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08/03/2023 | FRANCE | N°20/04200

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 2e chambre sociale, 08 mars 2023, 20/04200


Grosse + copie

délivrées le

à















COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



2e chambre sociale



ARRET DU 08 MARS 2023





Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 20/04200 - N° Portalis DBVK-V-B7E-OWQS



ARRÊT n°



Décision déférée à la Cour : Jugement du 14 SEPTEMBRE 2020

CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE MONTPELLIER - N° RG F 17/01320







APPELANTE :



S.A.R.L. [O]

CUISINES

[Adresse 4]

[Adresse 4]



Représentée par Me Yann GARRIGUE, substitué par Me Fanny LAPORTE de la SELARL LEXAVOUE MONTPELLIER GARRIGUE, GARRIGUE, LAPORTE, avocats au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant

Assistée par Me Fr...

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

2e chambre sociale

ARRET DU 08 MARS 2023

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 20/04200 - N° Portalis DBVK-V-B7E-OWQS

ARRÊT n°

Décision déférée à la Cour : Jugement du 14 SEPTEMBRE 2020

CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE MONTPELLIER - N° RG F 17/01320

APPELANTE :

S.A.R.L. [O] CUISINES

[Adresse 4]

[Adresse 4]

Représentée par Me Yann GARRIGUE, substitué par Me Fanny LAPORTE de la SELARL LEXAVOUE MONTPELLIER GARRIGUE, GARRIGUE, LAPORTE, avocats au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant

Assistée par Me Françoise AURAN-VISTE de la SCP AURAN-VISTE & ASSOCIES, avocat au barreau de BEZIERS, avocat plaidant

INTIME :

Monsieur [R] [W]

né le 27 Novembre 1963 à [Localité 13] (57)

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représenté par Me Julie GIMENEZ, avocat au barreau de MONTPELLIER

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2020/014589 du 23/12/2020 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de MONTPELLIER)

Ordonnance de clôture du 19 Décembre 2022

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 09 JANVIER 2023,en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Florence FERRANET, Conseiller, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Jean-Pierre MASIA, Président

Madame Florence FERRANET, Conseiller

Madame Véronique DUCHARNE, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Marie-Lydia VIGINIER

ARRET :

- contradictoire ;

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par Madame Florence FERRANET, Conseiller, en remplacement du président empêché et par Madame Marie-Lydia VIGINIER, Greffier.

*

* *

EXPOSE DU LITIGE :

M. [W] a été embauché par la société [O] Cuisines le 28 avril 2010 en qualité de VRP exclusif selon contrat de travail à durée indéterminée moyennant une rémunération mensuelle brute fixe de 533,57 €, une commission calculée sur le montant hors taxes des ordres pris par lui-même et une indemnité forfaitaire mensuelle brute de déplacement de 120 €.

A compter du 12 juillet 2017, M. [W] est placé en arrêt de travail.

Le 27 octobre 2017, M. [W] adresse une lettre recommandée avec accusé de réception à son employeur pour solliciter réparation de divers manquements de sa part.

M. [W] a saisi le conseil de prud'hommes de Montpellier le 28 novembre 2017, sollicitant la résiliation judiciaire de son contrat de travail ainsi que le versement de diverses sommes à titre de dommages-intérêts et indemnités.

Le 27 avril 2018, par lettre recommandée avec accusé de réception, M. [W] prend acte de la rupture de son contrat de travail aux torts exclusifs de l'employeur.

Par jugement rendu le 14 septembre 2020, le conseil de prud'hommes de Montpellier a :

Dit que M. [W] devait bénéficier du statut de vendeur classification groupe 4 niveau 3 de la convention collective de négoce de l'ameublement ;

Dit que M. [W] a été victime de discrimination vis-à-vis des autres salariés de la société [O] Cuisines ;

Dit que M. [W] n'a pas été rempli de ses droits sur les indemnités complémentaires maladie et prévoyance ;

Dit que M. [W] a subi des sanctions pécuniaires concernant le paiement de ses commissions ;

Dit que la société [O] Cuisines n'a pas exécuté le contrat de travail de M. [W] loyalement ;

Prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail de M. [W] aux torts exclusifs de la société [O] Cuisines ;

Fixé le salaire mensuel moyen de référence à 1 969,38 € ;

Débouté M. [W] de ses demandes complémentaires ;

En conséquence,

Condamné la société [O] Cuisines à verser à M. [R] [W] les sommes suivantes :

1 558,45 € à titre de rappel de salaire sur le statut de vendeur, outre la somme de 155,84 € au titre des congés payés afférents ;

3 175,63 € au titre du rappel de salaire sur prime d'ancienneté, outre la somme de 317,56 € au titre des congés payés afférents ;

5 908,14 € au titre des dommages-intérêts pour le préjudice subi du fait de la discrimination ;

3 080,62 € au titre du rappel de salaire sur les indemnités complémentaires maladie et prévoyance, outre la somme de 308,06 € au titre des congés payés afférents ;

188,63 € à titre de rappel de salaire sur commission du dossier [D], outre la somme de 18,86 € au titre des congés payés afférents ;

1 585,95 € à titre de rappel de salaire sur autres commissions, outre la somme de 158,59 € au titre des congés payés afférents ;

5 908,14 € à titre de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail ;

15 755,04 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

3 938,76 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre la somme de 393,87 € au titre des congés payés afférents ;

6 302,01 € à titre d'indemnité de licenciement ;

Condamné la société [O] Cuisines à verser à M. [W] la somme de 1 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Condamné la société [O] Cuisines à la régularisation des bulletins de salaire, cotisations et documents de fin de contrat sous astreinte de 20 € par jour de retard à compter d'un délai de 15 jours suivant la décision, le conseil se réservant le droit de faire liquider l'astreinte ;

Ordonné l'exécution provisoire de la décision ;

Débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;

Condamné la société [O] Cuisines aux entiers dépens.

