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01/03/2023 | FRANCE | N°20/03103

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 2e chambre sociale, 01 mars 2023, 20/03103


Grosse + copie

délivrées le

à































COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

2e chambre sociale

ARRET DU 01 MARS 2023



Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 20/03103 - N° Portalis DBVK-V-B7E-OUO6



Décision déférée à la Cour :

Jugement du 02 JUILLET 2020

CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION DE DEPARTAGE DE BEZIERS N° RG F18/00219



APPELANT :



Monsieur [V] [

Z]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représenté par Me Bruno SIAU, avocat au barreau de BEZIERS



INTIMEE :



S.A.R.L. PROSEGUR SÉCURITÉ

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentée par Me Vincent BOUILLAUD, avocat au barreau de TOULOUSE



Ordonnance de cl...

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

2e chambre sociale

ARRET DU 01 MARS 2023

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 20/03103 - N° Portalis DBVK-V-B7E-OUO6

Décision déférée à la Cour :

Jugement du 02 JUILLET 2020

CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION DE DEPARTAGE DE BEZIERS N° RG F18/00219

APPELANT :

Monsieur [V] [Z]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représenté par Me Bruno SIAU, avocat au barreau de BEZIERS

INTIMEE :

S.A.R.L. PROSEGUR SÉCURITÉ

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentée par Me Vincent BOUILLAUD, avocat au barreau de TOULOUSE

Ordonnance de clôture du 12 Décembre 2022

COMPOSITION DE LA COUR :

En application de l'article 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 09 JANVIER 2023, en audience publique, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par l'article 804 du même code, devant la cour composée de :

M. Jean-Pierre MASIA, Président

Mme Véronique DUCHARNE, Conseillère

Monsieur Jacques FOURNIE, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : M. Philippe CLUZEL

ARRET :

- contradictoire

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par M. Jean-Pierre MASIA, Président, et par M. Philippe CLUZEL, Greffier.

*

* *

FAITS ET PROCÉDURE

Monsieur [V] [Z] a été engagé par la Sarl Prosegur sécurité humaine, devenue Fiducial sécurité humaine, en qualité d'agent de sécurité confirmé par contrat à durée déterminée à temps partiel du 6 mai au 31 mai 2017 puis par contrat à durée indéterminée à temps complet à compter du 3 juillet 2017.

Le salarié a notamment été affecté sur deux sites dans le secteur de [Localité 2] : la CPAM et le tribunal de grande instance.

Le 8 mars 2018, le salarié a été mis à pied à titre conservatoire, puis, dès le lendemain, convoqué à un entretien préalable,fixé au 23 mars 2018, en vue d'un événtuel licenciement.

Le 16 avril 2018, le salarié a été licencié pour faute grave.

Contestant les motifs de son licenciement, M. [Z] a saisi le conseil de prud'hommes de Béziers le 24 mai 2018 de diverses demandes salariales et indemnitaires.

Par jugement du 18 juin 2020, le conseil de prud'hommes de Béziers, statuant en sa formation de départage a :

- rejeté l'ensemble des demandes formées par Monsieur [V] [Z],

- Dit n'y avoir lieu au prononcé d'une quelconque condamnation au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- Condamné Monsieur [V] aux dépens.

Par déclaration enregistrée au RPVA le 27 juillet 2020, Monsieur [V] [Z] a régulièrement interjeté appel de ce jugement.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Aux termes de ses dernières conclusions enregistrées au RPVA le 20 octobre 2022, M. [V] [Z] demande à la Cour de :

- Infirmer le jugement rendu par le Conseil de prud'hommes statuant en sa formation de départage le 02 juillet 2020 et statuant à nouveau :

- Débouter la société Prosegur de l'ensemble de ses prétentions et demandes contraires, et rejeter ses moyens contraires ;

- Faire droit aux demandes de M. [Z] ; et en conséquence,

- Requalifier le CDD pour accroissement temporaire d'activité en CDI ;

