La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

15/06/2023 | FRANCE | N°18/06124

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 3e chambre civile, 15 juin 2023, 18/06124


Grosse + copie

délivrées le

à



























COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



3e chambre civile



ARRET DU 15 JUIN 2023



Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 18/06124 - N° Portalis DBVK-V-B7C-N5NW





Décision déférée à la Cour :

Jugement du 27 novembre 2018

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE MONTPELLIER

N° RG 16/06891





APPELANTE :



SARL F

IELDMAN AMENAGEMENT

représentée par ses co-gérants MM [Z] et [X], domiciliés en ces qualités au siège social

RCS de Montpellier n°448 835 744

[Adresse 9]»

[Adresse 9]

[Adresse 9]

[Localité 2]

Représentée par Me Cyrille AUCHE de la SCP VERBATEAM MONTPELLIER,...

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

3e chambre civile

ARRET DU 15 JUIN 2023

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 18/06124 - N° Portalis DBVK-V-B7C-N5NW

Décision déférée à la Cour :

Jugement du 27 novembre 2018

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE MONTPELLIER

N° RG 16/06891

APPELANTE :

SARL FIELDMAN AMENAGEMENT

représentée par ses co-gérants MM [Z] et [X], domiciliés en ces qualités au siège social

RCS de Montpellier n°448 835 744

[Adresse 9]»

[Adresse 9]

[Adresse 9]

[Localité 2]

Représentée par Me Cyrille AUCHE de la SCP VERBATEAM MONTPELLIER, avocat au barreau de MONTPELLIER, substitué à l'audience par Me Olivier GUERS de la SCP VERBATEAM MONTPELLIER, avocat au barreau de MONTPELLIER

INTIMES :

Monsieur [W] [E]

né le 15 Juin 1973 à [Localité 7] (34)

de nationalité Française

[Adresse 4]

[Localité 3]

et

Madame [R] [Y] épouse [E]

née le 10 Mars 1972 à [Localité 8] (34)

de nationalité Française

[Adresse 4]

[Localité 3]

Représentés par Me François LAFONT, avocat au barreau de MONTPELLIER

Ordonnance de clôture du 22 mars 2023

COMPOSITION DE LA COUR :

En application de l'article 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 12 avril 2023, en audience publique, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par l'article 804 du même code, devant la cour composée de :

M. Gilles SAINATI, président de chambre

M. Thierry CARLIER, conseiller

M. Fabrice DURAND, conseiller

qui en ont délibéré.

En présence de Mme [P] [O], juriste assistante

Greffier lors des débats : Mme Camille MOLINA

ARRET :

- contradictoire ;

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour fixée au 08 juin 2023 et prorogée au 15 juin 2023, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par M. Gilles SAINATI, président de chambre, et par Mme Camille MOLINA, Greffière.

*

* *

EXPOSE DU LITIGE

Par acte sous seing privé du 18 mars 2015 rédigé par Me [K] [G], notaire à [Localité 7], M. [W] [E] et Mme [R] [Y] épouse [E] se sont engagés à vendre à la SARL Fieldman Aménagement une maison édifiée sur une parcelle cadastrée section BK n°[Cadastre 1] sise [Adresse 5] sur la commune de [Localité 6] (34).

Cette promesse unilatérale de vente a été accordée au prix de 250 000 euros, (outre la commission d'entremise de 5 000 euros au bénéfice de l'agence FipImmo) et pour une durée expirant au plus tard le 30 octobre 2015.

La SARL Fieldman Aménagement n'a pas levé l'option d'achat dont le délai requis.

Aux termes d'une lettre recommandée adressée le 28 octobre 2015 par Me [G], M. et Mme [E] ont demandé à la SARL Fieldman Aménagement de leur payer l'indemnité d'immobilisation stipulée à la promesse de vente à hauteur de 25 000 euros.

La SARL Fieldman Aménagement n'a pas répondu à cette demande.