*******

La société [O] Cuisines a interjeté appel de ce jugement le 6 octobre 2020.

Dans ses dernières conclusions déposées par RPVA le 8 décembre 2022, elle demande à la cour de :

Juger que M. [W] relevait du statut de VRP ;

Juger que M. [W] n'a jamais fait l'objet de discrimination ;

Juger qu'elle a rempli M. [W] de ses droits en matière d'indemnité complémentaire maladie et prévoyance ;

Juger qu'elle a rempli M. [W] de ses droits en matière de commission et ne lui a infligé aucune sanction pécuniaire ;

Juger qu'elle a exécuté loyalement le contrat de travail de M. [W] ;

Juger que les griefs invoqués au titre de la prise d'acte de la rupture par M. [W] sont infondés ;

Juger que la prise d'acte de M. [W] produit tous les effets d'une démission ;

Débouter M. [W] de l'intégralité de ses demandes ;

Condamner reconventionnellement M. [W] à lui régler l'indemnité de préavis non exécuté, soit la somme de 4 861,18 €, outre la somme de 17 724,42 € au titre de l'exécution provisoire ;

Condamner M. [W] à lui payer la somme de 3 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Condamner M. [W] aux entiers dépens.

*******

Dans ses dernières conclusions déposées par RPVA le 23 novembre 2022, M. [W] demande à la cour de :

Sur la reconnaissance du statut de vendeur :

Juger qu'il ne pouvait se voir appliquer le statut de VRP et devait bénéficier du poste de vendeur classification groupe 4 niveau 3 de la convention collective de négoce en ameublement ;

Condamner la société [O] Cuisines à lui verser les sommes suivantes :

1 558,45 € à titre de rappel de salaire sur le statut de vendeur, outre la somme de 155,84 € au titre des congés payés afférents ;

3 175,63 € au titre du rappel de salaire sur prime d'ancienneté, outre la somme de 317,56 € au titre des congés payés afférents ;

13 281,73 € à titre de rappel d'heures supplémentaires, outre la somme de 1 328,17 € au titre des congés payés afférents ;

14 580 € à titre d'indemnité forfaitaire de travail dissimulé ;

Sur la discrimination ;

Juger qu'il a été victime de discrimination ;

Condamner la société [O] Cuisines à lui verser une somme équivalente à 3 mois de salaire à titre de dommages-intérêts pour le préjudice subi du fait de cette discrimination ;

Infirmer la décision du conseil de prud'hommes sur le quantum et, tenant compte des heures supplémentaires, juger que le montant doit être porté à 7 290 € ;

A titre subsidiaire, confirmer la décision prud'homale sur le quantum ;

Sur les indemnités complémentaires maladie et prévoyance :

Constater qu'il n'a jamais été rempli de ses droits ;

Condamner la société [O] Cuisines à lui verser un rappel de salaire sur les indemnités complémentaires de prévoyance ;

Infirmer la décision du conseil de prud'hommes sur le quantum et juger que le montant doit être porté à la somme de 6 986,55 € à titre de rappel de salaires sur indemnités complémentaires et de prévoyance, outre la somme de 698,65 € au titre des congés payés afférents ;

A titre subsidiaire, condamner la société [O] Cuisines à lui verser la somme de 3 666,20 € à titre de rappel de salaire sur indemnité complémentaire et de prévoyance, outre la somme de 366,62 € au titre des congés payés afférents ;

Sur les commissions :

Constater qu'il a subi des sanctions pécuniaires interdites et qu'il n'a jamais été rempli de ses droits au titre de ses autres commissions ;

Condamner la société [O] Cuisines à lui verser les sommes suivantes :

188,63 € à titre de rappel de salaire sur commission du dossier [D], outre la somme de 18,86 € au titre des congés payés afférents ;

1 585,95 € à titre de rappel de salaire sur autres commissions, outre la somme de 158,59 € au titre des congés payés afférents ;

Sur l'exécution déloyale du contrat de travail :

Juger que la société a exécuté déloyalement le contrat de travail ;

Condamner la société [O] Cuisines à lui verser une somme équivalente à 3 mois de salaire à titre de dommages-intérêts pour le préjudice subi du fait de cette exécution déloyale ;

Infirmer la décision du conseil de prud'hommes sur le quantum et, tenant compte des heures supplémentaires, juger que le montant doit être porté à 7 290 € ;

A titre subsidiaire, confirmer la décision prud'homale sur le quantum ;

Sur la rupture du contrat de travail :

A titre principal,

Prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts exclusifs de la société [O] Cuisines ;

