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15/06/2023 | FRANCE | N°19/00284

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 3e chambre civile, 15 juin 2023, 19/00284


Grosse + copie

délivrées le

à















COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



3e chambre civile



ARRET DU 15 JUIN 2023



Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 19/00284 - N° Portalis DBVK-V-B7D-N7EM





Décision déférée à la Cour :

Jugement du 19 NOVEMBRE 2018

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PERPIGNAN

N° RG 16/595





APPELANT :



Monsieur [Y] [T]

né le 01 Septembre 1937 à [Local

ité 8] (Algérie)

de nationalité Française

[Adresse 5]

[Localité 6]

Représenté par Me Fernand MOLINA de la SCP DE TORRES - PY - MOLINA - BOSC BERTOU, avocat au barreau des PYRENEES-ORIENTALES





INTIME :



Monsieur [R] [I]

né le 06...

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

3e chambre civile

ARRET DU 15 JUIN 2023

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 19/00284 - N° Portalis DBVK-V-B7D-N7EM

Décision déférée à la Cour :

Jugement du 19 NOVEMBRE 2018

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PERPIGNAN

N° RG 16/595

APPELANT :

Monsieur [Y] [T]

né le 01 Septembre 1937 à [Localité 8] (Algérie)

de nationalité Française

[Adresse 5]

[Localité 6]

Représenté par Me Fernand MOLINA de la SCP DE TORRES - PY - MOLINA - BOSC BERTOU, avocat au barreau des PYRENEES-ORIENTALES

INTIME :

Monsieur [R] [I]

né le 06 Novembre 1932 à [Localité 7]

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Localité 6]

Représenté par Me François PARRAT de la SCP PARRAT-LLATI, avocat au barreau des PYRENEES-ORIENTALES substitué par Me Christine AUCHE HEDOU, avocat au barreau de MONTPELLIER

Ordonnance de clôture du 24 Mars 2023

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 14 avril 2023,en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Emmanuelle WATTRAINT, conseillère, chargée du rapport.

Ce(s) magistrat(s) a (ont) rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

M. Gilles SAINATI, président de chambre

M. Thierry CARLIER, conseiller

Mme Emmanuelle WATTRAINT, conseillère

Greffier lors des débats : Mme Sabine MICHEL

ARRET :

- contradictoire ;

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par M. Gilles SAINATI, président de chambre, et par Mme Sabine MICHEL, Greffière.

*

* *

EXPOSE DU LITIGE

Monsieur [Y] [T] est propriétaire depuis 1996 de deux parcelles, cadastrées AZ [Cadastre 4] et AZ [Cadastre 2] sur la commune de [Localité 6]. Ces terrains sont mitoyens au terrain appartenant à Monsieur [R] [I], cadastré AZ [Cadastre 3], se trouvant en partie basse de versant.

Monsieur [R] [I], se plaignant d'écoulement des eaux sur son terrain, a saisi le juge des référés du tribunal de grande instance de Perpignan aux fins de nomination d'un expert. Par ordonnance en date du 5 septembre 2012, monsieur [G] [W] a été désigné en qualité d'expert judiciaire. Il a déposé son rapport le 22 février 2013.

Monsieur [Y] [T] se plaignant de ce que monsieur [R] [I] aurait entreposé des objets dans le caniveau pour empêcher son écoulement normal, a également saisi le juge des référés par acte d'huissier en date du 4 novembre 2013. Par ordonnance en date du 29 janvier 2014, le juge des référés a constaté que la procédure était devenue sans objet, le caniveau ayant été nettoyé.

Monsieur [Y] [T], évoquant de nombreuses infiltrations et des remontées d'humidité dans son habitation, a de nouveau saisi le juge des référés par assignation en date du 18 septembre 2014. Par ordonnance du 15 octobre 2014, le juge des référés ordonné une nouvelle mesure d'expertise judiciaire confiée à nouveau à monsieur [G] [W].

Monsieur [G] [W] a déposé son rapport d'expertise le 2 février 2015.

Sur assignation de monsieur [Y] [T] délivrée le 4 décembre 2015, le tribunal de grande instance de Perpignan a, par jugement du 19 novembre 2018 :

- dit que monsieur [T] ne rapporte pas la preuve de ce que le raccordement du tuyau d'évacuation des eaux pluviales de monsieur [I] au caniveau constitue un obstacle à la servitude d'écoulement des eaux,

- dit que monsieur [T] ne rapporte pas davantage la preuve de l'existence de tout objet ou construction entreposé ou réalisés par monsieur [I], empêchant l'entretien dudit caniveau et constituant un empêchement à son écoulement,

- débouté monsieur [T] de l'ensemble de ses demandes, en ce compris la demande de dommages et intérêts,

- condamné monsieur [T] à verser à monsieur [I] la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens d'instance en ce compris le rapport d'expertise judiciaire,

- autorisé la distraction des dépens en conformité avec les dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Par acte du 15 janvier 2019, monsieur [Y] [T] a interjeté appel de ce jugement.

