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27/06/2023 | FRANCE | N°22/06089

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 5e chambre civile, 27 juin 2023, 22/06089


Grosse + copie

délivrée le

à







COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



5e chambre civile



ARRET DU 27 JUIN 2023



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/06089 - N° Portalis DBVK-V-B7G-PUGP





Décisions déférées à la Cour : Jugement du 08 NOVEMBRE 2018

TRIBUNAL PARITAIRE DES BAUX RURAUX DE NIMES - Arrêt du 8 DECEMBRE 2020 COUR D'APPEL DE NIMES - Arrêt du 28 SEPTEMBRE 2022 COUR DE CASSATION







DEMANDERESSE A LA DECLARATION DE SAISINE :r>


SELARL ETUDE BALINCOURT prise en la personne de M. [B] [I] né le 11Juillet 1963 à [Localité 4],en qualité de liquidateur amiable du GROUPEMENTFONCIER AGRICOLE DE [Adresse 6], domici...

Grosse + copie

délivrée le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

5e chambre civile

ARRET DU 27 JUIN 2023

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/06089 - N° Portalis DBVK-V-B7G-PUGP

Décisions déférées à la Cour : Jugement du 08 NOVEMBRE 2018

TRIBUNAL PARITAIRE DES BAUX RURAUX DE NIMES - Arrêt du 8 DECEMBRE 2020 COUR D'APPEL DE NIMES - Arrêt du 28 SEPTEMBRE 2022 COUR DE CASSATION

DEMANDERESSE A LA DECLARATION DE SAISINE :

SELARL ETUDE BALINCOURT prise en la personne de M. [B] [I] né le 11Juillet 1963 à [Localité 4],en qualité de liquidateur amiable du GROUPEMENTFONCIER AGRICOLE DE [Adresse 6], domicilié

en cette qualité

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée par Me Philippe SENMARTIN de la SELARL CSA, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant

assistée de Me Philippe RECHE, avocat au barreau de NIMES, avocat plaidant

Autre(s) qualité(s) : Intimé(e) devant la 1ère cour d'appel

DEFENDERESSE SUR LA DECLARATION DE SAISINE :

SELARL BRMJ prise en la personne de M. [L] [O], né le 13/12/1963 à [Localité 2] ès qualités de liquidateur à la liquidation Judiciaire de l'EURL [V] [J] et de M. [V] [J]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représentantée par Me Jacques Henri AUCHE de la SCP AUCHE HEDOU, AUCHE - AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant

assististé de Me Julien VOLLE, avocat au barreau de NIMES, avocat plaidant

Autre(s) qualité(s) : Appelant devant la 1ère cour d'appel

En application de l'article 937 du code de procédure civile, les parties ont été convoquées à l'audience.

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 22 MAI 2023,en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Nathalie AZOUARD, Conseiller et M. Emmanuel GARCIA, Conseiller, chargé du rapport.

Ce(s) magistrat(s) a (ont) rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Nathalie AZOUARD, Conseiller Conseiller faisant fonction de Président, en remplacement du Président empêché

M. Emmanuel GARCIA, Conseiller

Madame Christel BORIES, Conseiller, désignée par le Premier Président par une ordonnance en date du 14 février 2023 en remplacement du magistrat empêché

Greffier, lors des débats : Madame Sylvie SABATON

ARRET :

- contradictoire.

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par Madame Nathalie AZOUARD, Conseiller faisant fonction de Président, en remplacement du Président empêché et par Madame Sylvie SABATON, greffier.

*

* *

EXPOSE DU LITIGE

Les 16 janvier 1980, 13 septembre et 3 octobre 2000, le groupement foncier agricole de [Adresse 6] (GFA de [Adresse 6]) a consenti à [V] [J] un bail rural à long terme de 18 ans, portant sur différentes parcelles de terres agricoles situées à [Localité 5] (30).

Le 26 mars 2000, une EURL [V] [J] a été constituée, dont le gérant et unique associé était [V] [J], avant d'être placée en liquidation judiciaire par jugement du tribunal de grande instance de Nîmes du 3 décembre 2009, désignant [L] [O] en qualité de liquidateur judiciaire.

