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12/04/2023 | FRANCE | N°21/00304

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 2e chambre sociale, 12 avril 2023, 21/00304


Grosse + copie

délivrées le

à















COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



2e chambre sociale



ARRET DU 12 AVRIL 2023





Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 21/00304 - N° Portalis DBVK-V-B7F-O2UQ



ARRÊT n°



Décision déférée à la Cour : Jugement du 17 DECEMBRE 2020

CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION DE DEPARTAGE DE NARBONNE - N° RG F 18/00215











APPELANTE :



Association AFTRAL

[Adresse 2]

[Localité 3]



Représentée par Me Suzanne GAL, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant

Assistée par Me Kathy AZEVEDO, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant









INTIME :



Monsieur [C] [L...

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

2e chambre sociale

ARRET DU 12 AVRIL 2023

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 21/00304 - N° Portalis DBVK-V-B7F-O2UQ

ARRÊT n°

Décision déférée à la Cour : Jugement du 17 DECEMBRE 2020

CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION DE DEPARTAGE DE NARBONNE - N° RG F 18/00215

APPELANTE :

Association AFTRAL

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Suzanne GAL, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant

Assistée par Me Kathy AZEVEDO, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant

INTIME :

Monsieur [C] [L]

de nationalité Française

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 1]

Représenté par Me Cyril CAMBON, avocat au barreau de NARBONNE

Ordonnance de clôture du 31 Janvier 2023

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 21 FEVRIER 2023, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Magali VENET, conseiller et Monsieur Richard BOUGON, Conseiller, faisant fonction de président, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Richard BOUGON, Conseiller, en remplacement du président, empêché

Madame Magali VENET, Conseiller

Monsieur Jacques FOURNIE, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Marie-Lydia VIGINIER

ARRET :

- contradictoire ;

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par Monsieur Richard BOUGON, Conseiller, en remplacement du président, empêché et par Madame Marie-Lydia VIGINIER, Greffier.

*

* *

FAITS, PROCÉDURE ET DEMANDES DES PARTIES

Le 3 octobre 2017 le médecin du travail déclare M. [C] [L] (ci-après le salarié), employé en qualité de formateur depuis le 21 avril 2008 à l'association Aftral (ci-après l'association ou l'employeur) et sur visite de reprise après maladie, inapte au poste de formateur et à tous les postes dans l'entreprise en un seul examen.

Le 26 décembre 2017 l'inspecteur du travail autorise l'employeur à licencier le salarié, retenant que l'enquête contradictoire n'a pas révélé de lien entre la demande de licenciement et l'exercice de son mandat de délégué du personnel.

Le 5 janvier 2018 l'employeur notifie au salarié son licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement.

Le 17 mai 2018 le ministre du travail annule l'autorisation administrative dans la mesure où la convocation à entretien préalable ne mentionnait pas la possibilité pour le salarié de se faire assister par une personne de son choix appartenant au personnel d'une entreprise de cette unité économique et sociale.

Le 19 mai 2018 le salarié sollicite sa réintégration.

Le 28 mai 2018 l'employeur convoque le salarié pour un entretien préalable à licenciement pour inaptitude.

Le 7 juin 2018 le médecin du travail déclare le salarié apte à son poste.

Le 8 juin 2018 le salarié saisit le juge des référés du Conseil de Prud'hommes de Narbonne afin d'obtenir sa réintégration.

Le vendredi 8 juin 2018 l'employeur avise le salarié que l'entretien du jeudi 7 juin 2018 a porté sur une réintégration à effet du lundi 11 juin 2018.

Le 11 juin 2018 le salarié bénéficie d'un arrêt de travail pour maladie jusqu'au 24 juin 2018.

Le 2 juillet 2018 le salarié bénéficie d'un arrêt de travail pour maladie jusqu'au 4 novembre 2018.

Le 4 octobre 2018 le salarié saisit le Conseil de Prud'hommes de Narbonne afin d'obtenir la résiliation judiciaire de son contrat de travail.

Le 27 novembre 2018 le salarié prend acte de la rupture de son contrat de travail.