- Condamner la société Prosegur à lui verser les sommes suivantes:

* 1 506,52€ net d'indemnité forfaitaire de requalification ;

* 76,25€ brut de rappel de primes (en ce comprise l'indemnité compensatrice de

congés payés afférente) ;

* 1 000,00€ net de dommages-intérêts pour licenciement abusif ;

* 219,15€ brut de rappel de prime d'habillement (en ce comprise l'indemnité compensatrice de congés payés afférente) ;

* 235,96€ brut de rappel de prime de fonction (en ce comprise l'indemnité compensatrice de congés payés afférente) ;

* 2 500,00€ net de dommages-intérêts pour discrimination abusive;

* à titre subsidiaire, 2 500,00€ net de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail,

* 2 326,50€ brut de rappel de salaire (en ce comprise l'indemnité compensatrice de congés payés afférente) ;

* 1 730,52€ brut d'indemnité compensatrice de préavis (en ce comprise l'indemnité compensatrice de congés payés afférente) ;

* 311,36€ net d'indemnité de licenciement ;

* 9 439,20€ net de dommages-intérêts pour licenciement nul ;

* à titre subsidiaire, 1 585,00€ net de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* 2 000,00€ net d'indemnisation sur le fondement de l'article 700 du CPC au titre des frais irrépétibles de première instance, outre 2000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel, outre les entiers dépens de l'instance ;

- Ordonner la remise des bulletins de paie des mois de mai 2017 à avril 2018 le certificat de travail et l'attestation destinée à Pole Emploi, ainsi que la délivrance d'un justificatif de paiement des cotisations sociales afférent aux rappels de salaires, accessoires et préavis susvisés, à la charge de la société Prosegur, corrigés en fonction de l'arrêt à intervenir, et ce sous astreinte provisoire de 100,00 euros net par jour de retard,

- Ordonner que les intérêts au taux légal courront sur les condamnations financières de la société Prosegur, depuis le 24 mai 2018, date de la saisine, et ce sur le fondement de l'article 1237-1 du Code civil ;

- Ordonner l'exécution provisoire expresse du jugement à intervenir, au-delà de la simple exécution de droit prévue à l'article R. 1454-28 du Code du travail

Aux termes de ses dernières conclusions enregistrées au RPVA le 19 septembre 2022, la Sarl Prosegur Sécurité demande à la Cour de :

- Confirmer le jugement de première instance,

- Dire et juger que le contrat de travail à durée déterminée initialement conclue entre Monsieur [V] [Z] et la société Prosegur Sécurité l'a été pour l'exécution d'une tâche précise et temporaire, en raison d'un accroissement temporaire de l'activité de l'entreprise,

- Débouter par conséquent Monsieur [V] [Z] de sa demande en requalification et de la demande indemnitaire qui en résulte,

- Dire et juger que Monsieur [V] [Z] a perçu les primes d'habillage et de déshabillage et les primes de fonction auxquelles il pouvait prétendre en application des dispositions de la convention collective nationale applicable,

- Débouter par conséquent Monsieur [V] [Z] de ses demandes de ce chef,

- Dire et juger que Monsieur [V] [Z] n'établit pas avoir fait l'objet d'une discrimination abusive de la part de la société Fiducial Sécurité humaine, venant aux droits de la société Prosegur Sécurité humaine en raison de son statut de sapeurs-pompiers volontaires,

- Débouter par conséquent Monsieur [V] [Z] de sa demande de ce chef,

- Dire et juger que Monsieur [V] [Z] n'établit que la société Fiducial Sécurité, venant aux droits de la société Prosegur Sécurité Humaine aurait exécuté de façon déloyale son contrat de travail,

- Débouter par conséquent Monsieur [V] [Z] de sa demande de ce chef,

- Dire et juger que Monsieur [V] [Z] n'a pas été licencié en raison de son statut de sapeurs-pompiers volontaires,

