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18/04/2023 | FRANCE | N°19/07508

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 1re chambre sociale, 18 avril 2023, 19/07508


Grosse + copie

délivrées le

à































COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



1ère chambre sociale



ARRET DU 18 AVRIL 2023



Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 19/07508 - N° Portalis DBVK-V-B7D-OM35





Décision déférée à la Cour :

Jugement du 30 OCTOBRE 2019

CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION DE DEPARTAGE DE PERPIGNAN - N° RG F17/00160





APPELANTE :



Association CGEA DE [Localité 11] UNEDIC

[Adresse 1]

[Localité 11]

Représentée par Maître CLAMENS-BIANCO de la SELARL CHATEL ET ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER

substituée par Maître Guilhem PANIS, avocat au barreau de MONTPELLIER ...

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

1ère chambre sociale

ARRET DU 18 AVRIL 2023

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 19/07508 - N° Portalis DBVK-V-B7D-OM35

Décision déférée à la Cour :

Jugement du 30 OCTOBRE 2019

CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION DE DEPARTAGE DE PERPIGNAN - N° RG F17/00160

APPELANTE :

Association CGEA DE [Localité 11] UNEDIC

[Adresse 1]

[Localité 11]

Représentée par Maître CLAMENS-BIANCO de la SELARL CHATEL ET ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER

substituée par Maître Guilhem PANIS, avocat au barreau de MONTPELLIER

INTIMES :

Me [S] [X] - Mandataire ad'hoc de SARL MAISON DE TOSCANE

[Adresse 5]

[Adresse 5]

[Localité 3]

Représenté par Maître Sophie BOUCLIER, avocat au barreau de PYRENEES-ORIENTALES, substituée par Maître Yann GARRIGUE, avocat au barreau de MONTPELLIER

Monsieur [Z] [J]

né le 23 Janvier 1971 à [Localité 10]

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représenté par Maître François CAULET, avocat au barreau de PYRENEES-ORIENTALES, substitué par Maître Naima MOHAMED SBAA Naïma, avocat au barreau de MONTPELLIER

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Partielle numéro 2020/010122 du 16/09/2020 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de MONTPELLIER)

Ordonnance de clôture du 07 Février 2023

COMPOSITION DE LA COUR :

En application de l'article 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 28 FEVRIER 2023, en audience publique, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par l'article 804 du même code, devant la cour composée de :

Monsieur Philippe DE GUARDIA, Président de chambre

Madame Véronique DUCHARNE, Conseillère

Monsieur Jacques FOURNIE, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffière lors des débats : Madame Isabelle CONSTANT

ARRET :

- Contradictoire

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par Monsieur Philippe DE GUARDIA, Président de chambre, et par Monsieur Philippe CLUZEL, Greffier.

*

* *

FAITS ET PROCÉDURE

Par contrat de travail à durée indéterminée du 1er avril 2013, M. [Z] [J] a été engagé à temps complet (35 heures hebdomadaires) par la SARL Kiwi, aux droits de laquelle vient la SAS Maisons de Toscane (SAS MDT) exerçant une activité de vente et de livraison de matelas, en qualité de livreur-monteur, moyennant une rémunération mensuelle brut de 1 430,25 €.

La convention collective nationale du négoce de l'ameublement est applicable.

Le salarié a subi plusieurs arrêts de travail, les derniers ayant respectivement débuté le 30 mai 2016 jusqu'au 4 juin 2016 et le 6 juin 2016 jusqu'au 30 juin 2016, prolongé régulièrement jusqu'au 5 janvier 2017.

Par requête du 4 avril 2017, faisant valoir que des rappels de salaire lui étaient dus au titre de la classification, des heures supplémentaires, des majorations pour travail des jours fériés et du maintien de salaire ainsi que des dommages et intérêts au titre des repos compensateurs, le salarié a saisi le conseil de prud'hommes de Perpignan en résiliation de son contrat de travail.

Par décisions des 5 avril et 17 mai 2017, la SAS MDT a été placée en redressement judiciaire puis en liquidation judiciaire.

Par décision du 30 mai 2018, la clôture pour insuffisance d'actif a été prononcée.

La SELARL MJSA en la personne de Maître [X] a été désignée en qualité de mandataire ad hoc en remplacement de Maître [R] initialement désigné.

