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24/01/2023 | FRANCE | N°20/04630

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 5e chambre civile, 24 janvier 2023, 20/04630


Grosse + copie

délivrées le

à















COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



5e chambre civile



ARRET DU 24 JANVIER 2023



Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 20/04630 - N° Portalis DBVK-V-B7E-OXJE





Décision déférée à la Cour :

Jugement du 08 SEPTEMBRE 2020

TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE MONTPELLIER

N° RG 11-19-1334





APPELANT :



Monsieur [N] [D]

[Adresse 1]
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Représenté par Me Philippe SENMARTIN de la SELARL CHABANNES-SENMARTIN ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant

assisté de Me Stéphane ROCHIGNEUX, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat plaidant







I...

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

5e chambre civile

ARRET DU 24 JANVIER 2023

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 20/04630 - N° Portalis DBVK-V-B7E-OXJE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du 08 SEPTEMBRE 2020

TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE MONTPELLIER

N° RG 11-19-1334

APPELANT :

Monsieur [N] [D]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représenté par Me Philippe SENMARTIN de la SELARL CHABANNES-SENMARTIN ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant

assisté de Me Stéphane ROCHIGNEUX, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat plaidant

INTIME :

Monsieur [F] [T]

né le 10 Mai 1966 à [Localité 5]

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représenté par Me Sophie MIRALVES-BOUDET de la SELARL CHATEL BRUN MIRALVES CLAMENS, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat au postulant

assisté de Me Mélody VAILLANT, avocat au barreau de MONTPELLIER , avocat plaidant

Ordonnance de clôture du 07 Novembre 2022

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 28 NOVEMBRE 2022,en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Emmanuel GARCIA, Conseiller, chargé du rapport.

Ce(s) magistrat(s) a (ont) rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Philippe GAILLARD, Président de chambre

Madame Nathalie AZOUARD, Conseiller

Monsieur Emmanuel GARCIA, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Estelle DOUBEY

ARRET :

- Contradictoire ;

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par Monsieur Philippe GAILLARD, Président de chambre, et par Madame Estelle DOUBEY, Greffier.

*

* *

EXPOSE DU LITIGE

Le 16 février 2018, [N] [D] a donné à bail à [C] [T] un appartement situé à [Localité 6], pour un loyer mensuel de 552,81 euros.

Le 24 août 2018, [N] [D] a fait délivrer à [C] [T] un commandement de payer les loyers visant la clause résolutoire du bail.

Par acte du 30 août 2018, intitulé « signification du commandement à la caution », [N] [D] a fait signifier ce commandement à [F] [T], père du locataire.

Le 13 mars 2019, le juge des référés du tribunal d'instance de Montpellier a débouté le bailleur de ses demandes contre [F] [T], faute d'engagement de caution, et a constaté que le bail s'était trouvé résilié de plein droit par le jeu de la clause résolutoire, le 25 octobre 2018, et a condamné [C] [T] à payer au bailleur la somme de 5 046,76 euros à titre de provision.

Le 29 mai 2019, [N] [D] a fait assigner [F] [T] aux fins d'obtenir sa condamnation à lui payer notamment la somme de 5 046,71 euros en faisant valoir que par ses man'uvres et écrits, [F] [T], l'avait conduit à accepter le locataire et que son comportement dolosif a été déterminant de son consentement à bail. [C] [T] est insolvable et a quitté la France.

[F] [T] a opposé qu'il n'était pas le co-contractant de [N] [D], de sorte que sa responsabilité contractuelle ne pouvait être engagée, précisant que les articles 1137, 1112-1 et 1231-1 du code civil ne s'appliquent que lorsque les parties sont liées par un contrat, ce qui n'est pas ici le cas.

Le jugement rendu le 8 septembre 2020 par le tribunal judiciaire de Montpellier énonce dans son dispositif :

Déboute [N] [D] de ses demandes ;

Condamne [N] [D] à payer à [F] [T] la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne [N] [D] aux dépens.

Le jugement expose que [N] [D] ne conteste pas, dans le cadre de la présente procédure, que [F] [T] ne s'est pas porté caution de son fils. En l'absence de relation contractuelle, le bailleur n'est pas fondé à invoquer les dispositions des articles 1137, 1130 et 1131 du code civil à l'appui de sa demande.

[N] [D] a relevé appel du jugement par déclaration au greffe du 23 octobre 2020.