Par acte d'huissier signifié le 10 novembre 2016, M. et Mme [E] ont fait assigner la SARL Fieldman Aménagement devant le tribunal de grande instance de Montpellier en paiement de cette indemnité de 25 000 euros.

Par un jugement contradictoire du 27 novembre 2018, le tribunal de grande instance de Montpellier a :

- rejeté la demande de nullité de la promesse unilatérale de vente formée par la SARL Fieldman Aménagement ;

- condamné la SARL Fieldman Aménagement à payer à M. et Mme [E] la somme de 25 000 euros représentant l'indemnité d'immobilisation ;

- condamné la SARL Fieldman Aménagement à payer à M. et Mme [E] la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné la SARL Fieldman Aménagement aux entiers dépens de l'instance.

Par déclaration au greffe du 7 décembre 2018, la SARL Fieldman Aménagement a relevé appel de ce jugement à l'encontre de M. et Mme [E].

Vu les dernières conclusions de la SARL Fieldman Aménagement remises au greffe le 30 janvier 2019 ;

Vu les dernières conclusions de M. et Mme [E] remises au greffe le 9 avril 2019 ;

Pour plus ample exposé des éléments de la cause, moyens et prétentions des parties, il est fait renvoi aux écritures susvisées, conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

La clôture de la procédure a été prononcée le 22 mars 2023.

MOTIFS DE L'ARRET

En cause d'appel, la SARL Fieldman Aménagement a renoncé à demander l'annulation de la promesse de vente du 18 mars 2015.

Sur la demande de paiement de l'indemnité d'immobilisation,

L'article 1134 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016 dispose que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.

Il appartient au juge d'interpréter les conventions qui lui sont soumises et de déterminer quelle a été la commune intention des parties.

En l'espèce, la cour fait application de la clause suivante intitulée " Indemnité d'immobilisation à la charge du bénéficiaire - séquestre " figurant en page 7 de l'acte litigieux :

" En cas de non réalisation de la vente promise selon les modalités et délais prévus au présent acte, le bénéficiaire s'engage à verser au promettant à titre d'indemnité forfaitaire pour l'immobilisation entre ses mains de l'immeuble formant l'objet de la présente promesse de vente pendant la durée de celle-ci, la somme de 25 000 euros.

Observation étant ici faite que l'intégralité de cette somme sera due au promettant même si le bénéficiaire faisait connaître sa décision de ne pas acquérir avant la date d'expiration du délai d'option. En aucun cas cette somme ne fera l'objet d'une répartition prorata temporis dans la mesure où son montant n'a pas été fixé en considération de la durée de l'immobilisation.

Toutefois, dans cette même hypothèse de non-réalisation de la vente promise, la somme ci-dessus visée ne sera pas due par le bénéficiaire :

- si l'une au moins des conditions suspensives stipulées aux présentes venait à défaillir selon les modalités et délais prévu audit acte hors le fait ou la faute du bénéficiaire ;

- si la non-réalisation de la vente promise était imputable au seul promettant. "

Pour prétendre s'exonérer du paiement de cette indemnité d'immobilisation, la SARL Fieldman Aménagement se fonde sur le jeu des conditions suspensives stipulées à l'acte et soutient :

- d'une part que M. et Mme [E] n'ont pas purgé le droit de préemption,

- d'autre part qu'elle s'est heurtée à un refus de prêt.

Sur la condition suspensive de purge du droit de préemption par M. et Mme [E],

La promesse unilatérale de vente du 18 mars 2015 stipule en page 8 :

" La présente promesse est consentie sous la condition qu'aucun droit de préemption, quel qu'il soit, résultant de dispositions légales, ni aucun droit de préférence résultant de dispositions conventionnelles, ne soit exercé sur les biens concernés. Dans l'hypothèse où un tel droit existerait, celui-ci sera purgé à première demande du bénéficiaire et au plus tard dans les 8 jours suivant la délivrance du permis de construire ci-après visé. Le promettant s'engage alors à procéder sans délai aux formalités nécessaires à sa purge. "

Par des motifs pertinents que la cour adopte expressément, le jugement déféré a exactement retenu que faute pour le bénéficiaire de la promesse de vente d'avoir obtenu la délivrance d'un permis de construire et faute pour lui d'avoir demandé la purge du droit de préemption, la défaillance de la condition suspensive afférente n'est pas démontrée.

