La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

05/07/2023 | FRANCE | N°20/05185

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 2e chambre sociale, 05 juillet 2023, 20/05185


Grosse + copie

délivrées le

à

















COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



2e chambre sociale



ARRET DU 05 JUILLET 2023





Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 20/05185 - N° Portalis DBVK-V-B7E-OYJT



ARRÊT n°



Décision déférée à la Cour : Jugement du 16 OCTOBRE 2020

CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE MONTPELLIER - N° RG 19/00544







APPELANTE :



COMMU

NE DE [Localité 3] COMMUNE DE [Localité 3]

[Adresse 1]

[Localité 3]



Représentée par Me Véronique NOY de la SCP VPNG, avocat au barreau de MONTPELLIER, substituée par Me Césarina RODRIGUEZ, avocat au barreau de MONTPELLIER







INTIMEE :...

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

2e chambre sociale

ARRET DU 05 JUILLET 2023

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 20/05185 - N° Portalis DBVK-V-B7E-OYJT

ARRÊT n°

Décision déférée à la Cour : Jugement du 16 OCTOBRE 2020

CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE MONTPELLIER - N° RG 19/00544

APPELANTE :

COMMUNE DE [Localité 3] COMMUNE DE [Localité 3]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Véronique NOY de la SCP VPNG, avocat au barreau de MONTPELLIER, substituée par Me Césarina RODRIGUEZ, avocat au barreau de MONTPELLIER

INTIMEE :

Mademoiselle [M] [R]

née le 09 Août 1995 à [Localité 3] (34)

de nationalité Française

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 2]

Représentée par Me Stéphanie BACLE, avocat au barreau de MONTPELLIER, substituée par Me Philippe SENMARTIN, avocat au barreau de MONTPELLIER

(bénéficie d'une aide juridictionnelle totale numéro 2020/015084 du 06/01/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de MONTPELLIER)

Ordonnance de clôture du 20 Février 2023

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 05 JUIN 2023, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Isabelle MARTINEZ, Conseiller et Madame Caroline CHICLET, Conseiller, chargée du rapport.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Caroline CHICLET, Conseiller, faisant fonction de président

Madame Isabelle MARTINEZ, Conseiller

Madame Véronique DUCHARNE, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Marie-Lydia VIGINIER

ARRET :

- contradictoire ;

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par Madame Caroline CHICLET, Conseiller, en remplacement du président empêché et par Madame Marie-Lydia VIGINIER, Greffier.

*

* *

EXPOSE DU LITIGE :

[M] [R], atteinte d'une sclérose en plaques et ayant la qualité de travailleuse handicapée depuis le 1er août 2016, a été engagée le 25 octobre 2016 par la commune de [Localité 3], employant habituellement au moins onze salariés, en qualité d'agent d'entretien et de restauration scolaire, dans le cadre d'un contrat unique d'insertion emploi avenir à temps complet d'une durée de 36 mois pour lequel elle percevait en dernier lieu une rémunération mensuelle brute de 1.466,62€.

A compter du 11 juillet 2018, la salariée est déclarée par le médecin du travail apte avec les restrictions suivantes :

'- pas de permanence,

'- pas de port de charges lourdes,

'- pas de cantine,

'- pas d'effort pénible,

'- travail à son rythme,

'- indiquer des consignes simples listées quotidiennement sur support papier.'

Le 10 septembre 2018, la salariée a été hospitalisée et placée en arrêt maladie jusqu'au 17 septembre 2018.

Elle est de nouveau placée en arrêt maladie entre le 26 septembre 2018 et le 15 octobre 2018.

A son retour, elle est placée par son médecin traitant à temps partiel pour raisons médicales jusqu'au 16 janvier 2019.

Le 27 mai 2019, le médecin du travail renouvelle les restrictions de juillet 2018.

Reprochant à son employeur le non-respect des restrictions médicales de la médecine du travail, des agissements répétés de harcèlement moral, un défaut de règlement des salaires et l'exécution déloyale du contrat, la salariée a saisi le conseil des prud'hommes de Montpellier, statuant en référé, pour obtenir diverses provisions lequel, par ordonnance du 18 juillet 2019, s'est déclaré incompétent en raison d'une contestation sérieuse.

Le 10 mai 2019, [M] [R] a saisi le conseil des prud'hommes au fond.

