Grosse + copie
délivrées le
à
COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
1re chambre sociale
ARRET DU 01 FEVRIER 2023
Numéro d'inscription au répertoire général :
N° RG 19/05072 - N° Portalis DBVK-V-B7D-OIHI
ARRET N°:
Décision déférée à la Cour :
Jugement du 18 JUIN 2019 du CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION DE DEPARTAGE DE MONTPELLIER
N° RG F16/00305
APPELANTE :
SAS PROMOD, prise en la personne de son représentant légal domicilié es qualité audit siège
[Adresse 3]
[Localité 2]
Représentée par Me Romain GEOFFROY de la SELARL SELARL ORA, avocat au barreau de MONTPELLIER (Postulant) et par Me WALLON-LEDUC Aude, avocate au barreau de LILLE (Plaidant)
INTIMEE :
Madame [U] [J]
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représentée par Me Emilie BRUM, avocate au barreau de MONTPELLIER
Ordonnance de clôture du 15 Novembre 2022
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 06 DECEMBRE 2022,en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Pascal MATHIS, Conseiller, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Monsieur Philippe DE GUARDIA, Président de chambre
Monsieur Pascal MATHIS, Conseiller
Mme Véronique DUCHARNE, Conseillère
Greffier lors des débats : Mme Marie BRUNEL
ARRET :
- Contradictoire
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;
- signé par Monsieur Philippe DE GUARDIA, Président de chambre, et par Mme Marie BRUNEL, Greffière.
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* *
EXPOSÉ DU LITIGE
La SAS PROMOD FRANCE a embauché Mme [U] [J] suivant contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel du 20 octobre 2012 en qualité de conseillère de mode.
Les relations contractuelles des parties sont régies par les dispositions de la convention collective des maisons à succursales de vente au détail d'habillement.
Le 7 mai 2015, l'employeur adressait à la salariée un avertissement rédigé en ces termes :
« Par la présente, nous faisons suite à votre entretien du 6 mai dernier avec votre responsable de région, [A] [W] et en présence de votre responsable adjointe [L] [D]. Lors de cet entretien Mme [W] a fait suite à votre mail du 06/04/2015 et vous a fait part de son mécontentement quant à votre comportement. En effet, dans votre mail du 06/04/2015, vous informez Mme [W] que vous ne prendrez pas part à la réunion du 07/04/2015 regroupant plusieurs équipes des magasins PROMOD, car vous ne souhaitez pas être en présence de votre ancien manager. Si vous ayez eu dans le passé des difficultés de communication avec un ancien manager, cela ne justifie pas votre absence à une réunion d'équipe et que vous nous mettiez, de surcroît, devant le fait accompli. Par ailleurs, le vendredi 03/04/2015, vous avez fait part à votre responsable de magasin, Mme [P] [H], de votre désaccord concernant votre planning. Alors que votre responsable vous rappelait les règles relatives à l'établissement des plannings et que ces règles étaient identiques pour toute l'équipe, vous lui avez indiqué que les autres vous vous en « foutez ». Enfin, le 14/04/2015, alors que vous étiez en repos, vous vous êtes présentée sur votre lieu de travail, avec votre enfant, afin d'avoir un entretien avec Mme [W]. Cette dernière vous a alors indiqué que vous étiez en repos, de surcroît avec votre enfant et qu'elle ne manquera pas de vous recevoir lors de sa prochaine visite. Alors qu'elle répondait à une question de votre part, vous vous êtes montrée irrespectueuse et agressive. En quittant le magasin, vous avez crié : « c'est du foutage de gueule », en surface de vente devant vos collègues et des clientes qui vous ont manifestement entendu. Ainsi, malgré un avertissement le 12 juillet 2013, nous avons, à nouveau, à déplorer de votre part un comportement contraire à vos obligations contractuelles et aux valeurs de l'entreprise. Nous ne pouvons tolérer un tel comportement démontrant un manque de professionnalisme, d'esprit d'équipe, de respect d'autrui et un manque d'esprit commerçant susceptibles de nuire à l'image de l'entreprise et à l'ambiance de travail. Aussi, nous vous confirmons, par la présente, un avertissement qui sera consigné dans votre dossier personnel. Nous vous rappelons que le professionnalisme, l'enthousiasme, l'esprit d'équipe, le respect d'autrui, la simplicité dans la façon d'être et l'esprit d'initiative sont des valeurs auxquelles notre société est fortement attachée. Nous vous encourageons à prendre du recul et il convient que vous révisiez votre comportement dans les plus brefs délais, que vous adoptiez une attitude positive en magasin dans le respect des valeurs de la société et de vos engagements contractuels. »