Le 12 juillet 2010, [V] [J] a été placé en liquidation judiciaire par jugement du tribunal de grande instance de Nîmes et [L] [O] désigné comme liquidateur judiciaire.

Le GFA de [Adresse 6] a fait l'objet d'une liquidation amiable et [B] [I] a été désigné en qualité de liquidateur amiable.

Le 23 mai 2011, [L] [O], en qualité de liquidateur judiciaire de [V] [J], a procédé à la résiliation du bail rural.

Le 31 juillet 2013, [L] [O], en qualité de liquidateur de l'EURL [V] [J] et de [V] [J], a saisi le tribunal paritaire des baux ruraux de Nîmes d'une demande en paiement d'une somme de 521 321,53 euros, avec intérêts de droit à compter de la date de saisine du tribunal, au titre de l'indemnité due au preneur sortant.

Le 27 octobre 2016, le tribunal paritaire des baux ruraux de Nîmes a déclaré irrecevable l'intervention volontaire de [C] [J], constaté que [L] [O] ne justifiait pas de l'agrément donné par le GFA de [Adresse 6] à son preneur pour apporter les parcelles louées à l'EURL [V] [J], constaté que [V] [J] était demeuré titulaire des parcelles appartenant au GFA jusqu'à la fin du contrat de bail et a déclaré [L] [O], en qualité de liquidateur judiciaire de l'EURL [V] [J], irrecevable à agir et a ordonné une expertise avant dire droit.

Le jugement rendu le 8 novembre 2018 par le tribunal paritaire des baux ruraux de Nîmes énonce dans son dispositif :

Constate que [V] [J], preneur des parcelles louées au GFA de [Adresse 6], selon contrat de bail rural du 16 janvier 1980, ne justifie pas de l'accomplissement de travaux ou d'améliorations sur les parcelles par son travail ou ses investissements ;

Déboute maître [O], ès qualités de liquidateur judiciaire de [V] [J], de sa demande en paiement d'une indemnité au titre du preneur sortant à maître [I], en qualité de liquidateur amiable du GFA de [Adresse 6] ;

Dit que les dépens seront mis à la charge de maître [O], es qualité de liquidateur judiciaire de [V] [J] et passeront en frais de procédure collective ;

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile.

Pour l'essentiel, le tribunal paritaire des baux ruraux de Nîmes a constaté que [V] [J] ne justifiait pas de l'accomplissement de travaux ou d'améliorations sur les parcelles par son travail ou ses investissements et a débouté [L] [O], en sa qualité de liquidateur judiciaire de [V] [J], de sa demande en paiement d'une indemnité au titre du preneur sortant.

Le 15 novembre 2018, [L] [O] en sa qualité de liquidateur de l'EURL [V] [J] et de [V] [J] a interjeté appel.

L'appelant a fait valoir que la régularité de l'apport du bail rural par [V] [J] à l'EURL [V] [J] était sans incidence sur son droit à indemnisation. Il a soutenu que l'indemnisation n'était pas conditionnée à la réalisation personnelle des travaux par le preneur ou à leur financement par ses propres investissements, le droit à indemnisation était acquis au preneur sortant même lorsque les améliorations étaient le fait du sous-preneur. L'appelant a ajouté que les travaux d'améliorations effectués ne nécessitaient aucune autorisation du bailleur mais, qu'en tout état de cause, le GFA de [Adresse 6] avait toujours autorisé les travaux, bien qu'il n'ait pas de preuves écrites en raison des liens familiaux et capitalistiques entre les parties. En effet, [V] [J] était associé du GFA de [Adresse 6] et le fils du dirigeant de droit du GFA. Pour finir, l'appelant a précisé qu'en application de l'article L. 622-20 du code du commerce, il ne pouvait y avoir aucune compensation entre l'indemnité allouée et la créance de fermage du GFA.

[B] [I], pris en sa qualité de liquidateur amiable du GFA de [Adresse 6], a opposé l'absence des conditions requises pour bénéficier d'un droit à indemnisation, que le bailleur n'avait pas donné d'autorisation à la réalisation des travaux et que l'impossibilité morale invoquée comme dispense d'écrit était infondée au regard des notifications intervenues entre les parties. Reconventionnellement, [B] [I] a sollicité la compensation avec la créance qu'il détenait au titre des fermages impayés.

