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12/04/2023 | FRANCE | N°20/04700

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 2e chambre sociale, 12 avril 2023, 20/04700


Grosse + copie

délivrées le

à















COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

2e chambre sociale

ARRET DU 12 AVRIL 2023



Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 20/04700 - N° Portalis DBVK-V-B7E-OXNH



Décision déférée à la Cour :

Jugement du 28 OCTOBRE 2020

CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE NARBONNE N° RG F 18/00138



APPELANT :



Monsieur [N] [O]

[Adresse 2]

[Localité 5]

Représenté p

ar Me DEPLAIX avocat pour Me Marianne MALBEC de la SELARL CLEMENT MALBEC CONQUET, avocat au barreau de NARBONNE



INTIMEES :



SELARL MJ SYNERGIE

[Adresse 1]

[Localité 6]

Représentée par Me Gilles ARGELLIES de la SCP...

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

2e chambre sociale

ARRET DU 12 AVRIL 2023

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 20/04700 - N° Portalis DBVK-V-B7E-OXNH

Décision déférée à la Cour :

Jugement du 28 OCTOBRE 2020

CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE NARBONNE N° RG F 18/00138

APPELANT :

Monsieur [N] [O]

[Adresse 2]

[Localité 5]

Représenté par Me DEPLAIX avocat pour Me Marianne MALBEC de la SELARL CLEMENT MALBEC CONQUET, avocat au barreau de NARBONNE

INTIMEES :

SELARL MJ SYNERGIE

[Adresse 1]

[Localité 6]

Représentée par Me Gilles ARGELLIES de la SCP GILLES ARGELLIES, EMILY APOLLIS - AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER

Représentée par Me Bastien MALLET de l'AARPI JAKUBOWICZ ET ASSOCIÉS, avocat au barreau de LYON

SELARL ALLIANCE MJ

[Adresse 3]

[Localité 6]

Représentée par Me Gilles ARGELLIES de la SCP GILLES ARGELLIES, EMILY APOLLIS - AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER

Représentée par Me Bastien MALLET de l'AARPI JAKUBOWICZ ET ASSOCIÉS, avocat au barreau de LYON

Association UNEDIC-CGEA-AGS

[Adresse 4]

[Localité 7]

Représentée par Me PORTE avocat pour Me Michel PIERCHON, avocat au barreau de MONTPELLIER

Ordonnance de clôture du 20 Janvier 2023

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 13 FEVRIER 2023,en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Jacques FOURNIE, Conseiller, et devant Mme Véronique DUCHARNE Conseillère

Ce(s) magistrat(s) a (ont) rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Véronique DUCHARNE, Conseillère, faisant fonction de Président en l'absence du Président empêché

Monsieur Jacques FOURNIE, Conseiller,

Mme Magali VENET, Conseillère,

Greffier lors des débats : M. Philippe CLUZEL

ARRET :

- contradictoire;

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par Mme Véronique DUCHARNE, Conseillère, et par M.Philippe CLUZEL greffier

EXPOSE DU LITIGE

M. [N] [O] a été engagé par contrats à durée déterminée à compter du 4 juillet 2011 puis par contrat à durée indéterminée du 8 mai 2012, par la SAS Toupargel en qualité de télévendeur.

Au dernier état de la relation contractuelle, M. [O] percevait une rémunération mensuelle brute de base fixée à 1453,50€ à laquelle pouvaient s'ajouter des primes variables.

Par courrier du 31 mars 2017, M. [O] a été convoqué à un entretien préalable à un licenciement.

Par courrier du 9 mai 2017 la société a notifié à M. [O] son licenciement pour cause réelle et sérieuse.

Le 29 juin 2018, M. [O] a saisi le conseil de prud'hommes de Narbonne en contestation de son licenciement.

Par jugement du 1er février 2019, une procédure de redressement judiciaire a été ouverte à l'égard de la société Toupargel.

Par jugement du 23 décembre 2019, le redressement judiciaire a été converti en liquidation judiciaire par le tribunal de commerce de Lyon.

La SELARL Alliance MJ, représentée par Maître Marie Dubois , et la SELARL MJ Synergie, représentée par Maître Bruno Walczak, ont été désignés liquidateurs judiciaires.

L'AGS a été appelée en la cause.

Par jugement du 28 septembre 2020, le conseil de prud'hommes de Narbonne a:

- confirmé le licenciement pour cause réelle et sérieuse de M. [N] [O]

- débouté M. [N] [O] de ses demandes

- condamné M. [N] [O] à payer à la SAS Toupargel la somme de 100€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile .

Par déclaration en date du 28 octobre 2020 M. [N] [O] a relevé appel de l'ensemble des dispositions de la décision.

Vu les dernières conclusions de M. [N] [O] en date du 20 janvier 2021 auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé de ses moyens et prétentions.

Vu les dernières conclusions de Maître Bruno Walczak et de Maître Marie Dubois en leur qualité de liquidateurs judiciaires de la société Toupargel en date du 13 avril 2021auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé de leurs moyens et prétentions.

