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18/04/2023 | FRANCE | N°19/03963

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 1re chambre sociale, 18 avril 2023, 19/03963


Grosse + copie

délivrées le

à































COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



1ère chambre sociale



ARRET DU 18 AVRIL 2023



Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 19/03963 - N° Portalis DBVK-V-B7D-OGCE





Décision déférée à la Cour :

Jugement du 06 MAI 2019

CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE MONTPELLIER - N° RG 17/00898





APPELA

NTE :



Me [E] [P] - Commissaire à l'exécution du plan de SAS SUD FLUOR

[Adresse 8]

[Localité 5]

Représenté par Maître Martha CHLALA PLANEL de la SARL CALISTAVOCATS, avocat plaidant au barreau de VALENCE et Maître Christiane CHECRI, avocat postulant au barr...

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

1ère chambre sociale

ARRET DU 18 AVRIL 2023

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 19/03963 - N° Portalis DBVK-V-B7D-OGCE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du 06 MAI 2019

CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE MONTPELLIER - N° RG 17/00898

APPELANTE :

Me [E] [P] - Commissaire à l'exécution du plan de SAS SUD FLUOR

[Adresse 8]

[Localité 5]

Représenté par Maître Martha CHLALA PLANEL de la SARL CALISTAVOCATS, avocat plaidant au barreau de VALENCE et Maître Christiane CHECRI, avocat postulant au barreau de MONTPELLIER

Maître [W] [V] - Mandataire judiciaire de SAS SUD FLUOR

[Adresse 2]

[Localité 5]

Représenté par Maître Martha CHLALA PLANEL de la SARL CALISTAVOCATS, avocat plaidant au barreau de VALENCE et Maître Christiane CHECRI, avocat postulant au barreau de MONTPELLIER

SAS SUD FLUOR

[Adresse 9]

[Localité 7]

Représentée par Maître Martha CHLALA PLANEL de la SARL CALISTAVOCATS, avocat plaidant au barreau de VALENCE

Représentée par Maître Christiane CHECRI, avocat postulant au barreau de MONTPELLIER

INTIME :

Monsieur [I] [X]

[Adresse 3]

[Localité 6]

Représenté par Maître Bruno SIAU, avocat au barreau de BEZIERS

INTERVENANTE :

Association AGS (CGEA-[Localité 4])

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représenté par Maître Delphine CLAMENS-BIANCO de la SELARL CHATEL ET ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER, substitué par Maître Guilhem PANIS, avocat au barreau de MONTPELLIER

Ordonnance de clôture du 07 février 2023 révoquée par ordonnance de clôture du 28 Février 2023

COMPOSITION DE LA COUR :

En application de l'article 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 28 FEVRIER 2023, en audience publique, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par l'article 804 du même code, devant la cour composée de :

Monsieur Philippe DE GUARDIA, Président de chambre

Madame Véronique DUCHARNE, Conseillère

Monsieur Jacques FOURNIE, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffière lors des débats : Madame Isabelle CONSTANT

ARRET :

- Contradictoire

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par Monsieur Philippe DE GUARDIA, Président de chambre, et par M. Philippe CLUZEL, Greffier.

*

* *

EXPOSE DU LITIGE

Monsieur [I] [X] a été engagé à compter du 3 février 2014 par la SAS Sud Fluor en qualité d'ingénieur de recherche en chimie, statut cadre moyennant une rémunération mensuelle brute de 2280 € pour un horaire de travail de 151,67 heures par mois.

En considération de retards dans le paiement des salaires, Monsieur [I] [X] adressait à l'employeur un premier courrier, le 15 juin 2017, aux termes duquel il lui demandait de procéder à un licenciement pour motif économique, puis un second courrier le 28 juin 2017 aux termes duquel il réclamait le paiement régulier du salaire, faisant valoir que celui d'avril lui avait été payé au cours de la première semaine de juin et que celui de mai ne lui avait pas encore été payé.

Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 5 juillet 2017, le salarié faisant valoir que le salaire de mai 2017 ne lui avait toujours pas été payé prenait acte de la rupture de son contrat de travail.

Le 24 août 2017, le salarié a saisi le conseil de prud'hommes de Montpellier aux fins de condamnation de l'employeur à lui payer différentes indemnités pour rupture abusive de la relation de travail ainsi que pour réparation du préjudice subi.

Le 2 octobre 2017, la société Sud Fluor a été placée en redressement judiciaire et Me [V] [O], désigné en qualité de mandataire judiciaire constituait avocat le 3 juillet 2019.

Par jugement du 6 mai 2019, le conseil de prud'hommes de Montpellier a dit que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail par le salarié s'analysait en un licenciement sans cause réelle et sérieuse et il a fixé les créances de Monsieur [I] [X] au passif de la société Sud Fluor aux montants suivants :

'1000 € à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi,

'13 600 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

'4560 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 456 € au titre des congés payés afférents,

'1558 € à titre d'indemnité légale de licenciement.

Le 10 juin 2019 la SA S Sud Fluor a relevé appel de la décision du conseil de prud'hommes.

Le 11 octobre 2019, le tribunal de commerce de Montpellier arrêtait un plan de redressement à l'égard de la société Sud Fluor et désignait Me [E] [P] en qualité de commissaire à l'exécution du plan.

Aux termes de ses dernières écritures notifiées par RPVA le 23 février 2023, la société Sud Fluor en présence de Me [E] [P], es-qualités de commissaire à l'exécution du plan, sollicitant le rabat de la clôture intervenue le 7 février 2023, conclut à l'infirmation du jugement rendu par le conseil de prud'hommes, et faisant valoir que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail produit les effets d'une démission, elle sollicite à titre principal le débouté du salarié de l'ensemble de ses demandes, subsidiairement, qu'en cas de condamnation les sommes soient portées sur l'état des créances et garanties par l'AGS. Elle revendique en tout état de cause la condamnation du salarié à lui payer une somme de 4560 € en raison de l'inexécution de son préavis par celui-ci, ainsi qu'une somme de 1500 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

L'UNEDIC, délégation AGS, CGEA de [Localité 4], dans ses dernières écritures notifiées par RPVA le 29 octobre 2019, sollicitant à titre principal la suspension de sa garantie pendant la durée d'exécution du plan de redressement, conclut à titre subsidiaire à l'infirmation du jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Montpellier, et considérant que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail par le salarié s'analysait en une démission, elle sollicite le débouté de ce dernier de l'ensemble de ses demandes ainsi que sa condamnation à lui rembourser la somme de 6497,26 € indûment perçue. À titre infiniment subsidiaire, elle sollicite le débouté du salarié de sa demande de dommages-intérêts pour préjudice subi en raison du retard dans le paiement des salaires et que le montant des dommages-intérêts éventuellement alloués soit ramené à de plus justes proportions.

Aux termes de ses dernières écritures notifiées par RPVA le 18 mai 2022, Monsieur [I] [X] conclut à la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a condamné la SAS Sud Fluor au paiement de dommages intérêts pour préjudice subi en raison du retard de paiement des salaires et en ce qu'il a dit que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail produisait les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, à sa réformation quant au montant des dommages-intérêts alloués pour retard dans le paiement des salaires qu'il souhaite voir porté à la somme de 3000 €. Il revendique ensuite la condamnation de la société Sud Fluor à lui payer une somme de 3500 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et à lui remettre les documents sociaux de fin de contrat ainsi qu'un justificatif de paiement des cotisations sociales afférentes aux rappels de salaire, accessoires et préavis en fonction de l'arrêt à intervenir, et ce sous astreinte de 100 € par jour de retard, outre intérêts au taux légal portant sur les condamnations prononcées à compter de la saisine du conseil de prud'hommes.