Condamner la société [O] Cuisines à lui verser une somme équivalente à 8 mois de salaire à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Infirmer la décision du conseil de prud'hommes sur le quantum et, tenant compte des heures supplémentaires, juger que le montant doit être porté à 19 440 € et à titre subsidiaire confirmer la décision prud'homale sur le quantum ;

Condamner la société [O] Cuisines à lui verser une indemnité compensatrice de préavis égale à 2 mois de salaire ;

Infirmer la décision du conseil de prud'hommes sur le quantum et, tenant compte des heures supplémentaires, juger que le montant doit être porté à 4 861,18 €, outre la somme de 486,12 € au titre des congés payés afférents et à titre subsidiaire confirmer la décision prud'homale sur le quantum ;

Condamner la société [O] Cuisines à lui verser une indemnité de licenciement ;

Infirmer la décision du conseil de prud'hommes sur le quantum et, tenant compte des heures supplémentaires, juger que le montant doit être porté à 7 777,88 € et à titre subsidiaire confirmer la décision prud'homale sur le quantum ;

A titre subsidiaire,

Juger que la prise d'acte de la rupture produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Condamner la société [O] Cuisines à lui verser la somme de 19 440 € à titre de dommages-intérêts pour la perte d'emploi, et à titre subsidiaire la somme de 15 755,04 € ;

Condamner la société [O] Cuisines à lui verser la somme de 7 777,88 € à titre d'indemnité de licenciement, et à titre subsidiaire la somme de 6 302,01 € ;

En tout état de cause,

Prononcer l'ensemble des condamnations avec taux d'intérêt légal à compter de la saisine prud'homale s'agissant des créances salariales et à compter de la décision de première instance s'agissant des créances indemnitaires ;

Condamner la société à la régularisation des bulletins de salaire, cotisations et documents de fin de contrat sous astreinte de 50 € par jour de retard à compter d'un délai de 15 jours suivant la décision à intervenir, le conseil se réservant le droit de faire liquider l'astreinte ;

Confirmer le jugement du conseil de prud'hommes en ce qu'il a fait droit à sa demande de condamnation de la société pour la procédure de première instance à lui verser une somme au titre de l'article 700 du Code de procédure civile à hauteur de 1 000 € ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance sur le fondement de l'article 696 du Code de procédure civile ;

Débouter la société [O] Cuisines de l'ensemble de ses demandes ;

Y ajoutant ;

Condamner la société [O] Cuisines à lui verser la somme de 1 500 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance sur le fondement de l'article 696 du Code de procédure civile s'agissant de la procédure d'appel.

**

Pour l'exposé des moyens il est renvoyé aux conclusions précitées en application des dispositions de l'article 455 du Code de procédure civile.

L'instruction du dossier a été clôturée par ordonnance du 19 décembre 2022 fixant la date d'audience au 9 janvier 2023.

*******

MOTIFS :

Sur la reconnaissance du statut de vendeur :

L'article L.7311-3 du Code du travail dispose que « est voyageur, représentant ou placier, toute personne qui :

1° Travaille pour le compte d'un ou plusieurs employeurs ;

2° Exerce en fait d'une façon exclusive et constante une profession de représentant ;

3° Ne fait aucune opération commerciale pour son compte personnel ;

4° Est liée à l'employeur par des engagements déterminant :

a) La nature des prestations de services ou des marchandises offertes à la vente ou à l'achat ;

b) La région dans laquelle il exerce son activité ou les catégories de clients qu'il est chargé de visiter ;

c) Le taux des rémunérations. ».

En l'espèce, M. [W] sollicite la requalification de son contrat de travail de VRP en contrat de travail de salarié de droit commun au motif qu'il exerçait une activité totalement étrangère au statut de VRP avec des missions de vendeur en magasin, des horaires de travail imposés, une mission de prospection interdite et des déplacements professionnels chez les clients faits exclusivement pour la prise de mesures.

Au soutien de ses prétentions, M. [W] produit aux débats six attestations (M. [T], Mme [S], M. [C], M. [U], M. [Y] et M. [F]).

Dans son attestation datée du 30 octobre 2017, M. [T], mêtreur au sein de la société [O] Cuisines de mai 2005 à octobre 2015, témoigne de ce que M. [W] était tenu de rester au magasin de 9 heures à 12 heures et de 14 heures à 19 heures, 5 jours par semaine (sauf dimanche et lundi).

Toutefois, les fonctions de M. [T] ne lui permettaient pas de constater personnellement que M. [W] était tout le temps présent aux horaires indiqués.

Dans son attestation datée du 6 décembre 2017, Mme [S] témoigne de ce qu'elle était salariée de la société [O] Cuisines du 13 juillet 2015 au 2 janvier 2016 au poste de vendeuse-conceptrice « comme M. [W] ». Elle témoigne de ce qu'ils étaient tenus de travailler durant les horaires d'ouverture du magasin, de 9h à 11h et de 14h à 19h, 5 jours par semaine, qu'ils étaient en permanence au magasin 40 heures par semaine et qu'ils ne faisaient pas de prospection extérieure, leur travail consistant à accueillir des prospects au magasin.

Dans son attestation datée du 3 janvier 2018, M. [C], peintre en bâtiment, témoigne de ce qu'il est passé plusieurs fois au magasin Mobalpa de [Localité 12] pour une visite de courtoisie le samedi et qu'il a constaté au cours des années 2016 et 2017 que M. [W] se trouvait seul dans les locaux.