Par jugement du 16 octobre 2020, ce conseil a :

- dit que la mairie de [Localité 3] n'a pas respecté les restrictions médicales du médecin du travail ;

- condamné la mairie de [Localité 3] à payer à [M] [R] les sommes suivantes :

$gt; 10.000 € à titre de dommages-intérêts pour non respect des prescriptions médicales du médecin du travail,

$gt; 1.290,30 € à titre de rappel de salaire,

$gt; 129,03 € au titre des congés payés y afférents,

$gt; 2.500 € à titre de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat,

- débouté la salariée du surplus de ses demandes ;

- rappelé l'exécution provisoire de droit ;

- débouté les parties de leurs demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné la mairie de [Localité 3] à payer à [M] [R] la somme de 960 € sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridictionnelle ;

- condamné la mairie de [Localité 3] aux dépens.

Le 19 novembre 2020, la commune de [Localité 3] a relevé appel de tous les chefs de ce jugement.

Vu les conclusions responsives de la commune de [Localité 3] remises au greffe le 16 août 2021;

Vu les conclusions de [M] [R], appelante à titre incident, remises au greffe le 17 mai 2021 ;

Vu l'ordonnance de clôture du 20 février 2023 ;

MOTIFS :

Sur les demandes indemnitaires pour non-respect des restrictions médicales et violation de l'obligation de sécurité :

La commune de [Localité 3] conclut à l'infirmation du jugement en ce qu'il l'a condamnée à payer à la salariée la somme de 10.000 € de dommages-intérêts pour non-respect des restrictions médicales et demande à la cour de débouter cette dernière de sa prétention.

[M] [R] conclut à la confirmation du jugement sur ce point mais, formant appel incident, demande à la cour de l'infirmer en ce qu'il a rejeté sa demande indemnitaire de 10.000 € pour violation de l'obligation de sécurité et de faire droit à sa prétention.

Les articles L. 4121-1 à L. 4121-5 du code du travail mettent à la charge de l'employeur une obligation générale de sécurité.

Par ailleurs, l'article L. 4624-6 du code du travail dans sa version issue de la loi du 8 août 2016, applicable au litige, dispose que 'L'employeur est tenu de prendre en considération l'avis et les indications ou les propositions émis par le médecin du travail en application des articles L. 4624-2 à L. 4624-4. En cas de refus, l'employeur fait connaître par écrit au travailleur et au médecin du travail les motifs qui s'opposent à ce qu'il y soit donné suite'.

S'il ne se rapproche pas du médecin du travail pour trouver une solution, ou s'il n'exerce pas de recours contre l'avis assorti de telles propositions conformément aux dispositions de l'article L.4624-7 du même code, l'employeur n'a pas d'autre choix que de les appliquer.

En l'espèce, le médecin du travail, lors de la visite de reprise du 11 juillet 2018, a conclu à l'absence de contre-indication médicale au poste de travail en précisant qu'une étude de poste était à prévoir compte tenu de la reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé (RQTH) et a émis les restrictions suivantes :

'- pas de permanence,

'- pas de port de charge lourde,

'- pas d'effort pénible,

'- travail à son rythme,

'- indiquer des consignes simples listées quotidiennement sur support papier.'

Le médecin a confirmé ces restrictions lors de la visite du 27 mai 2019.

[M] [R] soutenant avoir été affectée à la cantine malgré les restrictions du médecin du travail, il incombe à la commune de [Localité 3], qui n'a pas contesté ces avis du médecin du travail, de rapporter la preuve qu'elle s'y est conformée.

Or, aucun des témoignages produis par l'employeur ne fait ressortir que la salariée n'a pas été affectée à la cantine postérieurement à l'avis médical du 11 juillet 2018.

En effet, si la responsable technique du groupe scolaire, [S] [N], atteste avoir 'toujours respecté ses restrictions médicales', elle ne dément pas, cependant, les affirmations de la salariée selon lesquelles elle était affectée à la cantine scolaire et devait assumer le rangement des couverts, le dressage et le débarrassage des tables ainsi que le nettoyage des tables et du sol.

Et les témoignages des quatre agents d'entretien et de restauration scolaire, tous rédigés en des termes similaires ce qui fait douter de leur sincérité, ne contiennent aucune information concernant les tâches confiées à la salariée à partir d'août 2018.

Le tableau des horaires de travail des personnels des écoles de l'année 2018/2019, qui vise des catégories d'emploi et ne permet pas d'identifier les salariés, et dont [M] [R] soutient qu'il n'a jamais été appliqué, ne peut suffire, en l'absence d'autres éléments probants, pour démontrer qu'elle n'a pas été affectée à la cantine scolaire après juillet 2018 et ce, d'autant que la salariée a réclamé vainement à l'employeur, par deux sommations des 20 mai et 19 septembre 2019, de lui communiquer la copie de ses fiches journalières signées contenant la description des tâches accomplies.

