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26/01/2023 | FRANCE | N°18/01762

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 3e chambre civile, 26 janvier 2023, 18/01762


Grosse + copie

délivrées le

à





























COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



3e chambre civile



ARRET DU 26 JANVIER 2023



Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 18/01762 - N° Portalis DBVK-V-B7C-NTKL





Décision déférée à la Cour :

Jugement du 09 novembre 2017

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE NARBONNE

N° RG 15/00851





APPELANT :


>Monsieur [G], [R] [E]

né le 07 Juin 1959 à [Localité 14] (GRANDE BRETAGNE)

de nationalité Britannique

[Adresse 13]

[Adresse 13] (GRANDE BRETAGNE)



Représenté par Me Karen FAUQUE, avocat au barreau de MONTPELLIER,

et assisté à l'instance par Me Indra BALASSOUPRAMAN...

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

3e chambre civile

ARRET DU 26 JANVIER 2023

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 18/01762 - N° Portalis DBVK-V-B7C-NTKL

Décision déférée à la Cour :

Jugement du 09 novembre 2017

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE NARBONNE

N° RG 15/00851

APPELANT :

Monsieur [G], [R] [E]

né le 07 Juin 1959 à [Localité 14] (GRANDE BRETAGNE)

de nationalité Britannique

[Adresse 13]

[Adresse 13] (GRANDE BRETAGNE)

Représenté par Me Karen FAUQUE, avocat au barreau de MONTPELLIER,

et assisté à l'instance par Me Indra BALASSOUPRAMANIANE, avocat au ba rreau de PARIS, substituée à l'audience par Me Eléonore VOISIN de la SELEURL ELEONORE VOISIN, avocat au barreau de PARIS

INTIMEES :

SA CREDIT IMMOBILIER DE FRANCE DEVELOPPEMENT (CIFD), venant aux droits de CREDIT IMMOBILIER DE FRANCE RHONE ALPES AUVERGNE (CIFRAA) par fusion absorption du 1er juin 2015

RCS de Paris n°379 502 644, représentée par son dirigeant social en exercice demeurant en cette qualité au siège social

[Adresse 6]

[Localité 10]

Représentée par Me Sebastien PINET de la SARL SPE GRESSIER PINET EXPERT COMPTABLE AVOCAT, avocat au barreau de NARBONNE, substitué à l'audience par Me Yann GARRIGUE de la SELARL LEXAVOUE MONTPELLIER GARRIGUE, GARRIGUE, LAPORTE, avocat au barreau de MONTPELLIER,

et assistée à l'instance par la SCP BOISSIER, avocats au barreau de CLERMONT-FERRAND

SCP BENEDETTI [C] GALLY DARISCON

[Adresse 9]

[Localité 2]

Représentée par Me Gilles LASRY de la SCP D'AVOCATS BRUGUES - LASRY, avocat au barreau de MONTPELLIER

SARL HPA HOLDING anciennement GROUPE GARRIGAE et dont le nom commercial est «PROPRIETES ET CO»

RCS de Béziers n° 447 690 660, prise en la personne de son représentant légal en exercice, domicilié ès qualités au siège social

[Adresse 15]

[Localité 7]

et

SCI [Adresse 11]

RCS de Béziers n°487 721 268, prise en la personne de son représentant légal en exercice, domicilié ès qualités au siège social

[Adresse 4]

[Localité 8]

Représentées par Me Yannick CAMBON de la SELARL M3C, avocat au barreau de BEZIERS, substitué à l'audience par Me Christian CAUSSE de la SELARL M3C, avocat au barreau de BEZIERS

Ordonnance de clôture du 26 octobre 2022

COMPOSITION DE LA COUR :

En application de l'article 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 16 novembre 2022, en audience publique, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par l'article 804 du même code, devant la cour composée de :

M. Gilles SAINATI, président de chambre

M. Thierry CARLIER, conseiller

Mme Emmanuelle WATTRAINT, conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Camille MOLINA

ARRET :

- contradictoire ;

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par M. Gilles SAINATI, président de chambre, et par Mme Camille MOLINA, greffière.

*

* *

EXPOSE DU LITIGE

Au cours de l'année 2006, Monsieur [G] [E], ressortissant britannique, s'est vu proposer d'investir dans le secteur immobilier sur le territoire français dans une résidence de tourisme à construire située à [Localité 16], dans le département de l'Aude.

L'opération immobilière présentée par le Groupe Garrigae Investissement et portée par la SCI [Adresse 11] consistait en la construction d'un ensemble immobilier à usage de résidence avec services para-hôtelier destiné à la location.

Cette acquisition permettait de bénéficier des mesures de défiscalisation de la loi Demessine, régime fiscal français instauré par la loi de finances 1999 afin de favoriser les investissements locatifs dans certains territoires ruraux.Selon l'option retenue par les investisseurs, le bien acquis était mis en location par la SARL Groupe Garrigae et ils pouvaient également, sur une période annuelle prédéfinie, jouir eux-même du bien.

Il s'agissait donc d'une acquisition sur le modèle du "lease-back" consistant en l'achat d'un bien immobilier à un promoteur, financé par le paiement des loyers versés par la suite par ce promoteur à qui le bien était donné en bail commercial.

Un contrat de réservation a été signé entre la SCI [Adresse 11] et Monsieur [E] le 23 août 2007.

Le 11 août 2007, Monsieur [E] a donné à bail commercial à la SARL Groupe Garrigae Hôtels & Resorts le bien à acquérir pour une durée de 9 années avec la mention d'un loyer annuel fixé à 12 750 euros TTC, sous condition suspensive de la réalisation de la vente.

Le 11 janvier 2008, une procuration était signée par Monsieur [G] [E] au profit d'un clerc de notaire de l'étude SCP Benedetti [C] Gally Dariscon, suivant acte reçu devant Maître [V] [D] ayant le titre de Notary Public en Grande Bretagne.

Par acte authentique établi le 31 janvier 2008 en l'étude notariale de la SCP Alain Benedetti et [J] [C], notaires à [Localité 2], la SCI [Adresse 11] a conclu une vente en l'état futur d'achèvement avec Monsieur [G] [E] portant sur une maison d'habitation, lot n° 61 située dans un ensemble immobilier situé à [Localité 16] (résidence de tourisme) pour le prix de 282 256 euros TTC.

