La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

10/05/2023 | FRANCE | N°20/05966

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 2e chambre sociale, 10 mai 2023, 20/05966


Grosse + copie

délivrées le

à















COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

2e chambre sociale

ARRET DU 10 MAI 2023



Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 20/05966 - N° Portalis DBVK-V-B7E-OZY2

N°23/778

Décision déférée à la Cour :

Jugement du 26 NOVEMBRE 2020

CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION DE DEPARTAGE DE BEZIERS N° RG F20/00121



APPELANT :



Monsieur [N] [M]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représ

enté par Me PORTES avocat de la SCP LAFON PORTES, avocat au barreau de BEZIERS



INTIMEE :



S.A.S. BREGER SUD

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par Me Gilles ARGELLIES de la SCP GILLES ARGELLIES, EMILY APOLLIS - ...

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

2e chambre sociale

ARRET DU 10 MAI 2023

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 20/05966 - N° Portalis DBVK-V-B7E-OZY2

N°23/778

Décision déférée à la Cour :

Jugement du 26 NOVEMBRE 2020

CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION DE DEPARTAGE DE BEZIERS N° RG F20/00121

APPELANT :

Monsieur [N] [M]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représenté par Me PORTES avocat de la SCP LAFON PORTES, avocat au barreau de BEZIERS

INTIMEE :

S.A.S. BREGER SUD

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par Me Gilles ARGELLIES de la SCP GILLES ARGELLIES, EMILY APOLLIS - AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER

Représentée par Me William IVERNEL de la SELAS FIDAL, avocat au barreau de REIMS

Ordonnance de clôture du 20 Février 2023

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 13 MARS 2023,en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Florence FERRANET, Conseiller, chargé du rapport.

Ce(s) magistrat(s) a (ont) rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Florence FERRANET, Conseiller, faisant fonction de Président en l'absence du Président

Mme Véronique DUCHARNE, Conseillère

Madame Caroline CHICLET, Conseiller

Greffier lors des débats : M. Philippe CLUZEL

ARRET :

- contradictoire;

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par Madame Florence FERRANET, Conseiller, en l'absence du Président empêché, et par M. Philippe CLUZEL, Greffier.

*

* *

EXPOSE DU LITIGE :

M. [M] a été embauché par la société Breger Sud le 1er novembre 2008 en qualité d'agent de maintenance selon contrat de travail à durée indéterminée à temps complet.

Le 24 novembre 2014, la société Breger Sud informe M. [M] de l'évolution de sa classification au rang de technicien de maintenance catégorie employé/technicien niveau II échelon 3 coefficient 160.

Au dernier état des relations, M. [M] percevait une rémunération mensuelle brute de 2 379,98 €.

Le 7 juillet 2016, la société Breger Sud adresse à M. [M] un courrier de rappel à l'ordre relatif à des négligences commises dans le cadre de ses fonctions.

Le 20 juillet 2016, M. [M] conteste par courrier le rappel à l'ordre.

Le 15 février 2017, la société Breger Sud convoque M. [M] à un entretien préalable au licenciement le 28 février 2017.

Le 8 mars 2017, la société Breger Sud notifie à M. [M] son licenciement pour cause réelle et sérieuse.

M. [M] a saisi le conseil de prud'hommes de Béziers le 14 juin 2017, contestant son licenciement et sollicitant le versement de diverses sommes à titre de dommages-intérêts et indemnités.

Par jugement rendu le 26 novembre 2020, le conseil de prud'hommes de Béziers a :

Dit que le licenciement pour cause réelle et sérieuse de M. [M] est justifié ;

Débouté M. [M] de l'ensemble de ses demandes ;

Condamné M. [M] à payer à la société Breger Sud la somme de 300 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Dit n'y avoir pas lieu à ordonner l'exécution provisoire ;

Débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;

Condamné M. [M] aux dépens.

*******

M. [M] a interjeté appel de ce jugement le 22 décembre 2020.

Dans ses dernières conclusions déposées par RPVA le 17 février 2023, il demande à la cour de :

Dire et juger son licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

Condamner la société Breger Sud à lui payer la somme de 30 000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Condamner la société Breger Sud à lui verser la somme de 1 800 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Condamner la société Breger Sud aux entiers dépens de première instance et d'appel.