Le 17 décembre 2020 le Conseil de Prud'hommes de Narbonne, section activités diverses, en formation de départage, sur audience de plaidoiries du 22 octobre 2020, juge que le salarié a été victime de harcèlement moral, juge que la prise d'acte s'analyse en un licenciement nul, condamne l'employeur à payer au salarié les sommes de 12 429,81 € pour le paiement des salaires du 6 janvier au 10 juin 2018 et 1 242,98 € de congés payés y afférents, 1 035,39 € de 13ème mois correspondant à la période au 6 janvier au 10 juin 2018, 1 086,44 € de régularisation sur arrêt maladie du 11 au 24 juin 2018 indûment effectuée sur le bulletin de salaire du mois de juillet 2018, 2 652,34 € de complément d'indemnité journalière de sécurité sociale pour l'absence maladie du 2 juillet 2018 au 31 octobre 2018, 3 000 € de dommages intérêts pour harcèlement moral, 4 811,38 € d'indemnité compensatrice de préavis et 481,14 € de congés payés y afférents, 17 802,83 € d'indemnité de licenciement, 36 085,35 € de dommages intérêts pour licenciement nul et 1 800 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, condamne le salarié à payer à l'employeur la somme de 21 138 € au titre des sommes versées à l'occasion du licenciement annulé par la ministre du travail, ordonne la compensation des dettes respectives des parties, ordonne le remboursement par l'employeur à Pôle emploi des éventuelles indemnités versées par cet organisme au salarié et ce dans la limite de quatre-vingt-dix jours d'indemnités de chômage, décide que les sommes allouées par le présent jugement portent intérêts à compter de son prononcé et condamne l'employeur aux entiers dépens de l'instance.

Le 15 janvier 2021 l'employeur interjette appel et demande à la Cour de :

- infirmer le jugement sur le complément d'indemnité journalière de sécurité sociale pour l'absence maladie du 2 juillet 2018 au 31 octobre 2018 et statuant de nouveau juger qu'elle est redevable de la seule somme 579,69 € de complément ;

- infirmer le jugement sur le harcèlement et sur les effets de la prise d'acte et décider qu'elle produit les effets d'une démission ;

- débouter le salarié de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions ;

- condamner le salarié à lui payer la somme de 2 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Le salarié demande à la Cour de :

- confirmer le jugement sur le harcèlement moral, la nullité du licenciement, le paiement des salaires du 6 janvier au 10 juin 2018, le 13ème mois, la régularisation sur arrêt maladie du 11 au 24 juin 2018 indûment effectuée sur le bulletin de salaire du mois de juillet 2018, le complément d'indemnité journalière de sécurité sociale pour l'absence maladie du 2 juillet au 31 octobre 2018, sur l'indemnité de préavis et les congés payés y afférents, l'indemnité de licenciement et les dommages et intérêts pour nullité du licenciement ;

- infirmer le jugement sur le surplus et statuant à nouveau, condamner l'association, outre aux dépens d'appel, à lui payer les sommes de 10 000 € de dommages et intérêts pour sa tentative de licenciement à la suite de l'annulation ministérielle de l'autorisation de licenciement, 30 000 € de dommages et intérêts pour discrimination, à titre subsidiaire 24 056,90 € pour licenciement sans cause

réelle et sérieuse, 51 321,60 € d'indemnité pour violation du statut protecteur et 1 800 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture intervient le 31 janvier 2023 et les débats le 21 février 2023.

MOTIFS DE LA DÉCISION

1) sur les demandes de paiement des salaires du 6 janvier au 10 juin 2018, du 13ème mois et la demande de régularisation sur arrêt maladie du 11 au 24 juin 2018

Tout en consacrant quelques pages de ses conclusions à ces questions, l'employeur conclut en précisant qu'il " n'a pas souhaité interjeter appel du chef " de ces condamnations.

