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01/03/2023 | FRANCE | N°20/03105

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 2e chambre sociale, 01 mars 2023, 20/03105


Grosse + copie

délivrées le

à































COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

2e chambre sociale



ARRET DU 01 MARS 2023



Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 20/03105 - N° Portalis DBVK-V-B7E-OUPC



Décision déférée à la Cour :

Jugement du 29 MAI 2020

CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE MONTPELLIER N° RG 17/01418



APPELANTE :



Madame [D

] [V] épouse [C]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée par Me MENNESSON avocat pour Me Marie Pierre DESSALCES de la SCP DESSALCES & ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2020/007321 du 22/07/20...

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

2e chambre sociale

ARRET DU 01 MARS 2023

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 20/03105 - N° Portalis DBVK-V-B7E-OUPC

Décision déférée à la Cour :

Jugement du 29 MAI 2020

CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE MONTPELLIER N° RG 17/01418

APPELANTE :

Madame [D] [V] épouse [C]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée par Me MENNESSON avocat pour Me Marie Pierre DESSALCES de la SCP DESSALCES & ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2020/007321 du 22/07/2020 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de MONTPELLIER)

INTIMEE :

ACPPA association ACCUEIL ET CONFORT POUR PERSONNES AGEES

[Adresse 4]

[Localité 3]

Représentée par Me Yann GARRIGUE de la SELARL LEXAVOUE MONTPELLIER GARRIGUE, GARRIGUE, LAPORTE, avocat au barreau de MONTPELLIER

Représentée par Me NEVOUX avocat pour Me Catherine MILLET-URSIN de la SCP FROMONT BRIENS, avocat au barreau de LYON

Ordonnance de clôture du 12 Décembre 2022

COMPOSITION DE LA COUR :

En application de l'article 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 09 JANVIER 2023, en audience publique, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par l'article 804 du même code, devant la cour composée de :

M. Jean-Pierre MASIA, Président

Mme Véronique DUCHARNE, Conseillère

Monsieur Jacques FOURNIE, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : M. Philippe CLUZEL

ARRET :

- contradictoire

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par M. Jean-Pierre MASIA, Président, et par M. Philippe CLUZEL, Greffier.

*

* *

FAITS ET PROCEDURE

Par contrat de travail à durée déterminée du 8 septembre 1999, Madame [D] [C] a été engagée en qualité d'agent de service par l'ACPPA (Association Accueil et Confort Pour Personnes Agées). La relation de travail s'est poursuivie dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée à compter du 1er octobre 2002.

La salariée a bénéficié de plusieurs périodes de suspension de son contrat de travail. Ainsi, elle a été:

- en congé parental du 9 décembre 2007 au 3 décembre 2012;

- en arrêt maladie du 4 décembre 2012 au 10 janvier 2013.

- en arrêt maladie du 7 février 2013 au 4 juillet 2013;

- en congé maternité puis en congé parental du 5 juillet 2013 au 31 août 2016,

- en arrêt maladie du 1er septembre 2016 au 10 mars 2017;

- en congés payés du 1er juin 2017 au 6 juillet 2017;

- en arrêt maladie du 26 juillet 2017 au 30 novembre 2017;

- en arrêt maladie du 12 décembre 2017 jusqu'au 18 novembre 2018;

Le 21 décembre 2017, la salariée a saisi le conseil de prud'hommes de Montpellier d'une demande de résiliation judicaire du contrat de travail aux torts de son employeur auquel elle reprochait des agissements de harcèlement moral, une exécution déloyale du contrat.

En cours d'instance prud'homale, le 19 novembre 2018, la salariée a été déclarée inapte par le médecin du travail dans les termes suivants:

-'L'état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi.'

-'Inapte au poste et à tout poste de l'entreprise et à tout poste de l'entreprise et du groupe. Pas de reclassement possible actuellement.'

Par lettre du 30 novembre 2018 , l'employeur a convoqué la salariée à un entretien préalable, fixé au 12 décembre 2018, en vue de son éventuel licenciement pour inaptitude.

Par lettre du 17 décembre 2018, l'employeur a licencié la salariée pour inaptitude non professionnelle et impossibilité de reclassement.

Dans le dernier état de ses demandes présentées devant le conseil de prud'hommes, la salariée:

- n'a pas repris ses prétentions au titre de la résiliation judiciaire du contrat de travail;

- a maintenu ses prétentions au titre du harcèlement moral et de l'exécution déloyale du contrat;

- a contesté la nature de l'inaptitude, la régularité de la procédure de licenciement ainsi que la cause de son licenciement et sollicité diverses sommes de ces chefs;

- a demandé un rappel d'indemnités journalières;

- a demandé la délivrance des documents sociaux sous astreinte ainsi qu'une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement du 29 mai 2020, le conseil de prud'hommes de Montpellier l'a déboutée de toutes ses demandes et a laissé les dépens à sa charge.

C'est le jugement dont Madame [D] [C] a interjeté appel. Sa déclaration d'appel indique que son appel vise les chefs de jugement l'ayant déboutée de l'intégralité de ses demandes et ceux ayant omis de statuer sur plusieurs de ses prétentions ( les dommages et intérêts pour le non respect de la procédure légale de licenciement, l'indemnité compensatrice de congés payés restant due, les compléments d'indemnités journalières et la délivrance des documents sociaux sous astreinte.).

MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES

Vu les dernières conclusions de Madame [D] [C] régulièrement notifiées et déposées au RPVA le 6 juin 2021;

Vu les dernières conclusions de l'ACPPA établissement [5] régulièrement notifiées et déposées au RPVA le 8 décembre 2022.

Pour l'exposé des prétentions des parties et leurs moyens, il est renvoyé, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, à leurs conclusions ci-dessus mentionnées et datées.

