Grosse + copie
délivrées le
à
COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
2e chambre sociale
ARRET DU 03 MAI 2023
Numéro d'inscription au répertoire général :
N° RG 20/04493 - N° Portalis DBVK-V-B7E-OXBU
Décision déférée à la Cour :
Jugement du 23 SEPTEMBRE 2020
CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE MONTPELLIER N° RG F19/00875
APPELANTE :
Madame [B] [D] [R]
[Adresse 3]
[Localité 1]
Représentée par Me Aurélie CARLES, avocat au barreau de MONTPELLIER substitué par Me PIERCHON avocat
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2020/014846 du 23/12/2020 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de MONTPELLIER)
INTIMEE :
S.A.S. TOURNEZY HOTEL
[Adresse 4]
[Localité 2]
Représentée par Me Sarah DIAMANT BERGER, avocat au barreau de MONTPELLIER
Ordonnance de clôture du 13 Février 2023
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 06 MARS 2023,en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Isabelle MARTINEZ, Conseillère, chargé du rapport et par Mme Caroline CHICLET, Conseillère.
Ce(s) magistrat(s) a (ont) rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Mme Isabelle MARTINEZ, Conseillère, faisant fonction de Président en l'absence du Président empêché
Madame Caroline CHICLET, Conseillère
Mme Véronique DUCHARNE, Conseillère
Greffier lors des débats : M. Philippe CLUZEL
ARRET :
- contradictoire;
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;
- signé par Mme Isabelle MARINEZ, Conseillère, en l'absence du Président empêché et par M. Philippe CLUZEL, Greffier.
*
* *
EXPOSE DU LITIGE
Madame [B] [R] était recrutée selon contrat à durée déterminée par la sas Tournezy Hôtel ( la société) en qualité de femme de chambre moyennant un salaire s'élevant en dernier lieu à la somme de 1 481,82 €. Les parties ne s'accordaient pas sur la date d'embauche.
Affirmant notamment que son contrat de travail s'analysait en un contrat de travail à durée indéterminée, par requête du 23 juillet 2019, madame [R] saisissait le conseil de prud'hommes de Montpellier, lequel par jugement du 23 septembre 2020 la déboutait de toutes ses demandes.
Par déclaration reçue au greffe le 20 octobre 2020, la salariée relevait appel de cette décision.
MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES
Par conclusions régulièrement notifiées par voie électronique le 4 janvier 2023, madame [R] demande à la cour de dire que son contrat de travail a débuté le 24 juillet 2017 et de condamner la société à lui payer les sommes suivantes:
-979,71 € à titre de rappel de salaire outre 97,97 € pour les congés payés y afférents,
-8 890,90 € à titre d'indemnité pour travail dissimulé,
-1 481,82 € à titre d'indemnité de requalification,
-391,89 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis outre la somme de 39,19 € pour les congés payés y afférents,
-1 481,82 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
-1 500 € au titre de ses frais de procédure
et d'ordonner la remise sous astreinte de 150 € par jour de retard des documents de fin de contrat et des bulletins de paie.
Elle soutient, en substance, qu'elle a commencé à travailler le 24 juillet 2017 mais n'a été rémunérée qu'à compter du 13 août 2017 date à laquelle l'employeur a voulu lui faire signer un contrat à durée déterminée ce qu'elle a refusé.
Elle en déduit qu'il y a eu travail dissimulé et que l'absence d'écrit entraîne nécessairement la requalification du contrat de travail en un contrat à durée indéterminée.
Par conclusions régulièrement notifiées par voie électronique le 24 mars 2021, l'employeur demande la confirmation du jugement querellé, le rejet de toutes les demandes de la salariée et l'octroi d'une somme de 2 000 € au titre de ses frais de procédure.
Il fait valoir, essentiellement, que le 24 juillet 2017, la salariée a effectué un essai de deux heures, qu'elle a été embauchée par contrat à durée déterminée du 13 août au 31 août 2017 pour une vacation de 118 heures mais a refusé de signer le contrat prétextant qu'elle voulait un contrat à durée indéterminée avec plus d'heures pour pouvoir faire valoir ses droits au chômage. Il ajoute qu'il a effectué régulièrement la déclaration préalable à l'embauche.
Conformément à l'article 455 du code de procédure civile, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions respectives des parties, la cour se réfère aux conclusions régulièrement notifiées par les parties.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur le contrat de travail
sur la date d'embauche
La salariée revendique avoir commencé à travailler le 24 juillet 2017. Elle ne produit toutefois strictement aucune pièce à l'appui de ses allégations.
