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25/01/2023 | FRANCE | N°19/05361

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 1re chambre sociale, 25 janvier 2023, 19/05361


Grosse + copie

délivrées le

à















COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



1re chambre sociale



ARRET DU 25 JANVIER 2023



Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 19/05361 - N° Portalis DBVK-V-B7D-OIZL





Décision déférée à la Cour :

Jugement du 26 JUIN 2019

CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE MONTPELLIER - N° RG F 18/00232





APPELANT :



Monsieur [C], [T],[Z] [D]

né le 3

0 Septembre 1963 à Montpellier (34000)

de nationalité Française

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représenté par Maître Habiba MARGARIA, avocat au barreau de MONTPELLIER







INTIMEE :



SASU EPUR LANGUEDOC ROUSSILLON prise en la per...

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

1re chambre sociale

ARRET DU 25 JANVIER 2023

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 19/05361 - N° Portalis DBVK-V-B7D-OIZL

Décision déférée à la Cour :

Jugement du 26 JUIN 2019

CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE MONTPELLIER - N° RG F 18/00232

APPELANT :

Monsieur [C], [T],[Z] [D]

né le 30 Septembre 1963 à Montpellier (34000)

de nationalité Française

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représenté par Maître Habiba MARGARIA, avocat au barreau de MONTPELLIER

INTIMEE :

SASU EPUR LANGUEDOC ROUSSILLON prise en la personne de son représentant légal

[Adresse 2]

[Localité 1] (FRANCE)

Représentée par Maître Maria GRAAFLAND de la SELARL PACTA JURIS, avocat plaidant, au barreau de MARSEILLE et Maître Jeanne FOURNIER, avocat postulant au barreau de MONTPELLIER

Ordonnance de clôture du 02 Novembre 2022

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 22 NOVEMBRE 2022,en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Caroline CHICLET, Conseiller, chargé du rapport, et Monsieur Jacques FOURNIE, Conseiller.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Philippe DE GUARDIA, Président de chambre

Madame Caroline CHICLET, Conseiller

Monsieur Jacques FOURNIE, Conseiller

Greffière lors des débats : Madame Isabelle CONSTANT

ARRET :

- Contradictoire ;

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par Monsieur Philippe DE GUARDIA, Président de chambre, et par Madame Isabelle CONSTANT, Greffière.

*

* *

EXPOSE DU LITIGE

Monsieur [C] [D] a été engagé à compter du 1er mars 1994 par la société Saint-Pierre Exploitation exerçant une activité de démolition industrielle et de recyclage de matières premières ainsi que de négoce du fer et des métaux, selon contrat de travail à durée indéterminée en qualité de chauffeur poids-lourds, niveau II, coefficient 160 initialement régi par la convention collective de la métallurgie moyennant une rémunération mensuelle brute de 9600Fr pour trente-neuf heures de travail par semaine.

À compter du mois de juillet 2001 la convention collective applicable dans l'entreprise était la convention collective de l'industrie et du commerce de la récupération.

Par jugement du tribunal de commerce de Montpellier du 10 février 2014 la société Saint-Pierre Exploitation a été placée sous sauvegarde de justice convertie en un redressement judiciaire par jugement du tribunal de commerce de Montpellier du 2 octobre 2015.

Le 22 décembre 2015, le tribunal de commerce de Montpellier arrêtait un plan de cession des actifs de la société Saint-Pierre Exploitation au profit de la société Epur SA et il prononçait la liquidation judiciaire de la société Saint-Pierre Exploitation.

C'est dans ces conditions, qu'en janvier 2016, la société Epur Global, filiale de la société Epur SA, a créé la société Epur Languedoc-Roussillon afin de reprendre l'exploitation de l'activité.

La société Epur Languedoc-Roussillon a ainsi intégré le groupe Epur et les contrats de travail de la société Saint-Pierre exploitation ont été transférés au sein de la société Epur Languedoc-Roussillon.

Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 27 février 2017, la société Epur Languedoc-Roussillon convoquait le salarié à un entretien préalable à un éventuel licenciement pour motif économique prévu le 6 mars 2017.

Monsieur [C] [D] adhérait au plan de sécurisation professionnelle le 15 mars 2017 et son contrat de travail a pris fin le 28 mars 2017.