Vu l'ordonnance de clôture du 12 décembre 2022.

SUR CE

Sur le harcèlement moral et l'exécution déloyale du contrat de travail

Madame [C], qui conclut à la réformation du jugement sur ces chefs de demande, fait valoir qu'à compter de son retour de congé parental, le 4 décembre 2012, elle avait fait l'objet quotidiennement de pressions, de remarques désobligeantes, de propos dévalorisants, de demandes contradictoires et d'hostilité de la part de ses supérieurs hiérarchiques visant manifestement à obtenir son départ de l'entreprise par une démission.

Elle reproche également à l'employeur de n'avoir pas fait cas des préconisations du médecin du travail la concernant figurant sur les fiches médicales des 1er mars et 11 juillet 2017, de l'avoir acculée à signer une rupture conventionnelle le 1er juin 2017 avant qu'elle ne se rétracte très vite le 10 juin 2017, de l'avoir accusée dans des conditions intolérables le 25 juillet 2017 d'homicide involontaire ce qui l'avait amenée à vouloir attenter à ses jours.

Elle produit :

- une lettre datée du 21 janvier 2013 qu'elle avait adressée par envoi recommandé du 26 janvier 2013 au DRH de l'entreprise.

Dans cette lettre mentionnant comme objet 'signalement de harcèlement', la salariée dénonçait:

*subir quotidiennement des pressions, des remarques désobligeantes, des propos dévalorisants, des demandes contradictoires et des hostilités de la part de Monsieur [O], directeur adjoint, avec la 'complicité' de Madame [B], la directrice, le tout dans l'intention de la faire démissionner;

*avoir été avisée par lettre du 28 décembre 2012 émanant de Monsieur [O] que son salaire ne lui serait plus payé par virement mais par chèque à retirer au secrétariat alors que les autres salariés avaient continué à être payés par virement;

*ne pas avoir été convoquée à la visite médicale de reprise;

*être isolée des autres salariés qui ne répondaient pas à ses saluts;

*avoir été convoquée trois fois par Monsieur [O] pour s'entendre dire ' pourquoi est ce que tu es de retour et pourquoi tu n'as pas cherché du travail ailleurs' Il n'est pas temps de démissionner' Je ne vais pas arrêter la personne qui t'a remplacé pour que tu prennes sa place (...)'

* être la seule à ne pas être dotée d'une tenue à son nom et devoir porter celle des remplaçants ou alors garder cette tenue sale quand aucune n'était disponible;

*être victime d'une augmentation de sa charge de travail en comparaison avec les plannings des autres ASH, d'une modification de son roulement avec une incidence sur sa vie familiale et personnelle, d'une divulgation auprès des autres salariés des éléments de sa vie personnelle, être surveillée par ses collègues avec des menaces de sanctions de la part de Monsieur [O] en cas de travail non terminé, être poussée à la faute, avoir dû nettoyer à fond une chambre occupée par une résidente atteinte d'une maladie contagieuse, être la seule à devoir signer le planning, avoir reçu en décembre 2012 son bullletin de paie avec des erreurs sur la convention collective;

- la lettre datée du 26 janvier 2013 qu'elle avait adressée par envoi recommandé du 5 février 2013 à l'inspecteur du travail pour lui signaler un harcèlement moral au travail;

- la lettre datée du 30 janvier 2013 qu'elle avait adressée par envoi recommandé du 1er février 2013 au médecin du travail pour demander à passer au plus vite une visite médicale 'en raison d'un processus d'usure psychologique qui semble mis en place pour [la] faire démissionner ou [la] faire craquer ' ;

- la lettre de l'employeur du 16 mai 2013 en réponse à une lettre recommandée de la salariée du 9 avril 2013 et reçue le 25 avril 2013 dans laquelle l'employeur contestait l'accusation de harcèlement de la part de l'encadrement, invitait la salariée à 'ne pas rentrer dans une vaine polémique', lui indiquait ne pas 'vouloir rentrer dans les détails' de certains des points évoqués par la salariée, l'assurait de son soutien, de son écoute et de son souhait de la voir reprendre le travail ainsi que de sa volonté d'un dialogue social et d'une qualité de vie en établissement. Il ajoutait que malgré les accusations portées par la salariée contre eux, il considérait Madame [B] et Monsieur [O] comme 'deux professionnels d'expérience reconnue qui ont toujours eu à coeur de protéger la santé de l'ensemble de leurs salariés', qu'il était surpris d'apprendre que la salariée n'avait pas passé la visite médicale de reprise dans le délai de 8 jours et qu'après vérification, il s'avérait que le retard constaté n'était pas imputable à l'employeur mais à la médecine du travail qui n'avait pas été en mesure de la convoquer rapidement malgré les demandes de l'employeur;

- le courriel du 22 mars 2017 qu'elle avait adressé à Madame [B] pour dénoncer des 'évènements désagréables' qu'elle avait subis dans le courant de la semaine du 13 mars 2017 ainsi qu' une agression verbale de la part de Madame [Z] et demandant à sa hiérarchie d'intervenir;

- un rapport daté du 13 avril 2017 qu'elle avait adressé à Madame [U], responsable du pôle hébergement. Dans ce rapport, la salariée y dénonçait un incident avec une collègue de travail survenu dans le service le 13 avril 2017 et faisant suite à un précédent incident déjà signalé à Madame [U] sans réaction de cette dernière ;

- la lettre datée du 21 mai 2017 qu'elle avait adressée à l'inspecteur du travail pour lui signaler à nouveau une situation de harcèlement au travail ( tâches au-dessus des capacités de la salariée, privation d'outils de travail, omission de convocation aux réunions la concernant, clans au travail) ;

