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07/02/2023 | FRANCE | N°19/08199

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 5e chambre civile, 07 février 2023, 19/08199


Grosse + copie

délivrées le

à































COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



5e chambre civile



ARRET DU 07 FEVRIER 2023



Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 19/08199 - N° Portalis DBVK-V-B7D-OOHA





Décision déférée à la Cour : Jugement du 26 NOVEMBRE 2019

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE MONTPELLIER

N° RG 17/06410





APPELANTE :

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Syndicat des copropriétaires ESPACE SAINT CHARLES dont le siège social est sis [Adresse 3] - représenté par son syndic la SAS FONCIA [Localité 8] (anciennement dénommée FONCIA DOMITIA SOGEBA - RCS MONTPELLIER 343 765 178), prise en la personne de son représentant lég...

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

5e chambre civile

ARRET DU 07 FEVRIER 2023

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 19/08199 - N° Portalis DBVK-V-B7D-OOHA

Décision déférée à la Cour : Jugement du 26 NOVEMBRE 2019

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE MONTPELLIER

N° RG 17/06410

APPELANTE :

Syndicat des copropriétaires ESPACE SAINT CHARLES dont le siège social est sis [Adresse 3] - représenté par son syndic la SAS FONCIA [Localité 8] (anciennement dénommée FONCIA DOMITIA SOGEBA - RCS MONTPELLIER 343 765 178), prise en la personne de son représentant légal domicilié ès qualités audit siège sis

[Adresse 6]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représenté par Me Arnaud LAURENT de la SCP SVA, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant

assisté de Me Fanny JOUSSARD, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat plaidant

Syndicat des copropriétaires PARVIS SUD dont le siège social est sis [Adresse 3] - représenté par son syndic la SAS FONCIA [Localité 8] (anciennement dénommée FONCIA DOMITIA SOGEBA - RCS MONTPELLIER 343 765 178), prise en la personne de son représentant légal domicilié ès qualités audit siège sis

[Adresse 6]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représenté par Me Arnaud LAURENT de la SCP SVA, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant

assisté de Me Fanny JOUSSARD, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat plaidant

INTIMES :

Monsieur [W] [T]

né le 14 Avril 1951 à [Localité 5]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représenté par Me Sandy RAMAHANDRIARIVELO de la SCP RAMAHANDRIARIVELO - DUBOIS, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant

assisté de Me Marie GALLE, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat plaidant

Madame [G] [K] épouse [T]

née le 15 Juillet 1951 à [Localité 4]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par Me Sandy RAMAHANDRIARIVELO de la SCP RAMAHANDRIARIVELO - DUBOIS, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant

assistée de Me Marie GALLE, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat plaidant

Ordonnance de clôture du 21 Novembre 2022

COMPOSITION DE LA COUR :

En application de l'article 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 12 DECEMBRE 2022, en audience publique, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par l'article 804 du même code, devant la cour composée de :

Monsieur Philippe GAILLARD, Président de chambre

Madame Nathalie AZOUARD, Conseiller

M. Emmanuel GARCIA, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Sylvie SABATON

ARRET :

- contradictoire

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par Monsieur Philippe GAILLARD, Président de chambre, et par Madame Sylvie SABATON, greffier.

*

* *

EXPOSE DU LITIGE

Les époux [T] sont copropriétaires au sein d'un ensemble immobilier situé à [Localité 8], dénommé Espace Saint-Charles.

Une association syndicale libre (ASL), portant la même dénomination, a été constituée afin de gérer les équipements et espaces communs bénéficiant à plusieurs copropriétés, dont la copropriété Espace Saint-Charles et la copropriété [Adresse 7].

A la suite de plusieurs difficultés concernant notamment la répartition des charges relatives à l'éclairage des allées pour piétons, des allées pour voitures, l'entretien des jardins, les copropriétaires des résidences ont été appelés à voter des résolutions visant à modifier les servitudes existant lors de deux assemblées générales du 9 octobre 2017, notamment la résolution n° 6 prévoyant la « modification de servitudes existant dans le périmètre de la ZAC Saint-Charles : décision à prendre sur le projet établi par Maître [F] concernant l'abandon de servitudes réciproques de l'usage du jardin dans l'ensemble de l'ASL, avec les copropriétés voisines et limitée à la seule section E1 ».

