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08/03/2023 | FRANCE | N°20/03982

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 2e chambre sociale, 08 mars 2023, 20/03982


Grosse + copie

délivrées le

à































COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

2e chambre sociale

ARRET DU 08 MARS 2023



Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 20/03982 - N° Portalis DBVK-V-B7E-OWDX



Décision déférée à la Cour :

Jugement du 14 SEPTEMBRE 2020

CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE NARBONNE N° RG F 19/00125





APPELANT :



Monsi

eur [F] [U]

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représenté par Me Sedami armand ADIDO, avocat au barreau de NARBONNE

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2022/012347 du 23/11/2022 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de MONTPELLIER)


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Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

2e chambre sociale

ARRET DU 08 MARS 2023

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 20/03982 - N° Portalis DBVK-V-B7E-OWDX

Décision déférée à la Cour :

Jugement du 14 SEPTEMBRE 2020

CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE NARBONNE N° RG F 19/00125

APPELANT :

Monsieur [F] [U]

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représenté par Me Sedami armand ADIDO, avocat au barreau de NARBONNE

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2022/012347 du 23/11/2022 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de MONTPELLIER)

INTIME :

Monsieur [I] [Z]

[Adresse 4]

[Localité 1]

Représenté par Me Sebastien PINET de la SARL SARL SPE GRESSIER PINET EXPERT COMPTABLE AVOCAT, avocat au barreau de NARBONNE

Ordonnance de clôture du 17/01/2023

COMPOSITION DE LA COUR :

En application de l'article 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 17 JANVIER 2023, en audience publique, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par l'article 804 du même code, devant la cour composée de :

M. Jean-Pierre MASIA, Président

Monsieur Richard BOUGON, Conseiller

Madame Magali VENET, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : M. Philippe CLUZEL

ARRET :

- contradictoire

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par M. Richard BOUGON Conseiller, pour le Président empêché, et par M. Philippe CLUZEL, Greffier.

*

* *

FAITS ET PROCÉDURE

M. [F] [U] a été embauché en qualité d'apprenti en carrosserie par M. [I] [Z], exploitant d'un garage sous l'enseigne 'Carrosserie Auto 11", suivant contrat d'apprentissage à effet du 8 octobre 2018 au 30 juin 2020 moyennant une rémunération brute mensuelle de 374,63€.

Par courrier du 21 décembre 2018, M. [Z] a notifié à l'apprenti la rupture de son contrat d'apprentissage et lui a remis ses documents de fin de contrat. La rupture a été notifiée à la chambre des Métiers et de l'Artisanat de l'Aude.

Par courrier du 14 février 2019, la Chambre des Métiers et de l'Artisanat de l'Aude a informé l'apprenti de l'enregistrement de la résiliation de son contrat d'apprentissage avec effet au 21 décembre 2018.

Contestant la rupture de son contrat, Mme [H] [S], représentante légale de son fils mineur, a saisi au fond le conseil de prud'hommes de Narbonne le 23 mai 2019 lequel, par jugement du 14 septembre 2020 a :

- dit et jugé que la lettre de rupture du contrat d'apprentissage est conforme dans sa notification aux formes légales,

- dit et jugé que l'employeur a rompu unilatéralement le contrat dans le délai fixé par la loi,

- dit et jugé que la rupture du contrat d'apprentissage n'est pas abusive,

- débouté Mme [H] [S], représentant M. [U] de toutes ses demandes, fins et conclusions,

- débouté M. [Z] de sa demande au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- condamné Mme [S], représentant M. [U], aux entiers dépens.

Le 9 septembre 2021, M. [F] [U] est devenu majeur et l'instance a été reprise à son nom et il a régulièrement interjeté appel du jugement susvisé.

MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES

Dans ses dernières conclusions déposées par RPVA le 3 janvier 2023, M. [F] [U], demande à la Cour de :

A titre principal,

Dire que la lettre de rupture du contrat d'apprentissage était inopposable à sa mère et représentante légale, Mme [S] à défaut de lui avoir été notifiée,

Constater le défaut de notification dans les formes légales de la lettre de rupture du contrat d'apprentissage,

Condamner M. [Z] à lui verser la somme de 6743,34€ au titre des rémunérations qu'il aurait perçus jusqu'au terme de son contrat d'apprentissage,

A titre subsidiaire,

Dire que l'employeur a rompu unilatéralement le contrat d'apprentissage au-delà du délai fixé par la loi,

Dire que la rupture intervenue dans ces conditions est abusive,

Condamner M. [Z] à verser à M. [U] la somme de 6743,34€ au titre des dommages et intérêts pour résiliation abusive du contrat d'apprentissage,

Dans tous les cas,

Condamner M. [Z] à verser à M. [U] les sommes de :