Par requête du 5 mars 2018, Monsieur [C] [D] a saisi le conseil de prud'hommes de Montpellier aux fins de condamnation de la société Epur Languedoc-Roussillon à lui payer :

$gt; à titre principal,

'2602,54 euros à titre de dommages-intérêts pour non-respect de la procédure de licenciement,

'60 000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

'20 000 € à titre de dommages intérêts pour inobservation des critères d'ordre de licenciement,

$gt; à titre subsidiaire,

'60 000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement nul,

$gt; en tout état de cause,

'2500 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Aux termes des mêmes écritures, Monsieur [D] réclamait la condamnation de l'employeur à lui remettre sous astreinte de 100€ par jour de retard les documents sociaux de fin de contrat rectifiés.

Par jugement du 26 juin 2019 le conseil de prud'hommes de Montpellier a débouté Monsieur [C] [D] de l'intégralité de ses demandes.

Le 26 juillet 2019, le salarié a relevé appel de la décision du conseil de prud'hommes.

Aux termes de ses dernières écritures notifiées par RPVA le 28 octobre 2022, Monsieur [C] [D] conclut à l'infirmation du jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Montpellier,

et faisant valoir que la procédure de licenciement est irrégulière, il relève l'absence de toute cause économique de licenciement, le non-respect des critères relatifs à l'ordre de licenciement, le manquement de la société Epur Languedoc-Roussillon à son obligation de recherche loyale et sérieuse de reclassement, il demande que son licenciement soit dit sans cause réelle et sérieuse et sollicite la condamnation de la société Epur Languedoc-Roussillon à lui payer avec intérêts au taux légal à compter de la saisine, outre anatocisme, les sommes suivantes:

'2602,54 euros à titre de dommages-intérêts pour non-respect de la procédure de licenciement,

'60 000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

'20 000 € à titre de dommages intérêts pour inobservation des critères d'ordre de licenciement,

'5205,08 euro à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 520,50 euros titrent des congés payés afférents,

'2500 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Il réclame également la condamnation de l'employeur à lui remettre les documents sociaux de fin de contrat rectifiés sous astreinte de 200 € par jour de retard.

Dans ses dernières écritures notifiées par RPVA le 28 février 2022, la société Epur Languedoc-Roussillon conclut à la confirmation du jugement rendu par le conseil de prud'hommes, au caractère irrecevable et mal fondé des demandes formées par Monsieur [D] et à sa condamnation à lui payer une somme de 2500 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture était rendue le 2 novembre 2022.

SUR QUOI

L'article L 1232-4 du code du travail dispose que lors de son audition, le salarié peut se faire assister par une personne de son choix appartenant au personnel de l'entreprise.Lorsqu'il n'y a pas d'institutions représentatives du personnel dans l'entreprise, le salarié peut se faire assister soit par une personne de son choix appartenant au personnel de l'entreprise, soit par un conseiller du salarié choisi sur une liste dressée par l'autorité administrative.La lettre de convocation à l'entretien préalable adressée au salarié mentionne la possibilité de recourir à un conseiller du salarié et précise l'adresse des services dans lesquels la liste de ces conseillers est tenue à sa disposition.

La présence d'un délégué du personnel dans l'entreprise suffisait à écarter le recours à un conseiller extérieur à celle-ci. En effet, si l'entreprise est dotée de représentants du personnel, la lettre ne doit pas indiquer que le salarié peut se faire assister par un conseiller inscrit sur la liste préfectorale, cette option n'ayant pas été prévue par les dispositions légales. Or, le courrier de convocation à l'entretien préalable qui précisait que celui-ci devait se dérouler à [Localité 6] et spécifiait que le salarié pouvait se faire assister par une liste dressée à cet effet par le préfet des Bouches-du-Rhône pouvant être consultée à la mairie ou à l'inspection du travail du huitième arrondissement de Marseille, induisait le salarié qui résidait à [Localité 5] (34), en erreur sur ses réelles possibilités d'être assisté à l'occasion de l'entretien préalable.

Monsieur [D] n'a pas été assisté à l'occasion de l'entretien préalable et il indique que ce manquement ne lui a pas permis d'être conseillé utilement afin de faire valoir ses observations. Il en résulte que l'entrave dans la défense de ses droits du fait de l'irrégularité de procédure établit l'existence d'un préjudice pour le salarié.

Pour autant cette irrégularité ne prive pas par elle-même le licenciement de cause réelle et sérieuse.