- la lettre datée du 10 juin 2017 qu'elle avait adressée le même jour à l'employeur par envoi recommandé pour l'informer qu'elle rétractait la rupture conventionnelle signée le 1er juin 2017 dans des conditions qualifiées par elle comme étant 'des conditions de précipitation et d'indemnisation qui après réflexion m'apparaissent inacceptables eu égard aux graves difficultés que je rencontre au sein de votre entreprise (...)';

- la main courante faite le 26 juillet 2017 au commissariat de police de [Localité 2] dans laquelle la salariée déclarait avoir été accusée à tort par la directrice, Madame [K] , et par une auxiliaire de vie d'avoir laissé, dans la salle de bains de deux pensionnaires, un flacon de produit pour les vitres alors qu'un autre prensionnaire en avait profité pour dévisser ce flacon et aborbé le contenu. La salariée précisait que ce n'était pas la première fois qu'elle rencontrait des problèmes avec sa hiérarchie laquelle cherchait manifestement à la licencier pour faute grave ;

- les attestations de deux salariées rapportant qu'en mai 2017, il n' y avait plus qu'une seule ASH, contre deux auparavant pour s'occuper les deux postes du secteur fermé et du rez-de-chaussée, que (le 26 juillet 2016) Madame [C] avait très mal supporté d'être accusée d'avoir laissé un produit dans une chambre d'un résident ( témoignages de Madame [R], Madame [L]) et que devant l'inquiétude générée par les paroles de Madame [C] qui menaçait de mettre fin à ses jours en se jetant par le balcon, ses collègues avaient appelé la police;

- l'attestation d'une salariée rapportant que le 11 janvier 2013, elle avait trouvé Madame [C] en pleurs dans les vestiaires qui lui avait dit sortir du bureau de Monsieur [O] et que cela n'allait pas avec lui, que le 16 janvier 2013, elle avait vu Madame [C],

seule, nettoyer à fond le restaurant alors qu'habituellement les salariés étaient deux pour cette tâche, qu'elle avait également remarqué que Madame [C] n'avait pas de chariot pour travailler ni tenue à son nom et qu'elle avait été mise à l'écart par les autres membres du personnel (témoignage de Madame [P]);

- les éléments médicaux suivants:

*la prolongation du 4 janvier 2013 jusqu'au 6 janvier 2013 de son arrêt de travail du travail;

*la fiche de visite du 7 février 2013 par laquelle le médecin du travail la déclarait 'inapte temporaire' dans les termes suivants 'l'état de sante de mme [C] ne lui permet pas d'exercer ses fonctions,; adressée à son médecin traitant pour un arrêt de travail, soins et prise en charge';

*les arrêts de travail (initial et prolongations) délivrés du 7 février 2013 au 17 juillet 2013 mentionnant 'astnénie des lombaires' (prolongation du 1er avril 2013), 'contractions' (arrêts du 1er mai 2013, du 1er juin 2013 ) ou encore '14 jours pathologiques de grossesse' (arrêt du 5 juillet 2013);

*les arrêts de travail afférents à son congé maternité du 18 juillet 2013 jusqu'au 31août 2016 et à son arrêt maladie à compter de septembre 2016 jusqu'au 2 janvier 2017;

*les arrêts de travail pour maladie à compter du 3 février 2017 jusqu'au 3 mars 2017

*les arrêts de travail pour accident du travail du 26 juillet 2017 au 30 novembre 2017;

* la notification du 4 mai 2018 par la caisse primaire d'assurance maladie de la prise en charge du caractère professionnel de l'accident déclaré le 25 juillet 2016

*les arrêts de travail délivrés par un médecin psychiatre du 13 décembre 2017 au 30 octobre 2018 et mentionnant ' état dépressif. Suvi psychologique'

*la fiche d'aptitude médicale délivrée par le médecin du travail le 1er mars 2017 déclarant la salariée 'apte à la reprise. Un temps partiel thérapeutique aurait été préférable.'

*l'attestation de visite médicale délivrée par le médecin du travail le 11 juillet 2017 déclarant la salariée apte dans les termes suivants: ' apte avec aménagement du poste - la chargede travail devrait être évaluée - apte à un poste avec charge de travail normale. Une formation gestes et postures est nécessaire ainsi qu'une formation aux outils de manutention existant dans l'entreprise ';

* l'avis d'inaptitude délivré le 19 novembre 2018 dans les termes suivants: ' inapte au poste et à tout poste de l'entreprise et du groupe. Pas de reclassement possible actuellement.'.

Ces éléments pris dans leur ensemble, en ce compris ceux de nature médicale, laissent présumer une situation de harcèlement moral en sorte qu'il incombe à l'ACPPA d'établir, conformément à l'article L 1154-1 du code du travail, que de tels agissements ne sont pas constitutifs de harcèlement moral et sont justifiés par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

***

En réponse, l'ACPPA, qui conclut à la confirmation du jugement, fait valoir que les allégations de la salariée étaient manifestement infondées, que sur la totalité de la durée de la relation de travail, la salariée avait été absente pour diverses raisons pendant plus de dix ans, qu'en définitive depuis le 9 décembre 2007, elle avait travaillé moins de 11 mois continus, que sa très brève présence dans l'entreprise constituait un indice sérieux du caractère infondé des allégations, que la salariée avait écrit dans une lettre du 14 novembre 2022 être satisfaite de ses conditions de travail, que c'est par suite du refus de l'employeur en novembre 2012 d'accepter une rupture conventionnelle que la salariée avait commencé à prétendre être victime de harcèlement moral, qu'aucun élément permettait d'établir la matérialité des allégations de la salariée laquelle se contentait de produire des courriers qu'elle avait adressés à la direction et l'inspection du travail, que ces courriers n'avaient aucune valeur probante, que d'ailleurs l'inspection du travail n'y avait pas donné suite, que contrairement à ce que la salariée soutenait, l'ACPPA lui avait répondu les 4 février 2013 et le 16 mai 2013, que les attestations produites ne contenaientt aucun témoignage direct de harcèlement moral, que la salariée avait bien bénéficié d'une visite de reprise au terme de son arrêt de travail du 11 janvier 2013 mais qu'en raison de la pénurie des médecins du travail, elle n'avait été reçue que 7 février 2013, que les préconisations du médecin du travail avaient bien été respectées en ce que lors de la visite de reprise du 4 décembre 2017, le médecin du travail l'avait déclarée apte sans préconisation ou recommandation particulières, que dès le 4 décembre 2017, le directrice de l'établissement avait sollicité les préconisations du médecin du travail, qu'aucune accusation d'homicide volontaire n'avait été portée contre la salariée à la suite d'un oubli de produit d'entretien dans la chambre d'un résident malade.