Si le non-respect des prescriptions du médecin du travail par l'employeur a privé la salariée de la possibilité de trouver dans son emploi des conditions de sécurité et de stabilité susceptibles de l'aider à faire face à la sclérose en plaques, il n'est nullement démontré que ce manquement serait à l'origine du temps partiel pour raisons médicales prescrit par son médecin traitant entre le 16 octobre 2018 et le 25 janvier 2019 afin, selon elle, de lui éviter les horaires de cantine ou qu'il serait à l'origine de ses nombreux arrêts maladie puisque les relevés d'absence produits par l'employeur, dont le contenu n'est pas discuté, montrent que ceux-ci étaient déjà très nombreux entre mai 2017 et juin 2018.

Le préjudice souffert par la salariée du fait du manquement de l'employeur justifie l'allocation d'une indemnité de 10.000 €.

S'il résulte des motifs qui précèdent que l'employeur a failli dans la mise en place d'une organisation et de moyens adaptés et dans la prévention des risques, [M] [R] ne démontre pas que ce manquement de l'employeur à son obligation générale de sécurité lui a causé un préjudice distinct de celui déjà réparé par l'allocation de l'indemnité précitée et elle sera déboutée de sa demande de ce chef.

Le jugement sera par conséquent confirmé sur ces points.

Sur la demande au titre du harcèlement moral :

[M] [R] conclut à l'infirmation du jugement en ce qu'il a rejeté sa demande indemnitaire de 10.000 € pour harcèlement moral et demande à la cour de condamner l'employeur à lui payer ladite somme.

La commune de [Localité 3] conclut à la confirmation du jugement sur ce point.

L'article L. 1152-1 du code du travail énonce : 'Aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.'

Aux termes de l'article L.1154-1 du même code, dans sa rédaction issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, applicable au litige : « Lorsque survient un litige relatif à l'application des articles L.1152-1 à L.1152-3 et L.1153-1 à L.1153-4, le candidat à un emploi, à un stage ou à une période de formation en entreprise ou le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement. Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement. Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. »

Il résulte des dispositions des articles qui précèdent que, pour se prononcer sur l'existence d'un harcèlement moral, il appartient au juge d'examiner l'ensemble des éléments invoqués par le salarié, en prenant en compte les documents médicaux éventuellement produits, et d'apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral au sens de l'article L. 1152-1 du code du travail. Dans l'affirmative, il revient au juge d'apprécier si l'employeur prouve que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement. Sous réserve d'exercer son office dans les conditions qui précèdent, le juge apprécie souverainement si le salarié établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement et si l'employeur prouve que les agissements invoqués sont étrangers à tout harcèlement.

Au soutien de sa demande indemnitaire, la salariée invoque de la part de sa responsable hiérarchique, [S] [N] :

- son affectation à la cantine scolaire malgré les restrictions contraires du médecin du travail,

- des menaces et insultes,

- des rapports injustifiés,

- une discrimination à raison de son état de santé,

- l'absence d'enquête interne malgré ses alertes répétées,

- le défaut de renouvellement de son contrat après la saisine du conseil des prud'hommes.

Il ne résulte pas des pièces produites par la salariée l'existence de menaces ou insultes proférées à son encontre par sa responsable hiérarchique, de démarches de sa part alertant sur le traitement qui lui était infligé par cette responsable ou de mesures discriminatoires à raison de son état de santé.

En revanche, l'absence de prise en compte par l'employeur des restrictions du médecin du travail concernant l'affectation à la cantine scolaire (établie dans les motifs qui précèdent), la rédaction de multiples rapports d'incidents et le non renouvellement du contrat d'insertion sont des faits, matériellement établis, et qui, pris ensemble, font présumer l'existence d'un harcèlement moral.

Il incombe par conséquent à l'employeur de démontrer que ces agissements sont étrangers à tout harcèlement.

La lecture des 4 rapports d'incident concernant [M] [R] rédigés entre juin 2017 et janvier 2018, soit antérieurement aux restrictions médicales de juillet 2018 et à une date où il n'est pas établi que l'employeur connaissait la maladie de la salariée (celle-ci ne s'étant pas présentée au service de prévention pour faire évaluer la compatibilité de son état de santé avec le travail d'agent d'entretien et de restauration scolaire comme le regrettait sa responsable le 22 janvier 2018), ne concernent pas tant la qualité du travail fourni par la salariée que son attitude irrespectueuse envers ses collègues et sa responsable (insolence et agressivité, conflits avec différentes collègues) et ses refus répétés d'exécuter les consignes (préfère travailler en élémentaire qu'en maternelle car les méthodes lui conviennent mieux 'je préfère travailler avec des gens avec qui je me régale', veut changer de groupe scolaire, refus de vider les poubelles et de lever les chaises sur la table etc).