- Débouter par conséquent Monsieur [V] [Z] de ses demandes relatives à la nullité de son licenciement,

- Dire et juger que le licenciement de Monsieur [V] [Z] repose sur une faute grave,

- Débouter par conséquent Monsieur [V] [Z] de l'intégralité de ses demandes,

- Condamner à titre reconventionnel, Monsieur [V] [Z] à verser à la société Fiducial Sécurité humaine, venant aux droits de la société Prosegur Sécurité humaine, une somme de 2.000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,

- Condamner, à titre reconventionnel, Monsieur [V] [Z] à verser à la société Fiducial Sécurité humaine, venant aux droits de la société Prosegur Sécurité Humaine une somme de 2.000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamner Monsieur [V] [Z] au frais et dépens de la présente procédure.

Pour l'exposé des prétentions et des moyens des parties, il est renvoyé, conformément à l'article 455 du Code de procédure civile, à leurs conclusions ci-dessus mentionnées et datées.

La procédure a été clôturée par ordonnance du 12 décembre 2022.

MOTIFS

Sur les demandes au titre de l'exécution du contrat de travail,

Sur la requalification en contrat à durée indéterminée,

L'article L. 1242-1 du Code du travail dispose qu' « un contrat de travail à durée déterminée, quel que soit son motif, ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise ».

L'article L. 1242-2 2° du Code du travail, dans sa rédaction applicable au présent litige, prévoit qu'un contrat de travail à durée déterminée ne peut être conclu que pour l'exécution d'une tâche précise et temporaire, et seulement dans les cas suivants, dont l'accroissement temporaire de l'activité de l'entreprise.

L'accroissement temporaire de l'activité de l'entreprise est caractérisé lorsque l'activité pérenne et constante tout au long de l'année connaît ponctuellement des pics de production soumis à un aléa, à une imprévisibilité.

Faute pour l'employeur de démontrer l'existence d'un tel accroissement temporaire de l'activité, le contrat doit être requalifié à durée indéterminée.

En l'espèce, le contrat à durée déterminée conclu par M. [Z] le 6 mai 2017 vise un accroissement temporaire exceptionnel de l'activité dû à 'une augmentation ponctuelle du volume des commandes demandées par notre client Carrefour Market [Localité 2]'.

Pour établir un tel accroissement d'activité, l'employeur expose que la société a été sollicitée début mai 2017 par la société Carrefour Market [Localité 2] pour assurer le gardiennage des travaux en cours sur le site. Elle verse aux débats deux courriels émanant de la société Carrefour Market, un premier courriel du 15 mars 2017 aux termes duquel le responsable sécurité régionale de Carrefour Market demande au responsable de l'agence de [Localité 5] d'arrêter la prestation de gardiennage sur le Carrefour Market de [Localité 2], et un second courriel du 9 mai 2017 aux termes duquel un chef de secteur chez Carrefour Market demande au responsable sécurité régionale le maintien du vigile de [Localité 2] jusqu'à la fin du mois de mai.

Le salarié conteste la réalité du motif d'accroissement temporaire d'activité mentionné sur le contrat de travail et soutient avoir été embauché pour remplacer un salarié de la société Prosegur. Il verse aux débats une attestation de M. [P] [H], adjoint du chef de magasin pour la société Carrefour Market, qui indique que M. [Z] est arrivé sur la période de 6 au 31 mai 2017 en remplacement d'un de ses collègues qui avait été affecté au Palais de justice et ajoute que M. [Z] n'a jamais fait de gardiennage de chantier ou travaillé en extérieur.

La société ne produit aux débats aucune pièce comptable ni aucune analyse chiffrée de ses carnets de commandes permettant de vérifier l'existence d'un accroissement temporaire de son activité à la date de conclusion du contrat. Le fait que la société ait été sollicitée début mai par son client Carrefour Market d'une demande de mise à disposition d'un agent de sécurité ne saurait suffire à caractériser un accroissement temporaire de son activité.