Cette résolution a été approuvée pour le syndicat des copropriétaires Espace Saint-Charles, par 6 974/10 000 représentant 112 copropriétaires contre 459/10 000, et, pour le syndicat des copropriétaires [Adresse 7], par 6 838/10 000 représentant 42 copropriétaires contre 708/10 000.

Le 15 décembre 2017, les époux [T] ont fait assigner le syndicat des copropriétaires Espace Saint-Charles et le syndicat des copropriétaires [Adresse 7] aux fins d'obtenir notamment la nullité de toutes les résolutions ou, subsidiairement, de la seule résolution n° 6 des assemblées générales tenues le 9 octobre 2017. Ils ont fait valoir qu'il n'était pas justifié de la régularité de la tenue des deux assemblées, du constat des votes et des mandats recueillis pour certains des copropriétaires. Concernant la résolution n° 6, ils ont fait valoir qu'il n'était pas possible de vérifier le décompte des votes pour qualifier une majorité renforcée de l'article 26 de la loi du 10 juillet 1965, que chacune des résolutions n° 6 concernait l'entretien des terrains locaux et équipements destinés à l'exercice des servitudes, ce pour quoi seule l'ASL avait compétence aux termes de l'article 3 de ses statuts, que chaque résolution portait en un seul vote sur quatre points distincts et aurait dû donner lieu à 4 votes distincts et que décidant d'une aliénation de parties communes, chaque résolution n° 6 ne pouvait être prise qu'à l'unanimité de tous les copropriétaires.

Les deux syndicats ont opposé que le fait que l'ASL avait été constituée pour gérer les locaux, terrains et équipements communs sans tenir compte de données pratiques qui devaient être modifiées, ce qui avait donné lieu à un projet à la préparation duquel le demandeur avait participé, que les assemblées avaient été tenues de façon parfaitement régulières, que la pratique d'envoi des pouvoirs de vote au syndic n'avait rien d'illégale, que les conditions de majorité de vote avaient été respectées puisque l'abandon de servitude voté était un acte d'administration et non de disposition, que les décisions d'aliénation de servitudes n'étaient pas de la compétence de la seule ASL, qui avait seulement une mission de gestion et que toutes les questions abordées par la résolution n° 6 constituaient un ensemble qui ne pouvait donner lieu à votes séparés.

Le jugement rendu le 26 novembre 2019 par le tribunal de grande instance de Montpellier énonce dans son dispositif :

Reçoit les époux [T] en leur contestation des seules résolutions n° 4-9,4-10 et 6 de l'assemblée générale tenue le 9 octobre 2017 par les copropriétaires de la résidence Le Parvis Sud à [Localité 8] ;

Les déclare irrecevables en leur contestation des autres résolutions de la dite assemblée ;

Les déboute de leur contestation des résolutions n° 4-9 et 4-10 de celle-ci ;

Prononce l'annulation, pour défaut d'obtention d'une majorité votant pour 6 667 tantièmes soit les 2/3 de ceux de tous les copropriétaires, de la résolution n° 6 validant :

la modification de la servitude de passage pour tous véhicules grevant la copropriété Espace Saint-Charles au profit des copropriétaires Le Parvis Sud, Saint-Charles, Avenue Résidence les Allées Saint-Charles, Résidence Carré Saint-Charles,

la renonciation aux servitudes réciproques d'usage des jardins et en conséquence suppression des dites servitudes,

la constitution d'une servitude réciproque d'usage de jardin entre les résidences Saint-Charles Avenue et les Allées Saint-Charles ;

Et ce conformément au projet d'acte établi par maître [P] [F] ;

Reçoit les mêmes époux [T] en leur contestation de seules résolutions n° 4-15, 4-16, 6, 7 et 8 de l'assemblée générale du 9 octobre 2017 ;

Les déclare irrecevables en leur contestation des autres résolutions de la même assemblée ;

Les déboute en ce qui concerne leur contestation des résolutions n° 4-15, 4-16, 7 et 8 de celle-ci ;

Prononce l'annulation à défaut d'obtention d'une majorité votant pour de 6 667 tantièmes représentant 2/3 de ceux de tous les copropriétaires de la résolution n° 6 de la même assemblée et dont le libellé est strictement identique à celui cité plus haut de la résolution n° 6 de l'assemblée générale tenue le même jour par les copropriétaires de la résidence Le Parvis Sud ;

Condamne le syndicat des copropriétaires de la résidence Le Parvis Sud et le syndicat des copropriétaires de la résidence Espace Saint-Charles in solidum aux entiers dépens et à payer chacun aux époux [T] une somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Rejette toute autre demande ;

Ordonne l'exécution provisoire.