Par ses conclusions enregistrées au greffe le 27 décembre 2021, monsieur [Y] [T] sollicite l'infirmation du jugement entrepris et demande à la cour de :

- condamner monsieur [I], sous astreinte de 100 jours de retard à compter du 10ème jour après la signification du jugement à intervenir à :

' enlever son tuyau d'évacuation des eaux provenant de sa toiture afin qu'il ne soit plus raccordé au caniveau permettant d'évacuer les eaux pluviales provenant du fonds supérieur de monsieur [T],

' enlever tout objet ou construction qui empêchent l'entretien du caniveau et de voir s'il est obstrué par des objets ou autres,

- condamner monsieur [I], compte tenu de sa résistance abusive, au paiement de la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation d'un préjudice moral,

- condamner monsieur [I] au paiement de la somme de 3 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner monsieur [I] aux dépens comprenant les frais des deux rapports d'expertise et du constat d'huissier, avec application de l'article 699 du code de procédure civile.

Par ses conclusions enregistrées au greffe le 03 octobre 2022, monsieur [R] [I] sollicite de voir :

- constater l'absence de dommage et de faute,

- débouter l'appelant de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

- reconventionnellement, condamner l'appelant à lui verser la somme de 2 500 euros pour procédure abusive,

- condamner monsieur [T] au paiement de la somme de 3 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner monsieur [T] aux dépens avec application de l'article 699 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 24 mars 2023.

Pour un plus ample exposé des faits et des prétentions des parties, il est expressément renvoyé aux conclusions des parties et au jugement déféré.

MOTIFS

Sur la demande d'enlèvement du tuyau d'évacuation de la toiture de monsieur [I] raccordé au caniveau d'évacuation d'eaux pluviales

Le tribunal, au visa de l'article 640 du code civil, a débouté monsieur [Y] [T] de cette demande en relevant que si ledit tuyau rejoignait bien l'évacuation extérieure via le caniveau, pour autant monsieur [Y] [T] ne démontrait pas que cet ouvrage ait empêché l'écoulement des eaux du fonds supérieur ou aggravé la situation au détriment de son fonds.

Afin de ne pas empêcher l'écoulement des eaux pouvant provoquer l'inondation des parcelles de monsieur [Y] [T], l'expert judiciaire a préconisé la création d'un exutoire de 525 cm3 (lequel a été réalisé), précisant à plusieurs reprises (notamment p 13 du rapport d'expertise judiciaire pièce 9 de l'appelant) que l'installation ne devait subir aucun ouvrage rapporté.

Or, il résulte du procès-verbal de constat d'huissier dressé le 9 octobre 2015 par maître [C] (pièce 15 de l'appelant) que le tuyau de descente des eaux de la maison de monsieur [I] est désormais relié à un tuyau posé au sol et qui rejoint l'évacuation extérieure via le caniveau (contrairement à ce que prétend monsieur [I]), et qu'ainsi un ouvrage rapporté affecte l'exutoire réalisé.

Si en dépit des pluies de ces dernières années (pièces 1, 4 et 6 de l'intimé), le risque d'inondation ne s'est pas réalisé, pour autant ce tuyau d'évacuation, en ce qu'il est raccordé à l'exutoire, aggrave la situation au détriment du fonds de monsieur [Y] [T] en influant négativement sur l'écoulement des eaux, et ce aux termes des constatations et préconisations de l'expert judiciaire (effectuées en 2015 antérieurement à la réalisation du tuyau litigieux).

Dans ces conditions, le jugement sera infirmé et il sera fait droit à la demande de monsieur [Y] [T].

Sur la demande d'enlèvement de tout objet ou obstruction empêchant l'entretien du caniveau et une vue sur d'éventuelles obstructions

Le tribunal a rejeté cette demande de monsieur [T] en relevant qu'il n'était pas établi que le caniveau serait obstrué du fait de monsieur [I], ce qui aurait pour conséquence d'en empêcher l'entretien ou d'en obstruer la vue, la seule présence de plaques métalliques relevées dans le constat d'huissier n'étant pas de nature à constituer un empêchement à l'écoulement du caniveau.