Dès lors, il sera fait droit à la demande de requalification du contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée à compter du 6 mai 2017. L'employeur sera condamné à payer au salarié une indemnité de requalification d'un montant de 1506,52€.

Sur la demande de rappel de primes,

Il appartient au salarié qui revendique une prime de justifier qu'il a droit à son attribution, en fonction de conventions ou d'usages. Ensuite, la charge de la preuve du paiement du salaire incombe à l'employeur qui se prétend libéré.

M. [Z] sollicite le versement des sommes de 219,15€ brut à titre de rappel de primes d'habillement et 235,96€ brut à titre de rappel de prime de primes de fonction.

S'agissant de la prime d'habillement,

Le salarié conteste le montant de la prime d'habillement qui lui a été versée entre le mois de juillet 2017 et le mois de mars 2018. Il fait valoir qu'il aurait du percevoir la somme forfaitaire et mensuelle de 54,94€ bruts. En réplique, l'employeur fait valoir que le montant de cette prime n'est pas forfaitaire mais qu'elle a été calculée conformément aux dispositions conventionnelles applicables, en fonction de l'horaire effectif de travail.

L'article 5 de l'accord du 30 octobre 2000 relatif aux salaires et dispositions diverses prévoit le versement d'une prime d'habillement 'proratisée en fonction du nombre d'heures prestées par le salarié, son montant en valeur - 0,86F par heure de prestation effectivement réalisée - demeurant identique quels que soient le salaire et/ou le coefficient du salarié'.

L'employeur justifie, par la production des bulletins de paie, avoir versé chaque mois au salarié une prime proratisée en fonction de nombre d'heures de travail réalisées, conformément à la disposition conventionnelle susvisée. Le salarié sera donc débouté de sa demande à ce titre.

S'agissant de la prime de fonction,

M.[Z] fait valoir qu'il aurait du percevoir une prime de fonction s'élèvant à la somme de 45,32€ bruts à compter du mois d'octobre 2017. En réplique, l'employeur soutient que cette prime était due au salarié pour les seuls mois ou il exercait des fonctions de qualification supérieure, soit pendant 4 mois en octobre, novembre, décembre 2017 et janvier 2018.

L'article 3 de l'Annexe IV Agents d'exploitation, employés administratifs et techniciens prévoit que 'Tout agent d'exploitation, employé administratif ou technicien assurant l'intérim d'un poste de classification supérieure pendant une période continue de plus de 2 mois recevra, à partir du troisième mois, une indemnité mensuelle qui ne peut être inférieure à la différence entre son salaire et le salaire minimal conventionnel de la catégorie du poste dont il assure l'intérim'.

L'employeur justifie, par la production des bulletins de paie, avoir versé au salarié une prime de fonction de 45,32€ en octobre et novembre 2017, 20,54€ en décembre 2017 et 31,04€ en janvier 2018. Le salarié ne justifie par aucun élément qu'il remplissait les conditions pour continuer à bénéficier de cette prime au delà de cette période. Il sera donc débouté de sa demande à ce titre.

Sur les demandes indemnitaires de M. [Z],

- dommages et intérêts au titre de la discrimination abusive,

M. [Z] sollicite la somme de 2 500,00€ net de dommages-intérêts estimant avoir été discriminé en raison de son statut de sapeur pompier volontaire.Il fait grief à l'employeur de lui avoir imposé des horaires de travail incompatibles avec son statut de sapeur-pompier volontaire et d'avoir, par rétorsion, retenu la transmission de l'attestation de prise en charge de la complémentaire santé. Il ajoute que ces pressions ont conduit à la dégradation de son état de santé.

Il produit aux débats ses plannings, des échanges de mails indiquant notamment qu'une demande d'aménagement d'horaire a été refusée au salarié et un certificat médical du 27 avril 2018, établi par le Dr [K] [Y] [D], médecin généraliste, qui indique avoir reçu le salarié à compter de janvier 2018 et avoir constaté une montée de sa tension suite à un stress professionnel.