- 674,32€ au titre des indemnités compensatrice de congés payés,

- 749, 26€ au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,

- 1000€ au titre du préjudice moral subi,

Ordonner la remise des documents suivants sous astreinte de 50€ par jour et par document à partir de la date du prononcé du jugement à venir : ses bulletins de salaire, certificat de travail, attestation pôle emploi rectifiés,

Condamner M. [Z] à lui verser la somme de 1800€ au titre de l'article 700 du Code de procédure civile en première instance et 2000€ en instance d'appel ainsi qu'aux entiers frais et dépens de l'instance, et ce compris les frais d'exécution liés au recouvrement de l'indemnité de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Dire qu'à défaut de règlement spontané des condamnations prononcées par la présente décision et qu'en cas d'inexécution par voie extra judiciaire, les sommes retenues par l'huissier instrumentaire en application des dispositions de l'article 10 du décret du 8 mars 2001, portant modification du décret du 12 décembre 1996, devront être supportées par les parties défenderesse en suis de l'indemnité mise à sa charge sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Ordonner l'exécution provisoire de droit.

Dans ses dernières conclusions déposées par RPVA le 16 janvier 2023, M. [I] [Z] demande à la Cour de :

Confirmer le jugement du conseil de prud'hommes du 14 septembre 2020 en toutes ses dispositions,

Rejeter l'intégralité des demandes de M. [U] comme étant infondée,

Condamner M. [U] au paiement de la somme de 2000€ sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, outre les entiers dépens de l'instance.

Pour l'exposé des moyens il est renvoyé aux conclusions précitées en application des dispositions de l'article 455 du Code de procédure civile.

L'instruction du dossier a été clôturée par ordonnance du 17 janvier 2023 fixant la date d'audience au même jour.

SUR CE

Sur la régularité de la rupture du contrat d'apprentissage,

M. [F] [U] fait valoir que la lettre de rupture du contrat d'apprentissage est inopposable à sa mère et représentante légale à défaut de lui avoir été notifiée. Il ajoute que la rupture est irrégulière car elle a été notifiée par courrier simple au lieu de l'être par courrier recommandé comme le prévoit l'article L. 1232-6 alinéa 1 du code du travail.

En vertu de l'article R.6222-21 du code du travail, dans sa rédaction applicable à l'espèce, la rupture unilatérale du contrat d'apprentissage par l'une des parties pendant les deux premiers mois de son exécution est constatée par écrit. Elle est notifiée au directeur du centre de formation d'apprenti ou, dans le cas d'une section d'apprentissage, au responsable d'établissement, ainsi qu'à l'organisme ayant enregistré le contrat.

En l'espèce, la rupture du contrat est intervenue à l'initiative de l'employeur et a fait l'objet d'une notification par courrier à M. [U] ainsi qu'à la chambre des métiers et de l'Artisanat de l'Aude, conformément aux prescriptions de l'article R. 6222-21. L'absence de notification de la lettre de rupture au représentant légal de l'apprenti n'est pas de nature à vicier la rupture dès lors que ce dernier, capable de discernement, était en mesure de réceptionner la lettre de rupture de son contrat.

Sur la rupture unilatérale du contrat d'apprentissage,

L'article L. 6222-18 du code du travail, dans sa rédaction applicable à l'espèce, prévoit que le contrat d'apprentissage peut être rompu par l'une ou l'autre des parties jusqu'à l'échéance des quarante-cinq premiers jours, consécutifs ou non, de formation pratique en entreprise effectuée par l'apprenti. Passé ce délai, la rupture du contrat, pendant le cycle de formation, ne peut intervenir que sur accord écrit signé des deux parties. A défaut, la rupture du contrat conclu pour une durée limitée ou, pendant la période d'apprentissage, du contrat conclu pour une durée indéterminée, ne peut être prononcée que par le conseil de prud'hommes, statuant en la forme des référés, en cas de faute grave ou de manquements répétés de l'une des parties à ses obligations ou en raison de l'inaptitude de l'apprenti à exercer le métier auquel il voulait se préparer.

Par courrier du 21 décembre 2018, M. [Z] a notifié à l'apprenti la rupture de son contrat d'apprentissage en précisant qu'il s'agissait d'une 'résiliation du contrat au cours de la période d'essai de 45 jours en entreprise'. Le litige porte sur le nombre de jours de formation pratique effectuées par l'apprenti au jour de la rupture.