Après révocation de l'ordonnance de clôture rendue le 7 février 2023 afin de permettre l'intervention volontaire du commissaire à l'exécution du plan, une nouvelle clôture était prononcée à l'audience du 28 février 2023.

SUR QUOI

Le caractère d'actionnaire minoritaire de Monsieur [X], détenant 6,6 % du capital social, et l'apport de 10 000 € effectué par celui-ci au capital de la société en janvier 2016 quand bien même serait-il lié au difficultés financières évoquées par le président de la société dans son courriel du 6 octobre 2015, ne pouvait dispenser l'employeur du paiement régulier du salaire à monsieur [X] nonobstant les activités de développement d'une exploitation agricole ou de création d'une agence spécialisée dans le conseil en gestion d'entreprise et en développement industriel respectivement initiées par monsieur [X] en janvier 2016 et janvier 2017.

Or, en l'espèce, il ressort des pièces produites, que nonobstant l'acceptation par le salarié de retards de paiement de salaire récurrents, celui-ci établit l'existence de difficultés financières au cours de l'année 2017 le conduisant, le 15 juin 2017, à solliciter un licenciement économique en raison de la persistance de retards dans le paiement des salaires, puis le 28 juin 2017 à mettre en demeure l'employeur de lui payer le salaire du mois de mai 2017. Or, au 5 juillet 2017, date de la prise d'acte de la rupture du contrat de travail, l'employeur, destinataire le 29 juin 2017 de la mise en demeure que lui avait adressée le salarié n'avait toujours pas régularisé le paiement des salaires.

Il en résulte qu'en dépit de l'intérêt qu'avait pu manifester Monsieur [X] pour la poursuite de l'activité de l'entreprise l'ayant conduit à accepter certains retards de paiement de salaire, la persistance d'un défaut de paiement régulier du salaire engendrant des difficultés financières ne lui permettant pas de subvenir régulièrement à ses besoins personnels, notamment de logement, empêchait la poursuite du contrat de travail.

C'est pourquoi, tandis qu'en cours d'exécution du contrat, il mettait en demeure l'employeur de procéder à son licenciement et de régulariser le paiement des salaires, l'absence de régularisation de paiement des salaires à la date de la rupture du contrat de travail conduit à confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a dit que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail par le salarié le 5 juillet 2017 produisait les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse en raison d'un manquement suffisamment grave de l'employeur à son obligation de paiement régulier du salaire empêchant la poursuite du contrat de travail.

La rupture injustifiée du contrat de travail du fait de l'employeur, ouvre droit pour le salarié au bénéfice des indemnités de rupture pour des montants non spécialement discutés de 4560 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 456 € au titre des congés payés afférents et de 1558 € à titre d'indemnité légale de licenciement.

La rupture injustifiée du contrat de travail du fait de l'employeur ouvre également droit pour le salarié au bénéfice d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. À la date de la rupture du contrat de travail Monsieur [X] avait une ancienneté de trois ans et cinq mois dans une entreprise dont les pièces produites établissent qu'elle employait habituellement moins de onze salariés. Il bénéficiait d'un salaire mensuel brut de 2280 €. Monsieur [X] ne produit aucun élément sur sa situation postérieure à l'année 2018. Partant, sur la base des pièces produites aux débats, la cour dispose d'éléments suffisants pour fixer à 3000 € le montant de l'indemnité réparant le préjudice lié à la perte injustifiée de l'emploi.

Nonobstant le préjudice allégué en raison de retards de paiement de salaire, Monsieur [X] n'établit pas l'existence d'un préjudice distinct de celui résultant du paiement du salaire régularisé postérieurement à la rupture du contrat de travail et de celui réparant la perte injustifiée de l'emploi. Aussi, y a-t-il lieu d'infirmer le jugement entrepris à cet égard et de débouter Monsieur [X] de sa demande de dommages-intérêts pour préjudice distinct.