$gt;

En application de l'article L 1233-3 du code du travail dans sa rédaction en vigueur du 1er décembre 2016 au 24 septembre 2017, constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d'une suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification, refusée par le salarié, d'un élément essentiel du contrat de travail, consécutives notamment :

1° A des difficultés économiques caractérisées soit par l'évolution significative d'au moins un indicateur économique tel qu'une baisse des commandes ou du chiffre d'affaires, des pertes d'exploitation ou une dégradation de la trésorerie ou de l'excédent brut d'exploitation, soit par tout autre élément de nature à justifier de ces difficultés.

Une baisse significative des commandes ou du chiffre d'affaires est constituée dès lors que la durée de cette baisse est, en comparaison avec la même période de l'année précédente, au moins égale à :

a) Un trimestre pour une entreprise de moins de onze salariés ;

b) Deux trimestres consécutifs pour une entreprise d'au moins onze salariés et de moins de cinquante salariés ;

c) Trois trimestres consécutifs pour une entreprise d'au moins cinquante salariés et de moins de trois cents salariés ;

d) Quatre trimestres consécutifs pour une entreprise de trois cents salariés et plus ;

2° A des mutations technologiques ;

3° A une réorganisation de l'entreprise nécessaire à la sauvegarde de sa compétitivité ;

4° A la cessation d'activité de l'entreprise.

La matérialité de la suppression, de la transformation d'emploi ou de la modification d'un élément essentiel du contrat de travail s'apprécie au niveau de l'entreprise.

Les dispositions du présent chapitre sont applicables à toute rupture du contrat de travail à l'exclusion de la rupture conventionnelle visée aux articles L 1237-11 et suivants, résultant de l'une des causes énoncées au présent article.

En l'espèce la société justifie, par la production de ses éléments comptables, ainsi que par celle des comptes consolidés du groupe, pour l'exercice 2016 d'importantes pertes d'exploitation.

Ainsi au 31 décembre 2016, les pertes d'exploitation de la société Epur Languedoc-Roussillon atteignaient une somme de 469 632 € sans que l'analyse des pièces comptables ne justifie comme le prétend le salarié que ces pertes ne résulteraient que du rachat des actifs de la société Saint-Pierre Exploitation.

Dans le même temps, le groupe Epur, au sein duquel il n'est pas soutenu qu'aient existé plusieurs secteurs d'activité, cumulait 1 435 591 € de pertes.

Si le salarié soutient que son licenciement aurait pour origine ses mauvais rapports avec son neveu, gérant de la société, l'employeur justifie que les pertes d'exploitation se sont accompagnées d'une baisse d'activité qui s'est traduite par une période de chômage technique de six mois pour une partie des personnels au cours de l'exercice 2017, par la prise en compte du départ à la retraite prochain de deux salariés conducteurs d'engin, et que le choix de la suppression d'un poste de conducteur poids-lourd résultait en réalité de la réduction du volume de fret.

Monsieur [D] soutient enfin que l'existence de difficultés économiques avérées au moment du licenciement n'est pas démontrée par la projection sur l'année du déficit des deux premiers mois. Il ressort cependant des pièces produites qu'à l'issue de l'exercice 2017 la société accusait toujours un déficit de 67 813 € tandis que les difficultés économiques du secteur d'activité du groupe étaient avérées à la date du licenciement.

La réalité des difficultés économiques à la date du licenciement est par conséquent suffisamment établie.

$gt;

En application de l'article L 1233-4 du code du travail dans sa rédaction applicable au litige, le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l'intéressé ne peut être opéré sur les emplois disponibles, situés sur le territoire national dans l'entreprise ou les autres entreprises du groupe dont l'entreprise fait partie.

Le reclassement du salarié s'effectue sur un emploi relevant de la même catégorie que celui qu'il occupe ou sur un emploi équivalent assorti d'une rémunération équivalente. A défaut, et sous réserve de l'accord exprès du salarié, le reclassement s'effectue sur un emploi d'une catégorie inférieure.

Les offres de reclassement proposées au salarié sont écrites et précises.

En l'espèce le groupe ne dispose pas d'établissement à l'étranger et le salarié invoquant à la fois ses charges de famille et la maladie de son épouse refusait le 10 mars 2017 les propositions de reclassement qui lui avaient été faites par l'employeur le 8 février 2017 sur un poste d'opérateur de tri, niveau 1C de la convention collective nationale des industries et commerces de la récupération moyennant une rémunération annuelle de 22 750 € pour une durée de travail de trente-neuf heures hebdomadaire au sein de la société Epur Méditerranée (Gignac-13) ainsi que sur un poste d'opérateur de tri au sein de la société Epur Île-de-France (Steins-93) correspondant à la même qualification et à la même rémunération.