Ces éléments ne laissent pas présumer l'existence d'une discrimination fondée sur l'activité parallèle de sapeur-pompier volontaire occupée par le salarié. Le fait qu'une demande d'aménagement de planning lui ait été refusée en raison de sa demande tardive ne saurait suffire à présumer l'existence d'une discrimination. Au contraire, l'employeur justifie, sans que cela ne soit contesté, avoir proposé au salarié d'effectuer des journées de grande amplitude pour tenir compte de son activité parallèle. Par ailleurs, le licenciement du salarié, intervenu pour faute grave et précisement motivé, ne fait aucune référence à son statut de sapeur pompier volontaire.

Il convient de débouter le salarié de sa demande à ce titre.

- dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail,

L'article L 1222-1 du Code du travail dispose que le contrat de travail doit être exécuté de bonne foi.

En l'espèce, le salarié fait grief à l'employeur d'avoir pris en compte son statut de sapeur-pompier volontaire afin de lui nuire, d'avoir changé son planning régulièrement et brusquement, et d'avoir mentionné sur l'attestation Pôle emploi une date de fin effective du contrat au 10 avril 2018 alors que le salarié a été mis à pied le 8 mars 2018.

M. [Z] ne démontre aucun manquement de l'employeur à ses obligations en matière de temps de travail ni volonté de l'employeur de lui nuire en raison de son activité parallèle de sapeur-pompier. Par ailleurs, la date de rupture du contrat mentionnée sur l'attestation Pôle correspond bien à la date de notification du licenciement intervenu le 16 avril 2018Il convient de débouter le salarié de sa demande de dommages et intérêts au titre de l'exécution déloyale du contrat de travail.

Sur le licenciement,

Sur le bien fondé du licenciement,

La faute grave résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise. La charge de la preuve de la gravité de la faute privative des indemnités de préavis et de licenciement incombe à l'employeur débiteur qui prétend en être libéré.

La lettre de licenciement fixe les limites du litige et c'est au regard des motifs qui y sont énoncés que s'apprécie le bien-fondé du licenciement.

En l'espèce, l'employeur reproche au salarié d'avoir adopté une attitude non professionnelle chez deux de ses clients, la CPAM et le tribunal de grande instance, et d'avoir adopté un comportement agressif à deux reprises le 21 février, à l'égard du responsable des accueils de la CPAM, et le 8 mars 2018, à l'égard de l'un de ses supérieurs hiérarchiques, M. [F] et d'un collègue de travail, M. [O].

L'employeur produit aux débats:

- Un e-mail du 20 février 2018 aux termes duquel, M. [U], responsable du service accueil de la CPAM de l'Hérault, demande à la société de ne plus faire intervenir M. [Z] sur le site de la CPAM. Il lui est reproché de n'avoir pas respecté les consignes de travail, et notamment d'être resté assis, consultant son téléphone, de ne pas avoir mentionné ses pauses sur la main courante, de ne pas être resté à disposition pendant ses pauses et d'avoir quitté son poste sans attendre la relève.

- Par e-mail du 22 février 2018, M. [U] et M. [E], responsable prévention logistique de la CPAM ont réitéré leur demande de ne plus voir intervenir M. [Z] sur le site de la CPAM en faisant référence à un autre incident intervenu le 21 février 2018. Il est reproché au salarié d'avoir adopté une atttitude agressive à l'égard du responsable des accueils de la CPAM, M. [A], lorsque ce dernier lui a demandé de se tenir debout,

- Un e-mail du 8 mars 2018 aux termes duquel Mme [X], attachée d'administration au tribunal de grande instance de Béziers, se plaint à la société Prosegur du comportement de M. [Z] sur le site en lui reprochant de partir en pause en cours de service.