L'arrêt rendu le 8 décembre 2020 par la cour d'appel de Nîmes énonce dans son dispositif :

Infirme le jugement rendu par le tribunal paritaire des baux ruraux de Nîmes le 8 novembre 2018, en toutes ses dispositions ;

Fixe l'indemnité due au titre des améliorations apportées sur les fonds loués par [V] [J] au GFA de [Adresse 6] à la somme de 517 165,52 euros ;

Fixe au passif de la liquidation amiable du GFA de [Adresse 6] la somme de 517 165,52 euros au titre de l'indemnité due à [V] [J], preneur sortant avec intérêts au taux légal à compter de la requête soit du 31 juillet 2013 ;

Dit n'y avoir lieu à compensation entre les créances réciproques des parties ;

Fixe au passif de la liquidation amiable du GFA de [Adresse 6] la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Déboute [B][I] en sa qualité de liquidateur amiable du GFA de [Adresse 6] de sa demande formulée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Dit que les dépens, en ce compris l'expertise judiciaire, seront employés en frais privilégiés de la liquidation amiable du GFA de [Adresse 6].

La cour estime qu'en exigeant que [V] [J] ait réalisé lui-même ou financé les travaux sur la parcelle litigieuse, le premier juge a ajouté une condition au droit à indemnisation du preneur sortant, non exigée par les textes. [V] [J] est donc en droit de solliciter l'indemnisation due en fin de bail en cas de travaux ou d'améliorations apportées aux fonds, sous réserve du respect des autres conditions légales.

L'arrêt relève qu'il est nécessaire d'avoir un accord préalable du bailleur ou de l'informer préalablement des travaux qui vont être exécutés mais que [V] [J] ne produit aucune preuve écrite sur ce point. Il est établi que le gérant du GFA de [Adresse 6] est le père de [V] [J], qui est lui-même associé du GFA. Ce lien familial permet de justifier de la difficulté d'exiger un écrit. L'argument, de la mention dans les statuts de l'EURL [V] [J] selon laquelle « le bailleur a été préalablement avisé par LRAR de cette mise à dispositions du bail à l'EURL » démontre que l'existence du lien familial n'empêchait pas la mise en place d'un formalisme, est rejeté par le juge. Il n'est pas démontré que cette lettre a été adressée au GFA puisque, justement, le jugement a retenu que le bailleur n'avait pas été informé de l'apport de parcelles. L'arrêt estime que la preuve de l'information tacite du bailleur est apportée par la proximité géographique entre le gérant du GFA et des travaux, le GFA ne pouvant pas ne pas s'apercevoir des travaux.

La cour estime que le courrier rédigé par le gérant du GFA, qui fait part de son souhait d'être informé du montant et du mode de calcul de l'indemnité réclamée, doit être interprété comme un acquiescement au principe de celle-ci.

L'arrêt retient le montant de l'indemnisation de la conclusion du rapport d'expertise.

Il refuse la compensation sur le fondement des articles L. 622-20 et L. 641-4 du code de commerce qui, combinés, établissent que les sommes recouvrées à la suite des actions que le liquidateur engage ou poursuit dans l'intérêt collectif des créanciers entrent dans le patrimoine du débiteur pour être réparties en cas de liquidation entre tous les créanciers.

[B][I], en sa qualité de liquidateur du GFA de [Adresse 6], a formé un pourvoi en cassation, notamment sur le moyen qu'en déduisant que le bailleur avait donné son autorisation pour la réalisation des travaux, du fait qu'il avait acquiescé au principe de l'indemnité du preneur et du fait de sa proximité géographique, la cour d'appel aurait privé sa décision de base légale au regard des articles L. 411-69 et L. 411-73 du code rural et de la pêche maritime mais aussi sur le second moyen, qu'en disant n'y avoir lieu à compensation entre les créances, la cour d'appel aurait violé les articles L. 622-7 du code de commerce et l'article 1289 du code civil.

