Grosse + copie
délivrées le
à
COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
3e chambre civile
ARRET DU 16 MARS 2023
Numéro d'inscription au répertoire général :
N° RG 18/03057 - N° Portalis DBVK-V-B7C-NWLD
dont a été joint le N°RG 18/03330
Décision déférée à la Cour :
Jugement du 28 juin 2016
TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE MONTPELLIER
N° RG 13/07025
APPELANT et intimé
Monsieur [R] [J]
né le 19 Décembre 1934 à [Localité 5]
de nationalité Française
[Adresse 3]
[Adresse 3] ILE MAURICE
Représenté par Me Cyrille CAMILLERAPP, avocat au barreau de MONTPELLIER, substitué à l'audience par Me Sophie LOZE de la SCP SUR MAUVENU ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS
Appelant dans le n°18/03057 (fond)
Intimé dans le n°18/03330 (fond)
INTIMES et appelants
Madame [M] [H]
née le 08 Juillet 1992 à [Localité 2]
de nationalité Française
Chez Madame [N] [T]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
[Localité 2]
et
Madame [S] [I] veuve [H]
née le 06 Mars 1967 à [Localité 9]
de nationalité Française
[Adresse 11]
[Localité 10]
97000 ILE MAURICE
et
Monsieur [A] [D] [L] [H]
né le 16 Mai 2000 à [Localité 2]
de nationalité Française
[Adresse 11]
[Localité 10]
97000 ILE MAURICE
Représentés par Me Marie-Camille PEPRATX NEGRE de la SCP ERIC NEGRE, MARIE CAMILLE PEPRATX NEGRE, avocat au barreau de MONTPELLIER, substituée à l'audience par Me Eric NEGRE de la SCP ERIC NEGRE, MARIE CAMILLE PEPRATX NEGRE, avocat au barreau de MONTPELLIER,
et assistés à l'instance par Me Eric NAVARRO, avocat au barreau de MONTPELLIER
Appelants dans n°18/03330 (fond)
Intimés dans le n°18/03057 (fond)
Ordonnance de clôture du 21 décembre 2022
COMPOSITION DE LA COUR :
En application de l'article 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 11 janvier 2023, en audience publique, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par l'article 804 du même code, devant la cour composée de :
M. Gilles SAINATI, président de chambre
M. Thierry CARLIER, conseiller
M. Fabrice DURAND, conseiller
qui en ont délibéré.
En présence de Mme Stéphanie JEAN-PHILIPPE, avocate stagiaire (PPI)
Greffier lors des débats : Mme Camille MOLINA
ARRET :
- contradictoire ;
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;
- signé par M. Gilles SAINATI, président de chambre, et par Mme Camille MOLINA, Greffière.
*
* *
EXPOSE DU LITIGE
Suivant acte du 16 octobre 2009, M. [R] [J], acquéreur, a conclu avec M. [L] [H], vendeur, une promesse synallagmatique de vente pour l'achat d'une propriété désignée comme suit : « propriété située au lot n° 23 à [Localité 10] et Golf Resort, [Localité 4], d'une surface de 3184m2 et avec un bâtiment d'origine type D (541m2) qui a subi des améliorations et des agrandissements variés », dans le lotissement situé dans le [Adresse 8], à l'Île Maurice, pour le prix 1 700 000 euros.
La totalité de la somme correspondant au prix de vente et des droits d'enregistrement a été versée sur le compte client de Me [K] [B] [P], notaire à [Localité 7], au jour prévu initialement pour la signature de l'acte authentique de vente soit le 6 novembre 2009.
M. [L] [H] est décédé le 29 mars 2011 sans que la vente de l'immeuble ne soit finalisée par la signature de l'acte authentique devant notaire.
Par mail en date du 1er décembre 2011, Me [W] [Y], notaire associé des héritiers de M. [L] [H], a indiqué à M. [J] que ses clients avaient l'intention de régulariser l'acte de vente et de l'indemniser de son préjudice d'absence de mise à disposition de l'immeuble à la date convenue à hauteur de 170 000 euros.
Suite à l'absence de réitération de l'accord de volonté, par courrier recommandé avec accusé de réception en date du 23 mai 2012, M. [R] [J] mettait en demeure Mme [S] [I] veuve [H] de procéder aux formalités nécessaires à la signature de l'acte de vente définitif.
