Grosse + copie
délivrées le
à
COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
2e chambre sociale
ARRET DU 25 JANVIER 2023
Numéro d'inscription au répertoire général :
N° RG 20/05186 - N° Portalis DBVK-V-B7E-OYJV
ARRÊT n°
Décision déférée à la Cour : Jugement du 13 NOVEMBRE 2020
CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE MONTPELLIER - N° RG F 18/01307
APPELANTE :
S.A.S. ASB COM
[Adresse 6]
[Localité 1]
Représentée par Me Yann LE TARGAT de la SEP ALAIN ARMANDET ET YANN LE TARGAT, avocat au barreau de MONTPELLIER
INTIMEE :
Madame [C] [K]
née le 06 Août 1995 à [Localité 7]
de nationalité Française
[Adresse 5]
[Adresse 5]
[Localité 2]
Représentée par Me Jana KRATKA, avocat au barreau de MONTPELLIER
(bénéficie d'une aide juridictionnelle totale numéro 2021/005940 du 12/05/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de MONTPELLIER)
INTERVENANTE :
Association UNEDIC DÉLÉGATION AGS CGEA D'ANNECY UNEDIC Délégation AGS CGEA d'ANNECY
[Adresse 4]
[Localité 3]
Représentée par Me Delphine CLAMENS-BIANCO substituée par Me Pierre CHATEL, de la SELARL CHATEL BRUN MIRALVES CLAMENS, avocats au barreau de MONTPELLIER
Ordonnance de clôture du 02 Novembre 2022
COMPOSITION DE LA COUR :
En application de l'article 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 23 NOVEMBRE 2022, en audience publique, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par l'article 804 du même code, devant la cour composée de :
Monsieur Jean-Pierre MASIA, Président
Monsieur Jacques FOURNIE, Conseiller
Madame Magali VENET, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Marie-Lydia VIGINIER
ARRET :
- contradictoire ;
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;
- signé par M. Jean-Pierre MASIA, Président, et par Mme Marie-Lydia VIGINIER, Greffier.
*
* *
FAITS ET PROCÉDURE
Madame [C] [K] a été engagée par la sas Asb Com selon contrat de professionnalisation, à compter du 2 novembre 2017 avec une date de fin de contrat à durée déterminée au 21 août 2019, en qualité de commerciale. Au dernier état de la relation contractuelle, elle percevait un salaire brut mensuel de 1498,50€.
A compter du mois de janvier 2018, l'employeur a cessé de régler les salaires de sa salariée.
Par deux courriers recommandés du 28 février 2018, la salariée a mis en demeure son employeur de lui verser son salaire.
Le 16 avril 2018, la salariée a adressé à l'employeur un courrier intitulé 'rupture du contrat de professionnalisation pour faute grave de l'employeur'.
Sollicitant la condamnation de son employeur à lui régler ses salaires ainsi que les congés payés afférents et des dommages-intérêts au titre de la rupture abusive, la salariée a saisi le conseil de prud'hommes de Montpellier, en sa formation de référé.
Un procès verbal de conciliation a été dressé le 12 juillet 2018 devant la formation de référé du conseil de prud'hommes de Montpellier aux termes duquel l'employeur s'est engagé à verser à la salariée la somme de 2239€ nets de CSG-CRDS et à lui adresser dans un délai maximum de 15 jours le bulletin de salaire d'avril 2018, l'attestation Pôle emploi et le certificat de travail. Cette somme a été réglée à la salariée à la seconde présentation du chèque.
Par requête du 29 novembre 2018, Mme [K] a saisi le conseil de prud'hommes des demandes suivantes :
- dire et juger que son contrat de travail a été rompu aux torts de l'employeur,
- subsidiairement, prononcer la résiliation judiciaire du contrat de professionnalisation en raison de la faute grave de la SAS ASB COM, avec effet rétroactif au 16 avril 2018.
- Condamner la SAS ASB COM au paiement des sommes suivantes :
- 24 125,85 € au titre des salaires dus jusqu'au terme du contrat,
- 2412,60 € au titre des congés payés afférents,
- 3241,80 € au titre de l'article L 1243-3 du Code du travail,
- 2500€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Le 29 novembre 2018, la SAS ASB COM a été placée en redressement judiciaire, et le 3 juillet 2020 il a été mis fin au redressement judiciaire, l'intégralité des créanciers ayant été réglés.
