La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

19/01/2023 | FRANCE | N°18/04866

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 3e chambre civile, 19 janvier 2023, 18/04866


Grosse + copie

délivrées le

à















COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



3e chambre civile



ARRET DU 19 JANVIER 2023



Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 18/04866 - N° Portalis DBVK-V-B7C-N2RC





Décision déférée à la Cour :

Jugement du 09 AOUT 2018

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PERPIGNAN

N° RG 16/03381





APPELANT :



Monsieur [I] [M]

né le 26 Mars 1969 à [Localité

9]

de nationalité Française

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représenté par Me Pierre CASSAN de la SCP CASSAN - COURTY, avocat au barreau des PYRENEES-ORIENTALES substitué par Me Julien ROUGON, avocat au barreau de MONTPELLIER







INTIMES :...

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

3e chambre civile

ARRET DU 19 JANVIER 2023

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 18/04866 - N° Portalis DBVK-V-B7C-N2RC

Décision déférée à la Cour :

Jugement du 09 AOUT 2018

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PERPIGNAN

N° RG 16/03381

APPELANT :

Monsieur [I] [M]

né le 26 Mars 1969 à [Localité 9]

de nationalité Française

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représenté par Me Pierre CASSAN de la SCP CASSAN - COURTY, avocat au barreau des PYRENEES-ORIENTALES substitué par Me Julien ROUGON, avocat au barreau de MONTPELLIER

INTIMES :

Monsieur [O] [T]

né le 08 Décembre 1932 à [Localité 5] (66)

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Localité 7]

Représenté par Me Emilie MURCIA-VILA de la SCP GIPULO - DUPETIT - MURCIA, avocat au barreau des PYRENEES-ORIENTALES, substitué par Me Marjorie AGIER, avocat au barreau de MONTPELLIER

Madame [E] [V] épouse [T]

née le 17 Août 1940 à [Localité 7]

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Localité 7]

Représentée par Me Emilie MURCIA-VILA de la SCP GIPULO - DUPETIT - MURCIA, avocat au barreau des PYRENEES-ORIENTALES substitué par Me Marjorie AGIER, avocat au barreau de MONTPELLIER

Ordonnance de clôture du 07 Novembre 2022

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 28 NOVEMBRE 2022,en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. Fabrice DURAND, conseiller, chargé du rapport.

Ce(s) magistrat(s) a (ont) rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

M. Gilles SAINATI, président de chambre

M. Thierry CARLIER, conseiller

M. Fabrice DURAND, conseiller

Greffier lors des débats : Mme Sabine MICHEL

ARRET :

- contradictoire ;

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par M. Gilles SAINATI, président de chambre, et par Mme Sabine MICHEL, Greffier.

*

* *

EXPOSE DU LITIGE

Par promesse synallagmatique conclue le 21 avril 2015, M. [I] [M] s'est engagé à vendre à M. [O] [T] et à Mme [E] [V] épouse [T] un appartement (lots de copropriété n°26 et 27) de la Résidence Sarkis située [Adresse 1] (66) au prix de 349 000 euros.

Cet acte stipulait une condition suspensive d'obtention par l'acquéreur, dans un délai de 45 jours au plus tard, d'une ou plusieurs offres de prêts d'un montant maximum de 350 000 euros à un taux maximal de 3% la première année et sur une durée maximale de deux ans à titre de prêt relais, l'acquéreur devant justifier du dépôt de sa demande de financement dans les 15 jours suivants la signature de la promesse de vente.

La promesse stipulait également une clause pénale de 20% du prix de l'immeuble, soit 69 800 euros.

M. et Mme [T] ont versé à Me [Y], notaire à [Localité 8] intervenant en qualité de séquestre, un acompte de 15 000 euros.

M. [M] a accepté le 2 juin 2015 de reporter la date de signature de l'acte authentique de vente initialement prévue le 1er juin 2015 au 30 juin 2015.

Par acte signifié le 30 septembre 2015, le notaire Me [D] a sommé M. et Mme [T] de comparaître à son étude le 23 octobre 2015 pour signer l'acte authentique de vente.

Par courrier du 8 octobre 2015, M. et Mme [T] ont informé le notaire du refus de la BNP de leur accorder le prêt relais demandé conformément à la condition suspensive tout en lui confirmant leur volonté d'acquérir le bien suite à la vente de locaux commerciaux à [Localité 6].

