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19/04/2023 | FRANCE | N°21/00472

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 2e chambre sociale, 19 avril 2023, 21/00472


Grosse + copie

délivrées le

à















COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

2e chambre sociale

ARRET DU 19 AVRIL 2023



Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 21/00472 - N° Portalis DBVK-V-B7F-O263



Décision déférée à la Cour :

Jugement du 07 JANVIER 2021

CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE BEZIERS N° RG 19/00001





APPELANTE :



S.A.S.U. CHRISO

[Adresse 4]

[Localité 3]

Représen

tée par Me PICARD avocat pour Me Jérôme BRESO de la SELARL LEXIATEAM SOCIETE D'AVOCATS, avocat au barreau de MONTPELLIER



INTIMEE :



Madame [Y] [S]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée par Me BEYNET avocat pour Me Charl...

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

2e chambre sociale

ARRET DU 19 AVRIL 2023

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 21/00472 - N° Portalis DBVK-V-B7F-O263

Décision déférée à la Cour :

Jugement du 07 JANVIER 2021

CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE BEZIERS N° RG 19/00001

APPELANTE :

S.A.S.U. CHRISO

[Adresse 4]

[Localité 3]

Représentée par Me PICARD avocat pour Me Jérôme BRESO de la SELARL LEXIATEAM SOCIETE D'AVOCATS, avocat au barreau de MONTPELLIER

INTIMEE :

Madame [Y] [S]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée par Me BEYNET avocat pour Me Charles SALIES, avocat au barreau de MONTPELLIER

Ordonnance de clôture du 01 Février 2023

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 22 FEVRIER 2023,en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Jacques FOURNIE, Conseiller, chargé du rapport et devant Madame Magali VENET, Conseillère.

Ce(s) magistrat(s) a (ont) rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Jacques FOURNIE, Conseiller, faisant fonction de Président en l'absence du Président empêché

Mme Véronique DUCHARNE, Conseillère

Madame Magali VENET, Conseillère

Greffier lors des débats : M. Philippe CLUZEL

ARRET :

- contradictoire ;

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par Monsieur Jacques FOURNIE, Conseiller, faisant fonction de Président en l'absence du Président empêché, et par M. Philippe CLUZEL, Greffier.

*

* *

EXPOSE DU LITIGE

Mme [Y] [S] a été embauchée le 15 février 2017 par la Sasu Chriso selon contrat de travail à durée indéterminée en qualité de responsable administrative, catégorie agent de maîtrise.

Par avenant au contrat de travail en date du 1er décembre 2017, elle a été promue responsable de site.

Suite à un accident du travail elle a été placée en arrêt de travail du 11 septembre 2018 au 22 octobre 20218.

Après une période de congés du 23 octobre au 5 novembre 2018, suite à la visite de reprise, Mme [S] a repris le travail le 06 novembre 2018.

Le même jour, Mme [S] et la Sasu Chriso ont conclu une rupture conventionnelle du contrat de travail.

Par courrier du 8 novembre 2018, Mme [S] s'est rétractée de la rupture conventionnelle.

Par courrier du 13 novembre 2018, la Sasu Chriso a adressé à Mme [S] une convocation à un entretien préalable à un licenciement ainsi qu'une mise à pied conservatoire.

Par courrier du 26 novembre 2018, l'employeur a notifié à Mme [S] son licenciement pour faute grave.

Le 2 janvier 2019, Mme [S] a saisi le conseil de prud'hommes de Béziers afin de contester son licenciement.

Par jugement du 7 janvier 2021, le conseil de prud'hommes de Béziers a :

- dit que les faits reprochés à Mme [Y] [S] dans la lettre de licenciement sont prescrits

- dit le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse

- condamné la société Chriso à payer à Mme [S]:

- 11 000€ nets à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

- 3412,24€ à titre d'indemnité compensatrice de préavis

- 341,22€ au titre des congés payés y afférents

- 1599,48€ à titre d'indemnité de licenciement

-1049,75€ à titre de rappel de salaire pour la période de mise à pied

-104,97€ au titre des congés payés y afférents

-1000€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

Par déclaration en date du 22 janvier 2021, la Sasu Chriso a relevé appel de l'ensemble des dispositions de la décision.

Vu les dernières conclusions de la Sasu Chriso en date du 21 avril 2021 auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé de ses moyens et prétentions.