Par jugement de départage du 30 octobre 2019, le conseil de prud'hommes a

- débouté M. [Z] [J] de sa demande de résiliation judiciaire à la date de la saisine du conseil de prud'hommes,

- dit que M. [Z] [J] avait fait l'objet d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse de la part de la SASU MDT en date du 20 septembre 2016,

- fixé la créance du salarié à la liquidation judiciaire de la SASU MDT aux sommes suivantes :

* 533,99 € brut au titre du rappel de salaire en application de la convention collective applicable,

* 175,50 € brut au titre de la majoration pour le travail effectué durant des jours fériés,

* 1 663,22 € brut au titre du maintien du salaire pour les mois de juin et juillet 2016,

* 1 179 € au titre de l'indemnité de licenciement,

* 3 369,58 € brut à titre d'indemnité compensatrice de congés payés afférents (préavis et rappels de salaire),

* 16 847,91 € à titre d'indemnité pour licenciement pour cause réelle et sérieuse,

- débouté M. [Z] [J] de l'ensemble de ses autres demandes indemnitaires,

- déclaré le jugement opposable à l'AGS-CGEA de [Localité 11], à défaut de fonds disponibles dans la société, dans les conditions prévues par la loi et les réglements et les plafonds de garantie applicables,

- dit que l'AGS-CGEA de [Localité 11] procèdera à l'avance des créances conformément aux dispositions de l'articleL 3253-6 du Code du travial et dans les conditions et limites fixées par les articles L 3253-17 et L 3253-18 et suivants du même Code,

- dit que la garantie de l'AGS-CGEA de [Localité 11] doit être fixée à six fois le plafond mensuel retenu pur le calcul des contributions au régime d'assurance chômage,

- condamné la SELARL MJSA, en sa qualité de mandataire ad hoc de la SASU MDT, à remettre à M. [Z] [J] les documents sociaux conformes,

- ordonné l'exécution provisoire,

- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires au dispositif.

Par déclaration enregistrée au RPVA le 18 novembre 2019, l'association Unedic Délégation AGS CGEA de [Localité 11] a régulièrement interjeté appel de ce jugement.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Aux termes de ses dernières conclusions enregistrées au RPVA le 15 janvier 2020, l'association Unedic Délégation AGS CGEA de [Localité 11] demande à la Cour

- d'infirmer le jugement attaqué en ce qui concerne les demandes relatives à la rupture du contrat de travail de M. [Z] [J] ;

- de constater que la rupture du contrat de travail doit être fixée au 30 octobre 2019, soit postérieurement au 16 ème jour suivant la liquidation judiciaire et d'exclure la garantie AGS l'ensemble des indemnités de rupture ;

- de prononcer sa mise hors de cause ;

- de dire et juger que ne seront éventuellement garantis que les salaires dus à M. [J] dans les limites suivantes :

* l'intégralité des salaires dus avant le redressement judiciaire du 5 avril 2017,

* les salaires dus après le redressement judiciaire dans la limite de 45 jours ;

- de constater qu'en tout état de cause, la garantie de l'AGS est plafonnée toutes créances avancées pour le compte du salarié à l'un des trois plafonds définis par l'article D. 3253-5 du Code du travail et qu'en l'espèce, c'est le plafond 6 qui s'applique ;

- d'exclure de la garantie AGS les sommes éventuellement fixées au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, dépens et astreinte ;

- de dire que toute créance sera fixée en brut et sous réserve de cotisations sociales et contributions éventuellement applicables, conformément aux dispositions de l'article L. 3253-8 in fine du Code du travail ;

- de donner acte au CGEA de ce qu'il revendique le bénéfice exprès et d'ordre public des textes légaux et réglementaires applicables tant au plan des conditions de la mise en 'uvre du régime d'assurance de créances des salariés que de l'étendue de ladite garantie.