Par procès-verbal établi le 23 octobre 2015, Me [D] constatait le défaut de comparution de M. et Mme [T].

Par courrier recommandé adressé le 27 octobre 2015 par leur avocat au notaire, M. et Mme [T] faisaient valoir le refus du prêt sollicité auprès de la BNP.

Par courrier de son avocat adressé le 13 juillet 2016 à M. et Mme [T], M. [M] exigeait le paiement par ses concontractants de la clause pénale.

Par acte d'huissier signifié le 12 août 2016, M. et Mme [T] ont fait assigner M. [M] devant le tribunal de grande instance de Perpignan aux fins d'obtenir la restitution de la somme de 15 000 euros séquestrée entre les mains de Me [Y].

Par jugement du 9 août 2018, le tribunal de grande instance de Perpignan a :

' ordonné la libération de la somme de 15 000 euros séquestrée entre les mains de Me [Y], notaire associé à [Localité 8], au profit de M. et Mme [T] ;

' dit que le notaire procéderait à la libération des fonds au vu du présent jugement ;

' débouté M. et Mme [T] de leur demande de dommages-intérêts ;

' dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

' condamné M. [M] aux dépens ;

' ordonné l'exécution provisoire.

Par déclaration au greffe du 1er octobre 2018, M. [M] a relevé appel de ce jugement.

Vu les dernières conclusions de M. [M] remises au greffe le 27 octobre 2022 ;

Vu les dernières conclusions de M. et Mme [T] remises au greffe le 4 novembre 2022 ;

L'ordonnance de clôture a été rendue le 7 novembre 2022.

MOTIFS DE L'ARRÊT

Sur la réalisation de la condition suspensive d'octroi du prêt,

L'article 1178 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016 dispose que « La condition est réputée accomplie lorsque c'est le débiteur, obligé sous cette condition, qui en a empêché l'accomplissement. »

La condition suspensive litigieuse est rédigée en ces termes en page 6 de la promesse de vente du 21 avril 2015 :

« Emprunts : condition suspensive relative au financement :

En outre, la présente promesse de vente est consentie et acceptée sous la condition suspensive que l'acheteur obtienne, d'ici 45 jours au plus tard, une ou plusieurs offres de prêt d'un montant maximum de 350 000 € nécessaire au financement de son acquisition à un taux d'intérêt maximal de 3 % la première année et sur une durée maximale de 2 ans à titre de prêt relais.

L'acheteur devra justifier du dépôt de sa demande de financement dans les 15 jours suivant la signature de la présente promesse. La présente condition suspensive sera considérée comme réalisée dès que l'acheteur aura reçu une ou plusieurs offres de prêt couvrant le montant global d'emprunts nécessaire au financement de son acquisition.

Elle sera également considérée comme réalisée, conformément à l'article 1178 du code civil, dans le cas où l'acheteur aurait fait obstacle à sa réalisation en raison notamment de l'absence de dépôt, du dépôt tardif ou du dépôt incomplet des dossiers de demande d'emprunt.

L'obtention ou la non obtention du décret devra être notifié par l'acheteur à l'agence Catherine Estève Immobilier un mois avant l'expiration du délai de validité de la présente promesse de vente. »

Cette clause est complétée par la suivante :

« Si l'une des conditions suspensives n'est pas réalisée, tout acompte versé sera immédiatement restitué à l'acquéreur. Chacune des parties reprendra alors entière liberté de disposition sans indemnité de part et d'autre. Toutefois, si le défaut de réalisation de l'une quelconque des conditions suspensives était imputable à l'acquéreur en raison notamment, de la faute, la négligence, la mauvaise foi, d'un abus de droit de ce dernier, le vendeur pourra demander le bénéfice des dispositions de l'article 1178 du Code civil et faire déclarer la ou les conditions suspensives réalisées et ce sans préjudice de l'attribution de dommages-intérêts.

Dans cette éventualité, l'acquéreur devra également indemniser le mandataire du préjudice causé.

En tout état de cause, en cas de contestation relative à la restitution des sommes versées au séquestre, celui-ci comme il a été indiqué au paragraphe mission du séquestre, ne pourra se dessaisir desdites sommes qu'en vertu d'un accord amiable signé des deux parties ou une décision de justice. »

L'emprunteur est tenu d'exécuter loyalement son obligation de solliciter le crédit immobilier prévu par le contrat et il lui appartient de produire la preuve de ce qu'il a effectivement sollicité un prêt immobilier conforme aux caractéristiques mentionnées dans la clause suspensive stipulée dans l'avant-contrat.