L'acquisition était financée au moyen d'un prêt accordé le 31 janvier 2008 par la SA Crédit Immobilier de Françe Rhône Ain, à hauteur de 253 076 euros et garanti par une inscription d'hypothèque conventionnelle.

Un avenant au bail commercial a ensuite été conclu le 26 janvier 2012 au vu des difficultés rencontrées par la SARL Garrigae Hotel and Resorts, prévoyant une substitution de preneur (la SCI [Adresse 11]) et une réduction du loyer annuel.

Une procédure de redressement judiciaire a été ouverte au profit de la SARL Garrigae Hotel and Resorts le 30 janvier 2013, suivie d'un plan de cession totale.

Par acte des 21, 23 avril et 3 juin 2015, Monsieur [G] [E] a assigné la SA Crédit Immoblier de France Rhône Ain puis la SA Crédit Immobiler de France Développement, la SCP Alain Benedetti et [J] [C], la SARL Groupe Garrigae dénommée HPA Holding, la SCI [Adresse 11] et Monsieur [V] [D] afin de voir dire et juger que son consentement à la vente et au prêt conclus le 31 janvier 2008 avait été vicié par dol et en conséquence de voir prononcer la nullité du contrat de vente et du contrat de prêt.

Par jugement contradictoire du 9 novembre 2017, le tribunal de grande instance de Narbonne a :

- donné acte à la SA Crédit Immobilier de France Développement de son intervention volontaire aux débats pour venir aux droits de la SA Crédit Immobilier de France Rhône Alpes Auvergne elle-même venant aux droits de la SA Crédit Immobilier de France Rhône Ain ;

- déclaré irrecevable la demande formée par M. [E] en relevé et garantie des condamnation sollicitées à son profit telle que formée à l'encontre de M. [V] [D] ;

- déclaré recevables les autres demandes de condamnation in solidum formées par M. [E] ;

- rejeté la demande de nullité de la vente pour dol et les demandes subséquentes en restitution de dommages et intérêts ;

- rejeté les demandes subsidiaires en responsabilité contractuelle formées par M. [E] à l'encontre de la SCI [Adresse 11] et de la SARL Groupe Garrigae nouvellement dénommée HPA Holding ;

- rejeté les demandes formées par M. [E] à l'encontre de la SCP Benedetti [C] et de M. [V] [D] ;

- rejeté la demande en nullité du contrat de prêt et les demandes formées par M [E] à l'encontre de la SA Crédit Immobilier de France Développement;

- dit n'y avoir lieu à indemnité au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- laissé les dépens de l'action à la charge de M. [E] et autorisé les avocats qui en ont fait la demande à recouvrer directement ceux dont ils auraient fait l'avance sans en avoir reçu provision.

Le 4 avril 2018, Monsieur [G] [E] a relevé appel de ce jugement à l'encontre de la SA Crédit Immobilier de France Développement, de la SCP Alain Benedetti et [J] [C], de la SARL Groupe Garrigae dénommée HPA Holding et de la SCI [Adresse 11].

Vu les dernières conclusions de Monsieur [G] [E] remises au greffe le 21 octobre 2022 ;

Vu les dernières conclusions de la SA Crédit Immobilier de France Developpement venant aux droits de la SA Crédit Immobilier de France Rhône Alpes Auvergne remises au greffe le 25 octobre 2022 ;

Vu les dernières conclusions de la SCI [Adresse 11] et de la SARL HPA Holding anciennement Groupe Garrigae remises au greffe le 27 novembre 2018 ;

Vu les dernières conclusions de la SCP Benedetti-[C]-Gally-Dariscon remises au greffe le 20 février 2019 ;

MOTIFS DE L'ARRÊT

I/ Sur les demandes formées à l'encontre de Monsieur [V] [D],

Monsieur [D] n'ayant pas été intimé en appel et n'ayant pas interjeté appel du jugement, ce dernier sera confirmé en ce qu'il a déclaré irrecevable la demande formée par Monsieur [G] [E] en relevé et garantie des condamnations sollicitées à son profit telle que formée à l'encontre de Monsieur [V] [D].

Par ailleurs, le jugement sera également confirmé en ce qu'il a donné acte à la SA Crédit Immobilier de France Développement de son intervention volontaire aux débats pour venir aux droits de la SA Crédit Immobilier de France Rhône Alpes Auvergne elle-même venant aux droits de la SA Crédit Immobilier de France Rhône Ain.

II/ Sur l'action en nullité de la vente pour dol,

Monsieur [G] [E] conclut à l'annulation de la vente conclue le 31 janvier 2008 pour dol ainsi que l'annulation subséquente du prêt immobilier contracté pour cette acquisition.

En conséquence de la nullité du contrat de vente conclu avec la SCI [Adresse 11], Monsieur [E] demande à la cour d'ordonner la restitution du bien immobilier au vendeur, la SCI [Adresse 11], ainsi que la restitution corrélative des fonds perçus par la SCI [Adresse 11] à la SA Crédit Immobilier de France Developpement, outre la mainlevée de toutes les inscriptions de privilèges et hypothèques intervenues à la suite de l'acte de vente du 31 janvier 2008, aux frais exclusifs des défendeurs supportés in solidum.

Monsieur [E] sollicite également la condamnation in solidum de la SCI [Adresse 11], de la SARL HPA Holding, de la SCP Benedetti-[C] et de la SA Crédit Immobilier de France Developpement à l'indemniser de l'intégralité de son préjudice spécial non couvert par les restitutions :

- 14 940 euros en restitution de son apport personnel avec intérêts au taux légal à partir du 31 janvier 2008 ;

- 255 000 euros de gain manqué correspondant à la perte de loyer ;

- 41 848,20 euros au titre des frais exposés dans le cadre de la vente et du prêt, assorti de l'intérêt aux taux légal à compter du 31 janvier 2008 ;

- 50 000 euros en réparation de son préjudice moral.

A titre infiniment subsidiaire, Monsieur [E] soulève la faute contractuelle de la SCI [Adresse 11] et de la société HPA Holding et la faute délictuelle du notaire et de l'établissement bancaire pour manquement à leur obligation d'information et de conseil.

La SCI [Adresse 11] et la SARL HPA Holding anciennement Groupe Garrigae concluent à la confirmation du jugement.

La SARL HPA Holding sollicite sa mise hors de cause en faisant valoir qu'elle n'a signé ni l'acte de vente, ni le bail.