Le jugement expose que les procès-verbaux ne font apparaître aucune irrégularité et qu'il apparaît que [W] [T] ne peut être considéré comme opposant que pour certaines des résolutions. Il ajoute que [W] [T] ne peut pas invoquer le fait que certains copropriétaires n'auraient pas été convoqués, seuls eux pouvant s'en prévaloir. Il n'est pas important que les pouvoirs de vote n'ont pu être vérifiés lors de chaque assemblée dans la mesure où le tribunal est en capacité de les vérifier. En tout état de cause, l'irrégularité de certains pouvoirs de vote n'entraîne pas la nullité des résolutions votées mais des votes effectués.

Le jugement précise qu'il ne peut y avoir soustraction d'un vote pour exercice de celui-ci par quelqu'un d'autre que le vrai mandataire désigné. La copropriétaire [L] n'a pas dépassé la limite des 5 % fixée par l'article 22 de la loi du 10 juillet 1965, contrairement aux consorts [D] et la SCI Esfradel, qui constituent un copropriétaire unique, ce qui a comme conséquence de devoir soustraire 28 tantièmes du total ayant conduit à l'adoption ou au rejet de la résolution. Dès lors, les résolutions 4-9 et 4-10 ont été rejetées par 6 838 - 208, soit 6 630 tantièmes contre 707 et la résolution n° 6 approuvée par 6 630 tantièmes contre 707. Le jugement constate que cette rectification n'a pas d'effet sur le résultat des résolutions n° 4-9 et 4-10 mais qu'elle empêche à la résolution n° 6 d'obtenir avec 6 630 tantièmes les deux tiers des tantièmes de tous les copropriétaires, soit les 6 667 exigibles.

Concernant l'assemblée générale tenue le même jour par les copropriétaires de la Résidence Espace Saint-Charles, le jugement relève que pour la mandataire madame [L], le seuil des 500 tantièmes autorisé par l'article 22 de la loi du 10 juillet 1965 n'est pas dépassé mais que le nombre limite de trois copropriétaires mandants l'est. Il convient donc de défalquer les votes du copropriétaire mandataire ayant le plus petit nombre de tantième, soit 24 tantièmes. Le jugement constate que les époux [V] ont voté pour 15 copropriétaires et ont dépassé tant le seuil des trois copropriétaires que celui des 5 % des tantièmes. Le jugement défalque en conséquence et dans la limite des 500 tantièmes, les trois copropriétaires disposant du plus de tantièmes, soit 517 tantièmes. La soustraction de ces tantièmes ne modifie pas la validité des quatre résolutions rejetées mais affecte la résolution n° 6, qui n'atteint plus la majorité requise.

Les deux syndicats des copropriétaires ont relevé appel du jugement par déclaration au greffe du 20 décembre 2019.

La clôture de la procédure a été prononcée par ordonnance du 21 novembre 2022.

Les dernières écritures pour les syndicats de copropriétaires ont été déposées le 17 juillet 2020.

Les dernières écritures pour les époux [T] ont été déposées le 15 octobre 2020.

Le dispositif des écritures pour les syndicats de copropriétaires énonce :

Réformer le jugement dont appel en ce qu'il a prononcé l'annulation de la résolution n° 6 de l'assemblée générale de la copropriété Le Parvis Sud du 9 octobre 2017 et celle de la copropriété résidence Espace Saint-Charles ;

Débouter les consorts [T] de l'intégralité de leurs demandes, fins et conclusions ;

Réformer le jugement dont appel en ce qu'il est entré en voie de condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens ;

Confirmer le jugement dont appel en ce qu'il n'a pas fait droit aux demandes des époux [T] tendant à voir prononcer la nullité de l'assemblée générale ou la nullité des résolutions 4-9 et 4-10 de l'assemblée générale du 9 octobre 2017 de la copropriété Parvis Sud ;

Confirmer le jugement dont appel en ce qu'il n'a pas fait droit à la demande des époux [T] tendant à voir prononcer la nullité de l'assemblée générale résidence Espace Saint Charles plus spécifiquement les résolutions 4-15, 4-16, 7 et 8 de l'assemblée générale du 9 octobre 2017 de la copropriété Espace Saint Charles à [Localité 8] ;