La clôture de la procédure a été prononcée par ordonnance du 7 novembre 2022.

Les dernières écritures pour [N] [D] ont été déposées le 6 janvier 2021.

Les dernières écritures pour [F] [T] ont été déposées le 25 mars 2021.

Le dispositif des écritures pour [N] [D] énonce :

Réformer le jugement déféré ;

Condamner [F] [T] au paiement de dommages et intérêts à hauteur de la somme de 5 000 euros ;

Condamner [F] [T] au paiement de la somme de 2 500 euros au requérant au titre des frais irrépétibles sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

[N] [D] fait valoir l'exigence de bonne foi prévue à l'article 1112 du code civil, y compris lors de la période de pourparlers. La Cour de cassation par exemple, dans un arrêt de la chambre commerciale du 7 mars 2018, a précisé que l'obligation de bonne foi devait être respectée pour négocier loyalement, sous peine que la responsabilité des co-contractant soit engagée. La seule faute dans le cadre des pourparlers est susceptible d'engager la responsabilité délictuelle de l'une ou l'autre des parties sur le fondement des articles 1240 et 1241 du code civil. Il précise que lorsque le contrat n'est pas conclu et qu'une faute a été commise dans les négociations, la réparation du préjudice n'a pas pour objet de compenser ni la perte des avantages attendus du contrat non conclu, ni la perte de chance d'obtenir ces avantages, il est néanmoins possible d'obtenir réparation en cas de rupture abusive.

Pour [N] [D], le premier juge ne pouvait pas se limiter à énoncer que les parties n'avaient pas de relations contractuelles sans tenir compte des obligations qui existent à la charge de celui qui rompt des relations pré-contractuelles. [N] [D] affirme que [F] [T] a voulu faire croire sans équivoque qu'il allait se porter caution. Ce dernier a notamment adressé l'ensemble des justificatifs nécessaires pour se porter garant. L'agence lui a ensuite transmis le bail et l'acte de cautionnement à compléter avant que [C] [T] ne remette le bail et une copie du cautionnement en précisant que l'original serait transmis prochainement.

[N] [D] soutient que l'original ne lui est jamais parvenu et que s'il avait su que l'intimé se désengageait du cautionnement solidaire de son fils, il n'aurait pas signé le bail avec celui-ci. Le bailleur fait valoir que [F] [T] affirme qu'il n'a pas signé l'engagement transmis mais sans expliquer, alors même qu'il a transmis tous les justificatifs nécessaires et reçu seul un courrier lui transmettant l'acte à compléter, comment l'acte aurait pu être remis par son fils sans qu'il ne soit concerté avec celui-ci. [F] [T] aurait commis une faute dans l'hypothèse où il s'est en effet détourné du contrat sans s'être expliqué ou en avoir informé le bailleur.

En tout état de cause, il estime que le débat se situe au stade des man'uvres préparatoires, à la conclusion du contrat, et sur le défaut d'information de rupture des pourparlers et non sur la signature appartenant ou non réellement à [F] [T] sur la copie du cautionnement. Pour le bailleur, la volonté de [F] [T] de se porter caution est indéniable au vu des courriels échangés.

[N] [D] fait valoir que le locataire étant étudiant, il est certain que c'est le fait que le père ait indiqué se porter caution de manière expresse qui a rendu le dossier admissible. Il ajoute qu'il est curieux qu'un document envoyé exclusivement sur la boite mail du père ait pu être ouvert et signé par son fils, ou une autre personne que lui-même, sans qu'il ne le sache. Il n'explique pas plus pourquoi il n'a pas, dans cette hypothèse, répondu au courrier. Il n'a en effet jamais informé le propriétaire ou l'agence qu'il se refusait d'être caution.

Le dispositif des écritures pour [F] [T] énonce :

Confirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions ;

Débouter [N] [D] de l'ensemble de ses demandes ;

Condamner [N] [D] à payer à [F] [T] la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

[F] [T] affirme qu'il n'a jamais été le cocontractant de [N] [D] et ne nie pas avoir proposé de se porter caution. Il soutient néanmoins qu'il ne s'est jamais engagé puisque son fils lui a déclaré que cela était inutile. Selon [F] [T], son fils n'était pas étudiant mais un ouvrier salarié de 30 ans qui n'était donc plus à sa charge.

C'était le rôle de l'agence de vérifier la solvabilité du locataire, qui est au départ redevable des loyers.