2) sur la demande de complément d'indemnité journalière de sécurité sociale pour l'absence maladie du 2 juillet au 4 novembre 2018

L'article 14.1 sur l'indemnisation des absences pour maladie ou accident de la convention collective nationale des organismes de formation du 10 juin 1988 étendue par arrêté du 16 mars 1989 prévoit, notamment, que :

- sans préjudice des adaptations conventionnelles concernant les salariés titulaires d'un contrat de travail conclu dans le cadre de l'article L. 3122-28 du code du travail, après 1 an d'ancienneté au jour de l'arrêt médical, et en cas d'absence justifiée par l'incapacité résultant de la maladie ou d'un accident, professionnel ou non, dûment constatée par certificat médical et contre-visite s'il y a lieu, l'intéressé bénéficiera des dispositions suivantes, à condition d'avoir justifié, dans les 48 heures de cette incapacité, d'être pris en charge par la sécurité sociale et d'être soigné sur le territoire national ou dans l'un des pays de la Communauté économique européenne ;

- pendant 30 jours, le salarié recevra la rémunération qu'il aurait perçue s'il avait continué à travailler ;

- pendant les 60 jours suivants, il recevra les 3/4 de cette même rémunération ;

- l'indemnisation interviendra après un délai de carence de 7 jours ouvrables pour la maladie et à compter du premier jour d'arrêt pour l'accident du travail ou la maladie professionnelle survenant dans l'entreprise. Toutefois, à raison d'une fois par an, de date à date, ce délai de carence sera ramené à 3 jours. De plus, pour un arrêt de travail égal ou supérieur à 30 jours, le délai de carence de 7 jours sera rétroactivement supprimé ;

- le premier temps d'indemnisation sera augmenté de 15 jours par période entière de 5 ans d'ancienneté ; le deuxième temps d'indemnisation sera augmenté de 10 jours par période de même durée, sans que chacun de ces temps ne puisse excéder 90 jours ;

- les garanties ci-dessus accordées s'entendent déduction faite des indemnités que l'intéressé perçoit des caisses de sécurité sociale ou des caisses complémentaires ;

- en tout état de cause, cette déduction est limitée au salaire brut que l'intéressé aurait perçu pendant la période considérée ;

- en tout état de cause, ces garanties ne doivent pas conduire à verser à l'intéressé, compte tenu des sommes de toutes provenances perçues à l'occasion de la maladie ou de l'accident du travail, un montant supérieur à la rémunération nette qu'il aurait effectivement perçue s'il avait continué à travailler ;

- la rémunération à prendre en considération est celle correspondant à l'horaire pratiqué pendant son absence dans l'établissement ou partie d'établissement, sous réserve que cette absence n'ait entraîné une augmentation de l'horaire pour le personnel restant au travail ;

- sur une même période de 12 mois, la durée d'indemnisation sera au maximum celle des périodes ci-dessus fixées.

Ces dispositions sont complétées par celles de l'accord du 3 juillet 1992 relatif à la mise en place d'un régime de prévoyance, prévoyant en cas d'arrêt total de travail entraînant le versement des indemnités journalières de la sécurité sociale et dès que cesse le droit à la rémunération totale et jusqu'à la reprise de travail ou jusqu'à la reconnaissance de l'état d'invalidité, le régime de prévoyance verse au salarié une indemnité journalière complémentaire à celle de la sécurité sociale, indemnisation égale à 83 % du salaire de référence.

Il est d'ailleurs non contesté par les parties qu'après la première période de maintien intégral du salaire, le salarié bénéficie, en second temps, du régime de prévoyance avec indemnisation égale à 83 % de son salaire de référence.

Le salaire (cf ci-dessus) est payé du 6 janvier au 10 juin 2018.

Il est établi (cf ci-dessus) que du 11 au 24 juin 2018 (14 jours) le salarié se trouve en arrêt maladie et bénéficie du maintien du salaire pour une période de 11 jours (le délai de carence étant de trois jours).

Le salarié est à nouveau en arrêt maladie à compter du 2 juillet au 4 novembre 2018.

Sur ces bases le premier juge retient la perception de 100 % de sa rémunération pendant 60 jours puis 83 % pendant 66 jours pour un montant de 2 652,34 € après déduction des IJSS, le salarié réclamant la perception de 100 % de sa rémunération pendant 60 jours du 2 juillet au 30 août 2018 puis 83 % pendant 66 jours du 31 août au 4 novembre 2018 pour un montant de 2 652,34 € après déduction des IJSS.

Le salarié qui réclame une somme de 2 652,34 € omet la règle ci-dessus rappelée du calcul des avantages " sur une même période de 12 mois ", devant être tenu compte pour l'indemnisation de la

période du 2 juillet au 4 novembre 2018 de celle déjà intervenue pour la période antérieure du 11 au 24 juin 2018.