Condamner les époux [T] au paiement de la somme de 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Les syndicats des copropriétaires contestent l'annulation de la résolution n° 6. Ils rappellent que s'agissant de la constitution ou de l'abandon de servitudes, l'assemblée générale doit statuer à la majorité de l'article 26 de la loi du 10 juillet 1965, s'agissant d'un acte de disposition. Ils font valoir un arrêt du 9 février 2017 de la Cour de cassation prévoyant que tout copropriétaire peut déléguer son droit de vote à un mandataire qui ne peut recevoir plus de trois délégations de vote sauf si le total des voix dont il dispose lui-même et celle de ses mandants n'excèdent pas 5 % et que chacun des époux copropriétaires communs ou indivis d'un lot peut recevoir personnellement des délégations de vote dans les conditions et limites prévues par l'article 22. Selon eux, si la SCI Esfradel a bien comme associés les époux [D], elle n'est pas intervenue en qualité de mandataire des copropriétaires [X], [UI], [O] et [H]. Ces copropriétaires ont donné pouvoir à madame [D] et à monsieur [D]. Si le nom de la SCI figure sur la feuille de présence, cela ne matérialise pas l'existence des pouvoirs. Seuls les pouvoirs permettent ce calcul. Selon l'article pré-cité, un copropriétaire ne peut représenter plus de 500/10 000. Or, ni madame [D] ni monsieur [D] ne dépassaient ce seuil. La SCI Esfradel constitue une personne morale distincte dont les voix n'ont pas à être prises en compte pour le calcul du seuil des 500 voix. Il faut distinguer les voix de la SCI Esfradel, de celle de madame [D] et de celle de monsieur [D].

Concernant les pouvoirs adressés à la SCI Case Margot, les syndicats de copropriétaires font valoir que le pouvoir avait été attribué à la présidence du conseil syndical, charge à elle de l'attribuer à un mandataire de son choix et que ce pouvoir n'a pas été remis en début d'assemblée générale mais dans le cadre de la préparation de l'assemblée générale, ce qui est très courant en pratique.

Les syndicats des copropriétaires soutiennent que le nombre de mandats peut être supérieur à trois si le total des voix dont le mandataire dispose pour lui-même et pour ses mandants n'excède pas 5 %. Dès lors, aucune critique ne peut être apportée au vote de madame [L]. Ils affirment que ce n'est pas la SCI JCM qui a représenté les copropriétaires mais madame [L] quand bien même celle-ci soit la gérante de cette société.

Les syndicats des copropriétaires soutiennent que c'est à tort que les époux [V] ont été considérés comme copropriétaire unique concernant l'assemblée générale de Parvis Sud. Selon les syndicats des copropriétaires, les époux [V] n'atteignent pas pour chacun d'eux le seuil de 5 %, ce qui leur permet de représenter plus de trois copropriétaires.

Les syndicats des copropriétaires soutiennent que les pouvoirs adressés à monsieur [M] avait été adressés à la présidente du conseil syndical, charge à elle de l'attribuer à monsieur [S] et qu'ils ont été remis dans le cadre de la préparation de l'assemblée générale et non remis au début de l'assemblée générale. Ils font valoir que cette procédure arrive fréquemment sans que cela n'implique la nullité de l'assemblée générale. Il en est de même pour les pouvoir adressés à la SCI Hauteponche.

Les syndicats des copropriétaires contestent la demande des époux [T] visant à voir prononcer l'annulation en son entier des assemblées générales de Le Parvis Sud et Espace Saint-Charles. Ils rappellent que, de jurisprudence constante, un copropriétaire ne peut demander l'annulation en son entier d'une assemblée générale alors qu'il a voté en faveur de certaines résolutions. Il est démontré que les époux [T] ont voté en faveur de certaines résolutions et ne peuvent donc demander la nullité des assemblées générales en leur entier. Ils ajoutent qu'il ne saurait exister un abus du droit de subdéléguer alors que la subdélégation est admise en droit de la copropriété. Ils précisent que la SCI Jim a exercé les pouvoirs pour monsieur [J] et la SCI Robert sans dépasser le seuil des 500 voix. Il en serait de même si son représentant, madame [L] avait exercé ces pouvoirs. Les syndicats ajoutent que c'est par erreur que le nom de madame [L] a été biffé pour être remplacé par monsieur [S] pour le pouvoir de monsieur [M]. En tout état de cause, c'est bien monsieur [S] qui l'a représenté.