*******

Dans ses dernières conclusions déposées par RPVA le 14 juin 2021, la société Breger Sud demande à la cour de :

Débouter M. [M] de l'ensemble de ses demandes ;

Condamner M. [M] à lui payer la somme de 2 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

********

Pour l'exposé des moyens il est renvoyé aux conclusions précitées en application des dispositions de l'article 455 du Code de procédure civile.

L'instruction du dossier a été clôturée par ordonnance du 20 février 2023 fixant la date d'audience au 13 mars 2023.

*******

MOTIFS :

Sur le licenciement :

L'employeur qui prend l'initiative de rompre le contrat de travail doit énoncer son ou ses motifs dans la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige.

Les motifs avancés doivent être précis et matériellement vérifiables, des motifs imprécis équivalant à une absence de motifs.

En l'espèce, la lettre de licenciement adressée à M. [M] le 8 mars 2017 fait état des griefs suivants :

« Le jeudi 2 février 2017, vous êtes intervenu, à la demande d'un conducteur de machine, sur la machine à sacs N°7 qui posait un problème de réglage du pastilleur. Après 2 heures 30 d'intervention, vous indiquez, sur la fiche journalière, que vous avez procédé au démontage du pastilleur M7, au changement des couteaux et au réglage. Vous mentionnez que la machine est « OK après essais ''. Or, nous constatons que la fiche de production du vendredi 3 février 2017 fait apparaître de nombreux arrêts et réglages sur le pastilleur de la machine N°7 et que cette journée a été marquée par une production en marche dégradée.

Le lundi 6 février 2017, alors que vous étiez en congés pour la semaine, dès le début de la production, la machine a rencontré à nouveau un problème de pastilleur et nous avons constaté que vos réglages ne fonctionnaient pas malgré de nouveaux essais. Revenant d'un déplacement la semaine précédente, et compte tenu de délais de livraison impératifs, M. [U] a tenté en urgence de faire monter le pastilleur de la machine N°5 pour essai, mais cet essai s'est avéré non concluant, le pastilleur de cette machine étant également dégradé. Monsieur [U] a donc dû prendre, alors que cela relève de vos fonctions, la décision d'envoyer d'urgence en réparation les deux pastilleurs des machines à sacs N°5 et °7 aux Établissements SERRES situés à proximité avec priorité de remise en état de celui de la machine N°7. Le lendemain matin, à 8 heures, le pastilleur de la machine N°7 était livré et remis en fonction, ce qui a permis de reprendre normalement la production et depuis cette date aucun incident notable n'est intervenu.

Cette situation démontre que vous n'avez pas été en mesure de remettre en état cette machine car vous ne disposiez pas de pièces de rechange en état de fonctionnement, alors qu'il vous incombait de gérer les stocks de pièces, et que vous n'avez pris aucune initiative pour anticiper les difficultés que vous ne pouviez ignorer, alors qu'il était facile de prendre les dispositions qui s'imposaient.

D'autre part, vous n'ignoriez pas qu'à compter du lundi suivant vous étiez en congé, que vous êtes le seul technicien de maintenance de l'entreprise et pourtant vous n'avez pris aucune disposition pour alerter monsieur [U] à son retour, laisser des informations ni pris contact avec les Ets SERRES pour faire réparer la pièce défectueuse.

Il est apparu:

Que vous avez laissé en place une pièce dont il était évident qu'elle était défectueuse et qu'elle ne pourrait pas permettre de reprendre normalement la production.

Que vous n'avez pas pris la décision qui s'imposait des le premier jour, à savoir d'envoyer la pièce en réparation et il a fallu attendre le retour de Monsieur [U] pour que cette décision soit prise.

Que la conséquence a été que pendant les journées du 2 et 3 février 2017 la production n'a pas pu se dérouler normalement et que la machine N°7 a également été en arrêt total le 6 février 2017.

Vous ne pouviez ignorez vos responsabilités dans le maintien en état de cette machine puisque votre fiche de fonction confirme bien que vous devez, entres autres, veiller à détenir les pièces de rechange nécessaires et que votre responsabilité est d'exécuter ou de faire exécuter les travaux nécessaires au bon fonctionnement de l'unité de production. ».

