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14/02/2023 | FRANCE | N°20/05539

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 5e chambre civile, 14 février 2023, 20/05539


Grosse + copie

délivrées le

à















COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



5e chambre civile



ARRET DU 14 FEVRIER 2023



Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 20/05539 - N° Portalis DBVK-V-B7E-OY7M





Décision déférée à la Cour :

Jugement du 12 NOVEMBRE 2020

JUGE DES CONTENTIEUX DE LA PROTECTION DE MONTPELLIER

N° RG





APPELANT :



Monsieur [X] [H]

né le 18 Décembre 1947 Ã

  [Localité 3]

[Adresse 4]

[Localité 2]

Représenté par Me Sylvain ALET de la SELARL SYLVAIN ALET AVOCAT, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant

assisté par Me Mélanie LAPORTE, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat plaida...

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

5e chambre civile

ARRET DU 14 FEVRIER 2023

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 20/05539 - N° Portalis DBVK-V-B7E-OY7M

Décision déférée à la Cour :

Jugement du 12 NOVEMBRE 2020

JUGE DES CONTENTIEUX DE LA PROTECTION DE MONTPELLIER

N° RG

APPELANT :

Monsieur [X] [H]

né le 18 Décembre 1947 à [Localité 3]

[Adresse 4]

[Localité 2]

Représenté par Me Sylvain ALET de la SELARL SYLVAIN ALET AVOCAT, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant

assisté par Me Mélanie LAPORTE, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat plaidant

INTIMEE :

Madame [U] [T]

née le 28 Février 1966 à [Localité 5] (12)

[Adresse 1],

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Marion DEJEAN PELIGRY, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et plaidant

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2021/002908 du 17/03/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de MONTPELLIER)

Ordonnance de clôture du 12 Décembre 2022

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 02 JANVIER 2023,en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Emmanuel GARCIA, Conseiller, chargé du rapport.

Ce(s) magistrat(s) a (ont) rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Philippe GAILLARD, Président de chambre

Madame Nathalie AZOUARD, Conseiller

Monsieur Emmanuel GARCIA, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Estelle DOUBEY

ARRET :

- Contradictoire ;

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par Monsieur Philippe GAILLARD, Président de chambre, et par Mme Estelle DOUBEY, Greffier.

*

* *

EXPOSE DU LITIGE

Le 1er avril 2002, madame veuve [F] [H] a donné à bail à [U] [T] un logement situé à [Adresse 6], contre un loyer mensuel de 403 euros, provisions sur charges comprises.

Par plusieurs courriers, [U] [T] a averti son bailleur de certains désordres affectant le logement.

Le 30 octobre 2014, [X] [H], venant aux droits de [F] [H], a fait délivrer à la locataire un commandement de payer la somme de 1 400,46 euros au titre des loyers et charges impayés, arrêtés au mois d'octobre 2014 inclus et visant la clause résolutoire du bail.

Le 15 janvier 2015, [X] [H] a assigné [U] [T] afin d'obtenir notamment le paiement des loyers et charges ainsi que son expulsion.

Le 20 mai 2015, [U] [T] a été condamnée à payer la somme de 3 115,33 euros au titre de l'arriéré de loyers et charges arrêtés à la date du 6 mai 2015 et a été autorisée à se libérer de sa dette en 36 versements mensuels.

Parallèlement, suite à une visite du logement, Urbanis a envoyé au bailleur un courrier le 18 février 2015 relatant l'ensemble des défectuosités constatées dans le logement.

Le 28 juillet 2015, [X] [H] a cédé l'immeuble.

Le 16 décembre 2015, un arrêté préfectoral d'insalubrité remédiable relative au logement donné à bail a été pris.

Le 4 février 2019, [U] [T] a assigné [X] [H] aux fins de le voir condamner au paiement notamment de la somme de 50 000 euros à titre de dommages et intérêts pour les préjudices de jouissance, moral et matériel subis. Suite à plusieurs renvois, [U] [T] a précisé qu'elle estimait que le point de départ du délai pour agir en justice était le 16 février 2015, date de l'arrêté préfectoral d'insalubrité et qu'elle avait quitté les lieux en décembre 2015. Elle a également fait valoir l'examen d'Urbanis du 22 janvier 2015, qui a relevé plusieurs malfaçons du logement et a contesté les factures de travaux versées au débat par le bailleur puisque le lieu de leur réalisation n'était pas indiqué. Selon elle, vivre pendant des années dans un logement insalubre l'a fragilisée physiquement et psychologiquement.