La SCI [Adresse 11] soutient que Monsieur [E] ne démontre l'existence d'aucune man'uvre ni intention dolosive. Elle soutient n'avoir commis aucune faute en vendant un bien en état futur d'achèvement qui a été achevé et livré. Selon elle, aucun document contractuel ne garantissait la rentabilité locative de l'opération et les difficultés d'exécution d'un bail commercial constituaient un risque prévisible lors de la signature du contrat. Elle considère que l'élément essentiel du contrat était l'avantage fiscal et la jouissance des lieux à titre gratuit sur certaines périodes et non la garantie des loyers.

La SCI [Adresse 11] sollicite donc le rejet de la demande en réparation des divers préjudices, notamment celui résultant de la perte de loyers. Elle soutient qu'elle ne peut être tenue en tant que vendeur à garantir le paiement des loyers, que le défaut de paiement était un risque prévisible lors de la signature du bail qui pouvait être couvert par une assurance de garantie des loyers impayés non souscrite par Monsieur [E].

Enfin, le Crédit Immobilier de France Developpement conteste toute manoeuvre dolosive de sa part, faisant notamment valoir qu'il n'avait aucun rôle actif dans le choix de l'investissement, l'opération immobilière ayant été conclue avant l'obtention du prêt.

Il rappelle également que le devoir de conseil de la banque a disparu au profit d'un devoir de mise en garde.

Sur la demande de mise hors de cause de la société HPA Holding,

Il ressort de l'examen des documents versés aux débats :

' que la documentation commerciale est établie sous la double référence en haut de page «'[Adresse 11] - Vineyard Estate & Spa » et en bas de page «'Garrigae Investissements'» comportant le numéro d'immatriculation de la SARL HPA Holding au RCS 447 690 660 et l'adresse de cette même société [Adresse 3] à [Localité 8]';

' que l'acte de réservation conclu le 23 août 2007 entre Monsieur [E] et la SCI [Adresse 11] représentée par son gérant la société Garrigae Développement, devenue SARL HPA Holding, comporte le même logo en bas de page «'Garrigae Investissements'» que celui figurant sur le document commercial précité';

' que l'acte de bail commercial a été signé le 11 août 2007 avec la SARL Garrigae Hotels & Resorts représentée par son gérant Monsieur [F] [Y] ;

' que la vente de l'immeuble a été conclue par la SCI [Adresse 11] domiciliée [Adresse 3] à [Localité 8], représentée par la SARL Garrigae Développement devenue SARL HPA Holding et la vente du mobilier par la société Garrigae Hotels & Resorts représentée par Monsieur [F] [Y]';

' que l'avenant au bail commercial du 26 janvier 2012 a été conclu entre Monsieur [E], la SARL [Adresse 11] représentée par son gérant Monsieur [F] [Y] et la SAS Garrigae Hotels & Resorts représentée par la société Groupe Garrigae, elle-même représentée par son gérant, Monsieur [F] [Y].

La SARL HPA Holding (anciennement dénommée SARL Garrigae Développement) intervenant comme holding du groupe Garrigae n'a signé l'acte de réservation du 20 novembre 2006 et l'avenant au bail du 26 janvier 2012 avec Monsieur [E] qu'en qualité de gérante représentant la SCI [Adresse 11] et de la SAS Garrigae Hotels & Resorts, et non en qualité de cocontractant direct.

Mais la cour relève que la plaquette publicitaire, détaillant le projet d'investissement et la garantie des loyers, est établie sous le logo de la SARL HPA Holding accompagné de son propre numéro d'immatriculation au RCS 447 690 660 et non de celui de la SCI [Adresse 11].

Il en résulte qu'en sa qualité de rédacteur de la plaquette publicitaire remise directement aux investisseurs, dans laquelle elle est identifiée sous son numéro RCS, la SARL HPA Holding a contrôlé directement le contenu de ce document et qu'elle en a ensuite fait le plus large usage pour promouvoir programme d'investissement «'[Adresse 11] » et procéder à la commercialisation des lots auprès des particuliers investisseurs.

Elle est donc intervenue en qualité de gérante de la société venderesse mais aussi comme représentante indépendante assurant la promotion du projet et agissant pour le compte de la SCI [Adresse 11] et de la SARL Garrigae Hotels & Resorts qui devait ensuite assurer l'exploitation du complexe immobilier.

La SARL HPA Holding doit donc répondre d'éventuels agissements de dol aux côtés de la SCI [Adresse 11].

Sur le dol de la SCI [Adresse 11] et de la SARL HPA Holding :

En application de l'article 1116 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016 applicable au présent litige, le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les man'uvres pratiquées par l'une des parties sont telles, qu'il est évident que sans ces man'uvres, l'autre partie n'aurait pas contracté.

Le dol ne se présume pas et doit être prouvé.

Le dol peut être constitué par le silence d'une partie dissimulant à son cocontractant un fait qui, s'il avait été connu de lui, l'aurait empêché de contracter.

Il ne peut être invoqué que dans le cas où les man'uvres émanent de l'une des parties contractantes ou de leur représentant ou gérant d'affaire.

Les documents publicitaires peuvent avoir une valeur contractuelle dès lors que, suffisamment précis et détaillés, ils ont eu une influence sur le consentement du cocontractant.

En l'espèce, la plaquette de commercialisation rédigée en anglais et comportant l'en-tête «'Les jardins de St Benoît - Vineyard Estate & Spa » avec le logo « Garrigae Investissements » et le numéro RCS 447'690'660 a présenté ce projet immobilier à [Localité 16] comme un investissement dans une résidence de tourisme située dans une région décrite «'comme la plus dynamique en France'». Elle précise que «'le Languedoc connaît une rapide croissance dans le tourisme international'» et que la résidence sera gérée par une société dirigée par l'ancien «'directeur commercial du Club Méditerranée et PDG du Club Med Australie et USA'».

Il a ainsi été proposé à Monsieur [E] différentes modalités d'investissement dans l'achat d'un bien immobilier en état futur d'achèvement avec quatre différentes «'options de leaseback'», dont celle appelée « pure invest » qui garantit un «'rendement financier net de 4,5%'» obtenue par la conclusion d'un bail commercial.

Cette plaquette commerciale vante «'une variété d'option offrant une garantie de rentabilité locative et des options fiscales attractives en cas de non utilisation'». Le document précise «'le gouvernement français accepte de rembourser la TVA à l'achat, ce qui représente une remise effective de 19,6%'».