L'employeur verse par ailleurs aux débats les registres uniques du personnel de l'ensemble des sociétés du groupe et si le salarié fait valoir que les postes de reclassement qui lui ont été proposés n'étaient pas équivalents à celui qu'il occupait précédemment, l'existence d'un autre poste vacant disponible n'est pas relevée. Partant, il ne peut davantage être fait grief à la société de ne pas avoir proposé au salarié de poste accessible ou rendu accessible par des mesures d'accompagnement permettant d'assurer l'adaptation du salarié à une évolution de son emploi alors même qu'aucun élément ne permet de supposer qu'un tel poste vacant ait pu exister. Il en résulte que le défaut de formation allégué durant la relation contractuelle ne pouvait de ce fait rendre le licenciement sans cause réelle et sérieuse.

$gt;

L'article L1233-5 dans sa rédaction applicable au litige, dispose : Lorsque l'employeur procède à un licenciement collectif pour motif économique et en l'absence de convention ou accord collectif de travail applicable, il définit les critères retenus pour fixer l'ordre des licenciements, après consultation du comité d'entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel.

Ces critères prennent notamment en compte :

1° Les charges de famille, en particulier celles des parents isolés ;

2° L'ancienneté de service dans l'établissement ou l'entreprise ;

3° La situation des salariés qui présentent des caractéristiques sociales rendant leur réinsertion professionnelle particulièrement difficile, notamment celle des personnes handicapées et des salariés âgés ;

4° Les qualités professionnelles appréciées par catégorie.

L'employeur peut privilégier un de ces critères, à condition de tenir compte de l'ensemble des autres critères prévus au présent article.

Pour les entreprises soumises à l'obligation d'établir un plan de sauvegarde de l'emploi mentionné aux articles L. 1233-61 à L. 1233-63, le périmètre d'application des critères d'ordre des licenciements peut être fixé par l'accord collectif mentionné à l'article L. 1233-24-1 ou par le document unilatéral mentionné à l'article L. 1233-24-4.

Dans le cas d'un document unilatéral, ce périmètre ne peut être inférieur à celui de chaque zone d'emploi dans laquelle sont situés un ou plusieurs établissements de l'entreprise concernés par les suppressions d'emploi.

Les conditions d'application de l'avant-dernier alinéa du présent article sont définies par décret.

En l'espèce, le salarié soutient qu'en réalité le choix de l'employeur qui a défini des critères d'ordre était arrêté sur lui dès février 2017 et que les critères que l'employeur a retenu n'ont pas été appliqués de manière objective et sincère. A cet égard, il met en doute à la fois la sincérité du procès-verbal d'élection des délégués du personnel ainsi que celle du compte rendu de réunion des délégués du personnel aux fins notamment de consultation sur les critères d'ordre.

Or, le procès-verbal du second tour des élections des délégués du personnel signé des membres du bureau de vote s'est déroulé le 6 janvier 2015. Un seul candidat s'est présenté et a été élu par six votants sur un collège de trente et un salariés. Il n'est justifié d'aucune contestation de l'élection devant la juridiction compétente. De plus, le salarié qui soutient devant la cour l'irrégularité de la convocation à l'entretien préalable en raison de l'impossibilité d'assistance par un conseiller du salarié alors qu'il existait un délégué du personnel dans l'entreprise, ne peut sans se contredire au détriment d'autrui, arguer de l'inexistence de l'institution pour se prévaloir d'un défaut de consultation obligatoire sur les critères d'ordre.

Si le compte rendu de la réunion des délégués du personnel du 17 février 2017 mentionne ensuite la présence de Monsieur [E] [G] représentant le président excusé, de Monsieur [O] [J], délégué du personnel titulaire et de Monsieur [P] [D], responsable d'agence, et si le document n'est signé que des deux derniers nommés, la convocation mentionne l'ordre du jour qui comporte notamment la consultation sur l'ordre des licenciements. Le compte-rendu qui n'obéit lui-même à aucune forme particulière mentionne en outre les différents points figurant à l'ordre du jour, en particulier les critères d'ordre, ainsi que les remarques formulées par le délégué du personnel tandis que celui-ci atteste à la fois de sa consultation ainsi que de la présence de Monsieur [E] [G], si bien que la preuve de la consultation ne résulte pas que de la seule attestation de Monsieur [O] [J], et que dans ces conditions l'absence ou l'irrégularité de mise en 'uvre de cette formalité substantielle ne peut être retenue.