[X] [H] a soulevé à titre liminaire l'irrecevabilité des demandes de [U] [T] pour prescription, le point de départ de la prescription étant le jour où la locataire a connu ou aurait dû connaître les faits. Antérieurement au 4 février 2014, la demande est donc prescrite et postérieurement au 25 juillet 2015, l'immeuble ayant été vendu, il ne peut être tenu responsable. A titre subsidiaire, il a sollicité le débouté de la demanderesse et, à titre infiniment subsidiaire, d'écarter l'état des lieux versé aux débats par la demanderesse au motif que des mentions auraient été ajoutées, de considérer qu'il ne pouvait être tenu d'une quelque somme au-delà de la période entre le 4 février 2014 et le 25 juillet 2015 et de juger que le préjudice de jouissance ne pouvait dépasser 20 % du loyer mensuel.

Le jugement rendu le 12 novembre 2020 par le tribunal judiciaire de Montpellier énonce dans son dispositif :

Déclare recevable l'action de [U] [T] ;

Condamne [X] [H] à payer à [U] [T] la somme de 9 644 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de ses préjudices de jouissance et moral ;

Déboute [U] [T] de sa demande de dommages et intérêts au titre de son préjudice matériel ;

Condamne [X] [H] à payer à [U] [T] la somme de 1 200 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne [X] [H] aux dépens ;

Ordonne l'exécution provisoire.

Le jugement expose que l'article 7-1 de la loi du 6 juillet 1989, dans sa rédaction issue de la loi du 24 mars 2014, qui prévoit une prescription de trois ans pour les actions dérivant d'un bail, n'est pas d'application immédiate et que c'est donc la prescription quinquennale qui s'applique. L'action n'est donc pas prescrite.

Le jugement relève qu'il n'y a pas lieu d'écarter du débat l'état des lieux d'entrée puisque [X] [H] ne verse aucun autre exemplaire d'état des lieux et ne démontre pas la réalité d'une différence d'écriture dans le document litigieux.

Il constate qu'il résulte tant des courriers effectués par la locataire auprès de son bailleur que du rapport Urbanis ayant donné lieu à l'arrêté d'insalubrité remédiable que le logement loué était indécent dès l'entrée dans les lieux de [U] [T]. Le bailleur a donc manqué à son obligation contractuelle de remettre au locataire un logement décent. Les factures versées aux débats par le bailleur pour démontrer qu'il aurait réalisé des travaux dans le logement ne permettent pas de l'exonérer puisque l'arrêté d'insalubrité a été adopté postérieurement à celles-ci.

[X] [H] ne peut pas être tenu d'indemniser la locataire pour le trouble de jouissance subi postérieurement à la vente de l'immeuble mais doit l'indemniser pour la période allant du 4 février au 28 juillet 2015. Il apparaît que la locataire a également subi un préjudice moral pour avoir vécu plusieurs années dans un logement insalubre, ce qui est confirmé par le certificat médical versé aux débats mentionnant que l'état de santé de [U] [T] justifie un changement de domicile dès que possible. Le préjudice matériel mentionné par la locataire n'est pas démontré.

[X] [H] a relevé appel du jugement par déclaration au greffe du 7 décembre 2020.

La clôture de la procédure a été prononcée par ordonnance du 12 décembre 2022.

Les dernières écritures pour [X] [H] ont été déposées le 30 juillet 2021.

Les dernières écritures pour [U] [T] ont été déposées le 28 avril 2021.

Le dispositif des écritures pour [X] [H] énonce :

Réformer en toutes ses dispositions le jugement querellé ;

Subsidiairement, rejeter l'ensemble des demandes de [U] [T] et écarter l'état des lieux versé par [U] [T] aux débats ;

Ramener à de plus justes proportions le préjudice de jouissance de [U] [T] lequel ne saurait excéder une somme de 1 128,80 euros ;

Condamner [U] [T] au paiement d'une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers.

[X] [H] soutient que les demandes de la locataire sont prescrites sur le fondement de l'article 7-1 de la loi du 6 juillet 1989, dans sa rédaction issue de la loi du 24 mars 2014. L'article 82 II de la loi du 6 août 2015 prévoit en effet que l'article 7-1 susmentionné est applicable dans les conditions fixées par l'article 2222 du code civil. La prescription triennale trouve donc à s'appliquer. En tout état de cause, les conclusions de [U] [T] font état de désordres apparaissant dès l'état des lieux d'entrée et de plaintes déposées auprès du bailleur depuis l'arrivée dans les lieux. Le point de départ de la prescription ne serait donc pas l'arrêté d'insalubrité mais bien le jour où [U] [T] a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d'exercer ce droit.