Vu les dernières conclusions de Mme [Y] [S] en date du 15 mars 2021 auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé de ses moyens et prétentions.

L'ordonnance de clôture est en date du 01 février 2023.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur le licenciement pour faute grave:

La faute grave est définie comme la faute qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise .

En l'espèce la lettre de licenciement adressée par la Sasu Christo à Mme [S] le 26 novembre 2018 est rédigée en ces termes:

« En effet, à compter du 30/10/2018, nous avons été alertés par les membres du personnel que vous vous êtes cru autorisée, à de nombreuses reprises, à critiquer violemment la politique de l'entreprise et de dénigrer ouvertement le dirigeant de l'entreprise et son responsable d'exploitation auprès des membres de l'équipe de travail dont vous avez la responsabilité, allant même jusqu'à ne pas respecter les ordres de travail donnés, faisant ainsi preuve d'un égo sans borne.

L'insubordination répétée dont vous avez fait preuve, le non-respect des instructions données, la violation de vos obligations contractuelles, notamment celle consistant à exécuter de bonne foi le contrat de travail, l'atteinte portée à notre image par le dénigrement systématique des ordres de travail données par la direction de l'entreprise auprès de l'équipe de travail constituent des manquements intolérables à vos obligations, spécialement en votre qualité de responsable de site.

Nous considérons que ces faits constituent une faute grave rendant impossible votre maintien même temporaire dans l'entreprise.

Votre licenciement est donc immédiat, sans préavis ni indemnité de rupture et nous tenons à votre disposition votre certificat de travail, l'attestation Pôle Emploi et votre solde de tout compte ainsi que les salaires et indemnités qui vous sont dus.

Nous vous signalons à cet égard qu'en raison de la gravité des faits qui vous sont reprochés, le salaire correspondant à la période pendant laquelle nous vous avons mis à pied à titre conservatoire ne vous sera pas versé.

Par ailleurs, vous pouvez bénéficier, après la rupture de votre contrat de travail, d'un maintien des garanties des couvertures santé et/ou prévoyance en vigueur au sein de notre entreprise, aux conditions détaillées dans la notice d'information des organismes assureurs ci-jointes. ».

Il est ainsi fait grief à Mme [S] d'avoir violemment critiqué la politique menée par les dirigeants de l'entreprise, d'avoir dénigré les ordres de travail ainsi que ses employeurs, et ce en présence des autres salariés, alors qu'elle était responsable de site.

Au soutien de ses allégations, l'employeur verse aux débats les attestations suivantes rédigées par les salariés de la Sasu Chriso:

Ainsi, Monsieur [R] [O] témoigne en ces termes:

« Lors de mes déplacements sur le mois d'août du 01/08/2018 au 10/08/2018 ainsi que du 24/08/2018 au 31/08/2018, Lors de plusieurs prises de poste j'ai assisté au dénigrement de Mme [S] à l'encontre de son responsable Monsieur [T] ainsi que diverses remarques tel que : « il me casse les couilles », « il me fait chier », « je fais ce que je décide c'est moi la chef ».

De plus au cours de la journée du 08/08/2018 Madame [S] a critiqué avec virulence un de ses collaborateurs devant l'ensemble de l'équipe de production avec des remarques comme « papy devait rester chez lui, il nous fait de la merde, le vieux il est inutile. ».

Il atteste en outre: « je précise avoir informé ma direction le 2 novembre 2018 de l'ensemble de ces événements ayant eu lieu lors de mes déplacements. ».

Monsieur [J] indique également que :

« En date du 03/07/2018 et du 08/08/2018, j'ai assisté à plusieurs coups de sang de Madame [S] à l'encontre de Monsieur [T] son responsable et Monsieur [D] notre patron. De plus, Madame [S] se permet en l'absence de ces derniers et devant l'ensemble de nos collègues qu'elle est la chef ici et qu'elle fait ce qu'elle décide et que la direction la fait chier. »

Il atteste également avoir informé sa direction des faits le 31 octobre 2018.

Monsieur [B] rapporte également que :

« J'ai entendu des propos de [Y] [S] notre responsable de site sur [Localité 3] à l'encontre de la direction. Comme par exemple « ils me font chier avec leurs bennes de merde » entendu le 12/07/2018 alors que la consigne provenait de la direction et cela devant l'ensemble du personnel. »

Il atteste également avoir informé sa direction des fait le 31 octobre 2018.