Aux termes de ses dernières conclusions enregistrées au RPVA le 17 mars 2020, M. [Z] [J] demande à la Cour

A titre principal, de confirmer le jugement en ce qu'il a dit et jugé qu'il avait fait l'objet d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse le 20 septembre 2016 ;

A titre subsidiaire, de

- prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail ;

- fixer la date de rupture au 4 avril 2017 ;

- dire que la garantie de l'AGS doit intervenir pour l'intégralité des créances salariales découlant du « jugement à intervenir » ;

En tout état de cause, de

- fixer sa créance à hauteur des sommes suivantes :

* 533,99 € brut au titre de rappel de salaire en fonction de sa classification véritable,

* 19.183,19 € brut au titre de rappel d'heures supplémentaires,

* 175,5 € brut au titre de la majoration pour le travail effectué durant ces périodes,

* 5.506,52 € brut au titre de l'indemnité compensatrice de contrepartie obligatoire en repos,

* 31.360,68 € au titre d'indemnité pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse,

* 5.226,78 € brut au titre du préavis,

* 3.211 € au titre de l'indemnité de congés payés sur le préavis et les rappels de salaire,

* 15.680,34 € au titre de l'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé,

* 1.663,22 € brut au titre du maintien du salaire pour les mois de juin et juillet 2016 ;

- fixer en outre sa créance au titre de l'indemnité de licenciement à devoir au moment de la rupture du contrat de travail, celle-ci ne pouvant, en tout état de cause, être inférieure à la somme de 2.090,71 €, ;

- inviter la SELARL MJSA à lui remettre les bulletins de salaires rectifiés pour les années 2014, 2015 et 2016, ainsi que les bulletins de salaires depuis le début de son arrêt de travail, le reçu pour solde de tout compte, l'attestation Pôle emploi, le certificat de travail et « les bulletins du préavis ».

Aux termes de ses dernières conclusions enregistrées au RPVA le 6 février 2023, la SELARL MJSA, mandataire ad hoc de la SASU Maison de Toscane demande à la Cour de

- dire et juger que M. [J] a fait l'objet d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse dc la part de la SASU MDT le 20 septembre 2016 ;

- dire et juger la garantie de l'AGS acquise ;

- confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

- débouter M. [J] et l'AGS-CGEA de toutes prétentions plus amples ou contraires ;

- condamner à titre reconventionnel les appelants solidairement au paiement de la somme de 1 200 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, outre le paiement des entiers dépens.

Pour l'exposé des prétentions et des moyens des parties, il est renvoyé, conformément à l'article 455 du Code de procédure civile, à leurs conclusions ci-dessus mentionnées et datées.

La procédure a été clôturée par ordonnance du 7 février 2023.

MOTIFS

Sur les rappels de salaire.

Le salarié sollicite des sommes au titre des rappels de salaire ainsi qu'une indemnité compensatrice de congés payés globale, qu'il y aura lieu de détailler pour chacun des rappels de salaire accordés.

Le rappel de salaire au titre de la classification.

L'appelante ne présente aucune observation, aucune demande relatives au rappel de salaire au titre de la classification fondée sur les minima conventionnels, alors que le salarié sollicite la confirmation du jugement en ce qu'il a fixé sa créance à la somme de 533,99 € brut.

Le jugement doit être confirmé de ce chef.

L'indemnité compensatrice de congés payés y afférents s'élève à la somme de 53,40 €.

Le rappel de salaires au titre des heures supplémentaires.

Aux termes de l'article L. 3171-2, alinéa 1er, du Code du travail, lorsque tous les salariés occupés dans un service ou un atelier ne travaillent pas selon le même horaire collectif, l'employeur établit les documents nécessaires au décompte de la durée de travail, des repos compensateurs acquis et de leur prise effective, pour chacun des salariés concernés.

Selon l'article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d'enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.

Il résulte de ces dispositions, qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.

En l'espèce, le salarié fait valoir qu'il a accompli au total 303 heures supplémentaires entre 2014 et 2016, non payées par l'employeur, qu'il était amené à faire de nombreux kilomètres pour remplir ses missions et que son temps de travail était supérieur au temps de travail payé.

Il verse aux débats les pièces suivantes :

- un décompte pour chaque année concernée incluant la déduction correspondant aux quatre heures supplémentaires payées chaque mois, aux jours fériés chômés, à ses congés, à ses arrêts de travail et aux semaines au cours desquelles il n'a travaillé que quatre jours ; il en résulte qu'il a accompli

*en 2014, 516 heures supplémentaires entre le 1er avril et le 26 décembre,

*en 2015, 609 heures supplémentaires entre le 12 janvier et le 11 décembre,

*en 2016, 303 heures supplémentaires entre le 18 janvier et le 27 juin 2016,

- ses bulletins de salaire établissant que pour chaque mois travaillé, 17,33 heures supplémentaires ont été payées,

- une facture du 29 octobre 2014 d'un hôtel sis à [Localité 9] (69) pour une nuitée et une facture du 25 février 2016 d'un hôtel sis à [Localité 8] (56) pour deux nuitées,

- des photocopies de cartes de visites d'hôtels situés sur une grande partie du territoire national,

- des relevés émanant de Vinci Autoroutes et ses relevés de compte bancaire d'avril 2015 à juin 2016 comportant la trace de débits au moyen de la carte bancaire et corroborant le fait qu'il était amené à se déplacer sur l'ensemble du territoire national.