Ce document met en exergue que «'le propriétaire a l'avantage de bénéficier d'un bien en pleine propriété avec un revenu garanti, sans les ennuis et incertitudes qui vont avec la location et l'entretien du bien. Le revenu garanti est de l'ordre de 2.5% à 4,5% par an''».

Le bail signé par Monsieur [E] le 11 août 2007 avant la signature de l'acte authentique de vente du 31 janvier 2008 stipule un loyer annuel de 12 750 euros TTC.

Il ressort de ces documents que contrairement à ce que soutiennent la SCI [Adresse 11] et la SARL HPA Holding, l'élément essentiel qui a permis de convaincre l'acquéreur est la certitude d'un rendement financier garanti tel qu'il était présenté dans la documentation commerciale de l'investissement immobilier, et non la seule économie fiscale consistant en la récupération de TVA du fait de l'activité de location en meublé touristique.

Non seulement la documentation commerciale «'Les jardins de St Benoît - Vineyard Estate & Spa » mentionne dans son dernier paragraphe « résumé et points clés » que cette opération constitue une « opportunité unique d'acquérir une belle maison de vacances dans un complexe de luxe entièrement géré avec un revenu locatif garanti disponible » mais encore la mention expresse de'« revenu garanti'sans les ennuis et les incertitudes qui vont avec la location et l'entretien du bien » située dans le corps du texte achève de tromper l'investisseur étranger sur la réalité de la garantie promise.

A la lecture de ces documents commerciaux et du bail signé dès la réservation avec la garantie apportée d'un rendement net de 4,50% par an, Monsieur [E] pouvait légitiment croire à une véritable garantie de paiement de ces loyers et non à la garantie d'une seule rentabilité théorique.

En lui présentant un revenu et une rentabilité garantis, «'sans les ennuis et les incertitudes de la location'» tant sur la durée que dans son montant, les sociétés intimées ont induit Monsieur [E] en erreur et l'ont déterminé à acheter le bien immobilier litigieux.

Monsieur [E] n'aurait pas acheté ce bien à ce prix et dans ces conditions s'il n'avait pas été assuré de cette garantie de paiement des loyers. La seule défiscalisation, bien qu'elle ait pu contribuer à sa décision, était insuffisante à elle seule au regard des risques importants inhérents à une opération réalisée à l'étranger portant sur une maison d'habitation située dans un ensemble immobilier situé à [Localité 16], lieu inconnu pour lui et au prix de 282 256 euros TTC.

En vendant à un investisseur étranger, éloigné géographiquement, une maison en VEFA louée en meublé dans une résidence para-hôtelière, située dans un secteur éloigné des sites touristiques réellement attractifs, le promoteur en sa qualité de vendeur professionnel devait informer son acquéreur, qui est un simple consommateur, de ce que la garantie annoncée concernait exclusivement la conclusion d'un bail commercial et non la perception effective des loyers.

Il devait également l'avertir des risques éventuels d'impayés ou de révision à la baisse des loyers en cas de conjoncture défavorable et de la nécessité de couverture du risque par une assurance des loyers impayés si elle était possible, s'agissant d'une location commerciale.

La volonté de tromper l'acquéreur est d'autant plus établie qu'au même moment, la SARL Garrigae Investissement justifiait par courrier du 27 octobre 2008 le licenciement économique de leur salariée responsable juridique Madame [U] par les difficultés que le groupe rencontrait ou craignait de rencontrer, du fait de la crise financière et des problèmes de commercialisation de leurs programmes, qui ont entraîné, directement ou indirectement, le défaut de paiement des loyers du second semestre 2011, après seulement deux années d'exploitation.

Le promoteur n'a donc pas donné une information loyale sur les risques réels de l'opération immobilière à l' acquéreur lors de la signature de l'acte sous seing privé du 23 août 2007 et de l'acte authentique du 31 janvier 2008. Cette dissimulation des risques encourus a déterminé Monsieur [E] à contracter et l'a conduit à acheter le bien immobilier avec la croyance erronée qu'il disposerait d'un loyer garanti à hauteur de 12 750 euros TTC par an.

Contrairement à ce que soutiennent la SCI [Adresse 11] et la SARL HPA Holding, le montage de l'opération n'a pas été clairement expliqué à l'acquéreur quant à la nature exacte de la garantie des loyers mise en exergue par le promoteur.

Cette garantie constituait un élément déterminant de l'opération, la conclusion du bail commercial avec la SARL Garrigae Hotels & Resorts constituant une obligation essentielle du contrat mentionnée dans le contrat de réservation, sans disponibilité du bien, qui se situait dans la résidence para-hôtelière du groupe et ne pouvait pas être géré seul.

Cette attitude du promoteur est à l'origine de l'erreur de Monsieur [E], erreur toujours excusable en matière de dol, sur la garantie des loyers permettant de financer l'opération.

En l'espèce, le dol résulte des argumentaires commerciaux précis et détaillés s'appuyant sur des documents à caractère contractuel qui ont servi de base à l'établissement des actes préalables à l'acte de vente et de l'acte de vente lui-même.

Il se déduit des précédents développements que la SCI [Adresse 11] et la SARL HPA Holding ont sciemment provoqué l'erreur de Monsieur [E] sur la garantie des loyers annoncée et commis un dol.

En conséquence, il y a lieu de prononcer la nullité pour dol de l'acte authentique reçu le 31 janvier 2008 par Me [J] [C] aux termes duquel la SCI [Adresse 11], ayant pour représentant légal la SARL Garrigae Développement, a vendu en état futur d'achèvement à Monsieur [G] [E] une maison d'habitation située à [Localité 16] au prix de 282 256 euros TTC.

III/ Sur les conséquences de l'annulation de la vente,

La nullité de la vente a pour conséquence l'anéantissement rétroactif du contrat et la remise des parties en l'état où elles se trouvaient avant la passation du contrat.

Sur les restitutions à opérer

En conséquence de l'annulation de la vente :

- La SCI [Adresse 11] devra restituer à Monsieur [E] le prix de la vente de 282 256 euros TTC et non directement à la banque comme le sollicite ce dernier, s'agissant de l'annulation de conventions distinctes ;

- Monsieur [E] devra restituer à la SCI [Adresse 11] la maison lot n°61 type P3 de 55,48 m² de ce programme construite sur la parcelle cadastrée section C n°[Cadastre 5] sur la commune de [Localité 16] (11).