Monsieur [N] précise que :

« Je certifie avoir entendu des propos émanant de Mademoiselle [S] [Y] responsable de site de [Localité 3] à l'encontre de la direction. Ces propos ont eu lieu le 03/07/2018 et 08/08/2018. Dans ces propos Mademoiselle [S] critique avec virulence l'ensemble des consignes en provenance de la direction. En indiquant qu'elle est la chef et que je cite elle « fais ce qu'elle veut » et que « la famille [D] commence à la faire chier. »

Monsieur [I] indique que :

« Très régulièrement lors des prises de poste où j'ai assisté notamment les derniers de septembre Madame [S] critique la direction bien évidemment quand ces derniers ne sont pas présents. De plus le 06/09/2018 il était convenu avec la direction de m'allouer un membre de son équipe afin de procéder à l'installation du portail, cette dernière a refusé catégoriquement en prétextant qu'elle était la chef, qu'elle s'en fichait des consignes de Monsieur [T] ou Monsieur [D] et qu'ils commençaient à lui casser les ' »

Il précise que les faits sont connus de sa direction depuis le mercredi 31 octobre 2018.

Madame [V] [L] atteste que :

« Lors de différentes prises de poste le matin, j'ai assisté à plusieurs remarques acerbes de Madame [S] à l'encontre de ses responsables cela en présence de l'ensemble de l'équipe. De plus, à la fin de la plupart de ses entretiens téléphoniques Madame [S] s'est plaint avec virulence de la direction en utilisant des termes tel que « ils me font chier » « je suis la chef ici personne ne me dit ce que j'ai à faire ». Dernièrement j'ai eu l'occasion de l'entendre parler sur un ton très néfaste pour l'entreprise avec un intervenant extérieur lors de l'opération de remise en état d'une fuite d'eau. »

Elle précise aussi avoir informé sa direction de l'ensemble des événements concernant Mme [S] le 31 octobre 2018.

Alors que les faits litigieux se sont prolongés jusqu'au 6 septembre 2018, les éléments produits aux débats émanant des déclarations concordantes, précises et circonstanciées des salariés de l'entreprise suffisent à établir que l'employeur ne pouvait avoir connaissance des faits reprochés à la salariée qu'au plus tôt le 30 octobre 2018, si bien que Mme [S] ayant été convoquée à l'entretien préalable le 13 novembre 2018, la procédure a été engagée dans les délais prévus à l'article L1332-4 du code du travail.

Par ailleurs , les témoignages, recueillis auprès de nombreux salariés, rapportent des faits précis relatifs aux propos dénigrants et insultants régulièrement tenus par Mme [S] à l'égard des dirigeants de la sasu Chriso en présence d'autres salariés, et établissent ainsi l'existence de faits constitutifs d'une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien de la salariée dans l'entreprise.

Dès lors, c'est à juste titre que l'employeur a prononcé à son encontre un licenciement pour faute grave, sachant que les témoignages produits par la salariée, émanant de tiers à l'entreprise , énonçant qu'ils ne l'ont pas entendue critiquer son employeur , sont inopérants à rapporter la preuve contraire.

Il convient en conséquence d'infirmer le jugement , de dire que le licenciement pour faute grave est justifié et de rejeter l'ensemble des demandes indemnitaires formulées par Mme [S].

Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens:

Il convient de condamner Mme [Y] [S] à verser à la Sasu Chriso la somme de 1200€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

PAR CES MOTIFS

La cour, par décision contradictoire et en dernier ressort,

Infirme le jugement rendu le 7 janvier 2021 par le conseil de prud'hommes de Béziers en l'ensemble de ses dispositions.

Statuant à nouveau,

- Dit que le licenciement de Madame [S] repose sur une faute grave,

- Déboute Madame [Y] [S] de l'ensemble de ses demandes,

- Condamne Madame [Y] [S] à payer à la Société Chriso la somme de 1200 € au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.

- Condamne Madame [Y] [S] aux entiers dépens.

LE GREFFIER P/LE PRESIDENT EMPÊCHE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 2e chambre sociale
Numéro d'arrêt : 21/00472
Date de la décision : 19/04/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-04-19;21.00472 ?
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