En ce qui concerne la mauvaise intervention du jeudi 2 février 2017, il résulte de l'examen des fiches journalières que M. [M] est bien intervenu suite à une panne sur la machine à sacs N°7 le 2 février 2017. Il indique avoir fait les travaux suivants pendant une durée de 2h30 : « démontage pastilleur M7, Changement couteau + réglage etc... OK après essais », ce qui correspond à la fiche journalière du conducteur de la machine N°7 qui note un arrêt de 2h30 pour les mêmes travaux.

La fiche journalière du conducteur de la machine N°7 du 3 février 2017 indique que la machine a effectué en moyenne sur la journée 65 coups par minute, soit un total de 17 550 pièces pour un temps de roulage de 4h30. Le conducteur a indiqué sur cette fiche qu'il a fallu opérer un réglage du rabatteur et du pastilleur ainsi que de nombreux arrêts. Il n'est pas démontré que durant cette journée M. [M] a été alerté de dysfonctionnements sur cette machine.

Par ailleurs, le lundi 6 février 2017, la machine N°7 a été mise à l'arrêt et le pastilleur envoyé en réparation par M. [U]. Lorsqu'il a été remis en place le 7 février 2017 et que la société Breger Sud a constaté le fonctionnement normal de la machine, celle-ci a produit 16 000 pièces sur un temps de roulage de 5h, soit une moyenne de 53 coups par minute, ce qui est inférieure à la cadence de production de la machine le lendemain de l'intervention de M. [M], le 3 février 2017.

Dès lors, le fait que les 31 mai, 18 et 19 juin 2018, soit plus d'un an plus tard, cette même machine ait réalisé, en moyenne, 79, 75 et 72 coups par minute, ne démontre pas que la machine dysfonctionnait le vendredi 3 février 2017.

En ce qui concerne le fait de ne pas avoir envoyé en réparation le pastilleur de la machine N°5, il n'est pas justifié qu'il a été demandé à M. [M] d'intervenir sur la machine N°5 de sorte qu'il ne saurait lui être reproché de ne pas avoir envoyé le pastilleur de cette machine en réparation.

Il résulte de l'ensemble de ces constatations que les griefs évoqués à l'appui du licenciement de M. [M] sont infondés, de sorte que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse. Le jugement sera infirmé de ce chef.

Au jour du licenciement, M. [M] était âgé de 44 ans et avait une ancienneté de 8 ans, 4 mois et 7 jours dans une entreprise de plus de 11 salariés. Son salaire mensuel brut de référence s'élève à la somme de 2 379,98 €.

En application de l'article L.1235-3 du Code du travail, dans sa version en vigueur au jour du licenciement, M. [M] sollicite le versement de la somme de 30 000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. Le salarié justifie de ce qu'il a été inscrit sur la liste des demandeurs d'emploi du 1er décembre 2017 au 30 mai 2019 et de ce qu'il a été embauché en qualité de technicien dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée à compter du 27 mars 2019. Le préjudice de M. [M] est évalué à la somme de 20 000 €. La société Breger Sud sera condamnée à lui verser cette somme à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. Le jugement sera infirmé de ce chef.

En application de l'article L.1235-4 du Code du travail, la société Breger Sud sera condamnée à rembourser à Pôle Emploi les indemnités versées à M. [M] dans la limite de 6 mois d'indemnités.

Sur les autres demandes :

La société Breger Sud, qui succombe principalement, sera tenue aux dépens de première instance et d'appel et au paiement de la somme de 1 500 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La cour ;

Infirme le jugement rendu le 26 novembre 2020 par le conseil de prud'hommes de Béziers en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau ;

Requalifie le licenciement de M. [M] en licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Condamne la société Breger Sud à verser à M. [M] la somme de 20 000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Y ajoutant ;

Condamne la société Breger Sud à rembourser à Pôle Emploi les indemnités versées à M. [M] dans la limite de 6 mois d'indemnités ;

Condamne la société Breger Sud à verser à M. [M] la somme de 1 500 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Condamne la société Breger Sud aux dépens de première instance et d'appel.

LE GREFFIER P/LE PRESIDENT EMPECHE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 2e chambre sociale
Numéro d'arrêt : 20/05966
Date de la décision : 10/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-10;20.05966 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award