En tout état de cause, en ce qui concerne le préjudice de jouissance, [X] [H] avance qu'il ne peut être tenu d'indemniser la locataire pour le trouble subi après la vente du logement, soit le 28 juillet 2015. La prescription triennale trouvant à s'appliquer et [U] [T] ayant assigné son ancien bailleur le 4 février 2019, elle ne peut réclamer indemnisation qu'à compter de février 2016.

Subsidiairement, [X] [H] soutient que les demandes de [U] [T] ne sont pas fondées. Il fait valoir que l'état des lieux produit par [U] [T] est frauduleux tout comme la lettre manuscrite jointe à ce document. L'état des lieux comporte des mentions rajoutées dont l'écriture diffère du reste du document. Il précise qu'il ne verse pas son exemplaire de l'état des lieux dans la mesure où il a été réalisé en présence de l'ancienne propriétaire, sa mère, qui était âgée et a dû l'égarer. En tout état de cause, le fait qu'il soit indiqué que des convecteurs sont « en mauvaise état » ne signifie pas qu'ils ne sont pas fonctionnels, la mention de faïence cassées est sans incidence sur la jouissance du bien et la défectuosité de la grille d'aération n'est pas réellement démontrée.

[X] [H] soutient que l'insalubrité du logement n'est pas caractérisée sur la période où il est susceptible d'être tenu. Il avance que [U] [T] a fait preuve d'une grande passivité puisqu'entre l'état d'entrée dans les lieux, qui ferait prétendument mention d'un certain délabrement, et la première lettre de doléance, il s'est écoulé cinq ans sans plainte. C'est encore cinq années plus tard que [U] [T] a fait état de nouvelles doléances. Selon [X] [H], l'évolution de l'état de l'appartement est imputable à [U] [T] qui n'aérait pas et ne procédait qu'à un nettoyage sommaire des lieux. Le certificat médical produit par la locataire ne serait qu'un certificat de pure complaisance puisqu'il s'agit de la seule pièce en lien avec sa santé, aucune ordonnance, ou autre pièce médicale ne vient appuyer ses propos. [X] [H] souligne que [U] [T] a attendu deux ans après le certificat pour déménager malgré la prétendue urgence pour sa santé. Il rappelle que c'est lui qui a saisi en référé le tribunal d'instance, le 15 janvier 2015, et que l'ordonnance ne fait état d'aucun trouble de jouissance du locataire. Concernant la correspondance d'Urbanis, le 18 février 2015, [X] [H] souligne qu'elle est marquée d'incohérences puisque les conclusions adverses précisent que [U] [T] n'était pas là lors de la visite tandis que le courrier Urbanis précise que la visite a été effectuée en sa présence. L'arrêté d'insalubrité a été pris en décembre 2015, soit postérieurement à la vente du bien.

[X] [H] conteste l'existence d'un préjudice de jouissance pour [U] [T] puisque l'état d'insalubrité n'est ni caractérisé ni prouvé. Le préjudice moral n'est pas explicité par [U] [T]. Il n'est pas développé par la locataire et est confondu dans le jugement avec le préjudice de jouissance. [X] [H] avance que le préjudice moral n'est ici ni certain, ni direct, ni personnel et qu'aucun lien causal entre l'insalubrité prétendue et l'état de santé de [U] [T] n'est démontré. Il soutient qu'elle a été indemnisée deux fois pour un seul et même préjudice puisque le préjudice de jouissance tient compte d'un préjudice moral inhérent à la jouissance.

[X] [H] fait valoir qu'au vu de la période concernée et de la vente du bien, il lui a été difficile de retrouver des justificatifs des travaux réalisés, et ce d'autant plus qu'une partie a été réalisée par ses soins. Il avance qu'il a réalisé ou fait réaliser les travaux dès lors qu'une difficulté était signalée par la locataire. Il a notamment changé le chauffe-eau en 2011 et remplacé des radiateurs.

En tout état de cause, la demande formulée par la locataire serait disproportionnée. [U] [T] réclame près de 13 ans de loyers, soit l'intégralité de sa période d'occupation, alors qu'elle n'avait rien mis en 'uvre pour faire constater et cesser les prétendus troubles de jouissance subis. Il avance que le jugement a accordé une indemnisation à [U] [T] sur la période du 4 février 2014 au 28 juillet 2015 alors que son action était prescrite sur cette période. En outre, la somme retenue par le premier juge équivaut à 17 mois de loyers, soit aucun loyer sur l'intégralité de la période concernée. Il souligne que le 29 mai 2018, la cour d'appel de Paris a indemnisé le préjudice de jouissance du requérant à 20 % du loyer acquitté. Il convient donc de limiter en tous les cas l'indemnisation de la locataire à 20 % de son loyer mensuel.