La SCI [Adresse 11] ne demande pas la restitution des fruits perçus par Monsieur [E] qui conserve donc la totalité des loyers perçus depuis l'acquisition de l'immeuble.

En application de l'article 1153 du code civil, dans sa version antérieure à l'ordonnance n°2016-31 du 10 février 2016 applicable en l'espèce, il convient d'assortir la créance de restitution du prix par la SCI [Adresse 11] de l'intérêt au taux légal à compter de la date de la demande en justice formée le 21 avril 2015.

Sur les dommages-intérêts demandés par Monsieur [E],

En application de l'article 1382 du code civil, dans sa version antérieure à celle issue de l'ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016, tout fait quelconque de l'homme qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé, à le réparer.

Monsieur [E], partie au contrat de vente annulé, est de bonne foi et donc fondé à demander la condamnation des autres parties fautives à réparer le préjudice subi en raison de la conclusion du contrat annulé.

Sur la restitution de la somme de 14 940 euros,

Monsieur [E] sollicite la restitution de la somme de 14 940 euros représentant le montant de son apport personnel pour le paiement du prix de l'immeuble.

Cette somme est englobée dans le prix de 282 256 euros TTC dont le présent arrêt ordonne la restitution totale à l'acquéreur par la SCI [Adresse 11].

Cette demande de restitution supplémentaire de 14 940 euros formée par Monsieur [E] ne correspond à aucun préjudice subi et ne peut donc qu'être rejetée.

Sur la perte de loyers,

Monsieur [E] sollicite l'octroi de dommages-intérêts à hauteur de 255 000 euros représentant la totalité des loyers qu'il espérait percevoir durant vingt années (12 750 euros x 20 ans).

N'étant plus propriétaire de l'immeuble du fait de l'anéantissement rétroactif de la vente, il n'a plus vocation à revendiquer la perception de loyers issus de la location de cet immeuble, étant relevé qu'il a perçu des loyers depuis son acquisition, même si la rentabilité locative n'était pas celle qu'il espérait.

Par ailleurs, si la SCI [Adresse 11] et la SARL HPA Holding avaient donné à Monsieur [E] des informations complètes et précises sur l'absence de garantie des loyers du bien immobilier vendu comme un produit défiscalisé et sur l'aléa concernant la commercialisation de la résidence de tourisme, ce dernier n'aurait pas contracté aux mêmes conditions.

Le préjudice né du dol de la SCI [Adresse 11] et de la SARL HPA Holding ne peut donc consister qu'en une perte de chance de contracter à des conditions plus avantageuses.

Or, Monsieur [E] demande le règlement de la somme de 255 000 euros correspondant à la perte du préjudice direct de loyers et ne présente aucune demande, même subsidiaire, au titre de la perte de chance.

En conséquence, Monsieur [E] sera débouté de sa demande de dommages-intérêts de 255 000 euros au titre du gain manqué correspondant à la perte de loyers.

Sur les frais de notaire,

Monsieur [E] expose avoir supporté en pure perte 13 016 euros de frais de notaire.

Au soutien de sa demande, il produit le décompte notarié dont il ressort qu'il a effectivement supporté cette somme en pure perte .

Cette somme est définitivement perdue par l' acquéreur qui est donc fondé à en solliciter le paiement par la SCI [Adresse 11] et la SARL HPA Holding à titre de dommages-intérêts.

Sur les autres frais,

Monsieur [E] soutient avoir supporté en pure perte 19 000 euros de frais de mobilier. Il sollicite également le remboursement de taxes foncières et de frais d'agence immobilière liées à la propriété de l'immeuble pour un montant total de 9 832,20 euros supporté entre 2007 et 2014.

Il convient en premier lieu de rappeler que dans la mesure où Monsieur [E] est de bonne foi, il est dispensé de restituer les fruits à son vendeur suite à l'anéantissement du contrat de vente.

Les fruits de l'immeuble s'entendent de tous les loyers de l'immeuble perçus par Monsieur [E] dont il convient de déduire les charges qui se déduisent des loyers bruts pour obtenir le revenu foncier net.

Les frais de 9 832,20 euros dont Monsieur [E] demande le paiement ne constituent donc pas un chef de préjudice mais s'analysent en de simples charges à déduire de ses revenus fonciers bruts. En effet, pendant la période de possession de l'immeuble, il a bénéficié d'un revenu foncier net substantiel en dépit du fait que ce gain ait été inférieur aux promesses du promoteur.

L' appelant est en outre demeuré propriétaire des meubles achetés et ne démontre pas avoir subi un préjudice du fait de l'acquisition de ces meubles.

Par ailleurs, ces frais d'ameublement ont été largement amortis depuis le 31 janvier 2008, ces amortissements constituant une charge d'exploitation qui se déduit également des loyers bruts perçus avant d'obtenir le revenu foncier net.

Il n'est donc pas davantage démontré que l'acquisition des meubles à hauteur de 19 000 euros a généré un quelconque dommage à indemniser à hauteur de cette somme ou d'un montant inférieur.

Il résulte de ces développements que les demandes d'indemnisation à hauteur de 19 000 euros et de 9 832,20 euros formées par Monsieur [E] ne peuvent qu'être rejetées.

IV/ Sur le préjudice moral,

La faute de la SCI [Adresse 11] et de la SARL HPA Holding a occasionné un préjudice moral à Monsieur [E] qui a dû engager une longue procédure judiciaire en France et en subir les tracasseries inhérentes.

Il lui sera donc alloué une indemnité de 5'000 euros en réparation de ce préjudice moral, aucun justificatif ni démonstration n'étant par ailleurs produit à l'appui de sa demande formée à hauteur de 50 000 euros.

V/ Sur les demandes afférentes au prêt accordé par la SA Crédit Immobilier de France Développement,

Pour assurer le financement de son investissement, Monsieur [E] a contracté par acte authentique du 31 janvier 2008 auprès de la SA Crédit Immobilier de France Rhône Ain, aux droits de laquelle vient la SA Crédit Immobilier de France Developpement un prêt d'un montant de 253 076 euros en principal garanti par hypothèque conventionnelle.

Sur le dol reproché à la SA Crédit Immobilier de France,

Monsieur [E] soutient que la banque a commis un dol dans le cadre de la conclusion du prêt car « elle ne pouvait ignorer, en sa qualité de professionnel du crédit immobilier, le caractère mensonger de l'opération telle que présentée dans les documents remis aux consorts [P] pour les déterminer dans leur consentement.»