Les syndicats des copropriétaires contestent la nécessité d'obtenir une délibération de l'association syndicale libre (ASL) avant les délibérations des syndicats des copropriétaires au sujet des servitudes puisque ces servitudes de passage sont constituées par les règlements de copropriété. L'ASL est uniquement en charge de l'entretien des terrains, locaux et équipements destinés à l'exercice des servitudes.

Les syndicats des copropriétaires soutiennent que toutes les questions posées au sein de la résolution n° 6 constituaient un ensemble indivisible qui ne nécessitait qu'un seul vote. En effet, des votes contraires pour une ou plusieurs résolutions séparées aurait eu pour conséquence de parvenir à des situations ingérable et irrationnelle.

Ils contestent la nécessité d'un vote à l'unanimité pour la résolution n° 6 puisque la renonciation de ses servitudes ne constitue pas une aliénation des parties communes. L'arrêt de la cour d'appel d'Aix en Provence du 25 mai 2007, cité par les intimé,s concernent un cas très différent dans la mesure où la servitude consentie l'était au profit d'un tiers sans contrepartie financière. Il s'agit ici d'une renonciation à servitude et d'une constitution de servitude réciproque. En tout état de cause, il n'est pas démontré en quoi il y aurait atteinte au respect de la destination de l'immeuble.

Les syndicats des copropriétaires contestent la nullité des résolutions n° 1 des assemblées dans la mesure où le dol, invoqué par les époux [T], n'est pas établi.

Le dispositif des écritures pour les époux [T] énonce :

Débouter les syndicats des copropriétaires de la résidence Parvis-Sud et de la Résidence Saint-Charles de l'intégralité de leurs appels, moyens, demandes, fins et prétentions comme injustes et mal fondés, et confirmer le jugement en ce qu'il a reçu les époux [T] en leur contestation des résolutions n°4-9, 4-10 et 6 de l'assemblée générale du 9 octobre 2017 des copropriétaires de la résidence Le Parvis Sud et prononcé l'annulation de la résolution n° 6 de cette même assemblée, reçu les époux [T] en leurs contestations des résolutions n° 4-15, 4-16, 6, 7 et 8 de l'assemblée générale du 9 octobre 2017 des copropriétaires de la résidence Espace Saint-Charles et prononcé l'annulation de la résolution n° 6 de cette assemblée, condamne les syndicats des copropriétaires in solidum aux dépens et à payer aux époux [T] une somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Réformer le jugement en ce qu'il les a déclarés irrecevables en leur contestation et de demandes de nullité des autres résolutions des assemblées générales des copropriétaires ainsi que de leur demande de nullité de l'entièreté desdites assemblées générales, débouté de leur contestation et demande de nullité des résolutions n°4-9 et 4-10 de l'assemblée générale de la résidence Parvis Sud et des résolutions n°4-15, 4-16, 7 et 8 de l'assemblée générale de la résidence Espace Saint-Charles et du surplus de leurs demandes ;

Prononcer l'annulation respective en toutes leurs résolutions et leur entièreté de chacune des assemblées générales du 9 octobre 2017 ;

Prononcer l'annulation de la résolution n° 6 de l'assemblée du 9 octobre 2017 des copropriétaires Le Parvis Sud et de la résolution n° 6 du procès-verbal des assemblées générales des copropriétaires Espace Saint-Charles ;

Condamner chacun des appelants à payer aux époux [T] la somme de 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens in solidum.

Les époux [T] soutiennent que la jurisprudence du 9 février 2017 citée par les appelants n'est pas applicable à des associés gérants d'une société civile immobilière détenant le même lot, de sorte que comme le premier juge l'a retenu, les époux [D] ou la SCI Esfradel sont un copropriétaire unique. Ils ajoutent que ni la feuille de présence ni les mandats donnés ne précisent que ce serait en qualité de gérant que monsieur [D] aurait représenté [X] et [UI] par délégation, pas plus que madame [D] n'aurait pu voter en qualité de propriétaire par ailleurs pour représenter [O] et [H]. Le décompte sur liste des pouvoirs indique madame [D] comme porteuse des voix de messieurs [O] et [H], sans décompte de voix pour elle-même en tant que propriétaire votant et cette même liste des pouvoirs indique la SCI Esfradel monsieur ou madame comme porteur des voix de [X] et [UI]. Les pouvoirs n'ont donc pas été régulièrement exercés et ce d'autant plus que ne peut être exercé un vote par délégation que sur mandat écrit. Or, la SCI Esfradel n'était pas habilitée à voter au vu des pouvoirs et apparaît pourtant sur la feuille de présence et est mentionnée comme mandataire. La feuille de vote reflète la manière dont les votes ont été finalement décomptés et cette feuille mentionne le nom des mandataires. Il semble y avoir discordance entre les mandataires mentionnés à la feuille de présence et la manière dont dans le décompte des pouvoirs avec les voix du mandataire désigné ont été réparties en tenant compte ou non des voies détenues par le réel mandataire.

