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21/02/2023 | FRANCE | N°20/03755

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 5e chambre civile, 21 février 2023, 20/03755


Grosse + copie

délivrées le

à































COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



5e chambre civile



ARRET DU 21 FEVRIER 2023



Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 20/03755 - N° Portalis DBVK-V-B7E-OVVV



Décision déférée à la Cour : Jugement du 30 JUILLET 2020

Tribunal Judiciaire de PERPIGNAN

N° RG 18/00855





APPELANTE :



S.A. LA TOURRE

PLAGE Société Anonyme à conseil d'administration, et pour elle son représentant légal en exercice, domicilié en cette qualité audit siège social

[Adresse 9]

[Adresse 9]

[Localité 7]

Représentée par Me Sylvain DONNEVE de la SCP DONNEVE - GIL, avocat au barreau ...

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

5e chambre civile

ARRET DU 21 FEVRIER 2023

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 20/03755 - N° Portalis DBVK-V-B7E-OVVV

Décision déférée à la Cour : Jugement du 30 JUILLET 2020

Tribunal Judiciaire de PERPIGNAN

N° RG 18/00855

APPELANTE :

S.A. LA TOURRE PLAGE Société Anonyme à conseil d'administration, et pour elle son représentant légal en exercice, domicilié en cette qualité audit siège social

[Adresse 9]

[Adresse 9]

[Localité 7]

Représentée par Me Sylvain DONNEVE de la SCP DONNEVE - GIL, avocat au barreau des PYRENEES-ORIENTALES, avocat postulant

assistée de Me Ouiçal MOUFADIL, avocat au barreau de MONTPELLIER substituant Me Vincent DELPAL, avocat au barreau de LA ROCHELLE-ROCHEFORT, avocat plaidant

INTIMES :

Monsieur [S] [C]

né le 11 Décembre 1921 à [Localité 11] (66)

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Localité 7]

Représenté par Me Olivier REDON de la SCP DONNADIEU-BRIHI-REDON-CLARET-ARIES-ANDRE, avocat au barreau des PYRENEES-ORIENTALES, avocat postulant et plaidant

Madame [P] [C] épouse [T]

née le 20 Février 1958 à [Localité 13]

de nationalité Française

[Adresse 5]

[Localité 7]

Représentée par Me Olivier REDON de la SCP DONNADIEU-BRIHI-REDON-CLARET-ARIES-ANDRE, avocat au barreau des PYRENEES-ORIENTALES, avocat postulant et plaidant

Monsieur [I] [C]

né le 20 Janvier 1946 à [Localité 13]

de nationalité Française

[Adresse 3]

[Localité 7]

Représenté par Me Olivier REDON de la SCP DONNADIEU-BRIHI-REDON-CLARET-ARIES-ANDRE, avocat au barreau des PYRENEES-ORIENTALES, avocat postulant et plaidant

Madame [Y] [C]

née le 28 Janvier 1950 à [Localité 13]

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Localité 6]

Représentée par Me Olivier REDON de la SCP DONNADIEU-BRIHI-REDON-CLARET-ARIES-ANDRE, avocat au barreau des PYRENEES-ORIENTALES, avocat postulant et plaidant

Ordonnance de clôture du 19 Décembre 2022

COMPOSITION DE LA COUR :

En application de l'article 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 09 JANVIER 2023, en audience publique, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par l'article 804 du même code, devant la cour composée de :

Monsieur Philippe GAILLARD, Président de chambre

Madame Nathalie AZOUARD, Conseiller

M. Emmanuel GARCIA, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Sylvie SABATON

ARRET :

- contradictoire

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par Monsieur Philippe GAILLARD, Président de chambre, et par Madame Sylvie SABATON, greffier.