La SA Crédit Immobilier de France Developpement fait valoir qu'elle n'a commis aucune manoeuvre dolosive et qu'elle n'a pas participé au montage et à la commercialisation du bien immobilier objet du litige. Elle soutient avoir parfaitement exécuté son obligation de mise en garde sans qu'il lui incombe d'apprécier l'opportunité économique de l'investissement ni de conseiller son client à ce sujet.

En l'espèce, l'appelant n'apporte la preuve ni de la participation de la SA Crédit Immobilier de France à la commercialisation de l'opération financée, ni de l'existence de liens d'affaire entre la banque et le promoteur.

Les documents commerciaux «'[Adresse 11]'» se limitent à inciter les investisseurs à assurer leur financement par l'intermédiaire d'établissements bancaires français en raison des taux d'intérêts plus bas.

Aucun élément versé au dossier n'établit que la SA Crédit Immobilier de France a participé à la vente du bien immobilier litigieux auprès de Monsieur [E], opération au cours de laquelle elle aurait pu se livrer à des manoeuvres dolosives.

La SA Crédit Immobilier de France est intervenue en qualité exclusive de prêteur de deniers d'un investissement locatif, et ce postérieurement à la conclusion du contrat de réservation et du contrat de bail commercial, sans que l'existence d'aucun lien ne soit démontré entre elle et le promoteur.

Par ailleurs, il n'est établit aucun manquement par la SA Crédit Immobilier de France à son obligation de renseignement et de conseil susceptible de constituer un dol lors de la conclusion du contrat de prêt.

En conséquence, la demande d'annulation du prêt immobilier pour dol de la SA Crédit Immobilier de France Developpement, venant aux droits de la SA Crédit Immobilier de France Rhône Alpes Auvergne, elle-même venant aux droits de la SA Crédit Immobilier de France Rhône Ain, formée par Monsieur [E] sera rejetée, le jugement étant confirmé de ce chef.

Sur la responsabilité contractuelle pour faute de la banque,

En application de l'article 2224 du code civil, la prescription quinquennale de l'action en responsabilité pour manquement à l'obligation précontractuelle de mise en garde et de conseil exercée par Monsieur [E] à l'encontre de la banque court à partir du jour où l'emprunteur a connu ou aurait dû connaître les faits qui lui permettent de l'exercer.

En l'espèce, Monsieur [E] a eu connaissance de la défaillance de la société locataire commerciale de son immeuble au début de l'année 2012 lorsqu'il a été informé des difficultés financières de la SARL Garrigae Hotels & Resorts et de la nécessité d'abandonner les loyers du deuxième semestre 2011 et de diminuer le montant des loyers à partir du 1er janvier 2012.

L'action en responsabilité ayant été engagée contre la SA Crédit Immobilier de France par Monsieur [E] les 21, 23 avril et 3 juin 2015, cette action n'est pas prescrite.

D'autre part, Monsieur [E] ne démontre pas que la banque lui a proposé un produit inadapté à sa situation personnelle et à ses capacités financières de remboursement.

Contrairement à ce qu'il soutient, le Crédit Immobilier de France ne disposait d'aucune information sur les risques particuliers de cet investissement immobilier et il ne lui incombait pas de procéder à un audit financier du projet de son client ni de le conseiller sur l'opportunité économique de l'opération envisagée.

En l'absence de faute démontrée sur le fondement de l'article 1147 du code civil dans sa version antérieure à celle issue de l'ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016, la responsabilité de la SA Crédit Immobilier de France Developpement, venant aux droits de la SA Crédit Immobilier de France Rhône Alpes Auvergne, elle-même venant aux droits de la SA Crédit Immobilier de France Rhône Ain, ne peut pas être recherchée.

Monsieur [E] sera donc débouté de sa demande de condamnation in solidum de la SA Crédit Immobilier de France Developpement, venant aux droits de la SA Crédit Immobilier de France Rhône Alpes Auvergne, elle-même venant aux droits de la SA Crédit Immobilier de France Rhône Ain, à supporter le préjudice spécial réclamé, le jugement étant confirmé de ce chef.

Sur l'annulation du prêt immobilier,

Le prix de vente de 282 256 euros TTC a été payé par Monsieur [E] à la SCI [Adresse 11] au moyen d'un prêt bancaire accordé par la SA Crédit Immobilier de France Rhône Ain à hauteur de 223 076 euros.

En application de l'article L.312-12 du code de la consommation devenu L.313-36 du même code, l'offre de prêt est toujours acceptée sous la condition résolutoire de la non-conclusion, dans un délai de quatre mois à compter de son acceptation, du contrat pour lequel le prêt est demandé.

En raison de l'effet rétroactif de l'annulation du contrat de vente, le contrat de prêt est censé n'avoir pas été conclu dans le délai fixé par la loi, de sorte que le prêt souscrit pour assurer le financement de l'opération se trouve lui-même annulé de plein droit.

Sur les restitutions consécutives à l'annulation du prêt,

L'annulation du prêt immobilier oblige à une restitution corrélative des sommes versées entre les parties :

- Monsieur [E] devra restituer à la SA Crédit Immobilier de France Developpement, venant aux droits de la SA Crédit Immobilier de France Rhône Alpes Auvergne, elle-même venant aux droits de la SA Crédit Immobilier de France Rhône Ain, le montant du capital emprunté de 223 076 euros ;

' La SA Crédit Immobilier de France Developpement, venant aux droits de la SA Crédit Immobilier de France Rhône Alpes Auvergne, elle-même venant aux droits de la SA Crédit Immobilier de France Rhône Ain, devra restituer à Monsieur [E] la totalité des sommes encaissées en capital, intérêts contractuels et frais depuis le début du contrat de prêt.

En application de l'article 1378 du code civil, dans sa version antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 applicable au litige, les parties de bonne foi sont tenues de restituer les sommes perçues assorties de l'intérêt légal à compter seulement de la date de demande en justice du 21 avril 2015.

La cour ordonne la compensation judiciaire des sommes que se doivent réciproquement Monsieur [E] et la SA Crédit Immobilier de France Developpement.

Enfin, la demande de mainlevée de l'hypothèque formée par Monsieur [E] sera rejetée dans la mesure où cette hypothèque conventionnelle subsiste, malgré l'annulation du prêt dont elle est l'accessoire, tant que les parties n'ont pas été remises en l'état antérieur à la conclusion du contrat de prêt annulé.