La salariée contestait cet avertissement le 19 mai 2015 par lettre ainsi rédigée :
« J'ai bien reçu la lettre recommandée du 07/05/2015, ayant pour objet : « Avertissement », que je conteste. Vous revenez sur un mail du 06/04/2015 où je vous explique que je ne me sentais pas capable d'aller à une réunion avec mon ancienne responsable sur le point de vente de [Localité 5] avec laquelle ma relation de travail s'est mal terminée. Vous n'avez jamais répondu à ce mail, j'en ai donc conclu que vous acceptiez que je ne sois pas présente à cette réunion. Je tiens de plus à vous préciser que cette réunion était prévue sur mon jour de repos. En aucun cas, je vous mis devant le fait accompli. Concernant mon planning, j'ai effectivement le 03/04/2015 fait part à ma responsable Mme [H], de mon désaccord concernant celui-ci. En effet, vous avez modifié les samedis pour passer d'un samedi après-midi sur deux de repos à un travail tous les samedis après-midi. Je sais pertinemment que vous vous êtes dans votre droit en agissant de la sorte, mais vous comprendrez bien que je trouve cette situation inéquitable. Mes autres camarades de travail ayant un samedi sur deux, en dehors de [G] [N], avec qui vous avez eu un accord lui permettant d'obtenir deux jours de repos contre la fermeture systématique d'un samedi soir. Cependant, je ne puis accepter les propos que vous voulez m'octroyer, en aucun cas je n'ai dit que « je me foutais de mes autres collègues ». Concernant le 14/04/2015, vous me reprochez alors que j'étais en repos, de me présenter sur mon lieu de travail avec mon enfant, afin d'avoir un entretien avec Mme [W]. Entretien qui était prévu suite à un renseignement demandé au service juridique concernant mon planning, qui m'a conseillé de prendre contact avec la responsable régionale pour échanger sur ce point. Je me suis donc présenté sur mon jour de repos pour ne pas laisser traîner les choses, j'ai bien prévenu ma responsable que je me viendrais avec mon enfant en bas-âge, car je n'avais de système de garde sur mon jour de repos. Ce même jour, ma collègue a été reçue également sur son jour de repos. Je tiens à préciser que je ne me suis pas imposée à cette entrevue, comme il m'a été dit par la suite, j'étais attendue. Cet entretien s'est très mal passé, j'en suis sortie bouleversée et en larmes, et j'ai exprimé à la responsable adjointe de magasin, et uniquement à elle et en aparté, que « c'est du foutage de gueule ». D'ailleurs ces propos, vous ont été rapportés par cette dernière, preuve qu'ils n'ont pas été criés dans le magasin. Vous me parlez d'un avertissement du 12/07/2013, que vous m'avez fait signer sur le coin d'un bureau, sans que je puisse comprendre les faits qui m'étaient reprochés, et dont aucun document ne m'a été remis, j'en profite pour d'ailleurs pour le contester. Je vous rappelle que je travaille en CDI chez PROMOD depuis 20/10/2012, et que professionnalisme, enthousiasme, esprit d'équipe, respect d'autrui, simplicité dans la façon d'être, et esprit d'initiative, sont des valeurs auxquelles je suis très attachée, et que j'applique dans l'entreprise. Je n'ai malheureusement jamais eu l'occasion de vous rencontrer, ni même d'avoir une conversation sur mon parcours au sein de l'entreprise, mais j'ose espérer que vous reviendrez sur votre décision concernant cet avertissement. »
La salariée a été licenciée pour faute grave par lettre ainsi rédigée, dont la date sera discutée par les parties :