Pour la maladie du 11 au 24 juin 2018, il existe un maintien du salaire pour 11 jours (14 jours moins 3 jours de délai de carence) dont il doit être tenu compte pour la maladie du 2 juillet au 31 octobre 2018 puisque la durée d'indemnisation est calculée sur une même période de 12 mois.

De son côté l'employeur qui propose une somme de 579,69 € s'emmêle aussi dans ses calculs et son raisonnement entre maintien du salaire et prévoyance en concluant (cf page 17/35 de ses conclusions) que :

- à compter du 2 septembre 2018 le maintien du salaire par l'employeur a pris fin et qu'il existe une prise en charge prévoyance pour 83 % ;

- le maintien à 83 % devait être assuré durant 70 jours soit 28 jours en juin (juillet ''), 31 jours en août et 2 jours en septembre' ;

Pour la maladie du 2 juillet au 4 novembre 2018, il n'existe pas de délai de carence puisque l'arrêt de travail est égal ou supérieur à 30 jours.

Pendant 30 jours, le salarié recevra la rémunération qu'il aurait perçue s'il avait continué à travailler, ce premier temps d'indemnisation devant être augmenté de 15 jours par période entière de 5 ans d'ancienneté, soit deux fois 15 jours puisque le salarié est engagé le 21 avril 2008.

Du 2 au 31 juillet 2018 il existe 30 jours.

Du 1er au 31 août 2018 il existe 31 jours.

En conséquence il existe bien une indemnisation à 100 % pour 49 jours (60-11) du 2 au 31 juillet 2018 (30 jours) et du 1er au 19 août 2018 (19 jours), suivie d'une indemnisation à 83 % en application du régime de prévoyance.

Ce second temps d'indemnisation intervient du 20 août 2018 au 4 novembre 2018, soit 77 jours (12 jours en août, 30 jours en septembre, 31 jours en octobre et 4 en novembre).

Pour cette période du 11 juin au 4 novembre 2018 le salarié bénéficie d'IJJS de 5 297,37 € (433,95 + 4 863,42) ainsi qu'un maintien de salaire de 1 688 ,60 €.

A raison du taux journalier proposé qui ne fait l'objet d'aucune contestation, l'indemnisation s'établit à 9 054,25 € [(49 jours x 80,19 €) = 3 929,31 € + (77 jours x 80,19 € x 83%) = 5 124 ,94 €], soit un solde à percevoir de 2 068,28 € (9 054,25 - 5 297,37 - 1 688,60).

3) sur la condamnation du salarié à payer à l'employeur la somme de 21 138 € au titre des sommes versées à l'occasion du licenciement annulé par la ministre du travail

Depuis le 1er septembre 2017 l'article 954 du code de procédure civile prévoit que :

- les conclusions d'appel contiennent, en en-tête, les indications prévues à l'article 961 ;

- elles doivent formuler expressément les prétentions des parties et les moyens de fait et de droit sur lesquels chacune de ces prétentions est fondée avec indication pour chaque prétention des pièces invoquées et de leur numérotation, un bordereau récapitulatif des pièces y étant annexé ;

- les conclusions comprennent distinctement un exposé des faits et de la procédure, l'énoncé des chefs de jugement critiqués, une discussion des prétentions et des moyens ainsi qu'un dispositif récapitulant les prétentions (et si, dans la discussion, des moyens nouveaux par rapport aux précédentes écritures sont invoqués au soutien des prétentions, ils sont présentés de manière formellement distincte) ;

- la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion ;

- les parties doivent reprendre, dans leurs dernières écritures, les prétentions et moyens précédemment présentés ou invoqués dans leurs conclusions antérieures. A défaut, elles sont réputées les avoir abandonnés et la cour ne statue que sur les dernières conclusions déposées.

En l'espèce cette prétention du salarié figurant aux pages 8 et 9 de ses conclusions n'est pas reprise et énoncée au dispositif de ses écritures (pages 21 et 22) et ainsi par simple application des dispositions ci-dessus rappelées, la Cour n'a pas à statuer sur cette demande, demande d'infirmation qui, en tout état de cause, apparaît totalement infondée dans la mesure où il est établi qu'à la suite de la première rupture du contrat de travail le salarié a perçu, suivant solde de tout compte, la somme de 21 138 € .