Sur les demandes indemnitaires formées par la SA Crédit Immobilier de France Developpement contre les auteurs du dol,

Le dol commis par la SCI [Adresse 11] et par la SARL HPA Holding anciennement Groupe Garrigae est la cause directe de l'annulation du prêt consenti par la SA Crédit Immobilier de France à Monsieur [E].

Du fait de cette annulation du prêt imputable à la SCI [Adresse 11] et à la SARL HPA Holding anciennement Groupe Garrigae, l'établissement bancaire prêteur est fondé à solliciter sur le fondement de l'article 1382 ancien du code civil l'indemnisation de son préjudice.

En l'espèce, la banque sollicite la condamnation des parties coupables de manoeuvres dolosives à lui payer une somme équivalente aux intérêts échus au 18 mars 2020, soit 138 684,60 euros , mais aussi des intérêts à échoir non perçus jusqu'au 10 août 2034, soit 70 128 euros.

S'agissant des intérêts échus et des intérêts à échoir, il est constant qu'à la suite de l'annulation d'un contrat de prêt accessoire à un contrat de vente, la banque est fondée à être indemnisée au titre de la restitution des intérêts échus et à se prévaloir de la perte de chance de percevoir les intérêts à échoir.

La faute commise par la SCI [Adresse 11] et de la SARL HPA Holding anciennement Groupe Garrigae est la cause directe de cette perte de chance qu'il convient de fixer, eu égard à la possibilité de remboursement anticipée prévu au contrat, à 80 % de la totalité des intérêts réclamés, soit la somme de 56 102,40 euros.

Par conséquent, la SCI [Adresse 11] et la SARL HPA Holding anciennement Groupe Garrigae seront condamnées in solidum à payer à la SA Crédit Immobilier de France Developpement, venant aux droits de la SA Crédit Immobilier de France Rhône Alpes Auvergne, elle-même venant aux droits de la SA Crédit Immobilier de France Rhône Ain la somme de 138 684,60 euros au titre des intérêts échus restitués et la somme de 56 102,40 euros au titre des intérêts à échoir.

V/ Sur l'action en responsabilité délictuelle dirigée contre le notaire,

Monsieur [E] soutient que la SCP Benedetti - [C] - Gally - Dariscon a engagé sa responsabilité civile professionnelle en ne l'informant pas des risques inhérents aux actes de son ministère. Il demande sa condamnation in solidum avec les autres intimés à l'indemniser de tous ses chefs de préjudice non couverts par les restitutions.

La SCP Benedetti - [C] - Gally - Dariscon sollicite la confirmation du jugement. Elle conclut que le notaire n'a commis aucune faute et que l'appelant ne justifie pas d'un préjudice en lien de causalité directe avec la prétendue faute.

En application de l'article 1382 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016, tout fait quelconque de l'homme qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé, à le réparer.

Les obligations du notaire tendant à assurer l'efficacité d'un acte instrumenté par lui et constituant le prolongement de sa mission de rédacteur d'acte relèvent aussi de sa responsabilité délictuelle.

Le notaire est tenu d'informer et d'éclairer les parties sur la portée, les effets et les risques de l'acte auquel il prête son concours y compris quant à ses incidences fiscales. Le notaire doit le cas échéant déconseiller aux parties de s'engager, sans que leurs compétences personnelles ni la présence d'un conseiller à leur côté ne le dispensent de ce devoir de conseil.

Le contrat de réservation signé le 23 août 2007 prévoit que l'Office Notarial du Palais représenté par Me [J] [C] devra recevoir l'acte authentique de vente et que le dépôt de garantie de 6 100 euros TTC sera réglé par virement sur le compte de la SCP Alain Benedetti et [J] [C] ouvert à la trésorerie générale de [Localité 2].

La plaquette publicitaire mentionnait également que la SCP Benedetti [C] était le notaire chargé de recevoir les actes authentiques de vente en état futur d'achèvement.

L'acte de vente reçu le 31 janvier 2008 par la SCP Benedetti-[C]-Gally-Dariscon stipule notamment :

- que l'acquéreur est représenté à l'acte par Madame [A] [S], clerc de notaire, en vertu de la procuration établie le 11 janvier 2008 ;

- que l'immeuble vendu se trouve au stade d'avancement « ouverture du chantier » ;

- que la banque SA Calyon domiciliée [Adresse 1] a garanti l'achèvement de l'immeuble conformément à l'article R.261-17 du code de la construction et de l'habitation ;

- que le remboursement de la TVA à hauteur de 16,39% du prix TTC, conséquence de la location commerciale consentie, sera affectée au paiement des trois derniers stades d'avancement des travaux.

Il n'est pas contesté par Monsieur [E] que la construction a été achevée, que le contrat de vente en état futur d'achèvement a été entièrement exécuté, que l'avantage fiscal concernant la TVA a été appliqué et que le notaire a fait figurer dans son acte toutes les informations nécessaires à la mise en oeuvre des avantages fiscaux liés à l'opération.

Si l'acte précise que le vendeur déclare donner son accord à l'acquéreur pour la conclusion de tout contrat de location au profit de la SARL Garrigae Hotels & Resorts et rappelle l'obligation pour l'acquéreur d'assujettir les loyers à TVA pour bénéficier de la récupération de cette taxe, il n'est nullement démontré que le contrat de réservation signé le 23 août 2007 et le contrat de bail commercial signé le 11 août 2007 ont été rédigés par le notaire alors que l'acte authentique de vente est intervenu plus tard le 31 janvier 2008.

Le seul fait que les coordonnées du notaire chargé de l'établissement des actes notariés soit mentionnées sur la plaquette commerciale et sur l'acte de réservation avec versement du dépôt de garantie sur le compte séquestre de l'étude notariale conformément à la loi ne suffit pas à démontrer, contrairement à ce que soutient Monsieur [E], que le notaire est intervenu lors des phases de négociation et de signature de l'avant-contrat, ni qu'il était informé de la garantie de loyers annoncée dans les documents publicitaires diffusés pour la commercialisation auprès d'une clientèle étrangère.

Aucun élément ne démontre donc que le notaire est intervenu durant la phase pré-contractuelle.