Souhaitant obtenir la régularisation de la vente, M. [R] [J] a assigné Mme [M] [H], Mme [S] [I] veuve [H] et M. [A] [H], héritiers de M. [L] [H], devant le tribunal de grande instance de Montpellier.
Par jugement contradictoire du 28 juin 2016, le tribunal a :
- rejeté la demande des consorts [H] tendant à voir constater la caducité de la promesse synallagmatique de vente conclue le 16 octobre 2009 entre M. [R] [J] et M. [L] [H] ;
- dit que la vente intervenue le 16 octobre 2009 entre M. [R] [J] et M. [L] [H] et portant sur l'immeuble sis à Maurice désigné comme suit : « propriété située au lot numéro 23, [Localité 10] et Golf Resort, [Localité 4], d'une surface de 3184 m2 et avec un bâtiment d'origine type D (541 m2) qui a subi des améliorations et des agrandissements variés '', pour le prix de 1 700 000 euros, est parfaite ;
- dit que Mme [S] [I] veuve [H], Mme [M] [H] et M. [A] [H], représenté par son représentant légal, sont substitués à feu [L] [H], leur auteur, en qualité de parties à la promesse synallagmatique de vente du 16 octobre 2009 ;
- dit que le jugement à intervenir vaudra acte authentique de vente entre M. [R] [J] et Madame[S] [I] veuve [H], Mme [M] [H] et M. [A] [H], représenté par son représentant légal, venant aux droits de M. [L] [H], dès qu'il sera devenu définitif et fera l'objet, par M. [R] [J], d'une publication à la conservation des hypothèques ;
- dit que le jugement valant acte authentique de vente sera retranscrit dans les formes légales en usage à Maurice par Me [P], notaire à Maurice chargé de la vente, détenteur du prix de vente ;
- dit que le prix de vente de 1 700 000 euros détenu par Me [K] [B] [P], notaire à l'Île Maurice, sera payé dans les conditions prévues à la promesse de vente du 16 octobre 2009 entre les mains de Me [O] [X], notaire à [Localité 7] (île Maurice), [Adresse 6], notaire en charge de la succession de M. [L] [H] à Maurice, déduction faite des dommages intérêts fixés par le présent jugement et après que le bien ait été purgé de toutes sûretés, hypothèques et autres nantissements ;
- condamné solidairement Mme [S] [I] veuve [H], Mme [M] [H] et M. [A] [H], représenté par son représentant légal, au paiement de la somme de 170 000 euros à titre de dommages et intérêts au profit de M. [R] [J] ;
- rejeté pour le surplus ;
- débouté Mme [S] [I] veuve [H], Mme [M] [H] et M. [A] [H], représenté par son représentant légal, de leurs demandes ;
- ordonné l'exécution provisoire ;
- condamné solidairement Mme [S] [I] veuve [H], Mme [M] [H] et M. [A] [H], représenté par son représentant légal, à payer à M. [R] [J] la somme de 8 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamné solidairement Mme [S] [I] veuve [H], Mme [M] [H] et M. [A] [H], représenté par son représentant légal, aux entiers dépens.
Le 13 juin 2018, M. [R] [J] a interjeté appel de ce jugement à l'encontre de Mme [M] [H], Mme [S] [I] veuve [H] et M. [A] [H], enrôlé sous le N°RG 18/03057.
Le 27 juin 2018, Mme [M] [H], Mme [S] [I] veuve [H] et M. [A] [H] ont interjeté appel de ce même jugement à l'encontre de M. [R] [J], enrôlé sous le N°RG 18/03330.
Par ordonnance du 15 février 2019, M. [R] [J] a obtenu du juge de la mise en état la désignation d'un expert, lequel a déposé son rapport le 12 juillet 2019.
Par ordonnance du 28 mai 2019, le conseiller de la mise en état a prononcé la jonction des deux procédures.
Vu les dernières conclusions de M. [R] [J] remises au greffe le 7 octobre 2022 ;
Vu les dernières conclusions de Mme [M] [H], Mme [S] [I] veuve [H] et M. [A] [H] remises au greffe le 26 avril 2019 ;
La clôture de la procédure a été prononcée le 21 décembre 2022.
MOTIFS
Sur la compétence territoriale,
L'article 122 du code de procédure civile dispose : « Constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel ['] la chose jugée ».