« Nous faisons suite à l'entretien préalable à sanction pouvant aller jusqu'au licenciement prévu le vendredi 15 janvier dernier et vous notifions, par la présente, votre licenciement pour faute grave pour les motifs évoqués ci-après. Le 5 janvier dernier, votre responsable de région Mme [A] [W], a reçu un mail de la direction administrative et financière, lui signalant qu'un chèque d'un montant de 80,82 €, encaissé sur le magasin de [Localité 4] Trifontaine le 11 décembre 2015, était sans provision. Après vérification, il s'avère que vous avez procédé à l'encaissement de ce chèque. Or, ce genre d'incident n'est pas censé se produire étant donné que tous nos magasins disposent du service Certegy Transax leur permettant de garantir les chèques reçus en magasin, et que comme l'exige la procédure, tout chèque, peu importe le montant, doit faire l'objet d'une vérification auprès de ce service avant d'être accepté. Or, il s'avère que vous avez accepté ce chèque sans interroger le service Certegy Transax. Notre société ne peut donc prétendre au remboursement de ce chèque qui restera donc impayé. Ceci est d'autant plus inacceptable que vous avez noté au dos de ce chèque un numéro d'accord qui s'avère être totalement fictif. En effet, nous pouvons affirmer que ce chèque n'a fait l'objet d'aucune vérification, il était donc impossible que vous ayez obtenu un numéro d'accord. Par ailleurs, nous vous avions déjà alertée sur l'importance du respect des procédures relatives aux opérations de caisse par un courrier en date du 15 décembre dernier. L'ensemble de ces faits est strictement contraire à toutes vos obligations, tant professionnelles que contractuelles, et, compte tenu de leur gravité, votre maintien dans l'entreprise s'avère impossible. En effet, de tels manquements aux procédures compromettent la sécurisation des flux financiers en magasin. De plus, le fait d'avoir sciemment dissimulé votre erreur par l'inscription d'un faux numéro d'accord au dos du chèque remet en cause toute la confiance que nous pouvons vous accorder dans l'exercice de vos missions de conseillère de mode. Vous ne vous êtes pas présentée à l'entretien préalable à sanction pouvant aller jusqu'au licenciement prévu le vendredi 15 janvier dernier. Ainsi, faute d'avoir recueilli des explications lors de cet entretien, nous ne sommes pas en mesure de modifier notre appréciation par rapport à la faute qui vous est reprochée. Votre contrat de travail prendra fin le jour de la première présentation de cette notification, sans préavis ni indemnité, et vous sortirez donc de nos effectifs à cette date. Par ailleurs, nous tenons à vous préciser que la mise à pied à titre conservatoire qui vous a été notifiée le 8 janvier 2016 ne vous sera pas rémunérée. Conformément aux dispositions de la loi de sécurisation de l'emploi du 14 juin 2013 et à l'article L. 911-8 du code de la sécurité sociale, vous trouverez ci-joint un courrier d'information concernant la portabilité de vos garanties de prévoyance et, le cas échéant, de mutuelle en fonction de votre situation. Nous vous transmettrons dans les meilleurs délais votre solde de tout compte ainsi que votre certificat de travail et votre attestation Pôle Emploi. »
La salariée a répondu à l'employeur le 24 février 2016 en ces termes :
« Je fais suite à votre courrier daté du 17 février dernier (et reçu bien après, le 23 février 2016) aux termes duquel vous me notifiez mon licenciement. Ce courrier n'a pas manqué de me surprendre. L'entretien préalable était prévu le 15 janvier. Vous aviez donc jusqu'au 15 février, soit un mois après l'entretien préalable, pour me notifier mon licenciement. Malgré mes relances (mes nombreux appels téléphoniques notamment), je n'ai rien reçu avant le 23 février 2016. Par ailleurs, je conteste les faits qui me sont reprochés. Votre lettre est vague et imprécise. Vous êtes incapable de me donner l'heure où les faits se sont soi-disant produits ni même le nom de l'émetteur du chèque, de telle sorte que toute vérification m'est impossible ! Vous n'ignorez pas que nous sommes toujours au moins deux en magasin (voire même parfois 3) et que nous avons toutes accès à la même caisse. Je regrette la décision que vous avez prise. Je suis extrêmement affectée par cette situation et ce d'autant plus que je me suis toujours investie dans mon travail. »