Toutefois, M. [C] ne précise pas à quelle date et à quel horaire celui-ci visitait le magasin de Mobalpa de [Localité 12]. De plus, il n'a pas pu personnellement constater que M. [W] était seul dans les locaux durant toute la journée de travail lors de laquelle il se rendait au magasin.

Dans son attestation datée du 17 janvier 2019, M. [U] témoigne avoir été concepteur pour la société [O] Cuisines sur les mois de février et mars 2017 conformément aux horaires du magasin malgré son statut de VRP. Il ajoute qu'il n'y a que des vendeurs en magasin, qu'aucune prospection n'est possible et que les seules sorties sont les prises de mesure chez les clients ou les demandes de projet envoyées par le site Mobalpa.

Dans son attestation non datée, M. [Y] témoigne de ce qu'il a exercé les fonctions de vendeur magasin pour la société [O] Cuisines de mai 2010 à octobre 2011. Il atteste de ce que l'équipe commerciale devait être présente aux horaires d'ouverture du magasin, 5 jours par semaine, pour un total de 40 heures par semaine et impérativement le samedi, et que leur activité consistait à attendre les prospects au magasin. Il ajoute enfin qu'il leur était interdit de quitter le magasin pour exercer une quelconque activité de prospection, M. [O] Cuisines ayant été catégorique sur ce sujet, les déplacements extérieurs étant réservés aux métrés de contrôle s'ils étaient amenés à accompagner le métreur pour la vérification des dimensions.

Toutefois, cette attestation est contradictoire avec celle de M. [C] qui soutient que M. [W] était seul dans le magasin à chaque fois qu'il passait le samedi.

Dans son attestation non datée, M. [F] témoigne de ce qu'il était salarié de la société [O] Cuisines du 21 avril 2010 à septembre 2011 au poste de vendeur et de ce que M. [W], tout comme l'ensemble de l'équipe commerciale, était tenu d'être présent au magasin pendant les horaires d'ouverture, sans pouvoir quitter le magasin pour exercer une activité de prospection, leur activité consistant à attendre les clients au magasin, 5 jours par semaine, et tous les samedis sans exception. Il témoigne également de ce qu'il a formulé la demande auprès de M. [O] Cuisines de les autoriser à exercer une activité relationnelle et de prospection auprès des prescripteurs (promoteurs, constructeurs, architectes, etc.), mais qu'il lui a répondu que ce travail de prospection incombait à la direction et que l'équipe commerciale en place était tenue de rester au magasin pour gérer l'accueil du passage et les dossiers en cours. Enfin, M. [F] témoigne de ce qu'ils étaient amenés à se rendre chez les clients uniquement pour réaliser les métrés de contrôle avant installation et finaliser certaines fois les bons de commande à l'issue des métrés.

La société [O] Cuisines conteste le fait que M. [W] était tenu de rester au magasin de [Localité 12], bien qu'elle reconnaisse qu'il y avait un jour de permanence par semaine afin de finaliser les dossiers des prospects et d'accueillir les clients de passage.

Au soutien de cette affirmation, l'employeur produit aux débats sept attestations de salariés ou anciens salariés (M. [B], Mme [V], M. [G], M. [K], Mme [M], M. [P] et Mme [A]) qui témoignent tous de ce que les VRP, en ce compris M. [W], était tenus de prospecter à l'extérieur du magasin, qu'ils ne devaient pas suivre d'horaires fixes, hormis le jour de permanence et qu'ils devaient rendre compte de leurs déplacements dans le cadre de l'organisation de l'équipe commerciale.

L'employeur produit également de nombreux bons de commande signés par M. [W] en dehors du magasin, au domicile de clients à [Localité 8], [Localité 14], [Localité 3], [Adresse 1], [Localité 10], [Localité 11], [Localité 9], [Localité 7], [Localité 6], [Localité 5], [Localité 2], [Localité 15], sur une période allant de mars 2011 à novembre 2016. La case du bon de commande indiquant une « Étude effectuée en magasin » est cochée sur un seul d'entre eux.

Le fait que certains bons de commande fassent état de devis antérieurs à la date du bon de commande, qu'il s'agisse certaines fois de compléments de cuisine et que l'un d'eux concerne une cuisine d'une valeur de 32 500 € n'exclut pas le fait qu'ils soient le résultat de la prospection de M. [W], comme celui-ci le soutient. Effectivement, la prospection commerciale ne se limite pas au seul porte à porte, les prospects peuvent également avoir besoin d'un temps de réflexion entre le devis et le bon de commande et si certains ont besoin de rénover entièrement leur cuisine, d'autres pourraient simplement vouloir ajouter uniquement un ou plusieurs éléments.

Par ailleurs, M. [W] n'explique pas pourquoi, s'il a réalisé tous ces bons de commande au domicile des clients suite à une visite en magasin, seul l'un d'eux vise une « Etude en magasin ».