L'expert judiciaire a précisé que, pour remplir son office, et donc assurer convenablement l'écoulement des eaux sans risque important d'inondation, l'exutoire ne devait souffrir d'aucun dispositif d'occultation (page 13 du rapport d'expertise pièce 9 de l'appelant).

Or, il apparaît que des plaques métalliques occultant le caniveau sont positionnées sur le terrain de monsieur [I] sur le caniveau tout le long de sa clôture (pièces 14 et 15 de l'appelant).

Si en dépit des pluies de ces dernières années (pièces 1, 4 et 6 de l'intimé), le risque d'inondation ne s'est pas réalisé, pour autant ces plaques, en ce qu'elles sont constituées d'une 'grille en fonte à ailettes horizontales facilement et rapidement colmatée par les débris végétaux transportés par les eaux de ruissellement' (page 12 du rapport d'expertise judiciaire s'agissant d'une autre grille, pièce 9 de l'appelant), aggravent la situation au détriment du fonds de monsieur [Y] [T] en influant négativement sur l'écoulement des eaux, et ce aux termes des constatations et préconisations de l'expert judiciaire (effectuées en 2015 antérieurement à la pose des plaques litigieuses).

En dehors de l'existence de ces plaques, monsieur [T] ne démontre par ailleurs aucune présence d'un objet susceptible d'obstruer le caniveau.

Dans ces conditions, le jugement sera infirmé et il sera fait droit à la demande de monsieur [T], mais uniquement en ce qu'elle porte sur l'enlèvement des plaques métalliques posées sur le caniveau tout le long de la clôture de monsieur [I] côté [Adresse 9] (pièces 14 et 15 de l'appelant).

Sur la demande d'astreinte

Eu égard à la nécessité d'assurer l'effectivité de la présente décision dans un contexte de rapports de voisinage conflictuels, il sera fait droit par principe à la demande.

Face néanmoins aux enjeux relatifs en cause, le risque d'inondation ne s'étant pas pour l'instant réalisé, le montant de l'astreinte sera fixé à la somme de 20 euros par jour de retard, à compter du 10éme jour suivant la signification de la présente décision.

Sur la demande de dommages et intérêts pour préjudice moral

Il est constant que les travaux préconisés par l'expert ont été réalisés.

Si monsieur [R] [I] a ensuite posé le tuyau d'évacuation de ses eaux pluviales litigieux et des plaques sur le caniveau, monsieur [Y] [T] ne démontre pas que cet état de fait lui ait causé un quelconque préjudice moral.

Dans ces conditions, il sera débouté de sa demande.

Sur la demande de dommages et intérêt pour procédure abusive

Les demandes de monsieur [Y] [T] étant accueillies, il ne peut être utilement soutenu que son action serait abusive.

Dans ces conditions, monsieur [R] [I] sera débouté de sa demande.

Sur la demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens

Compte tenu de l'issue du litige, le jugement sera infirmé.

Eu égard à la nature du litige, les parties seront déboutées de leurs demandes en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et il sera dit que les dépens de première instance et d'appel, en ce compris les frais des deux rapports d'expertise judiciaire et du procès-verbal de constat d'huissier du 9 octobre 2015, seront partagés par moitié entre les parties, avec application de l'article 699 du code de procédure civile au profit de maître Fernand Molina et de la SCP Parrat-Llati.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Infirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 19 novembre 2018 par le tribunal de grande instance de Perpignan ;

Statuant de nouveau,

Condamne monsieur [R] [I], sous astreinte de 20 euros par jour de retard à compter du 10ème jour de la signification du présent arrêt, à :

- enlever son tuyau d'évacuation des eaux pluviales provenant de sa toiture afin qu'il ne soit plus raccordé au caniveau permettant d'évacuer les eaux pluviales provenant du fonds de monsieur [Y] [T],

- enlever les plaques métalliques posées sur le caniveau tout le long de sa clôture côté [Adresse 9] ;

Déboute monsieur [Y] [T] du surplus de ses demandes et monsieur [R] [I] de sa demande de dommages et intérêts ;

Déboute les parties de leurs demandes en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Dit que les dépens de première instance et d'appel, en ce compris les frais des deux rapports d'expertise judiciaire et du procès-verbal de constat d'huissier du 9 octobre 2015, seront partagés par moitié entre les parties, avec application de l'article 699 du code de procédure civile au profit de maître Fernand Molina et de la SCP Parrat-Llati.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 3e chambre civile
Numéro d'arrêt : 19/00284
Date de la décision : 15/06/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-06-15;19.00284 ?
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