Les pouvoirs sont censés avoir été renvoyés au syndic avec instruction de vote. Or, il n'est pas établi que les pouvoirs utilisés auraient été remis en main propre à madame [L]. Les époux [T] ajoutent que la feuille de présence mentionne que la SCI Esfradel a voté pour elle-même et qu'elle est mentionnée comme mandataire pour [N] [O], [I] [H], [B] [X] et [C] [UI]. Les époux [D] ne sont pas ici époux indivis mais représentants de cette société civile immobilière. Dès lors, tous les votes des copropriétaires mentionnés devraient s'ajouter à ceux propres de la SCI Esfradel.

Les époux [T] soutiennent que les votes décomptés par délégation à la SCI Jam sont irréguliers au titre de la résolution n°6 de la copropriété Espace Saint-Charles. En effet, les pouvoirs mentionnent [U] [L] à titre personnel et ne pouvaient être exercés par la SCI JCM. Ils avancent également que les époux [V] doivent être considérés ensemble comme copropriétaire unique et indivis. Ils ne peuvent donc ensemble dépasser les trois mandats s'ils dépassent le seuil des 5 %. Or, le décompte sépare les pouvoirs et voix de chacun des époux. L'exigence du seuil n'est donc pas respectée.

Les époux [T] sollicitent l'annulation intégrale des deux assemblées générales faute de démonstration de la régularité de leur tenue, du constat des votes et des mandats recueillis. Ils soutiennent concernant les deux assemblées générales que tous les copropriétaires n'ont pas été valablement invités à participer aux assemblées et à voter. Ils en veulent pour preuve la lettre du président du conseil syndical annexée aux notifications des deux procès-verbaux, qui précise que certains pouvoirs n'ont pu être comptabilisés sans en spécifier les raisons. Il est ainsi impossible de vérifier les personnes qui auraient dû être appelées à voter ou non. Le décompte des votants est donc nécessairement inexact et les résolutions doivent être annulées.

Ils font valoir un abus du droit de subdéléguer de [U] [L], comme la cour d'appel de Montpellier a pu le retenir le 3 mars 1994, puisqu'elle a reçu plus de trois mandats et a dépassé le seuil de 5 %.

Concernant l'assemblée générale de Parvis Sud, les époux [T] soutiennent que la SCI JCM a exercé des pouvoir directement pour deux copropriétaires alors que les pouvoirs ont été donnés à [U] [L] à titre personnel. Les votes décomptés pour la SCI Jam, copropriétaire mandatée, sont irréguliers. Il n'est pas démontré que le pouvoir donné par la SCI Case Margot ait été distribué par le président de séance après sa désignation, son décompte du vote serait donc irrégulier.

Concernant l'assemblée générale de l'Espace Saint-Charles, les époux [T] soutiennent que [U] [L] a reçu plus de pouvoirs par subdélégation qu'elle ne pouvait en obtenir au-delà du seuil de 5 %. L'affirmation du syndicat des copropriétaires établissant que la SCI JCM n'apparaît pas comme détenteur de pouvoir et que ce serait madame [L] qui aurait représenté les copropriétaires est contredite par la feuille de présence puisque le décompte des votes intègre les votes de la SCI JCM en tant que titulaires de mandats. Ils contestent également les pouvoirs décomptés pour les époux [V] pour les raisons indiquées précédemment et retenues par le premier juge. Ils soulignent qu'ils ont bien émargé comme copropriétaire unique. Les époux [T] remettent également en cause le pouvoir donné par [A] [M]. Le pouvoir vise [U] [L], mention biffée et remplacée, dans une écriture différente par monsieur [S]. Ce pouvoir est nul puisque madame [L] n'avait pas la faculté de subdéléguer ce pouvoir en tant que mandant principal. Selon eux, cette rectification a été faite pour éviter à la SCI Jam d'excéder le seuil des 5 %. Ils contestent également le pouvoir donné par [E] [Y] qui a été confié à monsieur le président, sans précision et qui, faute de précision sur l'identité du mandataire, est irrégulier. Il est a minima un pouvoir remis en blanc qui aurait dû être distribué après la désignation du président, ce qui n'est pas le cas. C'est madame [L] qui l'a confié à monsieur [Z] avant d'être élue présidente de séance puisque son élection induit l'usage du pouvoir litigieux.

