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16/05/2023 | FRANCE | N°21/00126

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 5e chambre civile, 16 mai 2023, 21/00126


Grosse + copie

délivrées le

à































COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



5e chambre civile



ARRET DU 16 MAI 2023



Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 21/00126 - N° Portalis DBVK-V-B7F-O2JS





Décision déférée à la Cour : Jugement du 14 DECEMBRE 2020

Tribunal Judiciaire de BEZIERS

N° RG 19/01418





APPELANTE :



Société S

CCV LA DISTILLERIE prise en la personne de son représentant légal domicilié ès qualités audit siège social

[Adresse 12]

[Localité 11]

Représentée par Me Nicolas BEDEL DE BUZAREINGUES de la SCP BEDEL DE BUZAREINGUES, BOILLOT, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postu...

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

5e chambre civile

ARRET DU 16 MAI 2023

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 21/00126 - N° Portalis DBVK-V-B7F-O2JS

Décision déférée à la Cour : Jugement du 14 DECEMBRE 2020

Tribunal Judiciaire de BEZIERS

N° RG 19/01418

APPELANTE :

Société SCCV LA DISTILLERIE prise en la personne de son représentant légal domicilié ès qualités audit siège social

[Adresse 12]

[Localité 11]

Représentée par Me Nicolas BEDEL DE BUZAREINGUES de la SCP BEDEL DE BUZAREINGUES, BOILLOT, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant

assistée de Me Linda AOUADI, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat plaidant

INTIMES :

Madame [M] [J]

née le [Date naissance 9] 1946 à [Localité 15]

[Adresse 2]

[Localité 15]

Représentée par Me Grégory CRETIN de la SCP COULOMBIE - GRAS - CRETIN - BECQUEVORT - ROSIER, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant

assisée de Me Yannick CAMBON, avocat au barreau de BEZIERS, avocat plaidant

Madame [I] [X]

née le [Date naissance 10] 1941 à [Localité 16]

[Adresse 13]

[Localité 15]

Représentée par Me Grégory CRETIN de la SCP COULOMBIE - GRAS - CRETIN - BECQUEVORT - ROSIER, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant

assisée de Me Yannick CAMBON, avocat au barreau de BEZIERS, avocat plaidant

Monsieur [V] [N]

né le [Date naissance 4] 1947 à [Localité 18]

[Adresse 5]

[Localité 15]

Représenté par Me Grégory CRETIN de la SCP COULOMBIE - GRAS - CRETIN - BECQUEVORT - ROSIER, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant

assisé de Me Yannick CAMBON, avocat au barreau de BEZIERS, avocat plaidant

Madame [K] [N]

née le [Date naissance 7] 1947 à [Localité 17] (ALGÉRIE)

[Adresse 5]

[Localité 15]

Représentée par Me Grégory CRETIN de la SCP COULOMBIE - GRAS - CRETIN - BECQUEVORT - ROSIER, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant

assisée de Me Yannick CAMBON, avocat au barreau de BEZIERS, avocat plaidant

Madame [U] [W]

née le [Date naissance 1] 1970 à [Localité 19]

[Adresse 3]

[Localité 15]

Représentée par Me Grégory CRETIN de la SCP COULOMBIE - GRAS - CRETIN - BECQUEVORT - ROSIER, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant

assisée de Me Yannick CAMBON, avocat au barreau de BEZIERS, avocat plaidant

Monsieur [C] [W]

né le [Date naissance 8] 1970 à [Localité 14]

[Adresse 3]

[Localité 15]

Représenté par Me Grégory CRETIN de la SCP COULOMBIE - GRAS - CRETIN - BECQUEVORT - ROSIER, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant

assisé de Me Yannick CAMBON, avocat au barreau de BEZIERS, avocat plaidant

Ordonnance de clôture du 06 Mars 2023

COMPOSITION DE LA COUR :

En application de l'article 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 27 MARS 2023, en audience publique, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par l'article 804 du même code, devant la cour composée de :

Monsieur Philippe GAILLARD, Président de chambre

Madame Nathalie AZOUARD, Conseiller

M. Emmanuel GARCIA, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Sylvie SABATON

ARRET :

- contradictoire

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par Madame Nathalie AZOUARD, Conseiller, faisant fonction de Président de Chambre en remplacement du Président empêché, et par Madame Sylvie SABATON, greffier.

*

* *

EXPOSE DES FAITS, PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :

Par acte en date du 7 septembre 2015, un compromis de vente portant sur la parcelle cadastrée section AL n° [Cadastre 6] sur la commune de [Localité 15] sur laquelle est édifiée une distillerie à démolir a été signé entre la Société Coopérative Agricole de Distillation Les Vignerons de [Localité 15] et une société BPG Black Pearl Group représentée par Monsieur [A] son président.

Le 17 février 2016 Monsieur [A] représentant la SCCV La Distillerie a déposé une demande de permis de construire complétée le 29 février 2016 portant sur la construction d'un immeuble collectif de 24 logements dont 9 logements sociaux.

Par arrêté en date du 27 mai 2016 le permis de construire a été accordé par le maire de la commune.

[M] [J], [I] [X], [V] et [O] [N], [C] et [U] [W] ont saisi le tribunal administratif de Montpellier en annulation du permis de construire.

Par jugement en date du 24 janvier 2019 le tribunal administratif de Montpellier a rejeté la demande en annulation du permis de construire.

Au motif que le recours exercé par les consorts [J], [X], [N] et [W] a « bloqué » pendant 30 mois son projet de construction qui ne pourra plus se réaliser la SCCV La Distillerie a par acte d'huissier en date du 28 juin 2019, saisi le Tribunal de grande instance de Béziers, d'une action en responsabilité pour procédure abusive et en réparation de ses préjudices.

Le jugement en date du 14 décembre 2020 rendu par le Tribunal judiciaire de Béziers énonce dans son dispositif:

Déboute la SCCV La Distillerie de l'ensemble de ses demandes.

Déboute [M] [J], [I] [X], [V] et [O] [N], [C] et [U] [W] de leur demande reconventionnelle en indemnisation d'un préjudice moral.

Condamne la SCCV La Distillerie à payer à chacun des défendeurs [M] [J], [I] [X], [V] et [O] [N], [C] et [U] [W] la somme de 400 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile ainsi qu'aux dépens.

Dit n'y avoir lieu à exécution provisoire.

Sur le caractère abusif du recours devant le tribunal administratif présenté par [M] [J], [I] [X], [V] et [O] [N], [C] et [U] [W] les premiers juges rappellent les dispositions de l'article 1240 du code civil et qu'il appartient au demandeur de rapporter la preuve d'une intention manifeste de nuire, d'une légèreté blâmable, d'une mauvaise foi ou d'une erreur grossière équivalente au dol.

En l'espèce le tribunal considère que si l'ensemble des moyens soulevés devant le tribunal administratif a été rejeté cela ne saurait constituer un abus de droit et que la SCCV La Distillerie ne peut valablement soutenir que la durée de la procédure ou le changement de législation en ce que la parcelle sur laquelle devait être édifiée le projet n'est plus classée en zone éligible au dispositif PINEL incombent à [M] [J], [I] [X], [V] et [O] [N], [C] et [U] [W] et qu'elle ne peut plus poursuivre son opération de construction de leur fait.

Sur la demande reconventionnelle en réparation du préjudice moral formée par les demandeurs le tribunal retient qu'il n'est pas démontré en quoi le comportement de la SCCV La Distillerie libre d'agir en justice pour faire valoir ses droits a dégénéré en abus de droit.

Il ajoute que l'obligation de constituer avocat pour se défendre à une action en justice ne fait pas naître de préjudice moral indemnisable en l'absence de faute de la partie ayant introduit l'instance.

La SCCV La Distillerie a déposé au greffe une déclaration d'appel le 7 janvier 2021.

La clôture de l'instruction a été ordonnée par décision en date du 6 mars 2023 .

La SCCV La Distillerie a déposé ses dernières écritures le 4 mars 2021.

Les dernières écritures pour [M] [J], [I] [X], [V] et [O] [N], [C] et [U] [W] ont été déposées le 31 mai 2021.

Le dispositif des dernières écritures de la SCCV La Distillerie en ses seules prétentions énonce :

Infirmer le jugement dont appel,

Statuant à nouveau,

A titre principal,

Condamner in solidum [M] [J], [I] [X], [V] et [O] [N], [C] et [U] [W] à payer la somme de 308 638 € à la SCCV La Distillerie au titre du préjudice financier subi.

A titre subsidiaire,

Condamner in solidum [M] [J], [I] [X], [V] et [O] [N], [C] et [U] [W] à payer la somme de 15 587,81 € à la SCCV La Distillerie au titre du préjudice financier subi.

En tout état de cause,

Condamner in solidum [M] [J], [I] [X], [V] et [O] [N], [C] et [U] [W] à payer la somme de 10 000 € à la SCCV La Distillerie au titre du préjudice moral subi.

Condamner in solidum [M] [J], [I] [X], [V] et [O] [N], [C] et [U] [W] à payer la somme de 4 000 € à la SCCV La Distillerie au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.

La SCCV La Distillerie reproche au tribunal judiciaire de ne pas avoir porté sa propre appréciation sur le comportement fautif des requérants à l'annulation du permis de construire se contentant de relever que le tribunal administratif dans son jugement n'avait pas relevé d'intention de nuire, de légèreté blâmable ou de mauvaise foi des parties demanderesses au recours.

Elle ajoute qu'il ressort de la lecture du jugement du tribunal administratif que les moyens soulevés à l'appui du recours ont été rejetés en raison d'un réel manque de précision et de preuve et que d'ailleurs les intimés ont été condamnés par le tribunal administratif à régler une somme de 1 000 € à la commune et une somme de 1 000 € à la SCCV La Distillerie sur le fondement de l'article L 761-1 du code de justice administrative ce qui n'est pas l'usage habituel quand les requêtes sont fondées.

Elle fait également valoir que le recours exercé contre le permis de construire l'a été en extrême limite de délais et que les requérants ont mis plus d'un an à produire un mémoire en réponse si bien qu'ils sont en partie responsables de la longueur de la procédure.

Sur les préjudices la SCCV La Distillerie expose que le recours formé contre le permis de construire a bloqué totalement le projet porté par la société pendant plus de 30 mois.

La somme de 308 638 € correspond à la marge nette qui était attendue en 2016 lors de l'obtention du permis de construire de cette opération, opération qu'elle ne peut plus réaliser car le dispositif PINEL dont le projet devait bénéficier n'a plus été applicable à la zone concernée par ledit projet suite à la loi de finance de 2018.

A titre subsidiaire elle expose que la somme de 15 587,81 € vise à réparer les différents frais exposés pour cette opération avortée et dont elle donne le détail la cour renvoyant pour un plus ample exposé sur ce point aux écritures de l'appelante.

Le dispositif des dernières écritures de [M] [J], [I] [X], [V] et [O] [N], [C] et [U] [W] énonce :

A titre principal,

Confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a débouté la SCCV La Distillerie de ses demandes .

Recevoir l'appel incident,

Condamner la SCCV La Distillerie au paiement de la somme de 10 000 € à chacun des intimés à titre de dommages et intérêts pour le préjudice moral subi;

Condamner la SCCV La Distillerie au paiement de la somme de 10 000 € à chacun des intimés au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

Les intimés font d'abord valoir que la SCCV La Distillerie reprend les mêmes arguments qu'en première instance et qu'elle ne justifie pas plus d'une faute de la part des intimés qui aurait causé le préjudice qu'elle invoque et qui n'est toujours pas justifié.

Ils font en premier lieu valoir qu'ils ne sont que de simples voisins particuliers et les victimes directes d'un projet immobilier et que leur recours n'avait aucun objet commercial.

Ils exposent que même si leur recours a été rejeté le tribunal administratif n'a jamais fait état du caractère abusif de ce recours et par ailleurs ils soulignent qu'ils n'ont exercé qu'une seul recours et n'ont pas fait appel de la décision du tribunal administratif ce qui démontre l'absence d'acharnement et l'absence d'intention de nuire, le seul fait d'avoir succombé devant le tribunal ne pouvant caractériser un abus de droit.

Ils font également observer qu'en cours de procédure administrative la SCCV La Distillerie aurait pu entrer en contact ou modifier son projet pour qu'il aboutisse ce qu'elle n'a jamais fait.

Ils ajoutent que de plus la SCCV La Distillerie n'établit aucun lien entre le recours exercé par les voisins contre son projet et les préjudices qu'elle allègue observant en substance que:

-la SCCV La Distillerie pouvait poursuivre son projet malgré l'introduction d'un recours celui-ci n'étant pas suspensif,

-ils ne sont pas responsables des délais de traitement par le tribunal de leur recours et la SCCV La Distillerie n'a jamais demandé au tribunal que l'affaire soit jugée rapidement,

-rien ne démontre que sans le recours la SCCV La Distillerie aurait réalisé son projet dans les délais prévus au regard notamment de la loi PINEL,

-la SCCV La Distillerie peut très bien réaliser une nouvelle opération sur la parcelle concernée,

-la SCCV La Distillerie qui attaque aussi la commune de [Localité 15] en réparation de son préjudice financier au motif d'une faute dans le classement de la parcelle objet du programme ne peut réclamer dans son intégralité le même préjudice à plusieurs entités pour des fautes différentes,

-ce n'est pas le recours exercé par les intimés qui est l'origine de l'incapacité pour la SCCV La Distillerie de mener à terme son projet mais le classement en zone rouge de la parcelle.

Enfin les intimés font valoir que la SCCV La Distillerie ne démontre pas l'existence d'un préjudice la pièce qui attesterait de la marge attendue étant une preuve qu'elle s'est faite à elle-même et qui n'est validée par aucun tiers compétent et qu'elle ne produit pas plus de mandat de commercialisation ou de réservation de client.

Sur leur appel incident les intimés exposent que d'une part avant toute action judiciaire la SCCV La Distillerie n'a tenté aucune procédure amiable et qu'elle persiste, malgré la décision de première instance qui l'a déboutée, dans un appel sur le même fondement et avec les mêmes pièces.

Ils ajoutent que la SCCV La Distillerie est d'autant plus fautive dans son appel qu'elle a convaincu la vendeuse du terrain d'assigner les intimés pour effectuer exactement les mêmes demandes avec les mêmes arguments alors même qu'elle l'avait déjà convaincue de proroger son compromis de vente qui était devenu caduc par faute de la SCCV La Distillerie qui n'avait pas déposé son permis de construire à temps.

Les intimés se retrouvent donc à subir plusieurs procédures pour un simple recours légitime exercé devant la juridiction administrative.

MOTIFS :

La cour rappelle tout d'abord qu'en application de l'article 954 du code de procédure civile elle ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des dernières conclusions des parties, c'est à dire sur ce à quoi prétend une partie et que la formulation dans le dispositif des conclusions de voir «dire et juger» ou de « constater » ne constitue pas une prétention et que la cour n'est donc pas tenue d'y répondre.

Sur la demande de la SCCV La Distillerie :

Sur la faute de [M] [J], [I] [X], [V] et [O] [N], [C] et [U] [W] il sera rappelé que l'exercice d'une action en justice ou l'exercice d'une voie de recours constitue en principe un droit ne dégénérant en abus qu'en cas de malice, de mauvaise foi ou d'erreur grossière équipollente au dol et qu'en outre une procédure ne peut être abusive au seul motif qu'elle n'est pas bien fondée si l'intention de nuire n'est pas démontrée.

Comme en première instance par des moyens identiques et en versant les mêmes pièces, la SCCV La Distillerie à qui incombe la charge de la preuve d'une intention de nuire soutient qu'il ressort de la lecture du jugement du tribunal administratif de Montpellier en date du 24 janvier 2019 que les moyens des requérants à l'annulation du permis de construire qui lui avait été délivré par le maire la commune de Bassan étaient dénués de précisions et de fondement.

Elle reproche également aux intimés pour caractériser l'abus de droit d'avoir contesté le permis de construire en extrême limite de délai en l'occurrence 24 heures avant la fin du délai, et d'avoir transmis des écritures tardivement.

Sur les motifs du jugement du tribunal administratif, il ressort de la lecture de la décision que la juridiction a répondu de façon longue et développée aux 5 moyens qui été invoqués par les requérants pour solliciter l'annulation du permis de construire et que si le tribunal administratif a effectivement considéré que le recours n'était pas fondé pour autant ses réponses détallées à chaque point de droit et de fait soulevés démontre que le recours n'a pas été introduit de façon légère, sans moyens en droit et en fait même si ces derniers n'ont pas été considérés comme pertinents par le tribunal administratif.

Le tribunal administratif dans sa motivation ne vient pas dire que les moyens invoqués par les requérants sont légers ou abusifs.

Par ailleurs le fait que les consorts [J], [X], [N] et [W] aient été condamnés par le tribunal administratif à verser à la commune de [Localité 15] et à la SCCV La Distillerie une somme de 1 000 € en application de l'article

L 761-1 du code de justice administrative ne peut suffire à démontrer que leur recours aurait été abusif dans la mesure où le dit article dispose uniquement que :  « Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Les parties peuvent produire les justificatifs des sommes qu'elles demandent et le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation » si bien que la condamnation sur la base de cet article n'est pas la sanction d'une action abusive.

En ce qui concerne le fait que les consorts [J], [X], [N] et [W] auraient contesté le permis de construire en extrême limite de recours il sera rappelé que le principe même des délais pour exercer un recours fait que tant que les dits délais ne sont pas expirés le recours est recevable et que la SCCV La Distillerie ne démontre pas que les requérants auraient sciemment attendu les derniers jours pour introduire leur recours dans l'intention de nuire à la SCCV La Distillerie.

Enfin la SCCV La Distillerie reproche aux requérants d'être au moins pour partie responsable de la longueur de la procédure administrative sans en rapporter la preuve le seul fait que les consorts [J], [X], [N] et [W] aient adressé un mémoire le 7 août 2017 ne suffisant pas à considérer que cela est tardif alors même que le comportement dilatoire des consorts [J], [X], [N] et [W] n'a jamais été mis en cause devant le tribunal administratif et ne ressort d'aucune des considérations des juges administratifs.

Par conséquent c'est à juste titre que la décision entreprise a dit que la SCCV La Distillerie était défaillante à rapporter la preuve d'un abus par les riverains ayant attaqué le permis de construire du droit d'agir en justice et donc en ce qu'elle a débouté la SCCV La Distillerie de l'ensemble de ses demandes.

Sur la demande de [M] [J], [I] [X], [V] et [O] [N], [C] et [U] [W] en dommages et intérêts pour procédure abusive:

Comme exposé ci-dessus l'exercice d'une action en justice ou l'exercice d'une voie de recours constitue en principe un droit ne dégénérant en abus qu'en cas de malice, de mauvaise foi ou d'erreur grossière équipollente au dol.

En outre une procédure ne peut être abusive au seul motif qu'elle n'est pas bien fondée si l'intention de nuire n'est pas démontrée.

Or en l'espèce la preuve de la mauvaise foi ou de l'intention de nuire de la SCCV La Distillerie n'est pas suffisamment démontrée.

En effet le seul fait de se voir délivrer une assignation en justice sans tentative de conciliation préalable ne peut à lui seul caractériser la mauvaise foi ou l'intention de nuire ce d'autant qu'en l'espèce le présent litige en responsabilité pour abus du droit d'agir en justice apparaît peu susceptible de recevoir une solution amiable.

Les intimés ne peuvent pas plus pour démontrer la mauvaise foi ou l'intention de nuire tirer argument de ce qu'ils ont également été assignés devant le tribunal judiciaire de Béziers par la SCA De Distillation Les Vignerons de [Localité 15] en responsabilité pour faute et paiement de dommages et intérêts, la SCCV La Distillerie et la SCA De Distillation Les Vignerons de [Localité 15] étant deux personnes morales bien distinctes et rien si ce n'est des allégations ne démontrant que c'est la SCCV La Distillerie qui est à l'origine de l'assignation délivrée par la SCA neuf mois après qu'elle ait elle-même délivré assignation.

Enfin comme rappelé par le jugement déféré l'obligation de constituer avocat pour défendre à une action ne fait pas naître de préjudice moral indemnisable en l'absence de faute de la partie adverse dans l'introduction de l'instance ou dans l'exercice des recours qui lui sont ouverts.

Par conséquent la décision de première instance déboutant les consorts [J], [X], [N] et [W] de leur demande de dommages et intérêts ne pourra qu'être confirmée.

Sur les demandes accessoires :

La décision de première instance sera également confirmée en ses dispositions au titre de l'article 700 code de procédure civile et des dépens.

La SCCV La Distillerie succombant en son appel sera condamnée à payer à [M] [J], [I] [X], [V] et [O] [N], [C] et [U] [W] chacun la somme de 5 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens de la présente procédure.

PAR CES MOTIFS:

La cour, statuant par arrêt contradictoire rendu par mise à disposition au greffe.

Confirme le jugement rendu le 4 décembre 2020 rendu par le Tribunal judiciaire de Béziers en toutes ses dispositions.

Y ajoutant ,

Condamne la SCCV La Distillerie aux dépens de la procédure en appel.

Condamne la SCCV La Distillerie à payer à [M] [J], [I] [X], [V] et [O] [N], [C] et [U] [W] chacun la somme de 5 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Le Greffier Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 5e chambre civile
Numéro d'arrêt : 21/00126
Date de la décision : 16/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-16;21.00126 ?
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