L'arrêt rendu le 28 septembre 2022 par la troisième chambre civile de la Cour de cassation énonce dans son dispositif :

Casse et annule mais seulement en ce qu'il dit n'y avoir lieu à compensation entre les créances réciproques des parties l'arrêt rendu le 8 décembre 2020, entre les parties par la cour d'appel de Nîmes ;

Remet sur ce point l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier ;

Condamne le liquidateur judiciaire de [V] [J] aux dépens et rejette la demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La Cour de cassation, sur le premier moyen, estime que la cour d'appel a pu déduire que le droit à indemnisation de [V] [J], né des améliorations apportées aux fonds loué, était démontré du courrier par lequel le gérant du GFA avait fait part de son souhait d'être informé du montant et du mode de calcul de l'indemnité.

Sur le second moyen, la Cour de cassation retient qu'en disant n'y avoir lieu à compensation, alors que la créance d'indemnité due pour l'amélioration des fonds loués et celle des fermages nées d'un même contrat sont connexes et que la première ne résulte pas d'une action engagée par le liquidateur dans l'intérêt collectif des créanciers, la cour d'appel a violé les articles L. 622-7, I du code de commerce et l'article 1291 du code civil.

[B][I], en sa qualité de liquidateur du GFA de [Adresse 6], a saisi la cour d'appel de Montpellier sur renvoi après cassation par déclaration au greffe du 5 décembre 2022.

La SELARL Etude Balincourt, prise en la personne de [B][I], en sa qualité de liquidateur du GFA de [Adresse 6], demande à la cour de :

Rappeler que l'arrêt de la cour d'appel de Nîmes a définitivement infirmé le jugement en toutes ses dispositions, fixé l'indemnité due à la somme de 517 165,52 euros et fixé au passif de la liquidation amiable du GFA de [Adresse 6] la somme de 517 165,52 euros, au titre de l'indemnité due à [V] [J], preneur sortant avec intérêts au taux légal ;

Réformer le jugement rendu par le tribunal paritaire des baux ruraux de Nîmes le 8 novembre 2018 pour le surplus, n'ayant pas acquis autorité de la chose jugée ;

Prononcer la compensation de la créance de [V] [J] d'un montant de 517 165,52 euros avec, d'une part, le montant de l'indemnité d'occupation due au GFA de [Adresse 6] pour la somme déclarée et admise de 125 026,03 euros correspondant aux années 2010 et 2011 et, d'autre part, avec la créance de la concluante admise au passif de l'EURL [V] [J] pour un montant de 341 563,15 euros, correspondant aux fermages antérieurs à 2010 ;

Juger que la créance de [V] [J] au passif de la GFA de [Adresse 6] en liquidation amiable sera donc ramenée à la somme de 50 000,55 euros, après compensation ;

Juger n'y avoir lieu à article 700 du code de procédure civile et juger que les dépens seront partagés.

[B][I] soutient qu'au vu de la cassation partielle du 28 septembre 2022, il n'est plus discutable que la créance dont dispose [V] [J] à l'encontre du GFA est définitive mais également que les fermages non acquittés doivent faire l'objet d'une compensation. Il fait valoir qu'il a déclaré à la procédure collective de [V] [J] sa créance née d'impayés de loyer pour 125 026,03 euros, au titre de fermages des années 2010 et 2011, et que l'expert a fixé à 125 601,81 euros le montant précis de la créance du GFA.

L'appelant souligne que la compensation n'est plus contestée mais que l'intimé estime que seul le montant de la créance déclarée doit être pris en compte, ce que l'appelant accepte au vu de la faible différence entre les deux.

L'appelant soutient qu'il faut ajouter à ce montant la créance antérieure et admise au passif de l'EURL [V] [J] pour un montant de 341 563,16 euros et donc également à l'égard au passif de la procédure collective de [V] [J] tenant l'extension de la procédure collective de sa société à son égard. Il affirme que les conditions cumulatives de réciprocité et de connexité sont remplies et permettent d'appliquer la compensation. En effet, la réciprocité de ces créances est la conséquence de l'extension de la procédure collective prononcée sur le fondement de la confusion du patrimoine, comme la chambre commerciale de la Cour de cassation a pu l'admettre. La connexité des créances se justifie par le fait que les deux créances résultent d'un même contrat, le bail rural, que les statuts constitutifs de l'EURL [V] [J] démontrent que des apports ont été réalisés par [V] [J] à sa société et que l'EURL a donc bénéficié d'une activité agricole en cours mais aussi du fait de la nature des créances, puisque si l'expert a fixé la valorisation des terres à la somme de 517 165,52 euros, c'est en raison du travail réalisé par l'EURL pendant dix ans sur les terres mais aussi car ce travail était la continuité de ceux réalisés par [V] [J] pendant les vingt années précédentes.