M. [U] conclut à l'infirmation du jugement du conseil de prud'hommes qui a considéré que le contrat avait été rompu après 43 jours de présence effective. Il fait valoir que l'employeur a omis de comptabiliser les périodes d'observations ayant précédées la conclusion du contrat d'apprentissage ainsi que 4 jours de formation (les 30 octobre 2018, 10 décembre, 13 décembre et 14 décembre 2018). Il produit aux débats :

- Les conventions organisant ses périodes d'observation au sein de l'entreprise Carrosserie Auto 11, pour les périodes du 24 au 28 septembre 2018 et du 1er au 5 octobre 2018. L'objectif assigné à ces périodes d'observation est 'la découverte du monde du travail et du métier de carrosserie et peinture',

- Ses bulletins de paie pour les mois d'octobre, novembre et décembre 2018 qui mentionnent ses absences les 29 et 30 octobre 2018 ainsi que les 11 et 12 décembre 2018,

- le récapitulatif de ses absences émanant du CFA de [Localité 5] confirmant son absence les 11 et 12 décembre 2018,

En réplique, M. [I] [Z] conclut à la confirmation du jugement du conseil de prud'hommes. Il produit aux débats les fiches de présence de l'apprenti pour les mois d'octobre, novembre et décembre 2018. M. [Z] comptabilise, à l'appui de ces fiches de présence, 43 jours de présence effective au sein de l'entreprise, étant précisé qu'aucune fiche de présence n'est produite pour la semaine du 10 au 14 décembre 2018.

Le délai de quarante cinq jours s'entend des seules périodes de 'formation pratique en entreprise effectuée par l'apprenti'. Les périodes d'observation ayant précédé la conclusion du contrat d'apprentissage, qui avaient pour finalité la découverte par le stagiaire du métier de carrosserie et peinture et non sa formation pratique au métier de carrossier n'avaient pas à être décomptées.

Il résulte des pièces versées aux débats que, pour le mois d'octobre 2018, le nombre de jours de formation pratique comptabilisés par l'employeur correspond bien aux mentions figurant sur le bulletin de paie. En revanche, l'employeur n'a pas comptabilisé la présence du salarié les 10, 13 et 14 décembre et ne fournit aucune fiche de présence pour cette période. Or, le bulletin de paie du mois de décembre 2018 ne fait mention d'aucune absence du salarié sur ces trois jours. En l'absence de preuve par l'employeur de l'absence du salarié sur les trois jours concernés, ces derniers doivent être comptabilisés. Il s'ensuit que l'apprenti comptabilisait quarante-six jours de formation pratique en entreprise au jour de la rupture du contrat de travail. L'employeur ne pouvait donc résilier le contrat de son seul chef.

Sur les conséquences de la rupture du contrat,

Sur le rappel de salaire et les congés payés afférents,

La rupture anticipée du contrat d'apprentissage par l'employeur hors des cas légaux est sans effet et ce dernier était donc tenu, en l'absence de mise à pied conservatoire, de payer les salaires. Il sera fait droit à la demande de paiement des salaires pour la période du 21 décembre 2018 au 30 juin 2020 sur la base d'une rémunération mensuelle brute de 374,63€, soit une somme de 6743,34€, outre la somme de 674,32€ au titre des congés payés afférents.

Sur le préjudice subi,

M. [U] sollicite la somme de 1000€ de dommages et intérêts pour préjudice moral dû à la rupture brutale et à la perte d'une chance de poursuivre sa formation. M. [U] ne produit aux débats aucun élément sur sa situation scolaire et professionnelle postérieure à la rupture. Il convient donc de limiter l'indemnisation à la somme de 1000€.

Sur l'indemnité compensatrice de préavis,

M. [U] sollicite la somme de 749,26€ au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, correspondant à deux mois de salaire, sur le fondement de l'article L. 1234-5 du code du travail. L'indemnité compensatrice de préavis prévue par l'article L. 1234-5 du code du travail n'est pas applicable en cas de rupture du contrat d'apprentissage dont le régime est dérogatoire au droit commun. M. [U] sera débouté de sa demande à ce titre.

Sur les demandes accessoires,

Il est équitable de condamner M. [I] [Z] à verser à M. [F] [U] la somme de 1500€ sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

PAR CES MOTIFS :

La Cour,

Infirme le jugement du conseil de prud'hommes de Narbonne du 14 septembre 2020 en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau,

Prononce la résiliation du contrat d'apprentissage aux torts de M. [I] [Z] au 21 décembre 2018,

Condamne M. [I] [Z] à verser à M. [F] [U] les sommes suivantes :

- 6743,34€ à titre de rappel de salaire du 21 décembre 2018 au 30 juin 2020,

- 674,32€ au titre des congés payés y afférents,

- 1000€ à titre de dommages-intérêts,

Ordonne la remise à M. [F] [U] d'un bulletin de salaire récapitulatif conforme au présent arrêt, sans qu'il y ait lieu à astreinte,

Condamne M. [I] [Z] à verser à M. [F] [U] la somme de 1500€ sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

Déboute M. [F] [U] de ses autres demandes.

Condamne M. [I] [Z] aux entiers dépens.

LE GREFFIER P/LE PRÉSIDENT EMPECHE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 2e chambre sociale
Numéro d'arrêt : 20/03982
Date de la décision : 08/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-08;20.03982 ?
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