[F] [T] fait valoir que le raisonnement de [N] [D] ferait peser sur lui une obligation qui irait au-delà de celle d'une caution ayant donné son consentement et ayant remis un acte par ailleurs entaché de nullité puisque si l'acte avait été considéré comme nul, le bailleur n'aurait pas eu d'action contre [F] [T] sur les fondements invoqués aujourd'hui. En outre, c'était au bailleur de s'assurer de l'obtention d'un acte de cautionnement en bonne et due forme. L'article 2292 du code civil précise que le cautionnement ne se présume point.

[F] [T] conteste être de mauvaise foi. Il soutient que l'acte de cautionnement n'est pas de sa main comme de nombreuses différences d'écritures le démontrent. Le juge des référés a d'ailleurs comparé les écritures et l'a mis hors de cause, sans que [N] [D] n'interjette appel de cette décision.

Le fait que l'agence mandataire du bailleur justifie d'avoir envoyé par mail les documents à remplir pour le cautionnement ne démontre pas qu'il l'ait reçu ou qu'il y ait répondu favorablement. C'est au bailleur de prouver qu'il n'a pas remis à [C] [T] une copie de l'acte et non à [F] [T] de démontrer qu'il n'a pas remis à son fils le mail reçu. Il n'est pas non plus démontré que [N] [D] aurait refusé de contracter avec [C] [T] sans la caution de son père.

En toutes hypothèses, la somme réclamée par [N] [D] correspond au montant des loyers restant dus alors même que la réparation du préjudice prétendu ne peut avoir pour objet de compenser ni la perte des avantages attendus du contrat non conclu, ni la perte de chance d'obtenir ces avantages. Le bailleur ne démontre aucun préjudice spécifique distinct de la perte des loyers. Si le bailleur prétend ne pas parvenir à localiser [C] [T], il ne justifie d'aucune tentative d'exécution forcée.

MOTIFS

Il est exact, comme l'énonce [N] [D], que si dans la phase pré-contractuelle les parties sont libres de mettre fin aux pourparlers, il ne faut cependant pas que la rupture des pourparlers dégénère en abus.

La cour vient toutefois préciser qu'en cas de rupture abusive des pourparlers, la réparation du préjudice ne peut donner lieu qu'à l'octroi de dommages-intérêts au titre du préjudice d'investissement, c'est-à-dire pour l'essentiel les frais engagés pour l'opération, et relève qu'au cas d'espèce, [N] [D] sollicite la condamnation de [F] [T] à lui payer la somme de 5 000 euros, sans aucunement en justifier.

De plus, il doit être tenu compte de ce que le contrat en litige consiste en un acte de cautionnement d'un bail d'habitation. Or, le cautionnement ne se présume point. Il doit être exprès et on ne peut pas l'étendre au-delà des limites dans lesquelles il a été contracté. Enfin, il doit être également être tenu compte qu'il s'agit d'un acte sous seing privé dont une des conditions de validité est la signature de ceux qui s'obligent.

En l'espèce, outre le fait que [N] [D] ne justifie pas d'un acte de cautionnement signé de la main de [F] [T], il ne peut pas plus se prévaloir d'une faute de celui-ci, pour échouer à établir une quelconque man'uvre dolosive, la cour retenant qu'il a pris en réalité, de sa propre initiative, la décision de signer le bail d'habitation avec [C] [T] sans avoir préalablement ou concomitamment signé un acte de cautionnement.

En conséquence, à défaut de démontrer un préjudice et une faute de [F] [T], le jugement rendu le 8 septembre 2020 par le tribunal judiciaire de Montpellier sera confirmé en ce qu'il a débouté [N] [D] de ses demandes.

Le jugement sera également confirmé en ce qui concerne les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile.

[N] [D] sera condamné aux dépens de l'appel.

[N] [D], qui échoue en cause appel, sera en outre condamné à payer à [F] [T] la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire et mis à disposition au greffe ;

CONFIRME le jugement rendu le 8 septembre 2020 par le tribunal judiciaire de Montpellier, en toutes ses dispositions ;

CONDAMNE [N] [D] à payer à [F] [T] la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais non remboursables exposés en appel ;

CONDAMNE [N] [D] aux dépens de l'appel.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 5e chambre civile
Numéro d'arrêt : 20/04630
Date de la décision : 24/01/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-01-24;20.04630 ?
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