La SELARL BRMJ, prise en la personne de [L] [O], en qualité de liquidateur de l'EURL [V] [J] et de [V] [J], demande à la cour de :

Infirmer en toutes ses dispositions le jugement du tribunal paritaire des baux ruraux de Nîmes du 8 novembre 2018 ;

Juger qu'il ne peut y avoir compensation de créances entre l'indemnité due au preneur sortant fixée à 517 165,52 euros outre intérêts au taux légal avec la créance déclarée et admise au passif de l'EURL [V] [J], pour 341 563,16 euros ;

Débouter le liquidateur amiable du GFA de [Adresse 6] de toutes ses demandes, fins et conclusions ;

Prononcer la compensation de créances entre l'indemnité d'occupation due au GFA de [Adresse 6] par [V] [J] à concurrence de 125 026,03 euros et l'indemnité due au preneur sortant, [V] [J], fixée à 517 165,52 euros ;

Condamner après compensation de créances le liquidateur amiable du GFA de [Adresse 6] à porter et payer au liquidateur judiciaire de [V] [J] la somme de 392 139,49 euros avec intérêts au taux légal à compter du 31 juillet 2013 et la somme de 3 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens.

[L] [O] fait valoir que le renvoi après cassation porte uniquement sur la compensation de créances invoquées par le GFA. Il soutient que le GFA ne peut solliciter la compensation que dans la limite de la créance qu'il a déclarée au passif de [V] [J], soit la somme de 125 026,03 euros. Il est impossible, selon l'intimé, d'obtenir compensation de l'indemnité due par [V] [J] avec la créance déclarée au passif de l'EURL [V] [J] par le GFA. [L] [O] avance, sur le fondement de l'article L. 622-7 I du code de commerce, qu'il est possible, par exception au principe de l'interdiction du paiement des créances nées avant le jugement d'ouverture de la procédure collective, d'obtenir la compensation des créances réciproques lorsqu'elles présentent un caractère connexe. La jurisprudence précise qu'il n'y a pas connexité lorsque les deux créances résultent de contrats distincts et autonomes et qu'un courant d'affaires réciproque ne suffit pas à établir la connexité. L'intimé rappelle également que l'extension de la procédure collective sur le fondement de la confusion des patrimoines ne fait pas disparaître la personnalité juridique de l'entité cible de l'action en extension. Dès lors, [L] [O] conteste que l'extension de la procédure collective pour cause de confusion des patrimoines de l'EURL [V] [J] à [V] [J] a entraîné la fusion de leurs personnalités juridiques. Cette confusion des patrimoines ne dispense pas le GFA de rapporter la preuve de la connexité de la créance déclarée au passif de l'EURL [V] [J] avec l'indemnité qu'il doit à [V] [J]. Selon [L] [O], ces deux créances sont distinctes et nées d'obligations différentes entre des personnalités juridiques différentes.

[L] [O] soutient que les deux créances ne sont pas nées d'un même contrat, comme l'a définitivement tranché la cour d'appel de Nîmes le 8 décembre 2020, en retenant que seul [V] [J] est demeuré titulaire du bail sur les parcelles. En outre, dans ses conclusions de première instance, le GFA affirmait n'avoir eu aucune relation contractuelle avec l'EURL [V] [J]. Le fait que [V] [J] ait effectué un apport de matériels et de plantations au profit de l'EURL [V] [J] est étranger au GFA, ce dernier n'étant pas partie à cette convention. Il n'y a jamais eu de transfert de bail rural. [L] [O] ajoute que le fait que [V] [J] ait bénéficié des améliorations effectuées par l'EURL [V] [J] n'établit pas de connexité entre son indemnité et les fermages dues au GFA. Les créances invoquées ne résultent pas du même contrat, ni d'un même ensemble contractuel unique.