Vu les dernières conclusions de l'Unedic Délégation AGS CGEA de Châlon sur Saône en date du 14 avril 2021auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé de ses moyens et prétentions.

L'ordonnance de clôture est en date du 20 janvier 2023.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la rupture du contrat de travail :

En application des dispositions de l'article L.1232-1 du code du travail, tout licenciement pour motif personnel doit être motivé par une cause réelle et sérieuse.

Concernant les motifs du licenciement, la lettre de licenciement adressée le 09 mai 2017 par la société Toupargel à M. [N] [O] motivait la rupture du contrat de travail par les faits suivants:

' Malgré un plan d'accompagnement personnalisé qui a eu lieu courant 2016 et des actions régulières en soutien, nous n'avons constaté aucune amélioration dans l'application de la méthode de vente qui vous a été dispensée, en témoignent notamment votre comportement, vos propos au téléphone avec les clients non conformes à notre politique commerciale : ainsi, quelques exemples de propos que vous tenez aux clients qui nous ont été révélés notamment la journée du 23 février 2017 alors que vous avez été informé des enregistrements de vos conversations :

'Madame, merci de me répondre, je suis en train de travailler pour votre retraite'

Je vous ai appelée hier...Vous avez été expéditive ...on parle en même temps, ça fait un dialogue de sourd'

Alors que vous souhaitiez parler à Madame, c'est le client qui répond, il vous demande 'c'est pour quoi' 'Vous lui répondez 'on vous rappellera ultérieurement, on vous sera plus utile plus tard'.

Un autre exemple : alors que la cliente dit qu 'elle ne prend rien. Vous lui rétorquez 'ça c'est bien passé, tout va continuer ainsi, on vous rappelle le 22 mars prochain »

Ou bien, à une autre cliente, nous insistez pour vendre du papier toilette, ' on en a tous besoin, tout le monde a besoin de consommer, ne serait-ce que du papier toilette ».

Vos propos traduisent une certaine condescendance, votre discours est empreint de moquerie, vous interrompez souvent le client.

Votre supérieur a déjà souligné à plusieurs reprises lors de double écoute les points que vous deviez améliorer. À ce jour manifestement vous ne mettez pas en application les conseils qui vous sont promulgués.

Ainsi, à titre d'exemples, vous ne procédez pas à la phase de questionnement du client alors qu'il s'agit d'une étape fondamentale pour découvrir ses goûts et ainsi identifier les produits qui lui correspondent. Vous devez laisser parler le client et faire preuve d'empathie et de dynamisme dans la discussion.

De surcroît, vous n'appliquez pas le script du discours de sortie. Pourtant, chaque étape est essentielle pour la fluidité du discours et participe à l'information client.

Nous vous rappelons que vous représentez la société Toupargel et comme tous les télévendeurs vous devez aborder le même discours pour dégager une image homogène et identifiable.

Nous avons reçu des mails de réclamation des clients qui se plaignent notamment de votre comportement à leur égard au téléphone. Ainsi à titre d'exemples:

- Madame [M] a adressé un néocase le 9 février 2017: cette cliente avait demandé la suppression de sa fiche client: le dernier conseiller qu'elle a eu 'n'a pas été agréable du tout'. Elle n'a pas commandé depuis-le 7 mars puis le 8 mars dernier vous avait contacté Madame [Z] pour une prise de commande. Le 21 mars suivant, nous avons été alertés de votre comportement à l'égard de cette cliente qui était fortement mécontente: celle-ci se plaint de votre insistance, vous lui avez dit que 'si elle voulait gagner des sous, elle devait profiter de vos offres'.

-Le 24 mars 2017, Madame [D] s'est plainte auprès de notre service télévente du comportement que vous avez adopté au téléphone avec elle: 'elle dit que vous étiez impoli, méprisant et narquois'. Nous avons dû nous excuser pour qu'elle veuille bien rester cliente, mais elle ne veut plus avoir à faire à lors d'une prochaine vente.

Le 5 avril 2017, une autre cliente, Mme [V] a manifesté son mécontentement auprès de notre société, disant qu'elle a été mal reçue par un téléconseiller en mars, vous avez été insistant la traitant presque de menteuse quand elle vous a dit qu'elle a regardé le catalogue mais n'en avait pas besoin.

Par ailleurs, certains de vos indicateurs ne sont pas conformes à nos légitimes attentes, ainsi, à titre d'exemples, vos temps de pause: en moyenne de novembre 2016 à mars 2010 17 , ils ont été de 10,4 %. Ou encore, vos temps de post appel restent élevés : ainsi, en moyenne, de novembre 2017 à mars 2017, ils ont été de 16,3 %.

Votre taux de concrétisation est également anormal: à titre d'exemples, il est de 26 % au mois de janvier de 17, 33 % au mois de février 2017, et 33 % au mois de mars 2017.

Quant à votre taux de transformation, il n'est pas non conforme à nos légitimes attentes: à titre d'exemple, il est de 6 % mois de janvier 2017, 10 % mois de février 2017, et 10 % au mois de mars 2017.

Vos résultats commerciaux sont impactés par votre comportement: ainsi, notamment, au mois de février 2017, il est de 83 % et il chute à 75 % au mois de mars 2017.

Votre hiérarchie vous avait pourtant régulièrement alerté lors de vos débriefs afin de vous signaler votre comportement non conforme à nos méthodes de vente. Ainsi ,à titre d'exemple, le 24 mai 2016, le commentaire était le suivant : 'tu es trop freestyle, la vente est faite de règles et d'usages.'

Votre comportement porte directement atteinte au bon fonctionnement et à l'image de marque de l'enseigne et du groupe Toupargel.

Les faits énoncés ci-dessus, contraires aux valeurs de notre société, sont constitutifs de manquements à vos obligations contractuelles. Dans ces conditions, nous sommes conduits à vous notifier par la présente votre licenciement.'

Il est ainsi fait grief à M. [O], de tenir des propos inappropriés aux clients, emprunts de condescendance et de moquerie, pour lesquels la société a été destinataire de plaintes.

Il lui est également reproché de ne pas appliquer les méthodes de travail requises et de ne pas mettre en oeuvre les procédures en vigueur dans l'entreprise.

L'employeur relève en outre un taux de concrétisation et résultats commerciaux anormalement bas et des temps de pause très élevés.

Concernant le comportement inadapté à l'égard de la clientèle, il ressort de la fiche client de M. Et Mme [M] et du relevé des appels passés par les salariés de la société Toupargel, que le 9 février 2017, suite à un appel passé par M [O] à Mme [M], M. [Y] [W], responsable se situant a [Localité 8], a recueilli la plainte de Mme [M] en ces termes: 'Mme ne souhaite plus être cliente car elle ne supporte pas notre façon de faire et le dernier conseiller qu'elle a eu n'a pas été agréable du tout . Elle n'est pas contente et ne veut plus rien commander du tout'.

Concernant des plaintes des clients des 21 mars, 24 mars et 5 avril visés dans la lettre de licenciement, et évoqués par l'employeur lors de l'entretien préalable avec le salarié, l'entreprise produit les preuves des dates et heures d'appels qui confirment bien que les plaintes des clients concernaient M. [O] (fiches clients, réclamations, listing des salariés intervenant les jours et heures des faits reprochés à M. [O]).

Par ailleurs, il est justifié que M. [O], qui ne parvenait pas à atteindre ses objectifs mensuels à la fin du premier trimestre 2016, avait bénéficié d'un accompagnement de son employeur dans son exercice professionnel afin d'identifier et de corriger ses lacunes. Les comptes rendus réalisés à l'issue de 'double écoute' mise en place pour analyser ses échanges avec la clientèle avaient pointé l'absence de structuration de son discours ainsi que le ton et les propos inappropriés du salarié.

Il ressort du bilan d'accompagnement effectué le 25 juillet 2016 que malgré le rappel des mêmes consignes sur la structure de l'appel de vente tant sur le fond que sur la forme pendant une durée de deux mois, M. [O] n'appliquait aucune des méthodes commerciales existantes au sein de la société Toupargel.

De plus, l'analyse des tableaux relatifs au taux de transformation, au taux de concrétisation ainsi qu'au taux d'atteinte des objectifs au sein de la société , laisse apparaître que les résultats de M. [O], sur la période de novembre 2016 à mars 2017, étaient très inférieurs à ceux des autres téléprospecteurs de son agence.

Il apparaît au regard des éléments précédemment développés que, malgré l'accompagnement dont il a bénéficié pour permettre une amélioration de son travail, M. [O] avait continué d'adopter à l'égard de la clientèle un comportement inadapté de nature à entraîner le mécontentement de ses interlocuteurs, voire de mettre fin de la relation commerciale, ce qui a également eu pour conséquence une baisse de ses résultats professionnels.

Ces faits, matériellement établis et personnellement imputables au salarié, sont constitutifs d'une cause réelle et sérieuse de nature à justifier son licenciement.

La décision du premier juge sera confirmée en toutes ses dispositions.

Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens:

Il convient de condamner M. [N] [O] à verser à la SAS Toupargel prise en la personne de son liquidateur judiciaire la SELARL Alliance MJ et la SELARL MJ Synergie la somme de 1000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'à verser à l'UNEDIC délégation AGS CGEA de Châlon sur Saône la somme de 1000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et de dire que les dépens seront décomptés en frais de liquidation judiciaire.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Par décision contradictoire et en dernier ressort,

Confirme le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Narbonne le 28 septembre 2020 en toutes ses dispositions

Condamne M. [N] [O] à verser à la SAS Toupargel prise en la personne de son liquidateur judiciaire la SELARL Alliance MJ et la SELARL MJ Synergie la somme de 1000€ en application de l'article 700 du code de procédure civile

Condamne M. [N] [O] à verser à l'UNEDIC délégation AGS CGEA de châlon sur Saône la somme de 1000€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

Dit que les dépens seront décomptés en frais de liquidation judiciaire.

Le Greffier P/Le Président empêché


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 2e chambre sociale
Numéro d'arrêt : 20/04700
Date de la décision : 12/04/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-04-12;20.04700 ?
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