4) sur la demande relative à la "discrimination et au harcèlement suite à son élection comme délégué du personnel "

Au soutien de cette double demande, le salarié, élu comme délégué du personnel suppléant à compter du 8 mars 2016, précise (cf pages 11 à 14 de ses conclusions) que :

- à partir du moment où il a été élu, le comportement de son employeur a été différent et n'a eu de cesse que de le pousser vers la sortie ;

- ainsi dès le mois suivant son élection, l'employeur refuse pour la première fois ces congés payés (pièce n° 32) ;

- il a appris en 2016 qu'il avait été déprogrammé sans motif pour assurer la formation taxi formation qu'il assurait depuis 2013 ;

- interrogeant son directeur de secteur, la réponse de ce dernier a été virulente et a été diffusée à de nombreux destinataires, le discréditant ainsi alors que sa demande était légitime (pièce n° 33 : mail du 14 février 2013 et pièce 34 : échanges de mails des 21 juillet et 3 août 2016) ;

- courant 2016 l'employeur ne l'a pas informé de la tenue de la formation RUTL qui s'est déroulée à [Localité 5] et qu'il anime pourtant depuis 10 ans en préférant y faire intervenir le formateur d'un autre centre éloigné géographiquement ;

- le compte rendu de la réunion des délégués du personnel du 29 décembre 2016 est d'ailleurs illustratif tant sur le site de [Localité 5] que sur celui de [Localité 6] du management autoritaire incarné par le directeur des secteurs, M. [X] [U] (pièce n° 30 compte rendu réunion DP 29 novembre 2016) ;

- le 3 janvier 2017 ce même directeur des secteurs donne à nouveau une grande publicité un échange de mails humiliants à son encontre qui confirme si besoin était la politique d'ostracisme menée à son encontre : " si le salarié n'est pas capable de faire une intervention sur TETTM sans PRAA, il faut prévoir un autre formateur '(pièce n° 35 : échange par mail du 3 janvier 2017) ;

- après cette agression son médecin traitant l'a arrêté ;

l'employeur a toujours opposé des entraves à sa reprise puisque le 2 mai 2017 l'employeur le positionne dès sa reprise sur un stage devant se dérouler à l'étage et le 3 mai 2017 l'employeur le positionne sur une conduite voyageur, formation qui n'avait jamais effectué auparavant ;

- les données médicales versées aux débats caractérisent les conséquences médicales de ce comportement (pièces 36, 37 et 45), le médecin du travail "impliquant clairement la relation de travail comme à l'origine de l'inaptitude " ;

Aucun élément ne permet la caractérisation :

- d'un fait précis qui serait intervenu " courant 2016 sur une formation RUTL à [Localité 5] ", l'employeur précisant, sans d'ailleurs être contredit, qu'une telle formation était assurée par plusieurs formateurs, le salarié n'alléguant ni ne prouvant d'ailleurs une quelconque exclusivité dans les faits, son contrat de travail ne prévoyant aucune formation en particulier ;

- de ce que l'employeur l'aurait positionné le 2 mai 2017 sur un stage devant se dérouler à l'étage, qu'il n'ait pas les compétences

pour certaines formations, voire que son contrat en exclut certaines ;

A l'appui de leurs prétentions, les parties ont la charge d'alléguer les faits propres à les fonder et ainsi que ci-dessus rappelé Elles doivent formuler expressément dans leurs conclusions les moyens de fait sur lesquels chacune de ces prétentions est fondée.

Renvoyer la juridiction à la pièce n° 30 du compte rendu de la réunion des délégués du personnel du 29 novembre 2016 en se contentant d'affirmer que ce document " est illustratif ' du management autoritaire incarné par le directeur des secteurs " n'a aucune portée, ne serait-ce que probatoire, la Cour n'ayant pas à deviner dans ce document de 4 pages s'il existe de l'autoritarisme et ce que le requérant considère comme autoritaire et les conséquences sur ces conditions de travail, réunion à laquelle le salarié n'assiste pas'

Contrairement à ce que précise le salarié il n'a pas été " déprogrammé sans motif " en 2016 pour assurer la formation taxi.