L' ACPPA produit les pièces suivantes:

- le tableau récapitualtif des absences de la salariée sur la période du 9 décembre 2017 au 12 novembre 2018;

-la lettre du 14 novembre 2012 reçue le 15 novembre 2012 dans laquelle Madame [C] indiquait être dans l'impossibilité de reprendre son travail en raison de difficultés d'ordre familial et souhaitait conclure une rupture conventionnelle aux fins de suivre une formation. Dans cette lettre, la salariée écrivait ' je vous rappelle avoir occupé un emploi chez vous depuis 1999 et avoir été satisfaite de mes conditions de travail. C'est avec regret que je formule cette demande mais je ne peux pas faire autrement.'

- le message faxé le 11 janvier 2013 à la médecine du travail pour organiser la visite de reprise de Madame [C];

- la fiche de visite médicale du 7 février 2013 déjà analysée plus haut;

- la lettre du 4 février 2013 dans laquelle l'employeur, en réponse à la lettre du 21 janvier 2013 de la salariée, indiquait être surpris, au regard des qualités humaines dont Monsieur [O] avait su faire preuve jusqu'à présent dans ses différentes missions, des accusations portées contre lui. L'employeur ajoutait s'être entretenu avec Monsieur [O], Madame [B] et un membre du CHSCT, qu'après analyse, le constat de la situation n'était pas celui décrit par la salariée et que le courrier de la salariée 'semblait davantage trouver son fondement dans le refus de la Direction des Couralies d'acquiesscer à votre demande de rupture conventionnelle. '

L'employeur indiquait ensuite dans sa lettre que Monsieur [O] l'avait reçue lors de la reprise du 10 janvier 2013 à l'issue de son congé parental pour l'informer de ce qu'elle retrouverait son précédent poste d'agent de service, que le virement de son salaire reprenait 'normalemernt' dès le mois de janvier, le paiement par chèque pour la période comprise entre le 4 décembre 2012 et le 9 janvier 2013 s'expliquant par l'absence de jutificatifs communiqués par la salariée sur le montant de ses indemnités journalières.

L'employeur indiquait en outre dans sa lettre que, concernant les tenues, des dysfonctionnements avaient été relevés avec la société prestataire et qu'ils devaient être rapidement résolus.

L'employeur indiquait en conclusion de sa lettre qu'il accordait de l'importance au dialogue social et à la qualité de vie en établissement, qu'un accord d'entreprise avait été conclu le 18 octobre 2011sur les risques psychosociaux, que divers chantiers dont un sur le bien-être au travail étaient menés avec la participation de tous les acteurs et qu'il invitait la salariée 'à accepter de se remettre en cause sans en prendre systématiquement ombrage'.

- la lettre du 16 mai 2013 déjà analysée plus haut en réponse à la lettre de la salariée du 9 avril 2013;

- la lettre de Madame [C] du 20 mars 2017 ayant pour objet 'relance de la demande de rupture conventionnelle ' dans laquelle la salariée expliquait sa demande par les agissements répétés de harcèlement moral qu'elle subissait sans réaction de l'employeur;

- la lettre de rétractation de Madame [C] du 10 juin 2017 déjà analysée plus haut;

- l'attestation de visite médicale délivrée par le médecin du travail le 4 décembre 2017 déclarant la salariée apte dans les termes suivants: ' apte-formation geste et postures cosneillée -à revoir dans 3 mois';

- le courriel du 4 décembre 2017 dans lequel la directrice de l'établissement interrogeait le médecin du travail sur la compatibilité de l'aménagement du poste de Madame [C] au regard d'une menace de suicide sur l'Unité 1, la mise en danger d'un résident souffrant de la maladie d'Alzheimer en oubliant de ranger ses produits d'entretien, les différents courriers de la salariée alertant l'employeur, le médecin du travail et l'inspecteur du travail sur une prétendue double charge de travail sur l'Unité 1, les remarques du contrôleur du travail sur le projet d'affectation dans l'Unité 1 au vu des antécédents de la salariée et des préconisations médicales en mars 2017 de passage à temps partiel thérapeutique, la ferme désaprobation manifestée par la salariée quand l'employeur lui avait indiqué qu'elle serait à nouveau affectée dans l'Unité 1;

- le courriel du 5 décembre 2017 dans lequel le médecin du travail répondait ne pas avoir d'élément médical lui permettant d'émettre des restrictions sur n'importe quelle Unité et n'avoir aucune compétence sur l'organisation de l'établissement.

- l'attestation du médecin de l'établissement (docteur [A]) rapportant au sujet des faits du mois de juillet 2017 (oubli d'un produit) que le centre anti poison avait été appelé, qu'il avait reçu

'la personne qui a priori était responsable du produit dans un bureau pour la rassurer. Je l'ai revue en fin de semaine avec la directrice de l'établissement pour la rassurer à nouveau. Cette personne se trouvait dans un état d'anxiété important malgré les propos rassurants de moi-même et de la directrice...'