La SARL Fieldman Aménagement n'est pas fondée à soutenir que " la promesse comporte une ambiguïté dans la mesure où il est fait état comme indiqué ci-dessus d'un " permis de construire " alors que l'opération est articulée autour d'une possibilité de division du terrain ; l'obtention d'un certificat de non-opposition à déclaration de division étant érigée en condition suspensive.".

En effet, une telle interprétation, qui ne correspond pas à la volonté clairement exprimée par les parties, dénaturerait la clause contractuelle précitée.

La cour observe en outre que la SARL Fieldman Aménagement n'apporte pas la preuve de ce qu'un quelconque droit de préemption ou droit de préférence était applicable en l'espèce.

Sur la condition suspensive d'obtention de prêt par la SARL Fieldman Aménagement,

La promesse unilatérale de vente du 18 mars 2015 stipule en page 11 :

" Obtention d'une ou plusieurs offres définitives de prêt(s) :

Qu'il soit obtenu par le bénéficiaire une ou plusieurs offres définitives de prêts.

Pour l'application de cette condition suspensive, il est convenu au titre des caractéristiques financières des offres de prêts devant être obtenues :

- organisme prêteur : tout établissement bancaire ou financier ;

- montant maximal de la somme empruntée : 300 000 euros ;

- durée de remboursement : 24 mois ;

- taux nominal d'intérêt maximum : Euribor+3 mois+1,6 % ;

- garantie : (')

Le bénéficiaire s'oblige à déposer le ou les dossiers de demande de prêt dans le délai d'un mois à compter de la signature des présentes auprès d'au moins trois banques ou établissements financiers différents [mention figurant en caractères gras dans le texte de la promesse], et à en justifier à première demande du promettant par tout moyen de preuve écrite.

La condition suspensive sera réalisée en deux temps savoir :

- au plus tard le 30 avril 2015 pour l'obtention d'une lettre d'intention ;

- au plus tard le 11 septembre 2015 pour l'obtention d'une offre de prêt. Cette obtention devra être portée à la connaissance du promettant par le bénéficiaire. "

En cause d'appel, la SARL Fieldman Aménagement produit aux débats une lettre d'intention du Crédit Mutuel datée du 27 avril 2015 suivie d'un lettre de refus de prêt datée du 8 septembre 2015 ainsi qu'une lettre de refus de prêt établie le 1er octobre 2015 par la Banque Populaire du Sud. Ces courriers émanent seulement de deux banques et ne comportent aucune information sur les caractéristiques et sur la date de ces demandes de prêt.

C'est donc par des motifs pertinents que la cour adopte expressément, que le jugement déféré a exactement retenu que la SARL Fieldman Aménagement n'avait sollicité l'obtention d'un prêt qu'auprès de deux établissements bancaires, sans justifier de la date d'accomplissement de ces démarches, et que dans ces conditions la défaillance de la condition suspensive d'obtention de prêt ne s'est pas effectuée dans les conditions contractuelles prévues par les parties, c'est-à-dire dans au moins trois établissements bancaires différents et avant la date du 18 avril 2015.

Il résulte des précédents développements que la SARL Fieldman Aménagement échoue à démontrer la défaillance de l'une ou de l'autre des deux conditions suspensives précitées selon les délais et modalités précisément définies à la promesse de vente conclue le 18 mars 2015.