Alors que le salarié apprend en juillet 2016 qu'il n'existe pas de formation taxi pour cette année, il interroge son employeur afin d'obtenir une réponse " précise et argumentée ", formation dont il précise d'ailleurs qu'elle a été reprise par la " concurrence " et s'inquiétant de " la perte d'une part non négligeable de marché ".

L'employeur lui répond (cf pièce 34) en des termes exempts de " virulence " en lui fournissant la réponse " précise et argumentée " qu'il sollicitait, précisant que la formation a été annulée à raison de l'absence de rentabilité (" en dessous de 12 stagiaires fermes sur chaque session la marge est totalement insuffisante "), employeur qui, après avoir rappelé le coût d'intervention moindre des concurrents, remercie le salarié pour son implication et lui demandant même de lui soumettre " ses idées pour conquérir des parts de marché avec les taxis'. ".

Même si le terme " n'est pas capable " sorti d'un contexte peut être interprété de manière péjorative, il n'existe ni humiliation ni ostracisme dans le fait que lors d'un échange entre responsables, échanges communiqués au salarié, il est précisé que la situation actuelle d'emploi et le manque de formateur ne permet pas d'octroyer une période de préparation aux formateurs (c'est le sens du terme PRAA).

Ainsi si Mme [W] [J], directrice des centre Pyrénées Orientales et Aude sollicite le directeur des secteurs pour savoir si le salarié peut se trouver en temps de préparation le 30 janvier 2017 pour assurer une formation TETTM, le refus de ce dernier, motivé par l'absence de personnel, et même accompagnée de la formule " si le salarié n'est pas capable de faire une intervention TETTM sans PRAA il faut prévoir un autre formateur " n'est nullement humiliante.

Il existe bien un refus de congés payés intervenu le 20 avril 2016.

Il existe bien une dégradation de la santé du salarié.

Pour autant et contrairement à ce qu'affirme le salarié " le médecin du travail n'implique pas clairement la relation de travail comme se trouvant à l'origine de l'inaptitude " ;

Outre que la décision d'inaptitude intervient le 3 octobre 2017, le courrier du médecin du travail du 4 mai 2017 (pièce n° 36) ne reprend que les doléances du salarié sans se positionner sur ce point (" il existe un épisode anxio-dépressif majeur que le salarié relie avec une souffrance au travail ").

Il en est de même pour le médecin traitant qui, même s'il évoque le 5 mars 2021 un burn-out (pièce 45), ne se prononce pas sur l'origine de l'épuisement professionnel.

A supposer, hypothèse la plus favorable au salarié, que le refus en janvier 2017 d'un temps de préparation liée à une formation puisse être considéré comme un fait qui permette de présumer l'existence d'un harcèlement, il en existe ainsi deux, l'autre étant le refus de congés.

Le refus de congés du 20 avril 2016 pour la semaine suivante est justifié par des éléments objectifs, étrangers à tout harcèlement puisque le refus lui est notamment notifié, outre qu'il n'existe pas de solution de remplacement pour la semaine suivante, par l'absence de congés disponibles pour le salarié sur cette période, ce que ne discute d'ailleurs pas le salarié qui, d'ailleurs, ne justifie pas plus d'une réaction à l'époque.

Le refus en janvier 2017 d'un temps de préparation liée à une formation est justifié par des éléments objectifs, étrangers à tout harcèlement puisque ce refus est motivé par une production tendue et l'absence de personnel, ce que ne discute pas plus le salarié qui n'établit pas une réaction à l'époque.

Ainsi et même si la dégradation de l'état de santé est avéré, il n'existe ni harcèlement moral ni discrimination.

Dès lors les demandes présentées à ce titre doivent être rejetées, notamment celles consécutives à l'annulation du licenciement.

5) sur les effets de la prise d'acte

La prise d'acte permet au salarié de rompre le contrat de travail en cas de manquement suffisamment grave de l'employeur empêchant la poursuite du contrat de travail.

La prise d'acte de la rupture par le salarié en raison de faits qu'il reproche à l'employeur entraîne la cessation immédiate du contrat de travail en sorte qu'il n'y a plus lieu de statuer sur la demande de résiliation judiciaire introduite auparavant.