- l'attestation de la directrice de l'établissement, Madame [X], qui rapporte avoir eu un entretien le 25 (ou le 26) juillet 2017 avec Madame [C] concernant l'incident du produit détergent oublié et ingéré par un résident. Le témoin rapporte avoir rassuré Madame [C] sur l'état de santé du résident et lui avoir dit qu'aucun élément ne l'accusait.

- la lettre de l'employeur du 18 janvier 2018 expliquant à la salariée que faute par cette dernière de communiquer les décomptes d'indemnités journalières versées par la sécurité sociale sur la période du 26 juillet 2017 au 30 novembre 20174 puis depuis le 13 décembre 2017, il ne pouvait pas calculer le complément de salaire auquel elle avait droit.

***

En l'état des explications et des pièces fournies, l'ACPPA justifie avoir demandé dès le 11 janvier 2013 à la médecine du travail de convoquer Madame [C] pour une visite de reprise en sorte qu'il est établi que le retard avec lequel cette visite avait eu lieu le 7 février 2013, aussi regrettable soit-il, n'était pas imputable à l'employeur.

La circonstance non discutée d'un paiement du salaire de décembre 2012 par chèque bancaire à la place d'un virement apparaît anodine au regard du contexte de l'époque marqué par le retour de Madame [C] qui avait été absente près de 5 ans. En définitive, la salariée n'avait été privée d'aucun salaire ni n'avait subi le moindre retard de paiement. Ce mode de paiement par chèque n'avait duré que deux moix maximum comme en avait été informée la salariée dès le 10 janvier 2013. Le comportement de l'employeur était donc là encore objectivement justifié.

Pour l'essentiel des autres agissements, il doit être rappelé à titre liminaire que le constat d'une courte durée de la présence effective de Madame [C] dans l'entreprise n'est pas nécessairement incompatible avec l'existence d'un harcèlement moral dénoncé par elle. De même, si la salariée avait écrit le 14 novembre 2012 être satisfaite de ses conditions de travail, pour autant une telle reconnaissance n'est pas de nature à la discréditer dès lors que les agissements reprochés à l'employeur sont tous postérieurs à cette date.

La cour constate qu'en 2013 et 2017, l'employeur avait été saisi plusieurs fois par Madame [C] de signalement d'agissements répétés de harcèlement moral de la part de sa hiérarchie.

Or, si l'ACPPA justifie avoir répondu par deux fois, les 4 février 2013 et 16 mai 2013, aux accusations écrites du 21 janvier 2013, force est de constater que d'emblée l'employeur n'avait accordé aucun crédit à la salariée l'accusant de vouloir se venger d'un précédent refus de rupture conventionnelle tout en vantant les mérites des personnes dénoncées laissant ainsi entendre qu'il était vain pour la salariée à persister dans ses accusations. Le 16 mai 2013, l'employeur reprochait même à la salariée de ne pas accepter de se remettre en cause lui laissant là encore comprendre que les difficultés dénoncées étaient imputables à la salariée.

L'ACPPA ne justifie aucunement avoir diligenté la moindre enquête ne serait-ce pour vérifier la réalité des faits portés à sa connaissance dès janvier 2013. Si l'employeur indiquait dans son courrier du 4 février 2013 avoir provoqué un entretien avec les deux supérieurs et un membre du CHSCT ce qui aurait abouti au constat de la vacuité des accusations, pour autant il ne produit aucune pièce attestant de l'existence de cet entretien et de sa teneur. Il est d'ailleurs remarquable de relever que l'employeur ne prendra jamais l'initiative de recevoir la salariée en entretien ou de faire procéder au recueil de ses déclarations et ce nonobstant l'alerte réitérée par celle-ci , par lettre du 20 mars 2017, de la poursuite des agissements de harcèlement moral à son encontre. De même, alors que Madame [C] avait dénoncé ses conditions de travail dégradées dans deux courriels les 22 mars 2017 et 13 avril 2017 en demandant à sa hiérachie d'intervenir, l'ACPPA ne justifie pas des mesures concrètes qu'elle aurait prises en réponse à la salariée.

Plus encore, il est avéré qu'en juillet 2017, parce qu'elle vivait très mal une grave accusation de négligence portée contre elle par sa hiérachie sur l'oubli d'un produit détergent laissé à la disposition d'un résident déficient qui avait ingéré le produit, Madame [C] avait menacé devant ses collègues de se jeter par le balcon. Or, l'employeur ne justifie pas avoir mené la moindre enquête pour vérifier les circonstances dans lesquelles cette négligence dans le fonctionnement du service avait été commise, les raisons pour lesquelles elle avait été imputée sans hésitation à Madame [C] et surtout les raisons pour lesquelles Madame [C] avait menacé d'attenter à ses jours ce qui avait conduit à un appel aux services de police. Pourtant dans son courriel du 4 décembre 2017 adressé au médecin du travail, Madame [X], la supérieure de Madame [C], reconnaissait avoir eu connaissance de la tentative de suicide de celle-ci sur les lieux du travail. Si l'ACPPA, qui s'appuie sur le témoignage de Madame [X], soutient qu'aucune accusation de négligence n'avait été portée contre Madame [C], il n'en demeure pas moins que dans le courriel susvisé du 4 décembre 2017, Madame [X], contrairement à ce qu'elle rapporte dans son attestation, imputait bel et bien à Madame [C] la mise en danger du résident.