- Une attestation de M. [O], collègue de M. [Z], qui rapporte les faits s'étant produits le 8 mars 2018 et auxquels il a personnellement assisté. Il indique que M. [Z] a eu un comportement agressif et provocateur à son égard ainsi qu'à l'égard de M. [F], son supérieur hiérarchique. Il rapporte notamment que M. [Z] a 'd'un ton colérique pris a parti M. [F]', en lui disant 'il va falloir qu'on parle ensemble entre quatre yeux, une discussion d'homme à homme' lui a crié dessus, puis 'il s'est mis devant moi, était très agressif'. Ces faits ont fait l'objet d'un rapport d'incident rédigé par M. [O] qui est également produit aux débats.

- Une attestation de M. [F], adjoint d'exploitation de la Sarl Prosegur qui rapporte également les faits s'étant produits le 15 mars 2018 et auxquels il a personnellement assisté.

En réplique, le salarié fait valoir qu'aucune consigne précise ne lui aurait été donnée quant à l'usage du téléphone portable et à la position assise et verse aux débats une attestation de Mme [L], employée à la CPAM de l'Hérault soulignant le professionnalisme du salarié. S'agissant de l'incident du 8 mars 2018 au tribunal de grande instance de Béziers, le salarié fait valoir qu'aucune enquête n'a été menée par la hiérarchie pour établir la réalité des faits.

Les courriels émanant de deux clients de la société demandant à ce que le salarié n'intervienne plus sur leurs sites en raison de son absence de professionnalisme permettent d'établir la matérialité des faits reprochés aux salariés. La gravité de ces faits résulte notamment de leur impact sur les relations qu'entretient la société Prosegur avec sa clientèle.

Par ailleurs, l'attitude agressive adoptée par le salarié le 8 mars 2018 est établie par les témoignages de M. [O] et M. [F], lesquels relatent dans des termes précis, circonstanciés et concordants entre eux que ce jour-là, M. [Z] avait eu un comportement agressif à leur encontre. Il convient de souligner qu'un autre client de la société, le tribunal de grande instance de Béziers, avait déjà reproché au salarié d'avoir adopté un comportement agressif quelques jours auparavant le 22 février 2018. Ces témoignages attestent de réactions inadaptées de la part du salarié, tant en raison de leur caractère violent que de la nature de ses fonctions.

La nature des manquements et leur répétition donnent aux faits reprochés caractère de gravité d'une importance telle que le maintien dans l'entreprise de M. [Z] était impossible ce qui justifiait son licenciement pour faute grave.

Le jugement doit être confirmé et le salarié débouté de toutes ses demandes.

Sur les demandes accessoires,

L'équité commande de ne pas faire application de l'article 700 du code de procédure civile.

Il convient d'ordonner la remise au salarié de ses documents de fin de contrat rectifiés, sans qu'il n'y ait lieu de prononcer une astreinte.

PAR CES MOTIFS,

La Cour, après en avoir délibéré, par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe ;

Infirme le jugement du conseil de prud'hommes de Béziers du 2 juillet 2020 en ce qu'il a rejeté la demande de requalification du contrat à durée déterminée conclu le 6 mai 2017 en contrat à durée indéterminée,

Statuant à nouveau sur ce point réformé,

Requalifie le contrat à durée déterminée conclu le 6 mai 2017 en contrat à durée indéterminée,

En conséquence, condamne la Sarl Prosegur Sécurité à verser à M. [V] [Z] 1506,52€ net d'indemnité de requalification,

Ordonne à la Sarl Prosegur Sécurité de remettre à M. [V] [Z] dans le délai de deux mois suivant la notification de l'arrêt les documents de fin de contrat rectifiés et conformes, sans qu'il n'y ait lieu de prononcer une astreinte.

Confirme le jugement pour le surplus

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile;

Condamne M. [V] [Z] aux dépens.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 2e chambre sociale
Numéro d'arrêt : 20/03103
Date de la décision : 01/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-01;20.03103 ?
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