Ces éléments sont suffisamment précis pour permettre à l'employeur de répondre.

Le mandataire ad hoc de l'entreprise rétorque que sa mission ne lui permet pas de produire les éléments relatifs au contrôle des heures de travail du salarié, que les factures versées aux débats par le salarié montrent seulement que celui-ci a passé trois nuits à l'hôtel et que les relevés de télépéage montrent qu'il a effectué des trajets au cours de la période comprise entre le 31 mars et le 3 avril 2015.

Faute pour le mandataire ad hoc, qui représente l'employeur dans le cadre de cette instance, de produire le moindre élément objectif susceptible de démontrer que l'employeur exerçait un contrôle du temps de travail du salarié, il doit être fait droit à la demande à hauteur de 19.183,19 € brut au titre de rappel d'heures supplémentaires.

Le jugement sera infirmé en ce qu'il a débouté le salarié de sa demande en rappel de salaire au titre des heures supplémentaires.

L'indemnité compensatrice de congés payés y afférents s'établit à la somme de 1918,32 €.

La majoration au titre des jours fériés travaillés.

Aucune des parties ne discute le jugement en ce qu'il a fixé à la liquidation de l'entreprise la somme de 175,50 € brut au titre de la majoration pour le travail effectué durant deux jours fériés.

Le jugement sera confirmé de ce chef.

L'indemnité compensatrice de congés payés y afférents s'élève à la somme de 17,55 €.

Le maintien de salaire.

Le salarié fait valoir qu'il aurait dû percevoir un maintien de salaire pendant ses arrêts de travail pour maladie à hauteur de 1 663,22 € brut pour les mois de juin et juillet 2016.

Cette somme n'est pas discutée. Le jugement sera confirmé en ce qu'il a fait droit à la demande.

Sur le repos compensateur obligatoire.

Au vu de ce qui précède, le contingent d'heures supplémentaires fixé par l'article D 3121-14-1 du Code du travail à 220 heures a été dépassé.

Il n'est pas démontré que le salarié aurait bénéficié de repos compensateurs obligatoires.

Le repos compensateur obligatoire est fixé à 100 % des heures supplémentaires accomplies au-delà du contingent annuel pour les entreprises de plus de 20 salariés.

En 2014, le salarié a accompli 296 heures supplémentaires au-delà du contingent annuel.

En 2015, il en a accompli 389.

En 2016, il en a accompli 83.

Dès lors, après prise en compte du taux horaire applicable et des limites de la demande, les dommages et intérêts sont fixés à la somme de 5 506,52 €.

Sur le travail dissimulé.

La dissimulation d'emploi salarié prévue à l'article L 8221-5 du Code du travail n'est caractérisée que s'il est établi que l'employeur a, de manière intentionnelle, omis d'accomplir la formalité relative à la déclaration préalable à l'embauche ou de déclarer l'intégralité des heures travaillées.

L'article L 8223-1 du même Code, dans sa version applicable, prévoit qu'en cas de rupture de la relation de travail, le salarié concerné par le travail dissimulé a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire.

En l'espèce, l'importance du volume des heures supplémentaires accomplies par le salarié établit l'intention de l'employeur de dissimuler celles-ci.

Il y aura lieu de fixer au passif de la liquidation de l'entreprise l'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé, soit la somme de 15 680,34 €.

Sur la rupture du contrat de travail et la garantie de l'AGS.

Le litige porte essentiellement sur la date de la rupture du contrat de travail, laquelle a des conséquences sur la garantie de l'AGS. Il doit être rappelé que la liquidation judiciaire de l'entreprise a été prononcée le 17 mai 2017.

L'employeur a adressé au salarié un courrier manuscrit, non daté, accompagné des imprimés cerfa relatifs à la rupture conventionnelle, rédigé comme suit :

« [H],

Mettre la date + « Lu et approuvé » + signature

$gt; le 20/09/16

Tu auras une indemnité de licenciement de 304,90 € car il y a eu changement de société.