Enfin, s'agissant de la présence de M. [W] en magasin, qui n'est pas contestée par la société [O] Cuisines à raison d'un jour de permanence par semaine, le salarié VRP peut parfaitement cumuler son activité de représentation avec une activité annexe exercée pour le compte de l'employeur. En l'espèce, le contrat de travail de M. [W] stipule que « conformément au planning fixé par la Direction, Monsieur [W] s'engage à effectuer des permanences au magasin et par là-même respecter les horaires d'ouverture du magasin lors de ces dernières ». Il n'est pas contesté que lors de ces permanences le salarié exerçait la profession de représentant en ce qu'il avait pour mission de concrétiser lors de rendez-vous les précédents contacts avec des prospects en bons de commande et de présenter aux prospects de passage les produits de la société [O] Cuisines dans le but de leur faire passer une commande.

Par conséquent, il résulte de l'ensemble de ces constatations que M. [W] travaillait bien pour le compte d'un employeur, la société [O] Cuisines et qu'il exerçait de façon exclusive et constante une fonction de représentant. En outre, il n'est pas contesté que M. [W] ne réalisait aucune opération commerciale pour son propre compte et qu'il était lié à l'employeur par un engagement déterminant la nature des prestations proposées à l'achat, le périmètre d'intervention et le taux des rémunérations.

Dès lors, il y a lieu de constater la réunion des conditions du statut de VRP telles que définies par l'article L.7311-3 du Code du travail, de sorte que M. [W] sera débouté de sa demande tendant à la requalification de son statut de VRP en vendeur salarié de droit commun ainsi que des demandes de rappel de salaires et congés payés afférents, rappel de prime d'ancienneté et congés payés afférents. Le jugement sera infirmé de ce chef.

M. [W] sera également débouté de ses demandes de rappel d'heures supplémentaires et congés payés afférents et d'indemnité de travail dissimulé. Le jugement sera confirmé de ce chef.

Sur la discrimination :

En vertu de l'article L.1132-1 du Code du travail, aucune personne ne peut faire l'objet d'une mesure discriminatoire directe ou indirecte en raison notamment de son âge, de son sexe, de ses opinions ou encore de son état de santé.

Si l'article précité ne fait pas obstacle aux différences de traitement, encore faut-il qu'elles répondent à une exigence professionnelle essentielle et déterminante, que l'objectif soit légitime et l'exigence proportionnée.

En cas de litige, lorsque le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte, il incombe à l'employeur de démontrer que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.

En l'espèce, M. [W] soutient que, contrairement à ses collègues de travail, il était le seul à ne jamais pouvoir bénéficier d'un jour de repos le samedi, ce qui a entraîné un préjudice tant moral que financier.

Au soutien de sa prétention, M. [W] produit aux débats un courrier du 27 octobre 2017 adressé à la direction et un courriel du 6 avril 2016 qu'il a lui-même rédigés évoquant le fait qu'il n'a jamais eu de jour de repos le samedi, ainsi que quatre attestations (M. [C], M. [U], M. [Y] et M. [F]).

Il a précédemment été souligné que M. [C] n'avait pu constater personnellement que M. [W] était tout le temps présent le samedi.

Dans son attestation, M. [U] n'atteste pas sur les jours de repos ni le travail le samedi.

Dans leurs attestations, M. [Y] et M. [F] témoignent respectivement de ce que les membres de l'équipe commerciale devaient « être impérativement présents le samedi » et « être présent obligatoirement tous les samedi sans exception ».

Dès lors, les éléments produits aux débats par le salarié contredisent clairement l'affirmation selon laquelle il aurait été victime d'une inégalité de traitement en raison d'une discrimination.

Par conséquent, M. [W] sera débouté de sa demande tendant à l'allocation de dommages-intérêts pour discrimination. Le jugement sera infirmé de ce chef.

Sur le rappel de commissions :

M. [W] sollicite le versement de la somme de 1 585,95 € à titre de rappel de commissions sur les dossiers [E], [Z], [L] [H], [J] et [X], ainsi que la somme de 188,63 € à titre de rappel de commission sur le dossier [D], outre les congés payés afférents.

Le contrat de travail prévoit notamment que le solde de commissions est versé mensuellement deux mois après encaissement total de l'affaire et ce compte tenu des éventuelles régularisations. Il est également précisé que les soldes ne seront dus que pour les dossiers pour lesquels le salarié aura effectué l'ensemble des tâches lui incombant à savoir : commande au siège social, vérifications et contrôles des dossiers et accusés réception des commandes usines.

C'est à l'employeur qu'il incombe d'établir qu'il a effectivement payé au salarié les commissions qu'il lui doit. Lorsque le calcul de la rémunération dépend d'éléments détenus par l'employeur, celui-ci est tenu de les produire en vue d'une discussion contradictoire.

S'agissant du dossier [E], la société [O] Cuisines soutient que le salarié a vendu ce projet sans en référer à son responsable technique en s'engageant sur des délais impossibles à tenir, ce qui a provoqué l'insatisfaction des clients.

Toutefois, l'employeur ne justifie pas qu'à cause du comportement du salarié les clients n'ont pas versé le montant total de l'affaire, de sorte que la commission sollicitée par le salarié est due.

S'agissant du dossier [Z], la société [O] Cuisines soutient que le salarié a encore une fois promis aux clients des délais de livraison impossibles à tenir, ce qui a suscité le mécontentement des clients.

Toutefois, de la même manière, l'employeur ne justifie pas qu'à cause du comportement du salarié les clients n'ont pas versé le montant total de l'affaire, de sorte que la commission sollicitée par le salarié est due.