Les époux [T] ajoutent que les résolutions n° 6 des deux assemblées générales sont illicites car elles précèdent des décisions devant être prises par l'ASL. L'article 3 de l'ASL prévoit que son objet est notamment « l'entretien des terrains, locaux et équipements destinés à l'exercice des servitudes », et n° 8 que l'ASL est souveraine pour toutes les questions comprises dans l'objet. La suppression des servitudes de passage dont l'ASL assure la gestion touche donc à son objet tout comme les servitudes créées.

Les époux [T] font également valoir que la résolutions n° 6 porte sur quatre objets distincts qui auraient dû faire l'objet de votes séparés. La jurisprudence rappelle de manière constante que les copropriétaires ne peuvent pas se prononcer par un seul vote sur plusieurs questions différentes. Il n'est pas démontré par le syndicat que les questions mises à l'ordre du jour étaient indissociables et indivisibles. Ils soutiennent que la décision portait sur des droits et des personnes distinctes.

Les époux [T] avancent que l'assemblée générale ne peut pas, sauf à l'unanimité des voix, décider de l'aliénation des parties communes dont la conservation est nécessaire au respect de la destination de l'immeuble. Or, les règlements des deux copropriétés stipulent que le réseau de servitudes, dont celles en litige, a été instauré pour l'utilisation conformément à leur destination des biens immobiliers s'inscrivant dans le périmètre du site de Saint-Charles. Il est certain que les parties communes de l'immeuble dont chaque copropriétaire est propriétaire indivis, constituent un élément indispensable pour permettre l'usage normal des parties privatives. Cette utilisation suppose un droit d'accès et de circulation notamment. Dès lors, la renonciation à ces servitudes porte atteinte à un droit acquis. L'abandon de servitude modifie ainsi la destination des parties privatives et de leur modalité de jouissance. Les règlements de copropriété prévoient un droit acquis des copropriétaires relatif aux conditions d'usage de l'immeuble et à son standing. Chacun des copropriétaires a acquis ces lots comprenant le bénéfice d'usage des parties communes et donc les servitudes en cause.

Les époux [T] avancent que le décompte des votes pour qualifier la majorité renforcée de l'article 26 de la loi du 10 juillet 1965 est invérifiable, ce qui permet d'annuler les résolutions n° 6 des deux assemblées générales et, plus globalement, l'intégralité de celles-ci. Le décompte des voix est contraire aux règles légales établies en la matière et les formalités d'établissement des procès-verbaux n'ont pas été respectées. Selon eux, la désignation à l'unanimité du président résulte d'un dol ayant vicié leur consentement résultant du faux décompte des mandats et des voix.

MOTIFS

L'article 22 de la loi du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, dans sa rédaction applicable à l'espèce, prévoit en son troisième alinéa que tout copropriétaire peut déléguer son droit de vote à un mandataire, que ce dernier soit ou non membre du syndicat. Chaque mandataire ne peut, à quelque titre que ce soit, recevoir plus de trois délégations de vote. Toutefois, un mandataire peut recevoir plus de trois délégations de vote si le total des voix dont il dispose lui-même et de celles de ses mandants n'excède pas 5 % des voix du syndicat.

Lorsque des pouvoirs présentés à une assemblée sont irréguliers, l'assemblée est nulle dans son entier sans qu'il soit besoin de rechercher si les votes correspondants pouvaient ou non modifier le sens des résolutions adoptées.

S'il est exact, comme l'énoncent les appelants, que chacun des époux copropriétaires communs ou indivis d'un lot peut recevoir personnellement des délégations de vote dans les conditions et limites prévues par l'article 22 précité, il est également exact, comme le soutiennent les époux [T], que tel n'est pas le cas pour des associés gérants d'une société civile immobilière détenant le même lot, de sorte que c'est à bon droit que les premiers juges ont retenu que monsieur et madame [D] et la société civile immobilière Esfradel étaient un copropriétaire unique et qu'il convenait d'apprécier les mandats de représentation en conséquence.

S'agissant de la copropriété Le Parvis Sud, la cour relève de la feuille de présence, annexe du procès-verbal pour le décompte et seul document faisant foi pour vérifier les représentations et présences à l'ouverture de séance puisque mentionnant le nom des mandataires, le cas échéant avec vérification du pouvoir correspondant, et s'ils sont présents ou représentés, que la société Esfradel, copropriétaire non tiers, était bien mentionnée comme mandataire, qu'ainsi, les pouvoirs qui lui ont été intégralement remis, par l'intermédiaire de ses associés gérants, doivent se décomposer comme suit : [R] [X]-[GR], 177 tantièmes, [C] [UI], 177 tantièmes. [N] [O], 178 tantièmes et [I] [H], 176 tantièmes, soit un total de 708 tantièmes, auxquels il convient d'ajouter ceux de la société Esfradel, soit 177 tantièmes, ce qui conduit à un total de 885/10 000èmes pour quatre mandats, soit un rapport supérieur aux 5 %, de 500/10 000èmes en l'espèce.

Ces pouvoirs étant irréguliers, l'assemblée générale du 9 octobre 2017 de la copropriété Le Parvis Sud sera déclarée nulle dans son entier.

S'agissant de la copropriété Espace Saint-Charles, il doit être retenu que dans la mesure où des époux mandatés détiennent ensemble leur lot, ils ne sauraient être admis à recevoir ensemble plus de trois mandats s'ils dépassent le seuil de 5 %, étant entendu que l'un ou l'autre des conjoints ne peut être considéré, pour la prise en compte desdits mandats, comme un mandataire, tiers à la copropriété.

Au cas d'espèce, dans la mesure où les époux [V] ainsi mandatés détiennent ensemble leur lot, tel que cela résulte de la feuille de présence communiquée, et que le syndicat des copropriétaires n'apporte aucun démenti à cet égard, ils ne sauraient en conséquence être admis à recevoir ensemble plus de trois mandats s'ils dépassent le seuil de 5 %.

La cour relève, comme les premiers juges, qu'ils ont voté pour quinze copropriétaires, disposant d'un total de 915 tantièmes, auxquels doivent s'ajouter les leurs, pour 73 tantièmes, de sorte qu'il ont voté en définitive pour 988/10 000èmes, ce qui est supérieur aux 5 %, de 500/10 000èmes en l'espèce.

Ces pouvoirs étant irréguliers, l'assemblée générale du 9 octobre 2017 de la copropriété Espace Saint-Charles sera également déclarée nulle dans son entier.

En conséquence de ce qui précède, le jugement rendu le 26 novembre 2019 par le tribunal de grande instance de Montpellier sera infirmé sauf en ce qu'il a condamné le syndicat des copropriétaires de la résidence Le Parvis Sud et le syndicat des copropriétaires de la résidence Espace Saint-Charles in solidum aux entiers dépens et à payer chacun aux époux [T] une somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Statuant à nouveau, il sera prononcé l'annulation des deux assemblées générales en leur entier.

2. Sur les dépens et les frais non remboursables

La copropriété Espace Saint-Charles et la copropriété Le Parvis Sud seront condamnées in solidum aux dépens de l'appel, avec recouvrement direct au bénéfice des avocats de la cause qui peuvent y prétendre.

La copropriété Espace Saint-Charles et la copropriété Le Parvis Sud seront en outre condamnées à payer chacune aux époux [T] la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire et mis à disposition au greffe ;

INFIRME le jugement rendu le 26 novembre 2019 par le tribunal de grande instance de Montpellier, sauf en ce qu'il a condamné le syndicat des copropriétaires de la résidence Le Parvis Sud et le syndicat des copropriétaires de la résidence Espace Saint-Charles in solidum aux entiers dépens et à payer chacun aux époux [T] une somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Statuant à nouveau,

PRONONCE la nullité dans son entier de l'assemblée générale du 9 octobre 2017 de la copropriété Le Parvis Sud ;

PRONONCE la nullité dans son entier de l'assemblée générale du 9 octobre 2017 de la copropriété Espace Saint-Charles ;

CONDAMNE la copropriété Espace Saint-Charles et la copropriété Le Parvis Sud à payer chacun aux époux [T] la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais non remboursables exposés en appel ;

CONDAMNE in solidum la copropriété Espace Saint-Charles et la copropriété Le Parvis Sud aux dépens de l'appel et accorde aux avocats de la cause qui peuvent y prétendre le droit de recouvrement direct conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Le Greffier Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 5e chambre civile
Numéro d'arrêt : 19/08199
Date de la décision : 07/02/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-02-07;19.08199 ?
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