*

* *

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Le 1er février 1979 [S] [C], [P] [C], [I] [C] et [Y] [C] ont donné à bail commercial pour une durée de 30 ans à la SA LA TOURRE PLAGE des locaux à usage de camping situés à [Localité 12] parcelles cadastrées section AW N°[Cadastre 8] et AW N°[Cadastre 4] sous l'enseigne [Adresse 9].

Un nouveau bail a été conclu le 25 mars 2010 pour une durée de 9 ans.

Par acte du 31 décembre 2017, les consorts [C] ont délivré congé avec offre de renouvellement du bail en sollicitant la fixation du loyer annuel à la somme de 25 000 €.

En l'absence de toute réponse de la locataire et suite à un mémoire signifié le 9 janvier 2018 par acte en date du 26 février 2018 les consorts [C] ont saisi le juge des loyers commerciaux du tribunal de grande instance de Perpignan aux fins à titre principal de fixation du loyer à la somme de 25 067€ par an à compter du 1er janvier 2018.

Par jugement en date du 28 juin 2018, le juge des loyers commerciaux du tribunal de grande instance de Perpignan a avant dire droit sur la détermination du montant du loyer renouvelé ordonné une expertise et désigné Monsieur [G] en qualité d'expert pour y procéder.

L'expert a déposé son rapport au greffe le 2 mai 2019.

Le jugement rendu le 30 juillet 2020 par le juge des loyers commerciaux du tribunal judiciaire de Perpignan énonce dans son dispositif :

fixe la valeur locative du bail renouvelé à la somme de 55 601,86 € par an à compter du 1er janvier 2018;

condamne la SA LA TOURRE PLAGE au paiement de la somme de 2 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile;

condamne la SA LA TOURRE PLAGE aux dépens y compris les frais de l'expertise judiciaire.

Sur la demande d'irrecevabilité soulevée par la SA LA TOURRE PLAGE sur le fondement de l'estopel le juge des loyers commerciaux la rejette au motif que ce principe selon lequel nul ne peut se contredire au détriment d'autrui doit être limité aux prétentions formées au cours d'une même instance judiciaire, or en l'espèce l'examen des prétentions des consorts [C] n'appellent pas le constat de contradictions puisque dès leur mémoire initial ils ont sollicité la modification du loyer en application des dispositions de l'article L 145-10 du code de commerce et qu'il n'est pas relevé de comportement procédural constitutif d'un changement de position de nature à induire la SA LA TOURRE PLAGE en erreur sur les prétentions des bailleurs.

Sur la valeur locative le juge des loyers commerciaux après avoir rappelé les dispositions de l'article R 145-10 du code de commerce sur le déplafonnement du loyers des baux à caractère monovalent ce qui est le cas en l'espèce s'agissant d'un camping, rappelle également que la soumission du bail aux dites dispositions exclut l'application de celles de l'article R 145-8 qui permet de prendre en compte les améliorations apportées par le preneur et que selon les usages au regard de la branche d'activité considérée, le loyer est fixé en fonction du chiffre d'affaires net moyen des trois dernier exercice précédant le renouvellement du bail soit au cas présent le CA au 29 février 2016, la CA au 28 février 2017 et le CA au 31 décembre 2017.

Le jugement écarte ainsi les documents comptables produits par la locataire pour l'exercice clos au 31 décembre 2018 soit à une date postérieure à celle du renouvellement.

Il retient donc une moyenne de chiffre d'affaires net de 2 986 939 € sur lequel il applique un taux d'effort de 15% et non de 11,5% comme proposé par l'expert judiciaire compte tenu du classement du camping en 4 étoiles.

Le jugement retient ensuite que la valeur locative doit être calculée non pas sur la quote part totale de propriété foncière des consorts [C] mais sur la quote-part exploitable de propriété foncière des consorts [C] soit:

2 986 939 x 15% x 12,41% ( proportion de superficies objet du bail) = 55 601,86 €.

La SA LA TOURRE PLAGE a relevé appel du jugement par déclaration au greffe de la cour en date du 9 septembre 2020.