S'agissant du dossier [L] [H], la société [O] Cuisines soutient que M. [W] a commis une erreur sur le coloris de l'évier commandé, ce qui a occasionné un avoir de 379 €, les clients ayant décidé de se fournir chez une autre société.

Toutefois, non seulement aucun élément ne justifie que l'erreur incombe à M. [W], mais l'employeur ne justifie pas du montant de l'avoir remis aux clients, qui viendrait réduire la commission de M. [W], de sorte que la commission sollicitée par le salarié est due.

S'agissant des dossiers [J] et [X], la société [O] Cuisines soutient que le salarié ne pourra recevoir le solde des commissions qu'au règlement total des chantiers par les clients.

Toutefois, alors que ces commandes datent respectivement de décembre 2016 et février 2017, l'employeur ne justifie pas de ce qu'il n'a toujours pas encaissé la totalité des sommes dues par les clients, de sorte que la commission sollicitée par le salarié est due.

S'agissant du dossier [D], la société [O] Cuisines soutient que les erreurs techniques sont imputables au VRP en charge du dossier et que M. [N], responsable technique, reconnaît l'erreur commise sur la mesure du plan de travail, de sorte que la commission n'a pu être attribuée à M. [W].

Toutefois, l'employeur ne produit aucun élément permettant de quantifier l'impact de l'erreur commise sur le montant payé par les clients, de sorte que la commission sollicitée par M. [W] est due.

Par conséquent, la société [O] Cuisines sera condamnée à verser à M. [W] la somme de 1 585,95 € à titre de rappel de commissions sur les dossiers [E], [Z], [L] [H], [J] et [X], ainsi que la somme de 188,63 € à titre de rappel de commission sur le dossier [D], outre les congés payés afférents. Le jugement sera confirmé de ce chef.

Sur les indemnités complémentaires de maladie et de prévoyance :

M. [W] sollicite le versement de la somme de 3 666,20 € à titre de rappel d'indemnité complémentaire et de prévoyance, outre la somme de 366,62 € au titre des congés payés afférents sur le fondement de la convention collective du négoce de l'ameublement.

Or, M. [W] ayant été débouté de sa demande de requalification de son statut de VRP en vendeur salarié de droit commun, la convention collective applicable est l'accord national interprofessionel des voyageurs représentants placiers du 3 octobre 1975.

L'article 8 dudit accord collectif dispose que les salariés de plus de 2 ans d'ancienneté bénéficient, lorsque la suspension du contrat pour maladie ou accident non professionnel se prolonge au-delà de 30 jours, d'une indemnité journalière complémentaire de celle servie par la sécurité sociale et prenant effet rétroactivement à partir du onzième jour de suspension.

Sont déduites du montant de l'indemnité, les indemnités versées par le ou les régimes complémentaires de prévoyance auxquels adhérait l'employeur et les sommes éventuellement perçues par le représentant de commerce sur des ordres passés depuis le premier jour d'absence indemnisé, au contraire, les sommes perçues au titre d'ordres passés antérieurement à cette absence lui restent acquises.

Lorsque le salarié a entre 5 et 10 ans d'ancienneté, cette indemnité est égale, par jour civil d'absence indemnisable, à 1/60ème de la rémunération moyenne mensuelle de l'intéressé au cours des 12 derniers mois d'activité (déduction faite des frais professionnels) pendant 45 jours, puis 1/120ème de cette rémunération pendant 15 jours.

En l'espèce, M. [W] est placé en arrêt de travail à compter du 12 juillet 2017. Il avait 7 ans d'ancienneté dans la société [O] Cuisines et il résulte des bulletins de paie qu'il a perçu sur les 12 derniers mois (de juillet 2016 à juin 2017) une rémunération brute totale de 25 590,05 €.

Toutefois, cette somme doit être augmentée des commissions que M. [W] aurait dû percevoir et qui ont fait l'objet d'une condamnation en paiement d'un rappel de salaire par le présent arrêt. Dès lors, la rémunération brute totale du salarié s'élève à la somme de 27 364,63 €, ce qui correspond à une rémunération mensuelle moyenne brute de 2 280,38 €.

L'indemnité s'élève à la somme de ((2 280,38/60x45)+(2 280,38/120x15)), soit 1 995,32 €. M. [W] n'a perçu aucune somme au titre d'un régime complémentaire de prévoyance dans la mesure où l'employeur, comme il en avait la faculté, n'a adhéré à aucun régime de ce type, de sorte qu'il ne doit être opéré aucune déduction sur cette indemnité.

Toutefois, aucune stipulations de l'accord collectif applicable ne prévoit le versement d'une rente née de la garantie incapacité/invalidité.

La société [O] Cuisines a versé la somme de 1 467,45 € à titre d'indemnité complémentaire à M. [W], de sorte qu'elle devra verser le solde au salarié, soit la somme de 527,87 €, sans qu'il soit fait droit à sa demande de congés payés afférents dans la mesure où l'arrêt maladie du salarié n'a pas de caractère professionnel et ne créait donc pas de nouveaux droits à congé. Le jugement sera infirmé de ce chef.

Sur l'exécution déloyale du contrat de travail :

L'article L.1222-1 du Code du travail dispose que le contrat de travail doit être exécuté de bonne foi.