La remise des documents sociaux de fin de contrat et d'un bulletin de paie rectifiés conformément au présent arrêt étant de droit, il convient de l'ordonner sans pour autant qu'il y ait lieu au prononcé d'une astreinte ou de condamnation de l'employeur à justifier plus avant du respect de l'ensemble des obligations légales lui incombant.

Par jugement du 2 octobre 2017, le tribunal de commerce de Montpellier a prononcé l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire à l'égard de la SAS Sud Fluor. Il n'est pas contesté que ce même tribunal de commerce a arrêté un plan de redressement à l'égard de l'entreprise, le 11 octobre 2019 et qu'à compter de cette date, la société est à nouveau in bonis. Pour autant, l'indemnité de licenciement, l'indemnité de préavis et les congés payés afférents payés par l'AGS étaient dus à la date du jugement d'ouverture de la procédure collective le 2 octobre 2017, si bien qu'en vertu de l'article L3253-8 du code du travail la garantie de l'AGS portant sur ces sommes reste due au salarié qui ne peut être tenu à leur remboursement à cet organisme. C'est pourquoi, l'UNEDIC, délégation AGS sera déboutée de sa demande reconventionnelle de remboursement par le salarié des sommes qu'elle lui a versées. De plus, la garantie de l'AGS joue également pour le paiement de dommages-intérêts accordés suite à la rupture du contrat de travail intervenue avant le jugement d'ouverture, même si la décision ayant condamné l'employeur est postérieure au jugement déclaratif. Il en résulte que le présent arrêt est opposable à l'UNEDIC, délégation AGS, CGEA de [Localité 4] dans les limites des plafonds de ses garanties légales et réglementaires, et que la cour ne peut que se borner en l'état, à déterminer le montant des sommes à inscrire sur l'état des créances déposé au greffe du tribunal.

Il convient de rappeler que les créances de nature salariale portent intérêts au taux légal à compter de la réception par l'employeur de sa convocation devant le bureau de conciliation et les créances à caractère indemnitaire produisent intérêts au taux légal à compter de la décision en fixant tout à la fois le principe et le montant.

En considération de l'équité, il convient de dire n'y avoir lieu à condamnation au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Compte tenu de la solution apportée au litige les dépens seront supportés par la société Sud Fluor, et il convient de les déclarer frais privilégiés au passif de la procédure collective de la société Sud Fluor.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Confirme le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Montpellier le 6 mai 2019 sauf quant au montant alloué à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et en ce qu'il a fait droit à la demande de dommages-intérêts formée par le salarié pour préjudice lié au retard de paiement du salaire;

Et statuant à nouveau des seuls chefs infirmés,

Fixe au passif de la procédure collective de la SAS Sud Fluor la créance de Monsieur [I] [X] à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à la somme de 3000 €;

Déboute Monsieur [I] [X] de sa demande de dommages-intérêts pour préjudice lié aux retards de paiement du salaire;

Rappelle que les créances de nature salariale produisent intérêts au taux légal à compter de la réception par l'employeur de sa convocation devant le bureau de conciliation et les créances à caractère indemnitaire produisent intérêts au taux légal à compter de la décision en fixant tout à la fois le principe et le montant;

Ordonne la remise par la SARL Sud Fluor à Monsieur [I] [X] des documents sociaux de fin de contrat et d'un bulletin de paie rectifiés conformément au présent arrêt;

Dit n'y avoir lieu au prononcé d'une astreinte;

Dit n'y avoir lieu à condamnation au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile;

Déclare le présent arrêt opposable à l'UNEDIC, délégation AGS, CGEA de [Localité 4] dans les limites de sa garantie;

Déboute l'UNEDIC, délégation AGS, CGEA de [Localité 4] de sa demande reconventionnelle de remboursement par le salarié des sommes qu'elle lui a versées;

Dit que les dépens seront supportés par la société Sud Fluor, et les déclare frais privilégiés au passif de la procédure collective de la société Sud Fluor.;

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 1re chambre sociale
Numéro d'arrêt : 19/03963
Date de la décision : 18/04/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-04-18;19.03963 ?
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