A l'inverse, l'employeur produit deux attestations de salariés (pièce n° 2 et 3) qui affirment que madame [R] n'est venue le 24 juillet 2017 que pour faire un essai de deux heures , essai qui a été concluant et a abouti à son embauche le 13 août 2017.
Il produit également le planning de travail des salariés sur cette période , planning sur lequel apparaît l'essai de deux heures de madame [R].
Or la période d'essai se distingue notamment dans sa finalité de l'essai professionnel ou épreuve technique qui permet de sélectionner un candidat à l'embauche. Nécessairement limité et d'une durée très brève, l'essai professionnel se situe dans une phase précontractuelle. Même rémunéré, le test professionnel ne constitue pas une période de travail, à moins que le candidat été placé dans des conditions normales d'emploi, ce qui n'est pas le cas en l'espèce comme cela ressort des attestations précitées et de la durée de l'essai qui doit nécessairement être assimilé à un test professionnel précontractuel
En conséquence, les demandes au titre du rappel de salaire et du travail dissimulé doivent être rejetées.
-sur la requalification du contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée
Il résulte des dispositions des articles, L. 1242-1, L. 1242-2, L. 1242-7, L. 1242-12, L. 1242-13, et L. 1245-1 que le contrat de travail à durée déterminée, quel que soit son motif, ne peut avoir ni pour objet, ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise, ne peut être conclu que pour l'exécution d'une tâche précise et temporaire, et seulement dans les cas énumérés par la loi.
Il doit être établi par écrit.
En l'espèce, il n'est pas contesté par les parties qu'un contrat de travail écrit a été établi par l'employeur le 13 août 2017 et que ce contrat n'a jamais été signé par la salariée.
Il était de la responsabilité de l'employeur de faire signer ce contrat de travail à la salariée ou de refuser de l'embaucher.
Or, il ne verse aucune pièce aux débats établissant qu'il a relancé madame [R] pour lui faire signer son contrat de travail et la mauvaise foi de cette dernière n'est établie par aucune pièce du dossier.
En conséquence, en l'absence de tout écrit, le contrat doit nécessairement être requalifié en un contrat de travail à durée indéterminée à compter du 13 août 2017.
Sur l'indemnité de requalification
En application de l'article L 1 245-2 du code du travail, la salariée a droit à une indemnité de requalification équivalente à un mois de salaire brut soit la somme de 1 481,82 €.
Sur la rupture du contrat de travail
Il n'est pas contesté par les parties que la relation salariale a cessé le 31 août 2017.
En l'absence de toute procédure de licenciement, la rupture des relations contractuelles s'analyse nécessairement en un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Sur l'indemnité compensatrice de préavis
Conformément à la convention collective applicable, eu égard à son ancienneté de moins de six mois la salariée a droit à une indemnité compensatrice de préavis d'un montant de 979,71 € outre 97,97 € pour les congés payés y afférents.
Sur les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
La cour est en mesure d'évaluer le préjudice subi par la salariée à la somme de 1 481,82 €.
Sur la remise des documents de fin de contrat
Suite à la rupture du contrat de travail, la salariée est en droit de solliciter un bulletin de paie, un certificat de travail et une attestation Pôle Emploi rectifiés conformément au présent arrêt sans qu'il y ait lieu de prononcer une astreinte.
Sur l'article 700 du code de procédure civile
L'équité commande d'allouer à madame [R] la somme de 1 500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile
PAR CES MOTIFS
Infirme le jugement rendu le 20 novembre 2020 par le conseil de prud'hommes de Montpellier sauf en ce qu'il a dit que la relation salariale avait débuté le 13 août 2017;
Statuant à nouveau des chefs infirmés,
Condamne la sas Tournezy Hôtel à payer à madame [B] [R] les sommes suivantes:
-1 481,82 € à titre d'indemnité de requalification,
-979,71 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis outre 97,97 € pour les congés payés y afférents,
-1 481,82 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
Ordonne à la sas Tournzy Hôtel de remettre à madame [B] [R] sa fiche de paie, son certificat de travail et l'attestation Pôle Emploi rectifiés conformément au présent arrêt;
Déboute madame [B] [R] de ses autres demandes;
Condamne la sas Tournzy Hôtel à payer à madame [B] [R] la somme de 1 500€ en application de l'article 700 du code de procédure civile;
Condamne la sas Tournezy Hôtel aux dépens de première instance et d'appel.
LE GREFFIER P/LE PRESIDENT EMPECHE