En l'espèce, M. [W] sollicite l'allocation d'une somme équivalente à 3 mois de salaire évaluée à la somme de 5 908,14 € à titre de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail, aux motifs que la société [O] Cuisines a multiplié les manquements au Code du travail de la manière suivante :

application du statut de VRP en dehors de tout respect des conditions d'application de ce statut ;

mise en 'uvre de sanctions pécuniaires en retirant le bénéfice de commissions qui lui étaient dues ;

absence de respect des dispositions relatives à l'indemnisation complémentaire.

Il a été démontré que M. [W] bénéficiait bien du statut de VRP, de sorte qu'en appliquant ce statut la société [O] Cuisines n'a pas fait preuve de déloyauté dans l'exécution du contrat de travail.

Il a également été démontré, d'une part, que la société [O] Cuisines a refusé de commissionner M. [W] sur certains dossiers suite au mécontentement de clients, sans justifier du montant payé par lesdits clients ; d'autre part, que le salarié est fondé à solliciter le versement de la somme de 527,87 € à titre de solde d'indemnité complémentaire suite à son arrêt maladie.

M. [W] soutient que cela a eu un impact particulièrement délicat tant financier que sur son état de santé, ceci ayant été constaté par le médecin du travail et son médecin traitant. Le dossier médical de la médecine du travail fait état d'insatisfaction au travail notamment en raison des commissions depuis une visite dans le cadre d'une surveillance médicale simple du 2 septembre 2016.

Par conséquent, le préjudice de M. [W], au-delà du simple préjudice financier réparé par l'allocation des rappels de commissions et indemnité complémentaire, sera justement évalué à la somme de 1 000 €. Le jugement sera infirmé de ce chef.

Sur la rupture du contrat de travail :

La prise d'acte de la rupture par le salarié en raison de faits qu'il reproche à l'employeur entraîne la cessation immédiate du contrat de travail en sorte qu'il n'y a plus lieu de statuer sur la demande de résiliation judiciaire introduite auparavant. S'il appartient alors au juge de se prononcer sur la seule prise d'acte, il doit fonder sa décision sur les manquements de l'employeur invoqués par le salarié tant à l'appui de la demande de résiliation judiciaire devenue sans objet qu'à l'appui de la prise d'acte.

Pour que la prise d'acte produise les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, les manquements invoqués par le salarié doivent être établis et être suffisamment graves pour rendre impossible la poursuite du contrat de travail. Il appartient donc au juge de vérifier l'existence d'un ou plusieurs manquements imputables à l'employeur et d'apprécier si ces manquement revêtent une gravité suffisante justifiant l'impossibilité de poursuivre la relation de travail.

Pour décider des effets de la prise d'acte par le salarié, le juge doit examiner tous les manquements de l'employeur invoqués devant lui par le salarié, même si celui-ci ne les a pas mentionnés dans l'écrit de prise d'acte car à la différence de la lettre de licenciement, celui-ci ne fixe pas les limites du litige. Il appartient au salarié d'établir l'existence des faits qu'il invoque pour justifier la prise d'acte.

En l'espèce, M. [W] a le 27 avril 2018, pris acte de la rupture de son contrat de travail aux torts de l'employeur lui reprochant les faits suivants :

«Tenant la situation professionnelle très difficile dans laquelle nous sommes et l'impossibilité manifeste de poursuivre nos relations contractuelles pour les raisons déjà invoquées, ayant eu un impact important sur mon état de santé, je vous informe par la présente que je prends acte de la rupture de mon contrat de travail, en vous en imputant la responsabilité. »

Dans ses conclusions, M. [W] relie sa demande à ce que sa prise d'acte produise les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse en indiquant que malgré la saisine prud'homale en résiliation judiciaire et ses multiples demandes, aucune indemnité complémentaire maladie ne lui a été versée, celui-ci « se retrouvant dans une situation financière inextricable pendant plusieurs mois ».

Par conséquent, le salarié relie la prise d'acte aux manquements invoqués au soutien de la résiliation judiciaire, à savoir :

l'application du statut de VRP en l'absence des conditions d'application de ce statut ;

une discrimination vis-à-vis des autres salariés ;

le refus de versement de commissions dues ;

le non-paiement de la totalité de l'indemnité complémentaire due en cas de maladie.

M. [W] a été débouté des deux premiers griefs de sorte qu'ils ne sont pas établis.

Toutefois, les griefs tendant au refus de versement de commissions dues ainsi qu'au non-paiement de la totalité de l'indemnité complémentaire sont fondés.

Or, le non-paiement de l'intégralité de la rémunération du salarié est un manquement suffisamment grave pour justifier de l'impossibilité de la poursuite de la relation de travail, de sorte que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse au 2 avril 2018.

Par conséquent, la société [O] Cuisines sera déboutée de ses demandes reconventionnelles de paiement du préavis non exécuté et de remboursement de la somme de 17 724,42 € réglée au titre de l'exécution provisoire.

Au jour de la rupture, M. [W] était âgé de 55 ans et avait une ancienneté de 8 ans.

M. [W] sollicite la fixation de son salaire de référence à une somme calculée compte tenu de la requalification de son statut de VRP en vendeur salarié de droit commun.