Contestant notamment son licenciement, Mme [U] [J] a saisi le 2 mars 2016 le conseil de prud'hommes de Montpellier, section commerce, lequel, par jugement de départage rendu le 18 juin 2019, a :
dit que le licenciement s'analyse en un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
condamné l'employeur à payer à la salariée les sommes suivantes :
'6 500,00 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
'2 030,08 € bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis ;
' 203,00 € bruts au titre des congés payés y afférents ;
' 710,53 € bruts à titre d'indemnité de licenciement ;
'1 319,55 € bruts à titre de rappel de salaire sur mise à pied conservatoire ;
' 131,95 € bruts au titre des congés payés y afférents ;
'1 000,00 € nets au titre des frais irrépétibles ;
rappelé que les condamnations prononcées au profit de la salariée bénéficient de l'exécution provisoire de droit dans les conditions prévues aux articles R. 1454-14 et R. 1454-28 du code du travail et sur la base d'un salaire mensuel moyen de 1 033,74 € bruts,
ordonné l'exécution provisoire pour le surplus ;
rappelé que de droit l'intérêt au taux légal s'appliquera à la date de la saisine concernant les condamnations salariales, à la date de la décision concernant les créances indemnitaires ;
débouté les parties de toute autre demande, plus ample ou contraire ;
ordonné par application de l'article L. 1235-4 du code du travail le remboursement par l'employeur des indemnités chômage versées à la salariée employée plus de deux ans et licenciée sans cause réelle et sérieuse, du jour du licenciement au jour du jugement dans les limites fixées par législateur, soir 6 mois d'indemnités de chômage ;
condamné l'employeur aux dépens.
Cette décision a été notifiée le 27 juin 2019 à la SAS PROMOD qui en a interjeté appel suivant déclaration du 18 juillet 2019.
L'instruction a été clôturée par ordonnance du 15 novembre 2022.
Vu les dernières conclusions déposées et notifiées le 1er octobre 2019 aux termes desquelles la SAS PROMOD demande à la cour de :
constater que l'avertissement en date du 7 mai 2015 est fondé ;
constater que les faits reprochés à la salariée sont constitutifs d'une faute grave ;
confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a considéré que l'avertissement en date du 7 mai 2015 était justifié ;
l'infirmer pour le surplus ;
ordonner le remboursement des sommes perçues dans le cadre de l'exécution provisoire ;
débouter la salariée de l'intégralité de ses demandes ;
condamner la salariée à lui payer une somme de 2 000 € au titre des frais irrépétibles ;
condamner la salariée aux entiers dépens de l'instance.
Vu les dernières conclusions déposées et notifiées le 6 août 2019 aux termes desquelles Mme [U] [J] demande à la cour de :
confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :
'dit que le licenciement s'analyse en un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
'condamné l'employeur à lui payer les sommes suivantes :
'2 030,08 € bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis ;
' 203,00 € bruts au titre des congés payés y afférents ;
' 710,53 € bruts à titre d'indemnité de licenciement ;
'1 319,55 € bruts à titre de rappel de salaire sur mise à pied conservatoire ;
' 131,95 € bruts au titre des congés payés y afférents ;
infirmer le jugement entrepris pour le surplus ;
condamner l'employeur à lui payer la somme de 12 184,80 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
dire que l'avertissement du 7 mai 2015 est injustifié et doit être annulé ;
condamner l'employeur à lui payer la somme de 5 000 € à titre de dommages et intérêts pour sanction disciplinaire injustifiée ;
condamner l'employeur à lui verser la somme de 1 500 € au titre des frais irrépétibles ;
condamner l'employeur aux dépens.