Il ressort ensuite des pièces produites qu'à la demande du salarié, l'employeur lui a communiqué le 7 mars 2017 les critères d'ordre retenus avec mention des différents coefficients prenant en compte les charges de famille, en particulier celles des parents isolés, l'ancienneté de service dans l'établissement ou l'entreprise, la situation des salariés qui présentent des caractéristiques sociales rendant leur réinsertion professionnelle particulièrement difficile, notamment celle des personnes handicapées et des salariés âgés ainsi que les qualités professionnelles, et qu'une seule catégorie étant concernée, il a privilégié la polyvalence reposant sur la possession de plusieurs permis routiers et autres que routiers.

Il résulte du dossier que les critères de l'ordre des licenciements s'appliquent à l'ensemble du personnel de l'entreprise dans la catégorie professionnelle des chauffeurs poids-lourds à laquelle appartient monsieur [D] dont l'emploi a été supprimé.

La société Epur a établi un tableau comportant le nom des autres salariés ainsi que les éléments relatifs à leurs charges de famille, leur ancienneté, leurs caractéristiques sociales et les éléments pris en compte au titre des qualités professionnelles. Si la réalité des charges de famille a été contestée par le salarié, il ressort des pièces produites par l'employeur que le nombre de points qui lui a été affecté à ce titre correspond très précisément aux critères retenus dès lors que ses deux enfants étaient majeurs à la date du licenciement, et que s'il invoque une absence de prise en compte suffisante de ses difficultés sociales, le critère légal ne s'attache qu'aux caractéristiques sociales rendant la réinsertion professionnelle du salarié lui-même, difficile, en particulier dans le cadre d'un handicap, Or, ce critère a été pris en compte en particulier sur la base de l'âge des salariés, et même si monsieur [D] était le moins âgé de tous les salariés appartenant à la catégorie concernée, les critères retenus ne lui ont pas été défavorables puisqu'il a bénéficié du même nombre de points à cet égard que les autres salariés.

Enfin, la réduction d'effectif s'accompagnant de la prise en compte du départ prochain à la retraite de deux salariés conducteurs d'engins le critère de polyvalence reposant sur la possession de plusieurs permis routiers ou autres que routiers privilégié par l'employeur répondait aux contraintes objectives de la société. L'appréciation portée sur les aptitudes professionnelles du salarié ne procédait par conséquent pas d'une erreur manifeste ou d'un détournement de pouvoir.

L'employeur a ainsi justifié des données objectives, précises et vérifiables sur lesquelles il s'est appuyé pour arrêter son choix, selon les critères définis pour déterminer l'ordre des licenciements si bien qu'il rapporte la preuve d'une absence de violation des dispositions de l'article L 1233-5 du code du travail.

Partant, il convient de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté le salarié de sa demande de dommages-intérêts à ce titre.

$gt;

Monsieur [D] qui a établi ne pas avoir été assisté à l'occasion de l'entretien préalable en raison de l'erreur dans laquelle l'a induit l'irrégularité de procédure examinée supra, démontre suffisamment l'existence d'un préjudice, justifiant l'allocation d'une somme de 1000 € à titre de dommages-intérêts.

Les créances à caractère indemnitaire produisant intérêts au taux légal à compter de la décision en fixant tout à la fois le principe et le montant, les intérêts au taux légal portant sur cette somme ne peuvent courir qu'à compter du prononcé de l'arrêt.

Compte tenu de la solution apportée au litige, la SASU Epur qui succombe partiellement conservera la charge des dépens.

En considération de l'équité, il convient de dire n'y avoir lieu à condamnation titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement par arrêt contradictoire mis à disposition greffe,

Confirme le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Montpellier le 26 juin 2019 sauf en ce qu'il a débouté Monsieur [C] [D] de sa demande de dommages-intérêts pour irrégularité la procédure;

Et statuant à nouveau du seul chef infirmé,

Condamne la société Epur Languedoc-Roussillon à payer à Monsieur [C] [D] une somme de 1000 € à titre de dommages-intérêts pour irrégularité de la procédure;

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires;

Condamne la société Epur Languedoc-Roussillon aux dépens;

la greffière, le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 1re chambre sociale
Numéro d'arrêt : 19/05361
Date de la décision : 25/01/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-01-25;19.05361 ?
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