Toutefois, le salarié a été débouté de sa demande de requalification, de sorte qu'il sera tenu compte de sa rémunération en tant que VRP. Sa rémunération brute totale sur les douze derniers mois, qui est plus favorable que celle des trois derniers mois, s'élève, après réintégration des commissions, à la somme de 27 364,63 €, ce qui correspond à une rémunération mensuelle moyenne brute de 2 280,38 €. C'est cette somme qui servira de rémunération mensuelle brute de référence pour le calcul des indemnités.

M. [W] sollicite le versement de la somme de 15 755,04 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. Il justifie de ce qu'il a été inscrit sur la liste des demandeurs d'emploi à compter du 28 août 2018 et a été embauché en qualité de représentant en contrat à durée indéterminée à compter du 3 juin 2019. Le préjudice du salarié sera justement évalué à la somme de 12 000 €. La société [O] Cuisines sera condamnée à lui verser cette somme à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. Le jugement sera infirmé de ce chef.

En application de l'article R.1234-2 du Code du travail, M. [W] est fondé à solliciter le versement d'une indemnité de licenciement égale à un quart de mois de salaire par année d'ancienneté, soit à la somme de (2 280,38/4x8), soit 4 560,76 €. La société [O] Cuisines sera condamnée à lui verser cette somme à ce titre. Le jugement sera infirmé de ce chef.

Au titre des effets de la prise d'acte, M. [W] ne reprend pas dans ses conclusions d'appel sa demande de versement d'indemnité compensatrice de préavis et congés payés afférents formulée devant le conseil de prud'hommes, il a donc abandonné cette demande, de sorte que la cour n'a pas à statuer sur cette demande, le jugement sera confirmé de ce chef.

Sur les documents sociaux :

M. [W] sollicite la régularisation par la société [O] Cuisines sous astreinte de 50 € par jour de retard à compter d'un délai de 15 jours suivant la décision à intervenir, le conseil (sic) se réservant le droit de liquider l'astreinte, des bulletins de salaire, cotisations et documents de fin de contrat.

La société [O] Cuisines devra remettre à M. [W] les documents demandés rectifiés et régulariser sa situation auprès des organismes sociaux concernés, sans qu'il soit fait droit à sa demande d'astreinte. Le jugement sera confirmé sur le principe et infirmé en ce qu'il a assorti la condamnation d'une astreinte.

Sur les autres demandes :

En application de l'article L.1235-4 du Code du travail, la société [O] Cuisines sera condamnée au remboursement des indemnités de chômage versées à M. [W] dans la limite de six mois d'indemnités.

Les sommes à caractère salarial et l'indemnité de licenciement produiront intérêts au taux légal à compter de la réception de la convocation devant le bureau de conciliation et les sommes à caractère indemnitaire produiront intérêts au taux légal à compter de l'arrêt.

La société [O] Cuisines, qui succombe principalement, sera tenue aux dépens d'appel.

Il n'apparaît pas équitable de faire application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La cour,

Confirme le jugement rendu le 14 septembre 2020 par le conseil de prud'hommes de Montpellier en ce qu'il a débouté M. [W] de ses demandes de rappel d'heures supplémentaires et d'indemnité de travail dissimulé, en ce qu'il a condamné la société [O] Cuisines à un rappel de commissions (1 585,95 € + 188,63 € et les congés payés correspondant), en ce qu'il a dit que l'employeur n'a pas exécuté loyalement le contrat de travail, en ce qu'il a condamné la société [O] Cuisines à la régularisation des documents sociaux et de la situation de M. [W] au regard des organismes sociaux, en ce qu'il a condamné l'employeur au titre de l'indemnité compensatrice de préavis et les congés payés afférents, aux dépens ainsi qu'au paiement d'une somme au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, et l'infirme pour le surplus ;

Statuant à nouveau ;

Déboute M. [W] de sa demande de requalification de son statut de VRP en vendeur salarié de droit commun et des demandes de rappels de salaire et de prime d'ancienneté et de congés payés afférents ;

Déboute M. [W] de sa demande de dommages-intérêts pour discrimination ;

Dit que le prise d'acte de la rupture du contrat de travail aux torts de l'employeur produira les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse à effet au 27 avril 2018 ;

Condamne la société [O] Cuisines à verser à M. [W] les sommes suivantes :

527,87 € à titre de solde d'indemnité complémentaire pour maladie ;

1 000 € à titre de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail ;

12 000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

4 560,76 € à titre d'indemnité de licenciement ;

Dit que la régularisation des documents sociaux et de la situation de M. [W] par la société [O] Cuisines ne sera pas assortie d'une astreinte ;

Déboute la société [O] Cuisines de ses demandes reconventionnelles en paiement du préavis non exécuté et en remboursement de la somme versée au titre de l'exécution provisoire ;

Ordonne le remboursement par la société [O] Cuisines des indemnités chômage versées par Pôle Emploi dans la limite de six mois d'indemnités ;

Y ajoutant ;

Dit que les sommes à caractère salarial et l'indemnité de licenciement produiront intérêts au taux légal à compter de la réception de la convocation devant le bureau de conciliation et les sommes à caractère indemnitaire produiront intérêts au taux légal à compter de l'arrêt.

Dit n'y avoir pas lieu à faire application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Condamne la société [O] Cuisines aux dépens d'appel.

LE GREFFIER LE CONSEILLER

Pour le président empêché

F. FERRANET


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 2e chambre sociale
Numéro d'arrêt : 20/04200
Date de la décision : 08/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-08;20.04200 ?
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