S'il appartient alors au juge de se prononcer sur la seule prise d'acte, il doit fonder sa décision sur les manquements de l'employeur invoqués par le salarié tant à l'appui de la demande de résiliation judiciaire devenue sans objet qu'à l'appui de la prise d'acte.

Au soutien de sa demande, le salarié se prévaut (cf pages 15 à 17 /22 de ses conclusions) de :

- l'absence de paiement des salaires du 6 janvier au 10 juin 2018 ;

- l'absence de paiement de maintien de salaire pour maladie ;

- la tentative de licenciement après annulation ministérielle ;

- le harcèlement et la discrimination à l'origine de l'inaptitude.

Ainsi que ci-dessus décidé il n'existe ni harcèlement ni discrimination.

Alors que le 3 octobre 2017 le médecin du travail déclare le salarié inapte à son poste et à tous les postes dans l'entreprise, que le 26 décembre 2017 l'inspecteur du travail autorise l'employeur à licencier le salarié en excluant tout lien entre la demande de licenciement et l'exercice de son mandat de délégué du personnel, que l'annulation de l'autorisation administrative le 17 mai 2018 intervient uniquement à raison d'une omission dans le courrier de convocation à entretien préalable, la volonté de l'employeur de se prévaloir de cette situation d'inaptitude pour poursuivre la procédure de licenciement, volonté qui n'empêche pas le salarié de rencontrer le médecin du travail le 7 juin 2018, ne peut être analysée comme un manquement de l'employeur et ce d'autant qu'après organisation d'une réintégration au lundi 11 juin 2018, le salarié bénéficie à cette date d'un arrêt de travail pour maladie jusqu'au 24 juin 2018.

L'absence de paiement des salaires du 6 janvier au 10 juin 2018 et les mauvaises déterminations des montants de maintien de salaire dans les conditions ci-dessus analysées pour des montants très inférieurs aux sommes dues par le salarié après annulation des effets du licenciement, sommes faisant l'objet de réclamations restées sans suite, le salarié qui connaît parfaitement le montant des sommes qu'il a perçues figurant au solde de tout compte s'y opposant sur un motif de forme dilatoire, ne représentent pas un manquement suffisamment grave de l'employeur de nature à empêcher la poursuite du contrat de travail.

Ainsi la prise d'acte produit les effets d'une démission.

En conséquences le salarié doit être débouté de toutes ses demandes présentées pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, indemnité compensatrice de préavis, les congés payés y afférents, indemnité de licenciement et indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

6) sur la compensation

Il convient effectivement de confirmer la décision du premier juge ordonnant la compensation des dettes respectives des parties.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Constate qu'il n'existe aucun recours sur la condamnation de l'employeur au paiement des sommes de 12 429,81 € pour les salaires du 6 janvier au 10 juin 2018, 1 242,98 € de congés payés y afférents, 1 035,39 € de 13ème mois correspondant à la période au 6 janvier au 10 juin 2018 et 1 086,44 € de régularisation sur arrêt maladie du 11 au 24 juin 2018 ;

Confirme le jugement du 17 décembre 2020 du Conseil de Prud'hommes de Narbonne, section activités diverses, en formation de départage, en ce qu'il condamne le salarié à payer à l'employeur la somme de 21 138 € au titre des sommes versées à l'occasion du licenciement annulé par la ministre du travail, ordonne la compensation des dettes respectives des parties et laisse les dépens de première instance à la charge de l'employeur ;

Pour le surplus infirme ;

Statuant à nouveau des chefs infirmés ;

Condamne l'employeur à payer au salarié la somme de 2 068,28 € de complément d'indemnisation pour la période maladie du 2 juillet au 4 novembre 2018, les intérêts au taux légal courant à compter de la première mise en demeure de l'employeur, le 11 octobre 2018 ;

Décide qu'il n'existe ni harcèlement moral ni discrimination ;

Déboute le salarié de toutes les demandes présentées à ce titre ;

Décide que la prise d'acte produit les effets d'une démission ;

Déboute le salarié de toutes les demandes présentées au titre d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Y ajoutant ;

Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Laisse les dépens du présent recours à la charge de l'employeur.

LE GREFFIER LE CONSEILLER

Pour le président empêché

R. BOUGON


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 2e chambre sociale
Numéro d'arrêt : 21/00304
Date de la décision : 12/04/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-04-12;21.00304 ?
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