MOTIFS DE LA DÉCISION
1/ Sur l'avertissement du 7 mai 2015
L'article L. 1333-1 du code du travail dispose que :
« En cas de litige, le conseil de prud'hommes apprécie la régularité de la procédure suivie et si les faits reprochés au salarié sont de nature à justifier une sanction.
L'employeur fournit au conseil de prud'hommes les éléments retenus pour prendre la sanction.
Au vu de ces éléments et de ceux qui sont fournis par le salarié à l'appui de ses allégations, le conseil de prud'hommes forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si un doute subsiste, il profite au salarié. »
L'employeur produit le courriel visé à l'avertissement et fait valoir qu'il ne pouvait y être répondu dès lors qu'il a été expédié la veille de la réunion à 23h31. Il produit de plus les attestations des témoins suivants :
' Mme [L] [D] :
« J'atteste avoir vu ma collègue [U] [J] partir du magasin en pleure en criant « c'est du foutage de gueule » devant nos clientes le mardi 14 avril 2015. »
' Mme [C] [Z] :
« [U] [J] a traversé le magasin en pleure et elle a crié « c'est du foutage de gueule ». »
L'employeur produit encore les attestations de Mme Hane [H] et de Mme [A] [T] épouse [W] qui confirment les faits rapportés dans la lettre d'avertissement.
La cour retient que la salariée n'a pas refusé de se rendre à la réunion du 7 avril 2015 en raison de son placement en repos à cette date mais de la présence d'une certaine personne à cette occasion. Ce refus manifesté la veille au soir apparaît fautif, au moins pour avoir été manifesté tardivement, ne permettant pas ainsi à l'employeur d'y répondre.
Le fait d'exiger un entretien professionnel en présence d'un jeune enfant durant un jour de repos est aussi fautif, tout comme les propos tenus publiquement en présence de la clientèle dont l'employeur prouve la réalité par deux témoignages.
Si la salariée produit plusieurs témoignages de satisfaction concernant son activité professionnelle ainsi que des attestations mettant en cause la qualité de l'encadrement dans l'entreprise, elle ne produit aucun témoignage direct concernant les faits reprochés.
En conséquence, il n'y a pas lieu d'annuler l'avertissement en cause qui apparaît justifié et proportionné aux faits et la salariée sera déboutée de sa demande de dommages et intérêts formée de ce chef.
2/ Sur le respect du délai d'un mois
L'article L. 1332-2 du code du travail dispose en son dernier alinéa qu'une sanction ne peut intervenir moins de deux jours ouvrables, ni plus d'un mois après le jour fixé pour l'entretien.
Pour l'application de ce texte, il convient de prendre en compte la date d'envoi de la lettre de licenciement par l'employeur à l'adresse déclarée par la salariée, sans qu'il puisse être imputé à l'employeur les erreurs des services postaux dans la distribution du pli.
La salariée reproche à l'employeur de l'avoir licenciée par lettre du 17 février 2016 alors que l'entretien préalable avait été fixé au 15 janvier 2016. Elle explique qu'elle avait déménagé en juillet 2015 et que l'employeur disposait de sa nouvelle adresse au [Adresse 1].
L'employeur répond qu'au mois de juillet 2015, la salariée ne lui a communiqué qu'un document mentionnant uniquement son adresse au [Adresse 1] et que c'est ainsi qu'il a adressé à la salariée dès le 26 janvier 2016 la lettre de licenciement à cette adresse dénuée de tout complément qui lui est revenue avec la mention « destinataire inconnue à l'adresse ».
La cour retient que, contrairement aux affirmations de l'employeur, le document que ce dernier produit lui-même en pièce n° 23 indique bien les compléments d'adresse suivants : « L'Iliade, logement 0084, 8e étage, escalier 2 » et qu'ainsi il disposait bien de l'adresse complète de la salariée au temps du licenciement.