La SARL Fieldman Aménagement ne peut prétendre s'exonérer de cette obligation simplement en affirmant que : " Il est parfaitement illusoire de penser qu'une banque tierce aurait accepté son concours " et en soutenant n'avoir commis aucune faute.

M. et Mme [E] sont donc fondés à demander le paiement de l'indemnité d'immobilisation stipulée au contrat.

Cette indemnité d'immobilisation de 25 000 euros représente le prix de la promesse et la contrepartie de l'immobilisation du bien puisque l'acte précise qu'elle a le caractère d'une " indemnité forfaitaire pour l'immobilisation entre ses mains [du promettant]de l'immeuble formant l'objet de la présente promesse de vente pendant la durée de celle-ci ".

Dans la mesure où cette indemnité d'immobilisation constitue un prix et non une pénalité contractuelle sanctionnant l'inexécution d'une obligation, cette clause n'est pas une clause pénale susceptible d'être révisée par le juge sur le fondement de l'article 1152 ancien du code civil.

De même, cette indemnité d'immobilisation est un prix qui reste dû aux promettants sans égard au fait de savoir s'ils ont subi un préjudice particulier ou s'ils ont vendu le bien à des conditions plus ou moins avantageuses.

En conséquence, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a condamné la SARL Fieldman Aménagement à payer à M. et Mme [E] la somme de 25 000 euros représentant l'indemnité d'immobilisation de l'immeuble objet de la promesse de vente du 18 mars 2015.

Cette condamnation sera assortie des intérêts au taux légal à compter de la date du 28 octobre 2015 à laquelle le conseil des intimés a mis en demeure la SARL Fieldman Aménagement de leur payer cette somme.

Sur les demandes accessoires,

Le jugement déféré sera également confirmé en ses dispositions afférentes aux dépens et à l'article 700 du code de procédure civile.

La SARL Fieldman Aménagement succombe intégralement en appel et devra aussi supporter les entiers dépens d'appel.

L'équité commande en outre de condamner la SARL Fieldman Aménagement à payer à M. et Mme [E] l'indemnité qu'ils sollicitent à hauteur de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile représentant les frais non compris dans les dépens supportés en cause d'appel.

Enfin, il sera fait application de l'article R. 631-4 du code de la consommation qui dispose que lors du prononcé d'une condamnation, le juge peut, même d'office, pour des raisons tirées de l'équité ou de la situation économique du professionnel condamné, mettre à sa charge l'intégralité des droits proportionnels de recouvrement ou d'encaissement prévus à l'article L. 111-8 du code des procédures civiles d'exécution, et notamment les droits proportionnels de recouvrement et d'encaissement mis à la charge du créancier par l'article A. 444-32 du code de commerce et le tableau 3-1 annexé à l'article R. 444-3 auquel renvoie l'article A. 444-55 du même code.

PAR CES MOTIFS,

La cour,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions, sauf à préciser que la condamnation de la SARL Fieldman Aménagement à payer à M. et Mme [E] la somme de 25 000 euros sera assortie des intérêts au taux légal à compter du 28 octobre 2015 ;

Y ajoutant,

Condamne la SARL Fieldman Aménagement à supporter les entiers dépens d'appel dont distraction au profit de la SCP Lafont Carrillo Chaigneau par application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;

Condamne la SARL Fieldman Aménagement à payer à M. [W] [E] et à Mme [R] [Y] épouse [E] la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Dit qu'en cas de recouvrement forcé par M. [W] [E] et Mme [R] [Y] épouse [E] et conformément à l'article R. 631-4 du code de la consommation, l'intégralité des droits proportionnels de recouvrement ou d'encaissement mis à la charge du créancier par l'article L. 111-8 du code des procédures civiles d'exécution sera supportée par la SARL Fieldman Aménagement ;

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

La greffière, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 3e chambre civile
Numéro d'arrêt : 18/06124
Date de la décision : 15/06/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-06-15;18.06124 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award