Ces rapports signalent des incidents sans lien manifeste avec les difficultés ressenties par la salariée en raison de sa maladie mais qui sont imputables au mode de relation entretenu par cette dernière avec ses collègues et la hiérarchie, ainsi que le soutient justement la commune, ce qui suffit à démontrer qu'ils sont étrangers à tout harcèlement.

Compte tenu des incidents répétés survenus pendant l'exécution du contrat et imputables à la personnalité de [M] [R], la commune, qui n'y était pas tenue, a préféré ne pas renouveler le contrat ce qui est étranger à tout harcèlement.

En revanche, la commune échoue à démontrer que ses agissements répétés, entre août 2018 et novembre 2019, visant à ne pas prendre en compte les restrictions, pourtant claires et explicites, du médecin du travail sont étrangers à tout harcèlement.

Le harcèlement moral est donc établi et, compte tenu de ses répercussions, justifie l'allocation d'une indemnité de 1.000 € en réparation de son préjudice.

Le jugement sera infirmé de ce chef.

Sur la demande de rappel de salaire :

La commune conclut à l'infirmation du jugement en ce qu'il l'a condamnée à payer un rappel de salaire à la salariée et demande à la cour de débouter cette dernière de toutes ses prétentions de chef.

[M] [R], formant appel incident, demande à la cour de condamner la commune à lui payer la somme de 4.414,32 € nets à titre de rappel de salaire outre 441,43 € nets au titre des congés payés y afférents.

Contrairement à ce que soutient à tort la salariée, elle n'aurait pas dû percevoir 100% de sa rémunération brute de base antérieurement à juillet 2018, date à partir de laquelle la prescription des arrêts maladie s'est faite dans le cadre d'une affection de longue durée, puisqu'il résulte des dispositions combinées des articles L.321-1 et R.323-4 du code de la sécurité sociale, L.1226-1, D.1226-1 et D.1226-3 du code du travail qu'elle ne pouvait percevoir au maximum que 90% de sa rémunération (déduction faite par l'employeur des 50% de 1/91,25ème des trois dernières paies perçus au titre des indemnités journalières) et qu'il y avait lieu de déduire de ces sommes :

- les 3 jours de carence pour le paiement des indemnités journalières (s'ils correspondent à des jours qui devaient être travaillés et pour les reprises excédant 48 h),

- les 7 jours de carence pour le paiement de l'indemnité complémentaire de l'employeur.

Ainsi, compte tenu des périodes d'arrêts maladie intervenues entre février et octobre 2018 et indemnisées à 90%, elle aurait dû percevoir 10.056,54 € nets au cours de cette période outre les salaires de novembre et décembre 2018 soit un total de 12.800,28 €.

Il convient de déduire de cette somme les 34 jours de carence de la période des arrêts maladie antérieure à la prescription des arrêts dans le cadre d'une affection de longue durée et correspondant à des journées travaillées (au titre de l'indemnité complémentaire due par l'employeur), soit la somme de 1.311,04 € nets (1.173 € nets mensuel x 12 mois /365 jours = 38,56 € nets par jour).

Il s'évince de ce qui précède que l'employeur aurait dû lui verser la somme de 11.489,24 € nets alors qu'elle n'a perçu que 10.567,80 € nets sur la période comprise entre février 2018 et décembre 2018.

La commune reste donc lui devoir la somme de 921,44 € nets à titre de rappel de salaire pour l'année 2018 outre 92,14 € nets au titre des congés payés y afférents.

S'agissant de l'année 2019, l'employeur, qui ne détaille pas dans ses écritures ni dans une pièce annexe les arrêts maladie prescrits chaque mois de janvier à octobre 2019 inclus, les indemnités journalières perçus pour le compte de la salariée dans le cadre de la subrogation au cours de chaque période de suspension du contrat de travail, le montant de l'indemnité complémentaire due ou le montant de la rémunération due, compte tenu du temps partiel médical, sur chaque période travaillée, ne rapporte pas la preuve, qui lui incombe, qu'il s'est acquitté de son obligation de paiement du salaire alors qu'il reconnaît, en page 22 de ses écritures, avoir omis de réduire la rémunération durant le temps partiel et de reverser les indemnités journalières perçues dans le cadre de la subrogation ce qui a donné lieu à des erreurs dans les bulletins de paie et à l'émission de titres de recette ensuite annulés.