Par jugement du 13 novembre 2020, le conseil de prud'hommes de Montpellier a :
- Dit et jugé que l'UNEDIC AGS est mise hors de cause dans cette procédure, seule la SAS ASB COM étant appelée à répondre des accusations portées contre elle devant le Conseil de céans.
- Prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail de Mme [K] aux torts de l'employeur à compter du 16 avril 2018,
- Condamné la SAS ASB COM prise en la personne de son représentant légal en exercice à verser à Mme [K] les sommes suivantes :
- 24 125,85 € au titre des salaires dus jusqu'au terme du contrat,
- 2412,60 € au titre des congés payés afférents,
- 3241,80 € au titre de l'article L 1243-3 du Code du travail,
- 960€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile
- Fixé le salaire moyen de la salariée à la somme de 1498,50€ bruts mensuel,
- Débouté la SAS ASB COM de l'ensemble de ses demandes,
- Condamné la SAS ASB COM aux entiers dépens.
Par déclaration enregistrée au RPVA le 19 novembre 2020, la SAS ABS COM a régulièrement interjeté appel de ce jugement.
PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Aux termes de ses dernières conclusions enregistrées au RPVA le 25 octobre 2022, la SAS ASB COM demande à la Cour de :
Recevoir l'appel comme régulier, en la forme,
Au fond, y faire droit,
Infirmer la décision entreprise en toutes ses dispositions,
Vu l'article 2044 du code civil,
Dire et juger que le procès-verbal de « conciliation totale » établi dans le cadre de la procédure de référé et le règlement de la somme de 2239 € « à titre d'indemnité globale, forfaitaire, transactionnelle et de dommages et intérêts pour mettre fin au litige » avait pour effet d'interdire et de rendre irrecevable toute saisine d'une juridiction par l'extinction du litige entre les parties,
A titre subsidiaire,
Vu l'arrêt Soc. 3 juin 2020, n° 18-13.628,
Vu l'article L1243-1
Dire et juger que le CPH a été saisi pour statuer sur les mérites et les conséquences d'une prise d'acte de rupture dans le cadre d'un CDD,
Dire et juger que la prise d'acte de rupture n'est pas un des modes possibles de rupture du CDD en application des dispositions légales,
Dire et juger qu'il y a lieu d'infirmer la décision querellée qui prononce une résiliation judiciaire qui ne lui était pas demandée, puisque l'effet d'une « prise d'acte de rupture » si elle est fondée sur une faute grave de l'employeur s'analyse en un licenciement sans cause réelle ni sérieuse, et puisqu'il constate que les griefs avaient disparus à la date du jugement,
Dire et juger que la « prise d'acte » improprement qualifiée comme telle s'agissant d'un CDD doit s'analyser en une démission,
A titre très subsidiaire,
Dire et juger que le CPH n'était pas saisi d'une demande de résiliation judicaire du CDD.
Dire et juger que le CPH qui constate que le grief invoqué (retard dans le paiement du salaire) a disparu à la date du jugement parce que l'employeur a entièrement régularisé la situation avant la décision de justice, ne peut prononcer la résiliation judiciaire du contrat,
En toutes hypothèses,
Dire et juger que l'article L 1243-3 du code du travail ne peut fonder une condamnation qu'au profit de l'employeur,
Condamner au paiement de la somme de 2.500€ au titre de l'art 700 du CPC, ainsi qu'aux entiers dépens.