Par ordonnance du 16 octobre 2015 le juge de la mise en état a statué sur la compétence territoriale en disant que le tribunal de grande instance de Montpellier est compétent pour statuer sur la demande de [R] [J].
Par arrêt rendu le 24 septembre 2020 la cour d'appel de Montpellier a statué et confirmé l'ordonnance du 16 octobre 2015 en estimant que : « Etant rappelé que les actions mixtes emportent tout à la fois contestation sur un droit personnel et sur un droit réel, de telle sorte que la décision qu'elles ont pour objet de provoquer en ce qui concerne l'existence du droit personnel aura pour effet virtuel de résoudre la question de l'existence du droit réel, il est de jurisprudence constante que la demande d'un acquéreur tendant à la réalisation d'un contrat de vente immobilière ou à l'exécution d'une promesse du même type relève de la matière mixte. L'exception d'incompétence territoriale sera donc rejetée et l'ordonnance déférée sera confirmée. "
Mais la cour d'appel de Montpellier a souligné dans cet arrêt qu'il " résulte que le juge de la mise en état a une compétence exclusive en matière d'exceptions de procédure et que les décisions qu'il rend dans ce domaine, ont au principal l'autorité de la chose jugée qu'elles mettent fin ou non à la procédure. La chambre de la cour d'appel de Montpellier saisie du fond du litige n'a donc pas compétence pour statuer sur l'exception de procédure invoquée par les consorts [H] ".
Par cet arrêt du 24 septembre 2020, la cour d'appel de Montpellier a confirmé l'ordonnance en toutes ses dispositions, reconnaissant donc la compétence territoriale des juridictions montpelliéraines.
En raison de l'autorité de chose jugée qui s'attache à l'arrêt de la cour d'appel de Montpellier du 24 septembre 2020, la demande des consorts [H] tendant à ce que la présente juridiction se déclare incompétente au profit de la juridiction mauricienne sera déclarée irrecevable.
Que la demande des consorts [H] est donc rejetée.
Sur la caducité de la promesse de vente,
L'article 1583 du code civil dispose que la vente est parfaite entre les parties, et la propriété est acquise de droit à l'acheteur à l'égard du vendeur, dès qu'on est convenu de la chose et du prix, quoique la chose n'ait pas encore été livrée ou le prix payé.
L'article 1589 du code civil complète le régime juridique de la vente et prévoit que « la promesse de vente vaut vente, lorsqu'il y a consentement réciproque des deux parties sur la chose et le prix.»
Il est produit aux débats une promesse de vente intitulée « PROMISE OF SALE » signée le 16 octobre 2009 entre M. [L] [H] et M. [R] [J], concernant un bien à l'île Maurice Lot 23, [Localité 10] & Golf Resort, [Localité 4].
Cette acte est traduit par un interprète assermenté, constitue une promesse synallagmatique de vente et la propriété du bien situé lot 23 [Localité 10] & Golf Resort [Localité 4] d'une étendue de 3184 m2.
Dans l'acte il est mentionné que l'acte de vente authentique doit être signé au plus tard le 6 novembre 2009 mais n'indique pas qu'à défaut de respecter ce délai, la promesse synallagmatique serait caduque. Selon ce texte, le vendeur reste autorisé à rester dans le bien jusqu'au 30 novembre 2009 sans devoir régler aucune contrepartie de son occupation.
Selon la jurisprudence constante la Cour de cassation le dépassement de la date butoir de signature de l'acte notarié contractuellement prévue n'entraîne pas la caducité de la promesse de vente à moins qu'une telle sanction ne soit stipulée, ce qui n'est pas le cas.
Afin de consolider cette promesse de vente il est d'ailleurs prévu au paragraphe 12 : " il est interdit au vendeur comme à l'acheteur de se retirer du présent accord ".
Dans son mail du 8 décembre 2009, M. [L] [H] exposait quelques difficultés techniques et proposait de proroger le délai d'occupation jusqu'à fin janvier 2010 et insérer une clause dans l'acte concernant l'acquisition du bien en l'état. Cette prorogation du délai d'occupation démontre bien que M. [H] avait acquiescé à la vente qu'il estimait réalisée et parfaite.
Dans la chronologie des faits, il s'évince de ce que M. [R] [J] avait, pour sa part, versé le prix de vente et les frais d'enregistrement auprès du notaire le 6 novembre 2009, date convenue pour la réitération de l'acte authentique.
L'intention non équivoque de M. [L] [H] de vendre le bien et de M. [R] [J] de l'acquérir est donc avérée aux conditions convenues conditionnées. L'intégration dans le compromis succinct d'un certain nombre de précisions est sans incidence sur le principe de l'engagement contractuel, une partie ne pouvant se libérer unilatéralement de l'obligation à laquelle elle s'est engagée à l'égard de son cocontractant alors qu'il était versé le prix de vente.
Il sera relevé que cette promesse de vente n'était affecté d'aucune durée de validité et d'aucune condition suspensive puisque l'engagement de M. [H] de réaliser certains travaux était unilatéral et potestatif et n'a pas changé les termes soit l'accord sur la chose et le prix.
En conséquence, le jugement sera confirmé, la promesse synallagmatique de vente signée le 16 octobre 2009 entre M. [L] [H] et M. [R] [J] n'est pas atteinte de caducité et est valable.
Sur l'engagement des héritiers de M. [L] [H],
M. [L] [H] est décédé le 29 mars 2011 à Tamarin Île Maurice soit bien postérieurement à la promesse synallagmatique.
Me [Y], notaire saisi de la succession de [L] [H], a adressé à l'avocat de Monsieur [J] un premier mail, en date du 1er décembre 2011, par lequel elle indiquait que les héritiers de [L] [H] avaient la volonté de régulariser l'acte de vente et d'indemniser le préjudice subi par le demandeur par une somme de 170 000 euros.
Par la suite dans les mails successifs du 11 juin 2012 puis du 21 juin 2012, Me [Y] confirmait la volonté des héritiers de poursuivre la vente et de la régulariser à l'île Maurice et en être empêché pour des raisons matérielles.
Concernant le cas de Mme [M] [H], il s'avère que celle-ci ne soit tenue au paiement des dettes de la succession que jusqu'à concurrence de la valeur des biens qu'elle a recueillis, le juge de la mise en état a constaté de manière évidente que « la présente instance porte uniquement sur le fait de savoir si la promesse synallagmatique de vente passée entre [R] [J] et [L] [H] vaut vente et dans l'affirmative d'obtenir l'exécution forcée de l'acte et qu'en aucune manière il ne s'agit de régler la succession invoquée, les sommes versées entre les mains du notaire pourront continuer à y être consignée en attendant le partage ».
Que ce moyen de Mme [M] [H] sera donc rejeté, la vente étant parfaite en raison de l'accord des parties sur la chose et le prix à la date du 16 octobre 2009, dans le patrimoine du défunt ne figure plus la villa mais la somme de 1 700 000 euros correspondant au prix de vente.
Sur les préjudices,
Il est constant que M. [J] n'est pas entré en possession de la villa mais par contre s'est vu dépossédé de la somme de 1 700 000 euros et des frais de la vente, somme consignée chez le notaire chez qui doit être régularisé l'acte authentique.
Il est tout aussi évident que le comportement des ayant droits de [L] [H] qui, après avoir proposé une indemnisation de 170 000 euros puis se sont rétractés et n'ont pas voulu réitérer la vente, constitue une attitude fautive conduisant à une indemnisation d'un préjudice moral et matériel, mais l'absence de livraison de la maison dans des délais raisonnables et de son entretien constitue un préjudice certain.
Il sera examiné les prétentions de [J] développés déjà en première instance.
Sur la somme de 170 000 euros au titre du préjudice de jouissance
Les héritiers de [L] [H] par l'intermédiaire de Me [Y], notaire ont proposé une somme de 170 000 euros, reconnaissant la réalité du préjudice de M. [J] à hauteur de 10 % du prix soit 170 000 euros.
Le tribunal retient cette somme au titre du préjudice de jouissance,
Cet élément de négociation sera donc retenu avec intérêts au taux légal à compter du 1er décembre 2011.
Sur la somme complémentaire de 935 000 euros
Le calcul effectué par M. [J] repose sur une extrapolation de l'engagement pré-contractuel des défendeurs mais conduit à une somme qui ne repose sur aucun élément factuel, le prononcé de l'intérêt au taux légal est satisfactoire en ce domaine.
Sur les sommes de 663 300 euros et 303 209 euros au titre du préjudice de jouissance
M. [J] produit des documents mentionnant des annonces immobilières concernant des Villas à louer sur l'île Maurice pour des montants de loyers mensuels compris entre 150 000 et 250 000 roupies mauriciennes, soit selon son estimation 5 025,19 euros par mois.
En réalité M.[J] ne rapporte pas la preuve d'un projet locatif de ce type, le seul élément objectif étant l'indisponibilité de la somme correspondant au prix pendant les 11 années, M. [J] sera débouté à ce titre.
Sur la somme de 785 000 euros HT à titre de dommages-intérêts en réparation du coût des travaux nécessaires pour la remise en état de la Villa pour son état d'origine
L'obligation de délivrance conforme implique que la chose soit délivrée dans l'état dans lequel elle a été vendue, tel que cet état résulte de la volonté des parties.
M. [J] produit aux débats en pièce 24 une évaluation de la société Primepillard Valuation en date du 7 octobre 2016 à l'occasion de l'évaluation de la succession de [L] [H] qui évalue :
- la villa à 30 000 Rs soit 751 000 euros
- le terrain 25 000 Rs.
Au contradictoire des parties, M. [J] a fait réaliser une expertise confiée à M. [Z] qui constate une dégradation importante de la villa et propose un coût des travaux de réaménagement et de restauration pour 600 000 euros et coût de diagnostics pour 95 000 euros.
Il est ainsi non contestable que l'état de cette villa n'est actuellement aucunement conforme à l'état dans lequel elle a été vendue. L'ensemble des équipements techniques de la Villa est totalement détérioré et dans l'incapacité de fonctionner comme l'a révélé le rapport Ekium du 17 juillet 2019 produit par M. [J] dans le cadre de l'expertise judiciaire.
Cette situation révèle une absence totale d'entretien de la part des héritiers, ne respectant pas leur obligation de conservation de la chose en bon père de famille jusqu'à sa délivrance, obligation à laquelle ils sont tenus en tant que vendeurs.
Ce préjudice est certain et la négligence des héritiers de [L] [H] démontrée, et il sera retenu la somme évaluée par l'expert soit :
- 600 000 euros HT
- 95 000 euros HT
Total : 695 000 euros HT, cette somme sera actualisée suivant l'évolution de l'indice BT01 depuis la date de dépôt du rapport d'expertise jusqu'à la date du jugement à intervenir, et portera par la suite intérêt au taux légal jusqu'à parfait paiement.
Sur la somme de 316 500 euros HT sur le coût de remplacement du mobilier
La promesse de vente du 16 octobre 2009 ne comportait pas de description précise des éléments vendus et notamment du mobilier (absence de descriptif), M. [J] sera débouté à ce titre.
Sur la somme de 303 290 euros au titre du préjudice de jouissance lié à la durée des travaux de remise en état à réaliser sur la villa avant de pouvoir l'occuper
En l'absence d'éléments matériels précis dans un conteste géographique, social et politique éloigné, M. [J] estime qu'il faudra 15 mois puis 24 mois pour réhabiliter la villa sans toutefois en rapporter aucun élément matériel et renouvelle son dire N°4 réalisé lors de l'expertise judiciaire où il est évalué une perte de jouissance à 189 312 euros. Cette demande non fondée sera rejetée.
Sur le préjudice moral de 150 000 euros
Le préjudice moral de M. [J] est évident et caractérisé, celui-ci attend depuis plus de 14 ans de pouvoir disposer de la villa qu'il a acquise et pour lequel il immobilisé une somme de 1 700 000 euros.
Ce préjudice est d'autant plus important alors que M. [J] est aujourd'hui âgé de 88 ans et qu'il va se retrouver en possession d'une villa qui totalement menace de ruine et nécessitera de nombreux travaux de remise en état, et qui avait fait l'objet d'une mise sous curatelle placée sous l'administration de la Curatelle des biens vacants de l'Iîe Maurice en 2011.
Ce préjudice moral sera évalué à la somme de 50 000 euros.
Sur la compensation,
Il y aura lieu en l'espèce ordonner la compensation entre le montant du prix de vente et l'ensemble des dommages-intérêts mis à la charge des consorts [H] les conditions de celles-ci étant réunies chaque créance étant pareillement liquides et exigibles.
Sur l'astreinte,
Afin d'éviter de nouveaux délais il convient de prononcer une astreinte et de condamner les consorts [H] à signer l'acte authentique de vente sous astreinte de 1 000 euros par jour à compter du jour fixé par les notaires pour la signature de l'acte authentique, cette signature pouvant intervenir par l'intermédiaire de procurations et visioconférences.
Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile,
Les consorts [H], succombants, seront condamnés à payer la somme de 15 000 euros à M. [R] [J] ainsi que la somme de 5 941,57 euros selon l'ordonnance de taxe du tribunal judiciaire de Montpellier du 1er octobre 2020 ainsi qu'aux entiers dépens.
PAR CES MOTIFS,
La cour,
Déclare irrecevable l'exception d'incompétence soulevée par les consorts [H] ;
Confirme le jugement rendu le 28 juin 2016 par le tribunal de grande instance de Montpellier en ce qu'il a :
- rejeté la demande des consorts [H] tendant à voir constater la caducité de la promesse synallagmatique de vente ;
- dit la vente parfaite intervenue le 16 octobre 2009 entre M. [R] [J] et M. [L] [H] et portant sur l'immeuble sis à Maurice désigné comme suit : « propriété située au lot numéro 23, [Localité 10] et Golf Resort, [Localité 4], d'une surface de 3184 m 2 et avec un bâtiment d'origine type D (541 m 2 ) qui a subi des améliorations et des agrandissements variés », pour le prix de 1 700 000 euros ;
- dit que Mme [S] [I] veuve [H], Mme [M]
[H] et M. [A] [H], sont substitués à feu [L] [H], leur auteur, en qualité de parties à la promesse synallagmatique de vente du 16 octobre 2009 ;
- dit que l'arrêt vaudra acte authentique de vente entre M. [R] [J] et Mme [S] [I] veuve [H], Mme [M] [H] et M. [A] [H], venant aux droits de [L] [H], dès qu'il sera devenu définitif et fera l'objet, par M. [R] [J], d'une publication à la conservation des hypothèques ;
- dit que l'arrêt valant acte authentique de vente sera retranscrit dans les formes légales en usage à Maurice par Me [P], notaire à Maurice chargé de la vente, détenteur du prix de vente ;
- dit que le prix de vente de 1 700 000 euros détenu par Me [K] [B] [P], notaire à l'île Maurice, sera payé dans les conditions prévues à la promesse de vente du 16 octobre 2009 entre les mains de Me [O] [X], notaire à [Localité 7] (île Maurice), [Adresse 6], notaire en charge de la succession de M. [L]
[H] à Maurice, déduction faite des dommages intérêts fixés par le présent jugement et après que le bien ait été purgé de toutes sûretés, hypothèques et autres nantissements ;
- condamné Mme [S] [I] veuve [H], Mme [M] [H] et M. [A] [H], venant aux droits de M. [L] [H] à payer à M. [R] [J] la somme de 170 000 euros à titre du préjudice de jouissance ;
Infirme le jugement et y ajoutant,
Condamne Mme [S] [I] veuve [H], Mme [M] [H] et M. [A] [H], venant aux droits de [L] [H] à payer à M. [R] [J] les sommes suivantes :
- 695 000 euros HT, cette somme sera actualisée suivant l'évolution de l'indice BT01 depuis la date de dépôt du rapport d'expertise jusqu'à la date du jugement à intervenir, et portera par la suite intérêt au taux légal jusqu'à parfait paiement et ce au titre de la remise en état de la villa,
- 50 000 euros au titre du préjudice moral,
- 5 941,57 euros au titre des frais d'expertise judiciaire ;
Déboute pour le surplus M. [R] [J] de ses demandes au titre des préjudices ;
Ordonne la compensation des sommes dues de part et d'autre ;
Condamne Mme [S] [I] veuve [H], Mme [M] [H] et M. [A] [H] à signer l'acte authentique de vente sous astreinte de 1 000 euros par jour à compter du jour fixé par les notaires pour la signature de l'acte authentique ;
Condamne solidairement Mme [S] [I] veuve [H], Madame [M] [H] et Monsieur [A] [H], à payer à M. [R] [J] la somme de 15 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.
La greffière, Le président,