La clôture de la procédure a été prononcée par ordonnance du 19 décembre 2022.

Les dernières écritures prises pour la SA LA TOURRE PLAGE ont été déposées le 8 décembre 2020.

Les dernières écritures prises pour les consorts [C] ont été déposées le 11 décembre 2020.

Le dispositif des écritures de la SA LA TOURRE PLAGE énonce en ses seules prétentions :

Prononcer la nullité du jugement dont appel ou subsidiairement le réformer en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau,

A titre principal,

Déclarer irrecevables les demandes, fins et conclusions des consorts [C],

A titre subsidiaire,

Rejeter les demandes, fins et conclusions des consorts [C],

Fixer à 20 069,86 € par an le loyer des locaux objets du bail commercial,

A titre infiniment subsidiaire,

Fixer à 23 780 € par an le loyer des locaux objets du bail commercial jusqu'au 1er janvier 2020,

Fixer à 9 432,83 € par an le loyer du bail renouvelé à compter du 1er janvier 2020,

En tout état de cause,

Condamner les consorts [C] à verser la somme de 6 000 € en vertu de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

L'appelante soutient en premier lieu l'irrecevabilité des demandes des consorts [C] par application du principe de l'estopel en ce que :

- les consorts [C] ont demandé l'application pure et simple de l'article R 145-10 du code de commerce qui nécessite une étude comparative,

- le jugement avant dire droit a ordonné une expertise en demandant à l'expert d'appliquer la méthode hôtelière avec confrontation de cette méthode avec la méthode économique et la méthode par comparaison,

- après le dépôt du rapport d'expertise les consorts [C] ont changé de position pour solliciter l'application de la méthode hôtelière uniquement,

- ce changement de position constitue bien un estopel à partir du moment où il se fait au détriment de la locataire puisque les bailleurs formulent une demande financière doublée par rapport à leur demande initiale en évitant un débat contradictoire devant l'expert.

Pour soutenir la nullité du jugement déférée la SA LA TOURRE PLAGE fait valoir pour l'essentiel que le juge a violé le principe du contradictoire en écartant le rapport d'expertise au motif de critique stérile sans demander à l'expert de compléter son travail et en se référant sur une précédente décision rendue par la cour d'appel concernant un autre bail signé par la SA LA TOURRE PLAGE;

Sur le fond, la SA LA TOURRE PLAGE fait valoir qu'en prenant en compte les résultats comptables pour l'année 2018 il en ressort une valeur locative de 20 069,86 € par an.

Elle ajoute qu'à compter du 1er janvier 2020 en raison de la crise sanitaire qui a généré une baisse de chiffre d'affaires de 47% et en application de l'article 1195 du code civil qui permet une révision des conditions d'un contrat en cas de changement de circonstances imprévisibles la valeur locative doit être fixée à 9 432,83 € par an.

Le dispositif des écritures des consorts [C] énonce:

Déclarer irrecevables et en tous cas mal fondées les demandes de la SA LA TOURRE PLAGE,

Confirmer le jugement dont appel,

Y ajoutant,

Dire que le reliquat du loyer portera intérêts au taux légal à compter du 1er janvier 2018 avec capitalisation des intérêts;

Condamner la SA TOURRE PLAGE au paiement de la somme de 5 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de première instance et d'appel avec bénéfice de distraction.

Sur le caractère mal fondé du moyen de la nullité du jugement en raison de la violation du principe de l'estopel les consorts [C] opposent :

-que leurs demandes ne sont nullement contradictoires puisqu'ils ont toujours demandé une modification du loyer sur le fondement de l'article L 145-10 du code de commerce s'agissant de locaux monovalents,

-qu'à ce titre au vu des usages en fonction de la branche d'activité plusieurs méthodes peuvent être proposées par l'expert et retenues par le juge,

-que le fait pour le bailleur d'écarter la méthode de comparaison qui n'est pas probante n'est donc pas contradictoire,

-qu'un rapport d'expertise ne sert qu'à éclairer le juge qui est libre ensuite de s'y fonder ou pas pour statuer.