Le dispositif des écritures pour [U] [T] énonce :

Rejeter l'appel formé par [X] [H] et le débouter de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions ;

Confirmer en son principe le jugement dont appel en ce qu'il a considéré que [X] [H] a manqué à ses obligations contractuelles ;

Infirmer le jugement dont appel quant au quantum de la réparation accordée ;

Condamner [X] [H] à payer à [U] [T] la somme de 50 000 euros à titre de dommages et intérêts toutes causes de préjudices confondus ;

Condamner [X] [H] à payer à Maître Marion Dejean Peligry, avocat de [U] [T] la somme de 2 500 euros HT sur le fondement de l'aide juridique outre aux entiers dépens.

A titre liminaire, [U] [T] conteste la prescription de ses demandes, alléguée par [X] [H]. Elle fait valoir qu'en première instance, [X] [H] se prévalait de l'article 2224 du code civil et invoquait une prescription quinquennale commençant en 2007, date de l'un de ses courriers de doléances, alors qu'en appel, il invoque une prescription triennale sur la base de l'article 2222 de code civil à la lumière de la loi du 6 août 2015. Selon [U] [T], l'article 82 II de la loi susmentionnée précise que ces dispositions s'appliquent aux baux en cours lors de sa publication et ne s'appliquent donc pas au bail litigieux qui était résilié depuis le 30 octobre 2014.

[U] [T] conteste l'argumentation de [X] [H]. Elle avance que les factures produites aux débats par l'appelant ne permettent pas de rattacher les travaux mentionnés à l'appartement de [U] [T], à l'exception du débouchage des canalisations en 2012. Elle soutient que ces travaux ont probablement eu lieu chez la mère d'[X] [H], qui vivait dans le même immeuble. [U] [T] soutient qu'[X] [H] ne peut se prévaloir de la vente de l'immeuble en juillet 2015 pour considérer qu'il ne peut être tenu responsable de l'arrêté d'insalubrité pris en décembre 2015. En effet, le 18 février 2015, [X] [H] a été informé par Urbanis des nombreuses défectuosités du logement, soit bien avant la vente, ces défectuosités ayant conduit à l'arrêté d'insalubrité. Les malfaçons ayant conduit à ce que ce logement soit reconnu insalubre sont antérieures à la vente et relèvent donc de la responsabilité de [X] [H]. [U] [T] souligne que si [X] [H] prétend avoir changé les radiateurs en 2011, le rapport Urbanis les considèrent vétustes et inadaptés à peine quatre ans plus tard, ce qui semble contradictoire.

[U] [T] soutient que vivre pendant toutes ces années dans un logement insalubre l'a fragilisée physiquement et psychologiquement. C'est grâce à l'aide des services sociaux, à compter de fin 2014, qu'elle a pu entamer des démarches pour faire reconnaître ses droits. Elle a enfin pu quitter les lieux après qu'un logement social lui a été proposé. Elle ajoute qu'il faut tenir compte de la mauvaise foi d'[X] [H], qui l'a laissée vivre treize ans dans un logement insalubre, en toute connaissance de cause.

Elle avance qu'[X] [H] reconnaît l'existence du trouble de jouissance lorsqu'il sollicite que la cour ramène à de plus juste proportions le préjudice de jouissance qu'elle a subi. Cela constitue selon elle un aveu judiciaire. Elle sollicite que le quantum de la réparation accordée par le premier juge soit majoré.

MOTIFS

1. Sur la prescription de l'action

[X] [H] vise les dispositions de l'article 82 II de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015, dont il constant qu'elles ne s'appliquaient qu'aux baux en cours.

Or, comme le soutient justement [U] [T], le bail en litige était résilié à la date de publication de cette loi, par l'effet de la clause résolutoire, consécutivement au commandement de payer qui visait cette clause, qu'[X] [H] a fait délivrer le 30 octobre 2014 et qui est demeuré infructueux.

En conséquence, il y a lieu en l'espèce, comme l'a retenu à juste titre le premier juge, d'appliquer le délai de prescription prévu à l'article 2224 du code civil, de cinq ans.

Sur le point de départ, [U] [T] ayant introduit son action par assignation du 4 février 2019 et comme l'a justement retenu le premier juge, les prétentions visant la réparation de son préjudice de jouissance et de son préjudice moral seront examinées sur la période du 4 février 2014 au 28 juillet 2015, date à laquelle [X] [H] a vendu le logement en litige.

Le jugement entrepris sera par conséquent confirmé en ce qu'il a déclaré l'action de [U] [T] recevable.