Par ailleurs, alors que le médecin du travail avait indiqué le 1er mars 2017 qu'un 'mi-temps thérapeutique aurait été préférable' , l'ACPPA ne justifie pas des raisons pour lesquelles ce mi-temps n'avait pas été mis en place. De même, alors que la salariée se plaignait d'une mauvaise répartition à ses dépens de la charge de travail (par exemple en se voyant confier seule l'accomplissement de tâches habituellement accomplies à deux) et que le médecin du travail avait préconisé le 11 juillet 2017 un aménagement de poste (évaluation de la charge de travail, attribution d'une charge de travail ' normale', formation nécessaire sur les gestes et les postures ainsi que sur les outils de manutention existant dans l'entreprise ), l'ACPPA ne justifie pas, en dehors des renseignements demandés dans le courriel susvisé du 4 décembre 2017 adressé au médecin du travail, les mesures précises et concrètes mises en oeuvre afin de respecter les préconisations médicales.

Enfin, si l'employeur était libre de refuser en novembre 2012, la première demande de rupture conventionnelle présentée par la salariée fondée uniquement sur des motifs personnels et familiaux de la salariée, en revanche, il apparait dans la seconde demande de rupture conventionnelle de la salariée du 20 mars 2017 ainsi que dans sa lettre de rétractation du 10 juin 2017 que les motivations de la salariée s'expliquaient, selon elle, par des agissements de harcèlement moral qu'elle disait subir sans que l'employeur n'ait à l'époque répondu à de telles accusations ni n'ait même cherché, là encore, à en vérifier la réalité.

Au vu de ce qui précède, la cour considère que l'ACPPA ne justifie pas par des éléments objectifs les agissements répétés à l'encontre de la salariée et qu'en s'abstenant de procéder aux vérifications qui lui incombaient, il avait laissé en parfaite connaisance de cause de tels agissements se répéter. Dans ces conditions, les deux griefs faits à l'employeur d'avoir été à l'origine d'un harcèlement moral et d'avoir exécuté de manière déloyale le contrat de travail sont fondés.

Ces faits fautifs de l'employeur ont causé un préjudice à la salariée qui sera indemnisée par la condamnation de l'ACPPA à lui payer la somme de 3500€ à titre de dommages et intérêts.

Le jugement sera réformé sur ces chefs de demande

.

Sur l'inaptitude d'origine professionnelle

Madame [C] qui conclut à l'infirmation du jugement, fait valoir que son inaptitude serait d'origine professionnelle ce que conteste l'ACPPA qui conclut à la confirmation du jugement sur ce point.

En droit, les régles protectrices concernant les victimes d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle s'appliquent dès lors que l'inaptitude du salarié , quel que soit le moment où elle est constatée ou invoquée, a, au moins partiellement, pour origine cet accident ou cette maladie et que l'employeur avait connaissance de cette origine professionnelle au moment du licenciement.

En l'espèce, le 25 juillet 2017, Madame [E] a été victime d'un accident lequel a été reconnu le 4 mai 2018 comme étant un accident du travail. Elle a bénéficié d'un premier arrêt de travail pour accident du travail du 26 juillet 2017 au 30 novembre 2017. Elle a repris le travail du 30 novembre 2017 au 12 décembre 2017 après avoir été déclarée apte le 4 décembre 2017 par le médecin du travail. Elle a ensuite été en arrêt de travail pour rechute de l'accident du travail à compter du 12 décembre 2017 jusqu'au 31 août 2018. Elle a bénéficié d'un arrêt de travail ordinaire du 31 août 2018 jusqu'à la visite médicale du 19 novembre 2018.

Dès lors qu'elle a été déclarée inapte à l'issue d'un arrêt de travail pour accident du travail, la cour retiendra que cette inaptitude avait au moins partiellement pour origine l'accident du travail du 25 juillet 2017. Certes, à compter du 31 août 2018, l'arrêt de travail n'a plus été prescrit au titre de la législation sur les accidents du travail. Toutefois, dès lors que l' accident du travail était survenu et avait donné lieu à des arrêts de travail successifs au titre de la rechute de cet accident du travail entre le 13 décembre 2017 et le 31 août 2018, la circonstance selon laquelle à compter du 31 août 2018 l'arrêt de travail avait été prescrit pour une maladie ordinaire est sans incidence dès lors que Madame [C] n'avait jamais repris le travail avant la déclaration d'inaptitude du 19 novembre 2018 ni n'avait passé de visite médicale de reprise avant cette date.

L'employeur, informé de la procédure de reconnaissance et de la décision favorable de la caisse primaire d'assurance maladie prise le 4 mai 2018 connaissait l'existence de l'accident du travail et les arrêts de travail pris au titre de la rechute. Il avait donc connaîssance de l'origine professionnelle de l'inaptitude. Le jugement sera réformé sur ce point.

Sur le licenciement

Madame [C], qui conclut à l'infirmation du jugement, soutient que le licenciement dont elle avait été l'objet avait pour origine l'attitude harcelante et déplacée de l'employeur ce que conteste l'ACPPA qui conclut à la confirmation du jugement ayant rejeté les demandes de ce chef.

Les conditions de travail de Madame [C], telles qu'elles ont été analysées plus haut, ont été dégradées par suite des agissements de harcèlement moral et de l'exécution déloyale du contrat de travail par l'ACPP. L'accident du travail du 25 juillet 2017 s'inscrit incontestablement dans ce lent processus lequel a abouti à des arrêts de travail. L'inaptitude de la salariée constatée le 19 novembre 2018 à l'issue de ces arrêts de travail trouve bien son origine dans les manquements de l'employeur en sorte que ce constat d'une inaptitude imputable à l'employeur conduit la cour à dire le licenciement sans cause réelle et sérieuse.