Sur le montant du loyer du bail renouvelé les consorts [C] font valoir que le loyer ne saurait être fixé à la somme de 20 069,86 € en se fondant sur deux attestations rédigées par l'expert comptable de la locataire et en ne tenant compte que du dernier exercice clôturé le 31 décembre 2018 alors que non seulement ces attestations ne respectent pas le principe du contradictoire et que surtout le montant de la valeur locative doit être déterminé en fonction du chiffre d'affaires sur la période antérieure au renouvellement soit en l'espèce au 31 décembre 2017.

Enfin sur la demande de réduction en cause d'appel pour changement de conditions imprévisibles les consorts [C] opposent en premier lieu qu'elle est irrecevable comme nouvelle en appel et ne tendant pas aux mêmes fins que la demande en fixation du loyer du bail renouvelé et que la présente instance a pour objet de fixer le loyer loyer à la date du renouvellement c'est à dire au 1er janvier 2018.

Sur le fond ils font valoir que cette demande n'est pas pertinente dans la mesure où le camping est resté ouvert durant les trois étés qui ont suivi le renouvellement du bail et que la baisse du chiffre d'affaires qui n'est pas d'ailleurs imprévisible ne trouve par sa cause dans la crise du COVID.

MOTIFS

La cour rappelle tout d'abord qu'en application de l'article 954 du code de procédure civile elle ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des dernières conclusions des parties, c'est à dire sur ce à quoi prétend une partie et que la formulation dans le dispositif des conclusions de voir «dire et juger» et/ou «constater» ne constitue pas une prétention et que la cour n'est donc pas tenue d'y répondre.

Sur la nullité du jugement dont appel:

Pour solliciter la nullité du jugement déféré l'appelante argue du non respect par le juge du principe du contradictoire en ce que le juge aurait écarté les conclusions du rapport d'expertise au motif de critique stérile sans demander à l'expert de compléter son rapport et en se référant à une décision rendue précédemment par la cour d'appel de Montpellier dans une instance entre certes la SA TOURRE PLAGE mais opposée à d'autres bailleurs que les consorts [C] et pour un bail commercial différent.

La cour rappelle que le juge n'est pas tenu par les conclusions d'un rapport d'expertise judiciaire lequel n'a que pour but d'éclairer le magistrat dans sa prise de décision et que le juge peut donc décider de ne pas fonder sa décision en totalité ou en partie sur les conclusions d'un rapport d'expertise si celles-ci ne lui paraissent pas pertinentes.

En l'espèce le juge des loyers commerciaux par des motifs qui peuvent faire l'objet de critique ce qui est l'objet du procès en appel à décider d'écarter au moins en partie les conclusions expertales ce qui ne saurait entrainer la nullité du jugement.

Par ailleurs le fait que le jugement dont appel ait retenu un taux de rendement de 15% comme l'a déjà retenu la cour d'appel de Montpellier dans un arrêt du 27 juin 2017 opposant les consorts [Z] à la SA TOURRE PLAGE ne constitue en rien une atteinte au principe du contradictoire dans la mesure où le juge comme les parties peuvent toujours faire référence à la jurisprudence et dans la mesure surtout où cette décision a pu être discutée par les parties à l'instance dans le cadre d'un débat contradictoire en particulier devant l'expert judiciaire qui a eu communication du dit arrêt par la SA TOURRE PLAGE.

La SA TOURRE PLAGE sera donc déboutée de sa demande de nullité du jugement déféré.

Sur l'irrecevabilité des demandes des consorts [C]:

L'appelante reproche au premier juge d'avoir écarté sa demande d'irrecevabilité en ne retenant pas l'application du principe de l'estopel.