2. Sur l'indemnisation des préjudices de [U] [T]

En cause d'appel, [X] [H] demande à nouveau que soit écarté des débats l'état des lieux d'entrée. Toutefois, la cour constate qu'il n'apporte aucune critique utile aux motifs du premier juge qui a justement retenu qu'il n'y avait pas lieu d'écarter ce document dès lors qu'[X] [H] ne versait aucun autre exemplaire d'état des lieux d'entrée et ne démontrait pas la réalité d'une différence d'écriture dans le document litigieux.

[X] [H] sollicite la réformation du jugement dont appel en ce qu'il a alloué à [U] [T] la somme de 9 644 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de ses préjudices de jouissance et moral, au motif principal qu'elle aurait fait preuve d'une grande passivité, qu'elle serait de mauvaise foi et que les deux préjudices seraient confondus.

Sur le caractère insalubre du logement, la cour relève qu'il n'est pas apporté de critique utile aux motifs du premier juge qui a motivé avec détails sa décision, reprenant d'une part l'ensemble des pièces versées au débat, notamment le courrier de la société Urbanis, sur lequel il est indiqué que [U] [T] était présente lors de la visite du logement le 22 janvier 2015, ainsi que l'arrêté d'insalubrité remédiable pris par le préfet de l'Hérault, et indiquant d'autre part que les pièces versées par [X] [H] étaient inopérantes.

La cour constate à ce titre qu'il s'agit non pas de factures de travaux réalisés mais des devis, à l'exception de la facture de la société Citec, en date du 14 juin 2012, pour la somme de 143,52 euros, sur laquelle il est indiqué que les travaux de débouchage du réseau des eaux usées ont été effectués dans le logement en litige.

Il sera en conséquence retenu l'état d'insalubrité du logement sur la période non prescrite, non pas à compter du 25 juillet 2015, comme demandé par [X] [H], mais à partir du 4 février 2014, celui-ci étant justifié dès cette date.

Sur le quantum, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a alloué à [U] [T] la somme de 5 644 euros en réparation de son préjudice de jouissance, correspondant à dix-sept mois de loyers, pour la période du 4 février 2014 au 28 juillet 2015.

S'agissant du préjudice moral, qui est ici distinct du préjudice de jouissance dès lors qu'il est démontré par [U] [T] qu'elle a vécu pendant de très nombreuses années dans un logement insalubre, qu'elle fait état d'une certaine vulnérabilité, celle-ci ayant notamment fait l'objet d'une mesure d'accompagnement social personnalisé dès mars 2015, qu'elle justifie d'un impact sur sa santé physique mais aussi et surtout psychologique, et que ce n'est que parce qu'elle a pu bénéficier de l'aide des services sociaux à compter de 2014 qu'elle a pu engager l'action nécessaire pour faire reconnaître son logement insalubre, il sera fait droit à sa demande d'indemnisation de son préjudice moral.

Le jugement entrepris sera en conséquence confirmé en ce qu'il lui a alloué la somme de 4 000 euros en réparation de son préjudice moral, cette somme étant considérée comme satisfactoire.

En conséquence de ce qui précède, le jugement rendu le 12 novembre 2020 par le tribunal judiciaire de Montpellier sera confirmé en toutes ses dispositions.

3. Sur les dépens et les frais non remboursables

Le jugement sera également confirmé en ce qui concerne les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile.

[X] [H] sera condamné aux dépens de l'appel.

En application de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, il sera alloué à l'avocat de [U] [T], qui bénéficie de l'aide juridictionnelle, la somme de 2 500 euros au titre des frais et honoraires non compris dans les dépens que le bénéficiaire aurait exposés en l'absence de cette aide, à charge pour l'avocat, s'il recouvre tout ou partie de cette somme, de renoncer à percevoir tout ou partie de la part contributive de l'Etat dans les conditions de ce texte.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire et mis à disposition au greffe ;

CONFIRME le jugement rendu le 12 novembre 2020 par le tribunal judiciaire de Montpellier, en toutes ses dispositions ;

CONDAMNE [X] [H] à payer à maître Marion Dejean Peligry, avocat de [U] [T], la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, étant rappelé que si l'avocat du bénéficiaire de l'aide recouvre cette somme, il renonce à percevoir la part contributive de l'Etat. S'il n'en recouvre qu'une partie, la fraction recouvrée vient en déduction de la part contributive de l'Etat ;

CONDAMNE [X] [H] aux dépens de l'appel.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 5e chambre civile
Numéro d'arrêt : 20/05539
Date de la décision : 14/02/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-02-14;20.05539 ?
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