La commune sera par conséquent condamnée, au titre de l'année 2019, à verser à la salariée la somme réclamée de 1.226,32 € nets outre celle de 122,63 € nets au titre des congés payés y afférents.

Le jugement sera infirmé sur le quantum.

Sur la demande au titre de l'exécution déloyale du contrat :

La commune conclut à l'infirmation du jugement en ce qu'il l'a condamnée à payer à la salariée la somme de 2.500 € à titre de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat et demande à la cour de la débouter de sa prétention de ce chef.

[M] [R] conclut à la confirmation du jugement sur le principe mas, formant appel incident, conclut à son infirmation sur le quantum et demande à la cour de condamner la commune à lui payer la somme de 4.855,75 € pour exécution déloyale du contrat.

Alors que l'employeur est tenu à l'obligation essentielle de verser le salaire et ses accessoires ou l'indemnité complémentaire pendant les périodes de suspension du contrat de travail, la commune a commis plusieurs erreurs et omissions dans le règlement des sommes dues (à l'exclusion de celle liée aux délais de carence imputés à tort dès lors que la salariée ne discute pas que son médecin traitant avait omis d'indiquer sur les arrêts de travail que ceux-ci étaient liés à une affection de longue durée) au détriment de la salariée ainsi que cela résulte des motifs qui précèdent.

Mieux, bien que connaissant le statut de travailleur handicapé de la salariée depuis l'avis du médecin du travail de juillet 2018 le signalant et les restrictions professionnelles importantes que son état de santé impliquait, l'employeur, au lieu de convoquer [M] [R] à un entretien en vue de régler les diverses difficultés administratives s'étant fait jour, a préféré lui notifier directement :

- un avis des sommes à payer en octobre 2018,

- une lettre de relance du 22 novembre 2018,

- un avis de poursuite par huissier de justice du 15 janvier 2019 pour un montant de 268,92 €,

- un dernier avis avant opposition sur les comptes bancaires du 14 février 2019,

- une notification de saisie administrative à tiers détenteur du 13 avril 2019,

- un avis de poursuite par huissier de justice du 7 août 2019 pour 116,08 €,

- un dernier avis avant opposition sur compte bancaire du 27 août 2019,

- un avis de saisie administrative à tiers détenteur du 12 novembre 2019 d'un montant de 100,89 €.

Ce faisant, il a manqué à son obligation d'exécution loyale du contrat.

Cette attitude a généré chez la salariée, déjà fragilisée, des inquiétudes et des manques à gagner qui l'ont contrainte à solliciter une aide financière auprès du centre communal d'action sociale de [Localité 5] afin de régler son loyer en avril 2019 ainsi qu'une aide alimentaire qui lui a été accordée.

La commune sera condamnée à lui payer la somme de 2.500 € en réparation de son préjudice et le jugement sera confirmé sur ce point.

Sur les autres demandes :

Les créances de nature salariale produisent des intérêts au taux légal à compter du jour où l'employeur a eu connaissance de la demande (soit à compter de la date de réception de sa convocation devant le bureau de conciliation), et les sommes à caractère indemnitaire à compter du jugement sauf celle due au titre du harcèlement moral qui produira intérêts au taux légal à compter du présent arrêt.

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant publiquement ;

Confirme le jugement entrepris sauf en ce qu'il a :

- condamné la mairie de [Localité 3] à payer à [M] [R] les sommes suivantes :

$gt; 1.290,30 € à titre de rappel de salaire,

$gt; 129,03 € au titre des congés payés y afférents,

- débouté la salariée de sa demande au titre du harcèlement moral ;

Statuant à nouveau sur les seuls chefs infirmés et y ajoutant ;

Condamne la commune de [Localité 3] à payer à [M] [R] les sommes suivantes :

$gt; 1.000 € à titre de dommages-intérêts pour harcèlement moral avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt,

$gt; 2.147,76 € nets à titre de rappel de salaire pour les années 2018 et 2019,

$gt; 214,77 € nets au titre des congés payés y afférents,

Dit que les sommes à caractère salarial porteront intérêts au taux légal à compter du jour où l'employeur a eu connaissance de leur demande ;

Condamne la commune aux dépens d'appel et à payer entre les mains de Maître Bacle, avocat au barreau de Montpellier, la somme de 1.500 € au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, l'avocat renonçant au bénéfice de l'aide juridictionnelle s'il parvient à recouvrer cette somme dans les douze mois de la délivrance de l'attestation de fin de mission ;

Déboute [M] [R] de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE CONSEILLER

Pour le président empêché

C. CHICLET


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 2e chambre sociale
Numéro d'arrêt : 20/05185
Date de la décision : 05/07/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-07-05;20.05185 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award