Il sera rappelé que la fin de non-recevoir tirée du principe de l'estoppel selon lequel nul ne peut se contredire au détriment d'autrui ne peut être efficacement invoquée que si des positions contraires sont adoptées au cours d'une même instance et qu'elle sanctionne l'attitude procédurale consistant pour une partie, au cours d'une même instance, à adopter des positions contraires ou incompatibles entre elles dans des conditions qui induisent en erreur son adversaire sur ses intentions.

En outre comme souligné par le premier juge ce principe selon lequel nu ne peut se contredire au détriment d'autrui est limité aux prétentions des parties et non pas aux moyens.

Or en l'espèce les demandes des bailleurs ne sont nullement contradictoires puisqu'ils ont toujours demandé une modification du loyer sur le fondement de l'article L 145-10 du code de commerce s'agissant de locaux monovalents, et qu'à ce titre au vu des usages en fonction de la branche d'activité plusieurs méthodes peuvent être proposées par l'expert et retenues par le juge, si bien que le fait de fonder leurs prétentions successivement sur l'une ou l'autre des méthodes ne peut être constitutif d'un changement de position de nature à induire en erreur la SA TOURRE PLAGE sur les intentions des consorts [C].

Par conséquent le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a débouté la SA TOURRE PLAGE de sa demande d'irrecevabilité.

Sur la fixation du loyer du bail renouvelé à compter du 1er janvier 2018 :

Comme observé par le juge des loyers commerciaux la fixation du prix du loyer de renouvellement d'un terrain de camping relève des dispositions des article R 145-9 et R 145-10 du code de commerce et les règles dites de « plafonnement du loyer » de l'article L 145-34 du dit code ne sont pas applicables et en raison de l'activité spécifique de camping il est admis que pour déterminer la valeur locative du bail renouvelé d'un terrain de camping la méthode la plus couramment employée est la méthode hôtelière appliquée à la spécificité des terrains à usage de camping.

En l'espèce d'ailleurs les deux parties s'accordent sur l'application de la méthode hôtelière pour déterminer la valeur locative du bail renouvelé à compter du 1er janvier 2028.

Valeur locative selon la méthode hôtelière:

Il sera rappelé que la méthode hôtelière appliquée à l'activité de camping avec ses annexes ( restauration, piscine....) repose sur la recette théorique annuelle à laquelle est appliquée un pourcentage ou taux de rendement suivant la catégorie du camping.

*recette théorique:

La démarche de l'expert judiciaire ne saurait être critiquée en ce qu'il a d'abord déterminé la recette théorique puis en ce qu'il a essayé de reconstituer la recette, en se basant sur certains éléments comptables produits en particulier pour l'année 2016/2017 pour reconstituer les exercices 2025/2016 et 2014/2015.

Le fait que le preneur n'ait pas produit devant l'expert l'intégralité des documents comptables ne peut conduire comme l'a fait le jugement entrepris à se borner à prendre en considération uniquement le chiffre d'affaires net moyen du camping sur les trois derniers exercice précédant le renouvellement du bail.

La cour ajoute que d'ailleurs les chiffres proposés par l'expert [G] qui prennent en compte non seulement la recette du camping mais aussi les commissions, les locations hors terrain, les achats de sous traitance, les sous locations chez les propriétaires et le crédit bail ne sont pas critiqués par les parties.

C'est également de façon pertinente que l'expert n'a pas pris en considération l'exercice 2017/2018 celui-ci n'étant pas complet les bilans comptables portant sur des exercices commençant au 1er mars pour se terminer au 28 février de chaque année.

Enfin comme l'a fait le premier juge la cour ne pourra qu'écarter les documents de son expert comptable produits par la SA TOURRE PLAGE devant le tribunal et prenant en compte le dernier exercice clôturé au 31 décembre 2018 soit postérieurement à la date du renouvellement.

Par conséquent la cour retient une moyenne de chiffre d'affaires de 2 366 113 € comme proposé par l'expert judiciaire.

*taux de rendement ou taux de recette:

La cour rappelle que la SA TOURRE PLAGE exploite le camping [10] sur de nombreuses parcelles cadastrales sises à [Localité 12] appartenant à différents propriétaires et faisant l'objet de différents baux pour une superficie globale de 152 729 m² les parcelles louées aux consorts [C] représentant une surface de 12 439 m².

L'expert [G] a proposé un taux de rendement de 11,5% en exposant que pour un camping classifié en catégorie 4 étoiles les usages professionnels prévoyaient un taux compris entre 11 et 12 %.

Le juge des loyers commerciaux a toutefois fait le choix pertinent d'appliquer un taux de 15% au regard d'une part de la progression de la fréquentation des campings haut de gamme au niveau national mais aussi pour être en cohérence avec un arrêt rendu par la cour d'appel de Montpellier le 20 juin 2017 ayant retenu pour le même camping [10] pour la détermination de la valeur locative d'autres parcelles loués un taux de rendement de 15%.

Les parties ne formulant aucune critique sur l'appréciation par le premier juge du taux de rendement à 15%, la cour retiendra ce taux.

*valeur locative des parcelles cadastrées section AW N°[Cadastre 8] et AW N°[Cadastre 4] objets du bail renouvelé, le juge des loyers commerciaux a à juste titre retenu non pas la quote part totale de propriété foncière des consorts [C] mais la quote part exploitable de propriété foncière des consorts [C] évaluée à 12,41% ce qui ne fait l'objet d'aucune critique par les parties.

Par conséquent il résulte de l'ensemble de ces élément que l'application de la méthode hôtelière fait ressortir le prix du bail du loyer renouvelé à 44 045,19 € (2 366 113 x 15% x 12,41%) à compter du 1er janvier 2018.

Sur la fixation du loyer à compter du 1er janvier 2020:

Pour la première fois devant la cour la SA TOURRE PLAGE sollicite qu'à compter du 1er janvier 2020 la valeur locative annuelle soit réduite à 20 069,86 € pour tenir compte d'une très forte baisse du chiffre d'affaires en 2020 en raison de la crise sanitaire sur le fondement de l'article 1195 du code civil.

Toutefois cette demande ne pourra qu'être déclarée irrecevable dans la mesure où il s'agit d'une demande nouvelle en appel à savoir la modification en cours de bail de l'une des obligations contractuelles en raison de circonstances imprévisibles et qui ne tend pas au mêmes fins que la fixation du loyer du bail renouvelé.

Sur les demandes accessoires:

Le jugement dont appel sera confirmé en ses dispositions au titre des frais irrépétibles et des dépens.

En outre si l'équité en appel commande de ne pas faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile la SA TOURRE PLAGE succombant au principal en son appel sera condamnée aux dépens de la présente procédure.

PAR CES MOTIFS:

La cour statuant par arrêt contradictoire et rendu par mise à disposition au greffe;

Déboute la SA TOURRE PLAGE de sa demande de nullité du jugement rendu le 30 juillet 2020 par le tribunal de judiciaire de Perpignan;

Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 30 juillet 2020 par le tribunal de judiciaire de Perpignan sauf en ce qui concerne le montant de la valeur locative ;

S'y substituant et y ajoutant,

Fixe la valeur locative à la somme de 44 045,19 € par an à compter du 1er janvier 2018 du bail commercial liant les consorts [C] à la SA TOURRE PLAGE;

Déclare irrecevable la demande de la SA TOURRE PLAGE de fixation du loyer à compter du 1er janvier 2020 à la somme de 20 069,86 €;

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile;

Condamne la SA TOURRE PLAGE aux dépens de la procédure d'appel.

Le Greffier Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 5e chambre civile
Numéro d'arrêt : 20/03755
Date de la décision : 21/02/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-02-21;20.03755 ?
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