MOTIFS

1. Sur la compensation entre les créances de fermages et d'indemnité pour amélioration des fonds loués

Il est désormais constant, d'une part, que la créance dont dispose [V] [J] au titre des améliorations apportées sur les fonds loués au GFA de [Adresse 6] et inscrite au passif de la liquidation amiable s'élève à la somme de 517 165,52 euros, d'autre part, qu'il y a lieu d'opérer compensation entre cette créance et celle de fermages nés d'un même contrat, dès lors qu'elles sont connexes.

Pour l'essentiel, [L] [O], en qualité de liquidateur de l'EURL [V] [J] et de [V] [J], soutient que la créance déclarée par le GFA de [Adresse 6] au passif de l'EURL [V] [J] et celle déclarée au passif de [V] [J] consistent en deux créances distinctes, nées d'obligations différentes, entre des personnalités juridiques différentes, de sorte qu'il ne peut y avoir connexité pour obtenir compensation de créances.

Or, s'il est exact qu'en application de l'article L. 622-7 du code de commerce, la connexité doit être exclue lorsque deux créances résultent de contrats distincts et autonomes qui ne peuvent s'intégrer dans un même ensemble contractuel, et que l'extension de la procédure collective, sur le fondement de la confusion des patrimoines, ne fait pas disparaître la personnalité juridique de l'entité cible de l'action en extension, au cas d'espèce, il doit être retenu que la réciprocité des créances résulte de l'extension de la procédure collective prononcée sur le fondement de la confusion de patrimoine et que la connexité de ces mêmes créances ressort de ce que, de première part, il n'existe qu'un seul et même contrat, soit le bail rural conclu en la forme authentique le 16 janvier 1980, peu important que le tribunal paritaire des baux ruraux ait pu constater que [V] [J] était demeuré titulaire des parcelles appartenant au GFA de [Adresse 6] jusqu'à la fin du contrat de bail, de deuxième part, que l'article 6 des statuts de l'EURL [V] [J] faisait état d'apports par [V] [J] de matériels et de plantations, et donc d'une activité agricole en cours, peu important qu'il s'agisse de deux personnes distinctes, de troisième enfin, de la nature des créances réciproques.

A ce titre, il doit être relevé que si l'expert judiciaire a fixé la valorisation des terres à la somme de 517 165,52 euros, c'est certes en raison du travail réalisé par l'EURL [V] [J] sur les terres pendant dix ans mais également parce que ce travail était la continuité de celui réalisé par [V] [J] durant les vingt années qui ont précédé.

Ainsi les deux conditions prévues par l'article L. 622-7 du code de commerce sont réunies, de sorte que la créance de [V] [J], de 517 165,52 euros doit être compensée non seulement avec l'indemnité d'occupation due par lui au titre des années 2010 et 2011, pour la somme non contestée de 125 026,03 euros, mais aussi avec les fermages antérieurs dus par l'EURL [V] [J], pour la somme totale de 341 563,16 euros, de sorte que la créance de [V] [J], au passif du GFA de [Adresse 6], sera fixée, après compensation, à la somme de 50 576,33 euros.

2. Sur les dépens et les frais non remboursables

Le jugement sera confirmé en ce qui concerne les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile.

Chacune des parties conservera ses dépens de l'appel.

Il ne sera pas fait application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire et mis à disposition au greffe ;

RAPPELLE que par décision définitive, il a été fixé au passif de la liquidation amiable du GFA de [Adresse 6] la somme de 517 165,52 euros au titre de l'indemnité due à [V] [J], avec intérêts au taux légal à compter du 31 juillet 2013 ;

Y ajoutant,

FIXE la créance du GFA de [Adresse 6] au passif de la liquidation de [V] [J] à la somme totale de 466 589,19 euros, au titre des indemnités d'occupation et des fermages ;

ORDONNE la compensation entre les créances ;

En conséquence,

FIXE la créance de [V] [J] au passif du GFA de [Adresse 6], après compensation, à la somme de 50 576,33 euros ;

DIT n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais non remboursables exposés en appel ;

DIT que chacune des parties conservera ses dépens de l'appel.

Le Greffier Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 5e chambre civile
Numéro d'arrêt : 22/06089
Date de la décision : 27/06/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-06-27;22.06089 ?
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