L'employeur n'allègue pas l'erreur de la Poste et cette dernière n'apparaît pas avoir manqué à ses obligations en ne distribuant pas le pli qui ne mentionnait ni le nom du bâtiment, ni le numéro de l'escalier et pas plus l'étage et le numéro du logement. L'employeur n'ayant expédié la lettre de licenciement à l'adresse complète de la salariée que le 17 février 2016, soit plus d'un mois après l'entretien préalable, le licenciement se trouve dès lors privé de cause réelle et sérieuse.
3/ Sur le rappel de salaire
La salariée sollicite la somme de 1 319,55 € bruts à titre de rappel de salaire sur mise à pied conservatoire outre celle de 131,95 € bruts au titre des congés payés y afférents.
L'employeur répond qu'il apparaît sur les fiches de paie des mois de janvier et février 2016 qu'il a maintenu en partie le salaire pour le mois de janvier 2016 à hauteur de 289,45 € et pour le mois de février 2016 à hauteur de 290,42 € et qu'ainsi, le rappel de salaire que peut excéder 202,93 € bruts.
Au vu des bulletins de paie produits, la cour retient que le rappel de salaire s'établit à la somme de 1 319,55 € ' 289,45 € ' 290,42 € = 739,68 € bruts outre la somme de 73,97 € bruts au titre des congés payés y afférents.
4/ Sur l'indemnité de licenciement
La salariée sollicite la somme de 710,53 € bruts à titre d'indemnité de licenciement.
Cette somme qui n'est pas discutée par l'employeur apparaît bien fondée, elle sera dès lors allouée à la salariée.
5/ Sur l'indemnité compensatrice de préavis et les congés payés y afférents
La salariée réclame la somme de 2 030,08 € bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis outre celle de 203,00 € bruts au titre des congés payés y afférents.
Comme précédemment, ces sommes ne sont pas discutées par l'employeur et elle apparaissent bien fondées. Elles seront dès lors allouées à la salariée.
6/ Sur les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
La salariée bénéficiait d'une ancienneté de 3 ans et 3 mois au temps du licenciement et elle était alors âgée de 30 ans. Elle ne justifie pas de sa situation au regard de l'emploi postérieurement au licenciement. Au regard de l'ensemble de ces éléments il convient d'allouer à la salariée une somme équivalente à 3 mois de salaire soit 3 × 1 015,04 € = 3 045,12 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
7/ Sur les autres demandes
S'agissant d'une salariée de plus de deux ans d'ancienneté et d'une entreprise de plus de onze salariés, il y a lieu de faire application de l'article L. 1235-4 du code du travail.
Il convient d'allouer à la salariée la somme de 1 500 € au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
L'employeur supportera les dépens d'appel.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a :
dit que le licenciement s'analyse en un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
condamné la SAS PROMOD à payer à Mme [U] [J] les sommes suivantes :
'2 030,08 € bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis ;
' 203,00 € bruts au titre des congés payés y afférents ;
' 710,53 € bruts à titre d'indemnité de licenciement ;
ordonné par application de l'article L. 1235-4 du code du travail le remboursement par la SAS PROMOD des indemnités chômage versées à Mme [U] [J] employée plus de deux ans et licenciée sans cause réelle et sérieuse, du jour du licenciement au jour du jugement dans les limites fixées par législateur, soir 6 mois d'indemnités de chômage ;
condamné la SAS PROMOD aux dépens.
L'infirme pour le surplus.
Statuant à nouveau,
Déboute Mme [U] [J] de ses demandes relatives à l'avertissement du 7 mai 2015.
Condamne la SAS PROMOD à payer à Mme [U] [J] les sommes suivantes :
739,68 € bruts à titre de rappel de salaire sur mise à pied conservatoire ;
73,97 € bruts au titre des congés payés y afférents ;
3 045,12 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
1 500,00 € au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel.
Rappelle que le présent arrêt dans ses dispositions infirmant la décision déférée constitue un titre exécutoire permettant le recouvrement des sommes versées en vertu de la décision de première instance sans qu'une mention expresse en ce sens soit nécessaire.
Condamne la SAS PROMOD aux dépens d'appel.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT