Grosse + copie
délivrées le
à
COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
1re chambre de la famille
ARRET DU 17 FEVRIER 2023
Numéro d'inscription au répertoire général :
N° RG 22/03190 - N° Portalis DBVK-V-B7G-POPR
Décision déférée à la Cour :
Jugement du 28 MARS 2022
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BEZIERS
N° RG 20/02137
APPELANT :
Monsieur [W] [L] [H]
né le 25 Juillet 1957 à [Localité 12] (MAROC)
de nationalité Française
[Adresse 7]
[Localité 9]
Représenté par Me Sandrine DUMAS de la SELARL ACTIUM AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de BEZIERS, substituée par Me Laure BENHAFESSA, avocat au barreau de MONTPELLIER
INTIMEE :
Madame [I] [N] [S] divorcée [H]
née le 24 Novembre 1955 à [Localité 11]
de nationalité Française
[Adresse 1]
[Localité 5]
Représentée par Me Marie-Hélène BES, avocat au barreau de BEZIERS
Ordonnance de clôture du 29 Novembre 2022
COMPOSITION DE LA COUR :
En application de l'article 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 06 DECEMBRE 2022, en audience publique, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par l'article 804 du même code, devant la cour composée de :
Madame Catherine KONSTANTINOVITCH, Présidente de chambre
Madame Nathalie LECLERC-PETIT, Conseillère
Madame Morgane LE DONCHE, Conseillère
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Séverine ROUGY
ARRET :
- Contradictoire ;
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;
- signé par Madame Catherine KONSTANTINOVITCH, Présidente de chambre, et par Madame Séverine ROUGY, greffière.
*
* *
FAITS ET PROCÉDURE
Du mariage de M. [W] [H] et Mme [I] [S] le 25 juillet 1981, sans contrat préalable, sont issus deux enfants : [G] [H], née le 1er mai 1981 et [M] [H], née le 4 juillet 1983.
Par jugement en date du 16 avril 2019, le juge aux affaires familiales du Tribunal de grande instance de Béziers a prononcé le divorce des époux et renvoyé les parties à la liquidation amiable de leurs intérêts patrimoniaux.
Par acte d'huissier en date du 15 octobre 2020, Mme [I] [S] a assigné M. [W] [H] devant le juge aux affaires familiales du Tribunal judiciaire de Béziers aux fins de liquidation et partage de leurs intérêts patrimoniaux.
Par jugement contradictoire rendu le 28 mars 2022, le juge aux affaires familiales :
déclarait recevable la demande en partage judiciaire
ordonnait l'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage judiciaire de l'indivision existant entre les ex-époux
au préalable, ordonnait une mesure d'expertise et commettait pour y procéder M. [U] [J], expert immobilier, avec la mission suivante :
se faire remettre copie, en leur intégralité, des titres de propriété de tous les biens immobiliers : les 2 biens immobiliers sis [Localité 13], le bien sis à [Localité 10] composé de 6 appartements, et le bien sis à [Localité 9], en véri'er les adresses
se rendre sur les lieux
déterminer la valeur des 4 biens immobiliers, dire s'ils sont partageables en nature
déterminer une mise à prix en cas de ventes aux enchères
déterminer les modalités de financement de l'acquisition et chiffrer ce que chaque partie a payé
déterminer si des travaux ont été effectués sur le bien immobilier sis à [Localité 9], bien propre de M. [H], en déterminer le montant et le financement
d'une manière générale, déterminer si l'une ou l'autre des parties est fondée à revendiquer une créance à l'égard de l'indivision ou de l'autre partie en raison notamment d'apports effectués
donner tout élément utile à la solution du litige
à ces diverses 'ns, entendre tout sachant, procéder à toute recherche utile auprès des débiteurs ou de ceux qui détiennent des valeurs pour le compte des parties sans que le secret professionnel puisse lui être opposé ; se faire remettre tout relevé de comptes, document bancaire, comptable et fiscal et tous autres documents dont il estimera la production nécessaire en intervenant directement, tant auprès des parties qu'auprès de ceux qui détiennent des valeurs pour leur compte, sans que ces derniers puissent opposer le secret professionnel ; interroger le cas échéant le fichier FICOBA, la présente décision valant autorisation expresse de consulter ledit 'chier, ou tout autre 'chier permettant de connaître l'état du patrimoine des parties ; de façon générale, procéder à toutes investigations utiles dans le respect du principe du contradictoire ;
répondre à toute question posée par les parties et instruire toute difficulté dont la solution paraîtra utile à la solution du litige
fixait à 2 000€ le montant de la provision à valoir sur la rémunération de l'expert que Mme [S] devra consigner, sauf à se prévaloir du béné'ce de l'aide juridictionnelle, dans le mois de l'avis qui lui sera adressé par le greffe, par chèque adressé avec les références du dossier au greffe du Tribunal judiciaire de Béziers, service des expertises
disait qu'à défaut de consignation dans les délais, la désignation de l'expert sera caduque
disait que l'expert devra déposer son rapport dans les 9 mois à compter du jour où il aura été saisi de sa mission par le greffe après consignation de la provision et qu'il en adressera copie aux avocats des parties en mentionnant cette remise sur l'original du rapport
réservait le surplus des demandes
partageait les dépens par moitié entre les parties et les déclarait frais privilégiés de partage.
****
M. [W] [H] a relevé appel de ce jugement par déclaration au greffe en date du 15 juin 2022 aux fins de réformation des chefs de la recevabilité de la demande en partage judiciaire, de l'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage judiciaire de l'indivision, et de la mesure d'expertise.
Les dernières écritures de l'appelant ont été déposées le 25 novembre 2022 et celles de l'intimée le 29 août 2022.
L'ordonnance de clôture a été prononcée le 29 novembre 2022.
PRÉTENTIONS DES PARTIES
M. [W] [H], dans le dispositif de ses dernières écritures en date du 25 novembre 2022 auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé, demande à la cour d'infirmer le jugement déféré des chefs critiqués par sa déclaration d'appel :
déclarer recevable et bien fondé son appel
ordonner l'ouverture des opérations de liquidation et partage de la communauté
désigner le Président de la Chambre des Notaires de L'Hérault à l'effet de commettre tel Notaire chargé de procéder aux opérations de compte, liquidation et partage de la communauté
rejeter la demande de Mme [I] [S] tendant à faire fixer une récompense au profit de la communauté pour des travaux prétendument exécutés sur l'immeuble situé à [Localité 9], bien propre de M. [H],
chiffrer les récompenses dues par la communauté à M. [H] aux sommes suivantes :
45 000€, suite à la donation effectuée par sa mère en 2007
29 751,49€, suite à la perception d'une assurance vie du fait du décès de sa mère le 23 Avril 2013
71 380,98 € suite à la perception par la communauté de ses loyers propres
rejeter la demande d'expertise sollicitée par Mme [I] [S] en l'absence de désaccord sur la valeur des biens
subsidiairement, si une expertise était ordonnée, ordonner que celle-ci reste à la charge exclusive de Mme [I] [S]
condamner Mme [I] [S] à lui payer une somme de 2 000€ par application des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile
condamner Mme [I] [S] aux entiers dépens.
Mme [I] [S], dans le dispositif de ses dernières écritures en date du 29 août 2022 auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé, demande à la cour, au visa des articles 815 et suivants du code civil et des articles 1360 et suivants du code de procédure civile, de confirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions :
ordonner l'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de la communauté
ordonner au préalable une mesure d'expertise confiée à M. [U] [J] selon la mission telle que définie par le jugement dont appel
débouter M. [W] [H] de l'intégralité de ses demandes
dire et juger que les dépens seront déclarés frais privilégiés de partage.
En application de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux écritures précitées pour l'exposé exhaustif des moyens des parties.
*****
SUR QUOI LA COUR
* Effet dévolutif de l'appel
L'étendue de l'appel est déterminée par la déclaration d'appel et peut être élargie par l'appel incident ou provoqué (articles 562 et 901 4° du code de procédure civile) alors que l'objet du litige est déterminé par les conclusions des parties (article 910-4 du code de procédure civile). L'objet du litige ne peut s'inscrire que dans ce qui est dévolu à la cour et les conclusions ne peuvent étendre le champ de l'appel.
En l'absence d'appel d'incident, la cour est saisie des chefs suivants : la recevabilité de la demande en partage judiciaire, l'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage judiciaire de l'indivision, les récompenses dues par et à la communauté, la mesure d'expertise, l'article 700 du code de procédure civile et les dépens.
* La recevabilité de la demande en partage judiciaire et l'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage judiciaire de l'indivision
En application de l'article 954 du code de procédure civile, les conclusions d'appel doivent expressément formuler les prétentions des parties, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion.
En l'espèce, M. [H] n'a pas émis de prétention dans le dispositif de ses conclusions quant à la recevabilité de la demande en partage judiciaire. Par ailleurs, il ne critique plus l'ouverture des opérations de compte liquidation et partage, puisqu'il sollicite lui-même dans le dispositif de ses conclusions que soit ordonnée cette ouverture. Ces chefs n'étant pas critiqués par l'appelant, il y a lieu de confirmer la décision du premier juge.
* La mesure d'expertise
Le premier juge était saisi d'une demande de Mme [S] aux fins de désigner un expert avec pour mission d'évaluer les biens immobiliers, l'actif de la communauté, de dire si elle est partageable en nature et le cas échéant composer les lots, déterminer une mise à prix en cas de vente aux enchères, dire si l'une ou l'autre des parties est fondée à revendiquer une créance, dire si la communauté doit recevoir récompense pour les travaux de rénovation de la maison appartenant en propre à M. [H] située à [Localité 9].
Il était par ailleurs saisi d'une demande de M. [H] aux fins de :
-dire que la communauté n'a droit à aucune récompense s'agissant de son bien propre situé à [Localité 9] au motif que Mme [S] ne démontre aucun appauvrissement de la communauté
-dire et juger que M. [H] dispose d'une créance sur la communauté d'un montant de 45 000 euros suite à la donation effectuée par sa mère en 2007
-dire et juger que M. [H] dispose d'une créance sur la communauté d'un montant de 29 751,49 euros suite à la perception d'une assurance vie le 23 avril 2013
-en conséquence, rejeter la demande de Mme [S] tendant à faire fixer une récompense au profit de la communauté pour travaux prétendument exécutés sur le bien immobilier propre de M. [H] situé à [Localité 9].
' Le premier juge a retenu que les parties exposaient être en situation d'indivision post-communautaire sur trois biens immobiliers sans pour autant présenter leurs titres de propriété permettant au tribunal de vérifier leurs dires, les adresses et références cadastrales, à savoir :
-une maison à usage d'habitation actuellement louée sis [Adresse 6],
-une maison à usage d'habitation actuellement louée sis [Adresse 3] selon les conclusions de Mme [S] mais au [Adresse 8] selon l'estimation qu'elle produit en pièce 25,
-un bien immobilier composé de six appartements, [Adresse 2].
Il a constaté qu'à l'issue des diligences des parties pour tenter de parvenir à un partage amiable, de nombreux points demeuraient litigieux notamment l'évaluation du bien situé à [Localité 10] composé de six appartements, le principe et le montant des récompenses. Il a relevé que l'immeuble de rapport situé à [Localité 10] n'avait fait l'objet que d'une estimation succinte effectuée sur documents photos et selon les informations communiquées par M. [H]. Il a estimé que les pièces produites n'étaient pas suffisantes pour déterminer le principe et le montant d'une récompense due à la communauté pour les travaux éventuellement effectués et financés par elle mais qu'elles permettaient de considérer les demandes de Mme [S] comme sérieuses et justifiant sa demande d'expertise.
' Au soutien de son appel, M. [H] fait valoir que :
- l'évaluation par expertise des deux biens situés à [Localité 13] ne s'impose pas dès lors qu'il accepte l'évaluation proposée par son ex-épouse en 2019 à hauteur de 260 000 euros. Il estime que l'évaluation par l'agence SAFTI qu'elle a ensuite produite s'agissant de ces deux biens pour une somme comprise entre 220 000 et 235 000 euros a été volontairement minorée.
- l'évaluation par expertise du bien d'[Localité 10] ne se justifie pas dans la mesure où il produit une estimation de la valeur vénale par un professionnel de l'immobilier connaissant le marché local, Mme [S] disposant par ailleurs des éléments afin de vérifier sa valeur locative dès lors qu'elle perçoit elle-même sa part sur les revenus fonciers générés par cet immeuble de rapport.
- l'évaluation par expertise de son bien propre situé à Autignac est infondée dès lors que le tribunal n'a pas statué sur l'hypothétique récompense sollicitée par Mme [S] au profit de la communauté
- le premier juge aurait dû trancher au préalable les points litigieux relatifs aux demandes de récompense, à tout le moins dans le principe des récompenses, avant d'ordonner une éventuelle expertise pour chiffrer le montant de celles-ci. Il fait grief à la décision déférée d'avoir donné mission à l'expert de trancher des difficultés juridiques
- il ne doit aucune récompense à la communauté qui ne s'est pas appauvrie pour améliorer la maison située [Adresse 7], bien qui lui est propre, dont les travaux de rénovation ont été réalisés pour partie grâce à l'aide financière de sa mère et pour partie avec les revenus tirés de son activité professionnelle. Il ajoute que ce bien a été évalué en-deça de sa valeur réelle à 8250 francs lorsqu'il a acquis le 23 juillet 1981 les parts de sa s'ur et de sa mère sur cette maison. Il expose qu'elle a été rénovée à moindre frais pendant la vie commune, que sa qualité de gérant de société dans le domaine des matériaux lui a permis de bénéficier de la fourniture des matériaux nécessaires à la rénovation et qu'il s'est chargé personnellement de la majorité des travaux, Mme [S] ne participant que modérément à ceux-ci. Il conteste l'évaluation par son ex-épouse de ce bien à la somme de 280 000 euros, et reproche à la première décision d'avoir donné mission à l'expert d'évaluer ce bien propre sans avoir au préalable tranché la question de savoir s'il y avait lieu à récompense au profit de la communauté pour les travaux effectués sur ce bien.
-la communauté lui doit récompense dès lors que le don manuel effectué en 2007 par sa mère de la somme de 45 000 euros a contribué à financer la rénovation de l'immeuble commun situé à [Localité 10] acquis au mois de décembre 2005 et pour lequel aucun emprunt n'a été souscrit, les autres fonds qui ont servi à cette rénovation provenant de la plus-value issue de la vente le 3 janvier 2005 pour un montant de 60 000 euros d'un bateau rénové par M. [H] seul qu'il avait acquis en 1994 à un prix peu élevé
- le produit de la vente de sa société le 31 décembre 2002 a également enrichi la communauté à hauteur de 67 087 euros et contribué au financement d'une partie des biens communs
- la communauté lui doit récompense à hauteur de 29 751,49 euros, somme qu'il a versée sur le compte commun suite au décès de sa mère correspondant à l'intégralité de la somme perçue au titre de l'assurance-vie souscrite par celle-ci
-la communauté lui doit récompense au titre des loyers de deux biens propres situés à [Localité 14] perçus entre le 12 décembre 2012 et le 30 juin 2016 pour un montant total de 71 380,98 euros
-il a bénéficié en tant que gérant d'une société dans le domaine des matériaux de la fourniture de matériaux nécessaires aux travaux de rénovation
-il a contribué aux charges du mariage avec les revenus de son activité professionnelle comme Mme [S].
' Mme [S] soutient que la mesure d'expertise était indispensable afin de statuer sur le principe même d'une récompense due à la communauté pour les travaux effectués et financés par celle-ci, les versions contradictoires des parties et les pièces produites aux débats nécessitant des investigations plus précises afin de permettre au tribunal de statuer sur le principe et le montant de la récompense.
Elle expose qu'elle n'a pu faire évaluer le bien d'[Localité 10] qui est loué et dont son ex-époux assure la gestion. Elle conteste l'évaluation produite par ce dernier, à hauteur de 270 000 euros, qu'elle estime minorée.
Elle expose que la communauté a droit à récompense en raison des travaux de grande ampleur effectués et financés par celle-ci pendant plusieurs années sur le bien propre de l'ex-époux, dont la valeur, de 8250 francs au moment de l'acquisition, s'élève désormais à 280 000 euros. Elle indique que l'intégralité des achats de matériaux, dont M. [H] a conservé les factures, a été effectuée avec des fonds communs et que M. [H] a en réalité utilisé le don manuel de 45 000 euros effectué par sa mère pour l'acquisition de biens à son usage personnel tels que des motocyclettes et un bateau.
' Réponse de la cour
- S'agissant de l'expertise des biens communs :
L'article 1362 du code de procédure civile dispose que sans préjudice des dispositions de l'article 145, un expert peut être désigné en cours d'instance pour procéder à l'estimation des biens ou proposer la composition des lots à répartir.
En l'espèce, c'est à juste titre que le premier juge a retenu le caractère incomplet des documents produits par les parties concernant les biens communs et la nécessité en particulier d'identifier de manière précise le second bien commun situé à [Localité 13], la cour relevant également en cause d'appel une incertitude quant à la localisation de ce bien , situé [Adresse 4] selon l'ex-époux, [Adresse 3] selon les conclusions de l'ex-épouse, mais [Adresse 8] selon l'estimation immobilière qu'elle produit. Les pièces produites par les parties ne permettent pas la localisation précise de ce bien.
Les parties sont par ailleurs, contrairement à ce que soutient M. [H], en désaccord concernant l'évaluation des deux biens situés à [Localité 13] dès lors que celui-ci indique accepter l'estimation personnelle proposée le 10 septembre 2019 par Mme [S] à hauteur de 170 000 euros pour la maison située [Adresse 6] et 90 000 euros pour celle située [Adresse 3], alors que Mme [S] communique une estimation plus récente effectuée le 6 juillet 2021 par l'organisme SAFTI à hauteur de 140 000-150 000 euros pour la première maison, 80 000-85 000 euros pour la seconde.
Enfin, le premier juge a relevé de manière pertinente le caractère insuffisant de l'estimation par le cabinet Roques en date du 4 mars 2020 produite par M. [H] concernant l'immeuble de rapport situé à [Localité 10], cette évaluation n'ayant été effectuée que sur photographie et selon les informations communiquées par l'ex-époux.
- S'agissant de l'expertise du bien propre de M. [H] :
L'article 1402 du code civil prévoit que tout bien, meuble ou immeuble, est réputé acquêt de communauté si l'on ne prouve qu'il est propre à l'un des époux par application d'une disposition de la loi.
L'article 1437 du code civil dispose que toutes les fois qu'il est pris sur la communauté une somme, soit pour acquitter les dettes ou charges personnelles à l'un des époux, telles que le prix ou partie du prix d'un bien à lui propre ou le rachat des services fonciers, soit pour le recouvrement, la conservation ou l'amélioration de ses biens personnels, et généralement toutes les fois que l'un des deux époux a tiré un profit personnel des biens de la communauté, il en doit la récompense.
En application de l'article 1469 du code civil, la récompense est, en général, égale à la plus faible des deux sommes que représentent la dépense faite et le profit subsistant. Elle ne peut, toutefois, être moindre que la dépense faite quand celle-ci était nécessaire. Elle ne peut être moindre que le profit subsistant, quand la valeur empruntée a servi à acquérir, à conserver ou à améliorer un bien qui se retrouve, au jour de la liquidation de la communauté, dans le patrimoine emprunteur.
En l'espèce, il n'est pas contesté que le bien propre de M. [H] a fait l'objet de travaux importants pendant le mariage, notamment la construction d'une piscine et d'une terrasse. Mme [S] produit, pour justifier du règlement de travaux par la communauté, trois factures, du 26 mai 2016 d'un montant de 2205,28 euros pour l'installation d'une climatisation dans le salon et une chambre, une facture du 13 juin 2016 d'un montant de 3850 euros pour la fabrication et pose d'un portail, et une facture du 15 juin 2016 de 1195,70 euros pour la réalisation et la pose de deux grilles en fer forgé. Il n'appartient pas à Mme [S] d'établir l'origine des fonds utilisés pour régler ces factures, qui sont présumés communs en application de l'article 1402 du code civil.
Mme [S] rapporte, par la production de ces factures, un commencement de preuve de l'utilisation de deniers présumés communs pour améliorer le bien personnel de M. [H]. Celui-ci conteste l'utilisation de deniers communs pour le règlement de ces factures et des autres travaux entrepris sur son bien mais ne communique aucune pièce pour combattre la présomption édictée par l'application combinée des articles 1402 et 1437 du code civil.
C'est ainsi à juste titre que le premier juge a estimé nécessaire d'identifier avec exactitude par voie d'expertise les travaux effectués sur le bien propre de M. [H] et d'en déterminer le montant et le financement.
L'expertise décidée par le premier juge concernant tant les biens communs que le bien propre de M. [H] apparaît donc pleinement justifiée, tenant le litige opposant les parties sur la valeur des biens communs, et le commencement de preuve rapporté par l'ex-épouse de l'utilisation de deniers communs pour financer des travaux d'un bien propre de M. [H].
Certaines dépenses ayant conduit à l'amélioration du bien de M. [H] telles que la construction d'une piscine, d'une terrasse, la pose de la climatisation ainsi que du portail et des grilles en fer forgé, il convient par conséquent de compléter la mission d'expertise afin que l'expert détermine outre la valeur actuelle du bien propre, la valeur que ce bien aurait eu sans les travaux qui y ont été effectués.
La décision déférée est par conséquent confirmée s'agissant de la mesure d'expertise, sauf à compléter la mission concernant le bien propre de M. [H] aux fins de détermination de sa valeur sans et avec les travaux effectués, afin de permettre ultérieurement au juge de déterminer le profit subsistant.
- S'agissant du versement par Mme [S] de la provision à valoir sur la rémunération de l'expert : il convient de rappeler que la demande tendant à «constater» ledit versement n'a pas vocation à conférer un droit à la partie qui l'a requis et ne constitue pas une demande ou prétention au sens de l'article 4 du code de procédure civile de sorte que la cour n'est pas tenue de répondre.
- S'agissant des demandes de récompenses formées par M. [H] :
M. [H] fait grief à la décision du premier juge de ne pas avoir statué au préalable sur ses demandes de récompenses, notamment celle portant sur la perception par la communauté des revenus fonciers de ses biens propres situés à [Localité 14]. Or, il résulte de la première décision qu'il n'avait formé aucune demande de récompense à ce titre, étant d'autre part rappelé que les fruits et revenus perçus des biens propres ont le caractère de biens communs.
Concernant les autres demandes de récompenses au titre des sommes provenant de la donation effectuée par sa mère d'un montant de 45 000 euros et de l'assurance vie perçue suite au décès de celle-ci pour un montant de 29 751,49 euros :
En application de l'article 1433 du code civil, la communauté doit récompense à l'époux propriétaire toutes les fois qu'elle a tiré profit de biens propres. Il en est ainsi, notamment, quand elle a encaissé des deniers propres ou provenant de la vente d'un propre, sans qu'il en ait été fait emploi ou remploi. Si une contestation est élevée, la preuve que la communauté a tiré profit de biens propres peut être administrée par tous les moyens, même par témoignages et présomptions.
Il appartient ainsi à M. [H] de rapporter la preuve du caractère propre des deniers dont il demande récompense, mais également de démontrer que la communauté a tiré profit de ces deniers si son épouse le conteste.
En l'espèce, M. [H] démontre que les fonds issus de l'assurance-vie perçue au décès de sa mère ont bien été versés sur un compte commun. La communauté est présumée avoir tiré profit de ces deniers, sauf à ce que Mme [S] rapporte la preuve contraire.
En revanche, si M. [H] produit la déclaration de don manuel effectué en 2007 à son profit par sa mère pour la somme de 45000 euros, il lui appartient encore de démontrer que cette somme a été encaissée sur un compte commun ou été utilisée comme il le soutient pour l'acquisition et la rénovation du bien commun d'[Localité 10].
A défaut de telles pièces, c'est à juste titre que le premier juge a estimé nécessaire d'ordonner une expertise préalable avant de statuer sur les demandes de récompenses des parties, celles-ci alléguant soit l'utilisation de deniers propres utilisés pour l'acquisition et l'amélioration du bien commun d'[Localité 10] s'agissant des demandes de M. [H], soit l'utilisation de deniers communs pour la rénovation du bien propre d'[Localité 9] s'agissant de la demande de Mme [S].
* Les frais et dépens
M. [H] succombant en cause d'appel, il n'y a pas lieu de faire droit à sa demande de condamnation de Mme [S] aux dépens. L'action en partage étant exercée dans l'intérêt commun des parties, les dépens en cause d'appel sont partagés par moitié entre les parties et déclarés frais privilégiés de partage comme sollicité par Mme [S].
L'équité commande de débouter M. [H], partie perdante en cause d'appel, de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant par arrêt contradictoire,
CONFIRME la décision déférée en tous ses chefs critiqués.
Y AJOUTANT
Dit que l'expert déterminera :
- la valeur actuelle du bien sis à [Localité 9] appartenant en propre à M. [H]
- la valeur que le bien sis à [Localité 9] appartenant en propre à M. [H] aurait eu si les travaux n'avaient pas été effectués.
Dit que les dépens en cause d'appel sont partagés par moitié entre les parties et déclarés frais privilégiés de partage.
Déboute M. [H] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
LE GREFFIER, LE PRESIDENT,
SR/MLD