L'indemnité de licenciement de Madame [C] doit être calculée conformément aux articles L 1225-24 (sur la prise en compte dans le calcul de l'ancienneté des périodes de suspension pour congé maternité), L 1225-54 (sur la prise en compte dans le calcul de l'ancienneté de la moitié du congé parental), L 1226-4 (sur la prise en compte dans le calcul de l'ancienneté de la période de préavis non exécuté par suite de la déclaration d'inaptitude), L 1226-7 (sur la prise en compte dans le calcul de l'ancienneté des périodes de suspension du contrat à la suite d'un accident du travail), L1226-14, L 1234-9 , R 1234- 1 et suivants du code du travail (sur le taux de l'indemnité, sur la détermination du salaire à prendre en compte selon la moyenne la plus favorable soit des trois derniers mois soit des douze derniers mois et sur le doublement au titre de l'indemnité spéciale de licenciement ).

Sur la base de ces textes, l'ancienneté à prendre en compte pour le calcul de l'indemnité de licenciement due à Madame [C] est de 15 ans, 3 mois et 15 jours et le salaire à prendre en compte pour liquider cette indemnité est de 1741,11€ (non discuté par l'ACPPA) soit une indemnité spéciale de licenciement de 7327,18€ x 2 = 14654,36€.

L' ACPPA n'ayant versé que la somme de 6806,08€, il reste dû à Madame [C] un solde de 7848,28€.

L'indemnité compensatrice de préavis pour une durée de 2 mois est de 3482,22€ outre les congés payés afférents pour 348,22€.

Compte tenu de l'ancienneté de la salariée (plus de deux ans), du nombre de salariés dans l'entreprise( plus de 11), du salaire brut mensuel perçu, de l'âge de la salariée née en 1980, des circonstances de la rupture et de l'absence de justificatifs sur la situation après la rupture, il sera alloué à Madame [C] la somme de 11000€ à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Le jugement sera réformé en ce qu'il a rejeté les prétentions de Madame [C] sur ces divers points.

Madame [C] ne peut prétendre à une indemnité pour l'irrégularité de la procédure laquelle ne se cumule pas avec celle allouée à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Le jugement sera confirmé sur ce point.

Sur le solde de congés payés

Madame [C], qui conclut à l'infirmation du jugement, soutient qu'il lui reste dû un solde de congés payés non pris qu'elle chiffre, selon décompte, à la somme de 5141,11€.

L'ACPPA, qui conclut à la confirmation du jugement sur ce point, oppose la prescription pour la période antérieure au 17 décembre 2015 et pour la période non prescrite fait valoir que la salariée avait été remplie de tous ses droits.

Sur la prescription

Pour répondre au moyen soulevé par l'ACPPA tiré de la prescription triennale, il convient de rappeler qu'en application de l'article L 3245-1 du code du travail, l'action en paiement de salaires se prescrit par trois ans et que lorsque le contrat de travail a été rompu, la demande peut porter sur les sommes dues au titre des trois années précédant cette rupture.

En l'espèce, la salariée, a saisi pour la première fois par conclusions déposées le 22 novembre 2019 le conseil de prud'hommes de sa demande en paiement de ses congés payés non pris sur la période totale du 1er juin 2004 au 31 mai 2019 .Il s'agit d'une créance de nature salariale.

La rupture étant intervenue le 17 décembre 2018, les demandes en paiement des congés payés pour la période débutant le 17 décembre 2015 sont recevables et les demandes en paiement des congés payés pour la période antérieure à cette date sont irrecevables car prescrites.

Sur la liquidation des droits à congés payés

En application des dispositions légales ( article L 3141-3, L 3141-5 du code du travail ) et conventionnelles ( article 32 du statut collectif) , le salarié a droit à un congé payé de 2,5 jours par mois de travail effectif ou par périodes équivalentes à 4 semaines ou 24 jours de travail effectif.

Sont assimilées à un temps de travail effectif, les périodes de congés payés, de congé maternité , les périodes dans la limite d'une durée ininterrompue d'un an pendant lesquelles le contrat de travail est suspendu pour cause accident du travail ou de maladie professionnelle, les périodes d'absences justifiées par la maladie dans la limite des trente premiers jours continus ou non.

L'indemnité de congé payé est calculée selon la régle la plus favorable au salarié c'est à dire soit la régle du dixième de la rémunération annuelle de référence calculée conformément à l'article L 3141-24 du code du travail soit la régle du salaire théorique que le salarié aurait perçu s'il avait travaillé.

En cas de litige sur les droits à congés payés, la charge de la preuve incombe à l'employeur lequel doit prendre les mesures propres à assurer au salarié la possibilité de prendre ses congés et, en cas de contestation, l'employeur doit justifier avoir accompli à cette fin les diligences qui lui incombent légalement.

En l'espèce, au vu d'une part du décompte détaillé produit par l'ACPPA sur les jours de congés acquis au regard de chaque période de travail effectif ou assimilée et d'autre part des bulletins de paie produits par Madame [C] sur lesquels figurent les congés payés pris, il apparait que si la salariée avait été remplie de tous ses droits à congés payés sur la période du 17 décembre 2015 au 11 décembre 2017, en revanche l'employeur avait méconnu les droits à congés payés acquis par la salariée sur la période du 12 décembre 2017 au 31 août 2018 qui correspondait à une période de suspension du contrat pour accident du travail qui aurait dû être assimilée à un temps de travail effectif pour le calcul des congés payés. Ainsi, l'employeur avait compté 6,5 jours de congés payés acquis sur cette période alors que la salariée avait acquis 22 jours de congés payés. Le solde restant dû au titre des congés payés est donc de 15,5 jours (22 jours - 6,5 jours) qui sera arrondi au nombre supérieur soit 16 jours.

L'indemnité compensatrice s'élève à (1741,11€/30) x 16 = 928,60€.

Le jugement sera réformé sur ce point.