En particulier, Monsieur [E] n'est pas fondé à lui reprocher d'avoir omis de l'informer :

- de l'absence de garantie des loyers annoncée dans la plaquette publicitaire, dans la mesure où ces éléments n'ont pas été portés à la connaissance du notaire et que ces éléments n'étaient pas nécessaires à l'établissement de l'acte authentique ;

- des risques inhérents au bail commercial auquel le notaire était étranger, ces actes n'étant pas annexés à l'acte authentique ;

- de l'insolvabilité future du preneur, dont il n'est pas démontré que le notaire pouvait en avoir connaissance le jour de la signature de l'acte ni même soupçonner un tel risque alors qu'en octobre 2008 l'essentiel des logements construits lors de cette opération de promotion immobilière avaient déjà été vendus pour un montant évalué à plus de 50 millions d'euros par les appelants ;

- d'un conseil concernant l'équilibre financier et l'opportunité économique de l'opération immobilière à défaut de mission particulière confiée sur ce point et en l'absence d'éléments financiers d'appréciation non remis par les parties à l'acte et qu'il n'avait pas à rechercher d'office dans le cadre de sa stricte mission de notaire rédacteur d'acte.

Monsieur [E] n'apporte donc pas la preuve d'une quelconque faute délictuelle commise par la SCP Benedetti - [C] - Gally - Dariscon.

En conséquence, sa demande dirigée contre le notaire sera rejetée.

Le jugement sera confirmé de ce chef.

PAR CES MOTIFS,

La cour,

Confirme le jugement sauf en ce qu'il a rejeté la demande de nullité de la vente pour dol et les demandes subséquentes en dommages et intérêts, en ce qu'il a dit n'y avoir lieu à indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile et en ce qu'il a laissé les dépens à la charge de Monsieur [G] [E] ;

Statuant à nouveau'sur les chefs infirmés et y ajoutant,

Prononce la nullité du contrat de vente en état futur d'achèvement conclu entre la SCI [Adresse 11] et Monsieur [G] [E] portant sur la maison formant le lot n°61 du programme immobilier [Adresse 11] construite sur la parcelle cadastrée [Adresse 12] section C n°[Cadastre 5] sur la commune de [Localité 16] (11), contrat reçu en la forme authentique le 31 janvier 2008 par Me [J] [C], notaire associé de la SCP Benedetti-[C]-Gally-Dariscon pour dol ;

Condamne la SCI [Adresse 11] à restituer à Monsieur [G] [E] la somme de 282 256 euros TTC assortie de l'intérêt au taux légal à compter du 21 avril 2015 ;

Dit que lorsque le prix lui aura été effectivement restitué, Monsieur [G] [E] sera tenu de restituer à la SCI [Adresse 11] le bien immobilier objet de la vente du 31 janvier 2008 annulée ;

Condamne in solidum la SCI [Adresse 11] et la SARL HPA Holding anciennement Groupe Garrigae à payer à Monsieur [G] [E] les sommes suivantes :

' 13 016 euros au titre des frais de notaire ;

' 5 000 euros en réparation de son préjudice moral';

Déboute Monsieur [G] [E] de ses demandes de restitution de son apport personnel à hauteur de 14 940 euros et de dommages et intérêts d'un montant de 255 000 euros au titre du gain manqué correspondant à la perte de loyers ;

Rejette les demandes d'indemnisation à hauteur de 19 000 euros (mobilier) et de 9 832,20 euros (charges) formées par Monsieur [G] [E] ;

Prononce l'annulation du contrat de prêt conclu entre la SA Crédit Immobilier de France Rhône Ain et Monsieur [G] [E] pour un montant de 253 076 euros par acte authentique reçu le 31 janvier 2008 par Me [J] [C], notaire associé de la SCP Benedetti-[C]-Gally-Dariscon ;

Dit que Monsieur [G] [E] sera tenu de restituer la somme empruntée de 253 076 euros à la SA Crédit Immobilier de France Developpement venant aux droits de la SA Crédit Immobilier de France Rhône Alpes Auvergne assortie de l'intérêt au taux légal à compter du 21 avril 2015 ;

Dit que la SA Crédit Immobilier de France Developpement venant aux droits de la SA Crédit Immobilier de France Rhône Alpes Auvergne sera tenue de restituer à Monsieur [G] [E] les sommes encaissées en capital, intérêts et frais qu'elle a perçues assorties de l'intérêt au taux légal à compter du 21 avril 2015 ;

Ordonne la compensation des sommes que se doivent réciproquement Monsieur [G] [E] et la SA Crédit Immobilier de France Developpement venant aux droits de la SA Crédit Immobilier de France Rhône Alpes Auvergne ;

Rejette la demande de mainlevée de la garantie hypothécaire inscrite sur le bien objet du litige ;

Condamne in solidum la SCI [Adresse 11] et la SARL HPA Holding anciennement Groupe Garrigae à payer à la SA Crédit Immobilier de France Developpement venant aux droits de la SA Crédit Immobilier de France Rhône Alpes Auvergne la somme de 138 684,60 euros au titre des intérêts échus restitués et la somme de 56 102,40 euros au titre des intérêts à échoir ;

Condamne in solidum la SCI [Adresse 11] et la SARL HPA Holding anciennement Groupe Garrigae à supporter les entiers dépens de première instance et d'appel, sauf ceux avancés par la SCP Benedetti-[C]-Gally-Dariscon et par la SA Crédit Immobilier de France Developpement qui seront mis à la charge de Monsieur [G] [E] ;

Condamne in solidum la SCI [Adresse 11] et la SARL HPA Holding anciennement Groupe Garrigae à payer à Monsieur [G] [E] une indemnité de 8 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour ses frais engagés en première instance et en cause d'appel';

Condamne Monsieur [G] [E] à payer sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en première instance et en cause d'appel :

- 2 000 euros à la SCP Benedetti-[C]-Gally-Dariscon ;

- 2 000 euros à la SA Crédit Immobilier de France Developpement venant aux droits de la SA Crédit Immobilier de France Rhône Alpes Auvergne ;

Dit que les dépens pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;

Dit que le présent arrêt sera publié au service chargé de la publicité foncière de la situation de l'immeuble à la diligence de Monsieur [G] [E] ;

Dit qu'une copie du présent arrêt sera transmis à la diligence du greffe à la direction départementales des finances publiques de l'Aude en application des dispositions de l'article L.101 du livre des procédures fiscales.

La greffière, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 3e chambre civile
Numéro d'arrêt : 18/01762
Date de la décision : 26/01/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-01-26;18.01762 ?
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