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14/03/2023 | FRANCE | N°21/00318

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 5e chambre civile, 14 mars 2023, 21/00318


Grosse + copie

délivrées le

à











COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



5e chambre civile



ARRET DU 14 MARS 2023



Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 21/00318 - N° Portalis DBVK-V-B7F-O2VN



Décision déférée à la Cour :

Jugement du 01 DECEMBRE 2020

JUGE DES CONTENTIEUX DE LA PROTECTION DE MONTPELLIER

N° RG 1119002445



APPELANTES :



Madame [P] [M]

assistée par son curateur l'APSH34

[Adress

e 5],

[Adresse 4]

[Localité 2]

Représentée par Me Florian KAUFFMANN, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et plaidant

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2021/002746 du 10/03/2021 acc...

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

5e chambre civile

ARRET DU 14 MARS 2023

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 21/00318 - N° Portalis DBVK-V-B7F-O2VN

Décision déférée à la Cour :

Jugement du 01 DECEMBRE 2020

JUGE DES CONTENTIEUX DE LA PROTECTION DE MONTPELLIER

N° RG 1119002445

APPELANTES :

Madame [P] [M]

assistée par son curateur l'APSH34

[Adresse 5],

[Adresse 4]

[Localité 2]

Représentée par Me Florian KAUFFMANN, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et plaidant

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2021/002746 du 10/03/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de MONTPELLIER)

ASSOCIATION POUR PERSONNES EN SITUATION DE HANDICA P (APSH34) ès-qualités de curateur de Madame [M]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée par Me Florian KAUFFMANN, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et plaidant

INTIMEE :

E.P.I.C. L'OFFICE PUBLIC DE L'HABITAT DE [Localité 2] MEDITE RRANEE METROPOLE (ACM - HABITAT) L'OFFICE PUBLIC DE L'HABITAT DE [Localité 2] MEDITERRANEE METROPOLE (ACM - HABITAT), Etablissement Public Industriel et Commercial dont le siège social est [Adresse 3], prise en la personne de son Directeur général domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représentée par Me Véronique NOY de la SCP VPNG, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant

assistée de Me Hélène ARENDT, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat plaidant

Ordonnance de clôture du 16 Janvier 2023

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 06 FEVRIER 2023,en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Emmanuel GARCIA, Conseiller, chargé du rapport.

Ce(s) magistrat(s) a (ont) rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Philippe GAILLARD, Président de chambre

Madame Nathalie AZOUARD, Conseiller

Monsieur Emmanuel GARCIA, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Estelle DOUBEY

ARRET :

- Contradictoire ;

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par Monsieur Philippe GAILLARD, Président de chambre, et par Madame Estelle DOUBEY, greffier .

*

* *

EXPOSE DU LITIGE

Le 28 avril 2017, l'office public de l'habitat de [Localité 2] métropole (ACM Habitat) a donné à bail à [P] [M] un local d'habitation situé à [Localité 2].

Le 25 octobre 2019, estimant que sa locataire commettait de nombreux troubles du voisinage, ACM Habitat l'a assignée ainsi que l'APSH 34, en sa qualité de curateur, aux fins notamment d'obtenir la résiliation du bail, ordonner l'expulsion de la locataire, fixer une indemnité mensuelle d'occupation et ce sous astreinte. Le bailleur a fait valoir plusieurs plaintes du voisinage et des manquements répétés à ses obligations locatives.

[P] [M] a contesté avoir commis des troubles du voisinage et a fait valoir l'absence de preuve rapportée par le bailleur de manquements graves et répétés. Les mails et mains courantes fournis par le bailleur sont anonymes. Elle a ajouté qu'aucune mise en demeure préalable ne lui avait été adressée personnellement avant son assignation. Subsidiairement, elle a sollicité des délais pour quitter les lieux en considération de son état de santé, de sa situation précaire et de sa bonne foi. Elle a contesté la demande d'astreinte qui ne respectait pas selon elle les dispositions de l'article L. 412-1 du code de procédures civiles d'exécution.

Le jugement rendu le 1er décembre 2020 par le tribunal judiciaire de Montpellier énonce dans son dispositif :

Prononce la résolution du bail conclu le 28 avril 2017 ;

Dit qu'à défaut pour [P] [M] d'avoir volontairement quitté deux mois après la signification d'un commandement d'avoir à libérer les lieux, il sera procédé à son expulsion selon la procédure habituelle ;

Fixe au montant du loyer et des charges qui auraient été exigibles si le bail n'avait pas été résilié, l'indemnité mensuelle d'occupation que [P] [M] devra payer à compter de la date de résiliation du bail jusqu'à l'entière libération des lieux et condamne [P] [M] à son paiement au profit de l'ACM Habitat ;

Déboute l'ACM Habitat de sa demande d'astreinte ;

Déboute [P] [M] de sa demande de délais supplémentaires pour quitter les lieux ;

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne [P] [M] aux entiers dépens ;

Ordonne l'exécution provisoire.

Le jugement expose qu'en matière de résiliation judiciaire d'un contrat, il n'existe pas d'exigence de mise en demeure préalable puisque la jurisprudence considère que l'assignation en résolution suffit à mettre le débiteur en demeure. Le courrier adressé au curateur par le bailleur le 5 septembre 2019 constitue plutôt une information du lancement d'une procédure, qu'une mise en demeure.

Le jugement constate que les échanges de courriels entre le bailleur et les locataires de la résidence mettent en exergue l'existence de troubles de voisinage causés par [P] [M] tenant notamment au bruit, à un manque d'hygiène ainsi qu'au fait qu'elle frappe aux porte la nuit, se balade nue dans la résidence, urine dans les parties communes et est agressive. Il est démontré que ces comportements perdurent. La pétition du 4 septembre 2019 signée par 8 voisins résume ces comportements et dénonce la situation. Deux mains courantes dénoncent des faits similaires. Le jugement relève qu'un mail du 26 août 2019 écrit par ACM Habitat à la mandataire judiciaire en charge de la locataire explicite que cette dernière avait déclaré oublier de prendre son traitement médical, ce qui engendrait de mauvais comportement de sa part.

Le jugement ne fait pas droit à la demande de délais formulée par [P] [M] puisque son comportement inadapté a fait l'objet de plusieurs signalements et à une réunion avec son bailleur. Elle est assistée d'une curatrice qui peut l'aider à se reloger. [P] [M] bénéficie également d'un délai relatif à la trêve hivernale.

Le jugement expose que la demande d'astreinte n'apparaît pas opportune au vu de la situation personnelle et financière de la locataire.

[P] [M] a relevé appel du jugement par déclaration au greffe du 18 janvier 2021.

Par ordonnance du 10 mars 2021, le Premier président de la cour d'appel de Montpellier a débouté [P] [M] de sa demande d'arrêt de l'exécution provisoire du jugement dont appel.

La clôture de la procédure a été prononcée par ordonnance du 16 janvier 2023.

Les dernières écritures pour [P] [M] ont été déposées le 8 mars 2021.

Les dernières écritures pour ACM Habitat ont été déposées le 31 mai 2021.

Le 26 janvier 2021, [P] [M] a sollicité l'arrêt de l'exécution provisoire du jugement.

Le dispositif des écritures pour [P] [M] énonce :

Infirmer le jugement entrepris ;

Débouter l'ACM de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

Subsidiairement, accorder les plus larges délais à [P] [M] pour quitter les lieux ;

Débouter l'ACM de sa demande d'astreinte ;

Statuer ce que de droit sur les dépens.

[P] [M] conteste les troubles qui lui sont imputés. Elle fait valoir que lors de la réunion avec son bailleur sur ce sujet, elle avait déjà fermement contesté les faits qui lui étaient reprochés. Selon elle, certains voisins ne souhaiteraient pas d'elle dans leur environnement. [P] [M] soutient que l'ACM Habitat ne démontre ni l'existence ni la persistance des troubles dont elle serait à l'origine. Les courriels et les déclarations de main courante versés aux débats sont anonymes.

[P] [M] ajoute qu'aucune mise en demeure ne lui a été délivrée alors qu'il s'agit d'un préalable indispensable avant d'engager une procédure en résiliation. Selon elle, le courrier que le bailleur prétend avoir envoyé le 5 septembre 2019 constitue, comme le considère le premier juge, plutôt une information solennelle qu'une mise en demeure. En outre, le courrier a été adressé à sa curatrice et non à elle personnellement. Il n'est justifié d'aucun trouble entre ce prétendu courrier et l'assignation.

[P] [M] souligne que les plaintes versées aux débats sont intervenues à compter de juin 2019 et il semble qu'aucun autre trouble ne soit allégué après septembre 2019. Quand bien même les faits qu'elle conteste seraient établis, ils seraient isolés.

[P] [M] soutient que la résiliation du bail aurait des conséquences catastrophiques sur son état de santé, déjà fragile et sur sa situation personnelle puisqu'elle est dans une situation précaire. Retrouver un logement social serait très compliqué et se reloger dans le parc privé serait difficile puisqu'elle est en fauteuil roulant.

Subsidiairement, elle sollicite des délais pour quitter les lieux en faisant valoir qu'elle est une personne particulièrement vulnérable du fait de son état de santé et de sa situation très modeste. Elle ajoute qu'elle est de bonne foi, preuve en est du complet paiement de ses loyers. Elle sollicite la confirmation du débouté de la demande d'astreinte du bailleur en faisant valoir que cette demande ne tenait pas compte des délais sollicités et serait contraire à l'article L 412-1 du code des procédure civiles d'exécution.

Le dispositif des écritures pour l'ACM Habitat énonce :

Confirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris le 1er décembre 2020 ;

Entendre prononcer la résiliation du bail conclu le 28 avril 2017 ;

Ordonne l'expulsion de [P] [M] ;

Assortir la décision à intervenir d'une astreinte de 50 euros par jour de retard, à compter de la signification de la décision ;

Condamner [P] [M] au paiement de la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens des deux instances.

L'ACM Habitat soutient que [P] [M] ne respecte pas son obligation de jouir paisiblement du logement. Il fait valoir un arrêt de la cour d'appel de Poitiers du 22 juin 2004 qui retient que le locataire a manqué à ses obligations et a causé des troubles anormaux du voisinage en laissant se propager de manière indiscutable des odeurs nauséabondes depuis son logement. Il est démontré par plusieurs courriels, anonymisés par crainte de représailles, que [P] [M] se promène régulièrement nue dans les parties communes, qu'elle jette des 'ufs sur les ascenseurs, que son logement dégage une odeur pestilentielle et qu'elle menace les autres locataires. Le bailleur verse aux débats également deux déclarations de main courantes relatant les faits précédemment mentionnés et indiquant que [P] [M] serait sortie de chez elle, nue avec un couteau de cuisine et apparemment du sang sur elle. Une pétition a été adressée au bailleur par plusieurs locataires, indiquant qu'ils vivaient dans la crainte qu'un drame ne survienne.

ACM Habitat fait valoir qu'il a envoyé la mise en demeure à l'organisme de curatelle car celui-ci est dans l'obligation de la communiquer à la personne protégée. Il est donc certain que [P] [M] en a été informée.

Il ajoute qu'il est tenu en tant que bailleur d'une obligation de garantir une jouissance paisible à ses locataires. Ainsi, si le bailleur n'est pas tenu de garantir les locataires contre les troubles commis par des tiers, il est établi par la jurisprudence que les locataires d'un même bailleur ne peuvent être considérés comme étant des tiers. Le fait que [P] [M] soit une majeure protégée ne la dispense pas du respect de ses obligations légales et contractuelles.

MOTIFS

1. Sur l'appel de [P] [M]

L'appel n'est pas général, ni l'effet dévolutif absolu, et tend non pas à une seconde instance mais à la critique argumentée en fait et en droit des motifs retenus par les premiers juges.

En l'espèce, la cour constate que le litige lui est soumis avec mes mêmes motifs et les mêmes pièces que ceux soumis au premier juge.

En l'état, la cour estime qu'il n'y a pas lieu à réformation, le premier juge juge ayant fit une exacte appréciation des pièces à lui soumises, notamment les nombreux courriels de résidents, qui sont identifiés, ainsi que deux mains courantes, qui établissent que [P] [M] a commis des manquements graves et répétés à son obligation de jouissance paisible des lieux, de sorte que le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a résilié le bail et ordonné son expulsion

Sur la demande de délais et pour les mêmes motifs que ceux du premier juge, de ce que les comportement inadaptés de [P] [M] ont été signalés à plusieurs reprises et depuis plusieurs mois avant la saisine du tribunal, de ce que même si elle fait l'objet d'une mesure de protection et est dans une situation financière délicate, elle bénéficie toutefois de l'assistance d'une curatrice qui l'aide dans ses démarches pour retrouver un logement adapté et qu'elle a pu bénéficier de la trêve hivernale, le jugement sera confirmé en ce qu'il a rejeté sa demande de délais.

En conséquence de ce qui précède, le jugement rendu le 1er décembre 2020 par le tribunal judiciaire de Montpellier sera confirmé en toutes ses dispositions.

2. Sur les dépens et les frais non remboursables

Le jugement sera également confirmé en ce qui concerne les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile.

[P] [M] sera condamnée aux dépens de l'appel.

Il ne sera pas fait application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire et mis à disposition au greffe ;

CONFIRME le jugement rendu le 1er décembre 2020 par le tribunal judiciaire de Montpellier, en toutes ses dispositions ;

DIT n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais non remboursables exposés en appel ;

CONDAMNE [P] [M] aux dépens de l'appel.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 5e chambre civile
Numéro d'arrêt : 21/00318
Date de la décision : 14/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-14;21.00318 ?
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