Sur les indemnités journalières

Madame [C], qui conclut à la confirmation du jugement, soutient qu'il lui reste dû un solde d'un montant de 1474€ au titre du complément de salaire en suite de l'arrêt de travail du 25 juillet 2017.

L' ACPPA conclut à la confirmation du jugement au motif qu'elle avait toujours respecté ses obligations et qu'elle avait dû relancer plusieurs fois en vain la salariée pour obtenir le montant des indemnités journalières payées par la sécurité sociale.

Madame [C] produit des décomptes très précis sur les diverses sommes qu'elle avait perçues au titre des salaires de son employeur et au titre des indemnités journalières de la sécurité sociale du mois de juillet 2017 au mois de septembre 2018. Sont aussi produits par les parties les bulletins de paie y afférents.

Hormis son affirmation de principe d'une exécution complète de ses obligations en matière de versement de complément de salaire pendant la période de suspension du contrat pour cause d'accident du travail et le reproche fait à la salariée de ne pas lui avoir transmis l'intégralité des justificatifs du versement des indemnités journalières, l'ACPPA, qui se borne à produire les bulletins de paie, ne produit ni décompte ni explications sur la différence existant entre ce que la salariée avait perçu et ce qu'elle aurait dû percevoir de l'employeur au titre du complément de salaire. L'ACPPA ne fait d'ailleurs aucune analyse ni critique des décomptes que présente Madame [C].

L'ACPPA, débitrice de l'obligation de paiement , ne rapportant pas la preuve de ce qu'elle s'était acquittée complètement de celle-ci, sera condamnée à payer la somme de 1282,43€ après déduction du mois de septembre 2018 pendant lequel la suspension du contrat ne trouvait pas sa cause dans un accident du travail.

Le jugement sera réformé sur ce point.

Sur la délivrance des documents sociaux

Madame [C], qui conclut à l'infirmation du jugement sur ce point, fait valoir que l'ACPPA avait mentionné sur l'attestation pôle-emploi la date d'embauche du 8 septembre 2000 au lieu du 8 septembre 1999 et que l'ACPPA avait rejeté sa demande de rectification

La circonstance invoquée par l'ACPPA et tirée de ce que la période ayant débuté le 8 septembre 1999 correspondait à un contrat emploi solidarité à durée déterminée est inopérante dès lors que, quelque soit la nature des divers contrats s'étant succédés ( contrat emploi soldidarité du 8 septembre 1999 au 7 septembre 2000, contrat emploi soldidarité du 8 septembre 2000 au 7 septembre 2001, avenants de prolongation des 23 juillet 2001 et 6 septembre 2002, contrat de travail à durée indéterminée du 1er octobre 2002)), la relation de travail avait été ininterrompue du 8 septembre 1999 au 17 décembre 2018.

Il y a donc lieu à ordonner la délivrance des documents sociaux sous astreinte et selon les modalités fixées au dispositif.

Sur l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et l'article 700 du code de procédure civile

L'équité commande de condamnner l'ACPPA, non bénéficiaire de l'aide juridictionnelle, à payer à Madame [C], bénéficiaire de l'aide juridictionnelle totale, la somme de 2000€ et dire que Maître [I] avocat de Madame [C] pourra, sous la condition de se conformer à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, poursuivre contre l'ACPPA condamnée aux dépens le recouvrement de cette somme

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Réforme le jugement du conseil de prud'hommes de Montpelllier en toutes ses dispositions sauf celles ayant débouté Madame [D] [C] de sa demande indemnitaire pour irrégularité de la procédure de licenciement;

Statuant à nouveau sur tous les chefs réformés, juge que:

- l'ACPPA (Association Accueil et Confort Pour Personnes Agées, établissement [5]) a commis des agissements constitutifs de harcèlement moral et d'une exécution déloyale du contrat de travail au préjudice de Madame [D] [C];

-l'inaptitude médicale de Madame [D] [C] est d'origine professionnelle;

-le licenciement de Madame [D] [C] est sans cause réelle et sérieuse;

-la demande en paiement de l' indemnité compensatrice de congés payés pour la période antérieure au 17 décembre 2015 est irrecevable car prescrite ;

En conséquence, condamne l'ACPPA (Association Accueil et Confort Pour Personnes Agées, établissement [5] ) à payer à Madame [D] [C] les sommes de:

-3500€ à titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral et exécution déloyale du contrat de travail;

-7848,28€ au titre du solde de l'indemnité spéciale de licenciement;

-3482,22€ au titre de l'indemnité correspondant à l'indemnité compensatrice de préavis;

-348,22€ au titre des congés payés y afférents;

-11000€ à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse;

-928,60€ au titre de l'indemnité compensatrice pour les congés payés acquis et non pris;

-1282,43€ au titre du rappel de salaire pour la période de juillet 2017 à août 2018;

-2000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile

Dit que l'ACPPA (Association Accueil et Confort Pour Personnes Agées, établissement [5] ) devra remettre à Madame [D] [C] le certificat de travail et l'attesatation pôle-emploi conformes au présent arrêt dans le délai de deux mois suivant la signification du présent arrêt et qu'à défaut d'exécution, l'ACPPA y sera contrainte sous atreinte de 50€ par jour de retard et par document

Dit que Maître Marie- Pierre Dessalces avocat de Madame [C], bénéficiaire de l'aide juridictionnelle totale, pourra, sous la condition de se conformer à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991en renonçant à la part contributive de l'Etat, poursuivre contre l'ACPPA le recouvrement de la somme de 2000€ allouée au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamne l'ACPPA (Association Accueil et Confort Pour Personnes Agées, établissement [5] ) aux dépens de première instance et d'appel.

Le greffier Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 2e chambre sociale
Numéro d'arrêt : 20/03105
Date de la décision : 01/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-01;20.03105 ?
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