Aux termes de ses dernières conclusions enregistrées au RPVA le 20 avril 2021, Mme [C] [K] demande à la Cour de :
Vu les articles L. 1222-1, L.1241-1 et suivants et L.6325-1 du Code du travail
Vu les articles 2048 et suivants du Code civil
Confirmer le jugement rendu par le Conseil de prud'hommes de Montpellier le 13 novembre 2020 en toutes ses dispositions,
Rejeter l'ensemble des demandes, fins et conclusions de la société ASB COM,
Donner acte à Mme [K] qu'elle ne s'oppose pas à la demande de mise hors de cause de l'UNEDIC CGEA de SEYNOD en l'état du jugement rendu par le Tribunal de commerce de Montpellier le 3 juillet 2020,
Condamner la société ASB COM à lui payer la somme de 2500€ sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,
Aux termes de ses dernières conclusions enregistrées au RPVA le 31 mars 2021, l'UNEDIC Délégation AGS CGEA de SEYNOD demande à la Cour de :
Confirmer le jugement attaqué seulement en ce qu'il a constaté qu'il a été mis fin à la procédure collective ouverte à l'encontre de la SAS ASB COM,
En conséquence,
Prononcer la mise hors de cause des organes de la procédure collective de la SAS ASB COM, Prononcer la mise hors de cause de l'UNEDIC CGEA de SEYNOD,
En tout état de cause,
Constater que la garantie de l'AGS est plafonnée toutes créances avancées pour le compte du salarié à l'un des trois plafonds définis par l'article D. 3253-5 du Code du travail et qu'en l'espèce, c'est le plafond 4 qui s'applique,
Exclure de la garantie AGS les sommes éventuellement fixées au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, dépens et astreinte,
Dire que toute créance sera fixée en brut et sous réserve de cotisations sociales et contributions éventuellement applicables, conformément aux dispositions de l'article L. 3253-8 in fine du Code du travail,
Donner acte au CGEA de ce qu'il revendique le bénéfice exprès et d'ordre public des textes légaux et réglementaires applicables tant au plan des conditions de la mise en 'uvre du régime d'assurance de créances des salariés que de l'étendue de ladite garantie.
La sas ASB COM s'est désistée de son appel contre l'Unedic délégation de l'AGS-CGEA.
Pour l'exposé des prétentions et des moyens des parties, il est renvoyé, conformément à l'article 455 du Code de procédure civile, à leurs conclusions ci-dessus mentionnées et datées.
La procédure a été clôturée par ordonnance du 2 novembre 2022.
MOTIFS
Sur la recevabilité des demandes :
La société ASB Com soutient sur le fondement de l'article 2044 du code civil que le procès-verbal de conciliation totale signé par les parties le 12 juillet 2018 devant la formation de référé du conseil de prud'hommes avait pour effet de rendre irrecevable la saisine par la salariée du conseil de prud'hommes pour statuer sur la rupture du contrat de professionnalisation et ses conséquences.La société ajoute que cet accord ne portait pas uniquement sur le règlement des salaires mais sur l'indemnisation du préjudice subi par la salariée du fait du paiement tardif du salaire et de celui consécutif à la rupture du contrat.
Au contraire, la salariée fait valoir que les demandes formulées devant le conseil de prud'hommes étaient recevables car le procès-verbal de conciliation avait uniquement pour objet les demandes en règlement des salaires impayés et la transmission des documents de rupture et non les demandes relatives à la rupture du contrat de travail.
Aux termes du procès-verbal de conciliation en date du 12 juillet 2018 les parties se sont accordées sur le versement à Mme [K] d'une somme de 2239€ à titre « d'indemnité globale, forfaitaire, transactionnelle et de dommages et intérêts pour mettre fin au litige ». La mention du versement de dommages et intérêts démontre que cet accord n'avait pas pour seul objet le règlement des salaires mais l'indemnisation du préjudice subi par la salariée du fait du retard dans le paiement du salaire et de celui né de la rupture. La salariée n'était donc pas fondée à saisir le conseil de prud'hommes au fond le 29 novembre 2018 de demandes sur lesquelles elle avait transigé.
En conséquence, le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Montpellier 13 novembre 2020 sera infirmé en toutes ses dispositions.
Sur les demandes accessoires :
Madame [C] [K], partie succombante, sera tenue aux dépens d'appel.
Il apparaît équitable de ne pas faire application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La Cour, après en avoir délibéré, par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe,
Infirme le jugement du conseil de prud'hommes de Montpellier en date du 13 novembre 2020 en toutes ses dispositions,
Statuant à nouveau,
Déclare Madame [C] [K] irrecevable en ses demandes,
Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne Madame [C] [K] aux entiers dépens d'appel.
LE GREFFIER LE PRÉSID ENT