Tu pourras t'inscrire au Pole Emploi mi novembre.

[C] te donneras en plus une prime de 750 € une fois que tout sera validé.

Je dois récupérer 2 exemplaires et tu en gardes 1.

1 pour moi

1 pour la DIRRECTE

1 pour toi.

Merci. »

Il n'est pas contesté que le prénom [H] désigne le salarié.

Il est tout aussi constant que ce dernier a refusé la rupture conventionnelle.

Ainsi que le soutiennent le mandataire ad hoc et le salarié, par cet écrit, l'employeur a, sous couvert d'une proposition de rupture conventionnelle, manifesté sa décision claire et non équivoque de rompre le contrat de travail ; ce qui est corroboré par la preuve de la fermeture de l'établissement sis à [Localité 7] dès le 20 octobre 2016 et la création en parallèle d'un autre établissement sis à [Localité 6] ne comprenant aucun effectif salarié.

Contrairement à ce que fait valoir l'AGS, la date de la rupture ne saurait être fixée au 30 octobre 2019, date du jugement, celui-ci n'ayant pas prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail.

Au regard du contenu du courrier valant rupture, la date de rupture doit être fixée au 20 septembre 2016.

La garantie de l'AGS doit en conséquence être mise en oeuvre.

La rupture du contrat sans aucun respect des formalités légales prévues pour le licenciement est irrégulière et sans cause réelle et sérieuse.

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a dit que la rupture s'analysait en un licenciement sans cause réelle et sérieuse à la date du 20 septembre 2016 et en ce qu'il a dit que la garantie de l'AGS était acquise dans les conditions légales et réglementaires.

Sur les conséquences pécuniaires de la rupture.

Compte tenu de l'âge du salarié (né le 23/01/1971), de son ancienneté à la date du licenciement (plus de trois ans), du nombre de salariés habituellement employés (au moins 11 salariés), de sa rémunération mensuelle brut (2 613,39€) et de l'absence de justificatif relatif à sa situation actuelle et au regard des demandes présentées, il convient de fixer les sommes suivantes à son profit:

- 15 681 € au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 5 226,78 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,

- 522,67 € au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés y afférents,

- 2 090,71 € au titre de l'indemnité de licenciement.

Le jugement sera infirmé s'agissant des montants des sommes relatives au licenciement sans cause réelle et sérieuse, à l'indemnité compensatrice de préavis et sur l'indemnité compensatrice de congés payés sur heures supplémentaires, rappels de salaire et préavis.

Sur les demandes accessoires.

Les dépens de l'instance seront supportés par la liquidation de l'entreprise.

Il est équitable de ne pas faire application 700 du Code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La Cour, après en avoir délibéré, par arrêt mis à disposition au greffe ;

INFIRME le jugement du 30 octobre 2019 du conseil de prud'hommes de Perpignan :

- en ce qu'il a débouté M. [Z] [J] de ses demandes au titre des heures supplémentaires, des repos compensateurs obligatoires et du travail dissimulé,

- s'agissant des sommes fixées au titre de l'indemnité de licenciement, de l'indemnité compensatrice de préavis, de l'indemnité compensatrice de congés payés afférente au préavis et aux rappels de salaire et de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Statuant à nouveau sur ces chefs infirmés,

FIXE à la liquidation de la SAS Maisons de Toscane représentée par la SELARL MJSA, mandataire ad hoc, les sommes suivantes :

- 19.183,19 € brut au titre de rappel d'heures supplémentaires,

- 1 918,32 € brut au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés y afférents,

- 5 506,52 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice lié à l'absence de repos compensateurs obligatoires,

- 15 680,34 € à titre d'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé,

- 15 681 € au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 5 226,78 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,

- 522,67 € au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis,

- 2 090,71 € au titre de l'indemnité de licenciement,

- 17,55 € au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés sur rappel de salaire lié à la majoration des jours fériés,

- 53,40 € au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés sur rappel de salaire lié à la classification ;

CONFIRME le jugement pour le surplus ;

Y ajoutant,

DIT n'y avoir lieu à l'application de l'article 700 du Code de procédure civile ;

DIT que les dépens seront supportés par la liquidation judiciaire;

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 1re chambre sociale
Numéro d'arrêt : 19/07508
Date de la décision : 18/04/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-04-18;19.07508 ?
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