En l'espèce, la promesse de vente a été conclue sous condition suspensive d'obtention d'un prêt au taux maximum de 3%.

Aucune des trois attestations de la BNP Paribas datées du 2 octobre 2015, du 25 novembre 2015 et du 5 avril 2017 ne mentionne la date de la demande, le taux ni la durée du prêt immobilier demandé.

Il en résulte que ces documents versés aux débats ne permettent pas de constater que M. et Mme [T] ont bien déposé une demande de prêt conforme à la promesse de vente signée le 21 avril 2015.

Il appartenait à M. et Mme [T] de demander à leur banque de mentionner toutes les caractéristiques du prêt demandé conformément à l'usage habituel permettant de mettre en oeuvre les conditions suspensives de cette nature.

M. et Mme [T] étaient eux-mêmes en capacité de verser aux débats la copie de leur demande de prêt, document qui comportait nécessairement mention du taux d'intérêt du prêt demandé.

Les autres documents communiqués par les intimés tels qu'un contrat de location de parking, un courrier de médecin-conseil d'assureur, une facture d'analyses médicales, une liste de pièces justificatives établie par le banquier ou divers courriers d'ordre général n'apportent rigoureusement aucune preuve de ce que M. et Mme [T] ont bien sollicité au moins un prêt immobilier conforme aux caractéristiques précisément mentionnées dans la clause suspensive.

En l'absence de preuve d'un dépôt de demande de prêt immobilier, M. et Mme [T] ne sont pas fondés à soutenir qu'ils ont respecté la date impartie pour procéder à ce dépôt, ni que ce prêt a été refusé en raison d'une décision de refus de garantie opposée par le Crédit-Logement dont la preuve n'est pas apportée.

L'attitude fautive des acquéreurs est corroborée par l'attestation établie par M. [H] le 24 novembre 2018 qui déclare que ces derniers ont expressément refusé de demander les deux prêts que l'agent immobilier, agissant comme courtier en crédit, leur avait proposés.

Ainsi, et contrairement à l'appréciation du jugement déféré sur ce point, M. et Mme [T] n'établissent pas avoir été dans l'impossibilité de demander et d'obtenir cette information essentielle de la part de la BNP Paribas.

En conséquence, la condition suspensive d'obtention du prêt est réputée accomplie en application de l'article 1178 ancien du code civil et la vente conclue entre les parties le 21 avril 2015 est parfaite.

Le jugement déféré sera donc infirmé en ce qu'il a intégralement débouté M. [M] de toutes ses demandes en retenant que M. et Mme [T] n'avaient commis aucune faute, qu'ils avaient déposé une demande de prêt conforme à la promesse de vente signée le 21 avril 2015 et que la condition suspensive ne s'était pas réalisée.

Sur les demandes formées par M. [M] contre M. et Mme [T],

La condition suspensive étant réalisée, la vente du 21 avril 2015 est devenue parfaite entre M. [M] et M. et Mme [T].

M. et Mme [T] ayant refusé de réitérer la vente en la forme authentique, M. [M] est parfaitement fondé à solliciter la résolution pour faute de cette vente sur le fondement de l'article 1184 ancien du code civil.

La promesse de vente du 21 avril 2015 stipule la clause pénale suivante :

« Dans le cas où l'une des parties viendrait à refuser de signer l'acte authentique, elle y sera contrainte par tous les moyens et voies de droit, en supportant les frais de poursuite, de justice, tous droits et amendes et devra, en outre, payer à l'autre partie 20 % du prix principal de vente, qui sera versé à titre d'un amitié forfaitaire et de clause pénale. »

En application de cette clause, M. et Mme [T] seront donc condamnés à payer à M. [M] la somme de 69 800 euros (349 000 euros x 20%) sans qu'il soit justifié en l'espèce de réduire ce montant qui n'est pas manifestement excessif au sens de l'article 1152 alinéa 2 ancien du code civil.

M. et Mme [T] seront aussi tenus de payer à M. [M] les frais de 368,80 euros liés à la constatation de la carence des acquéreurs par procès-verbal dressé le 23 octobre 2015 par Me [D].

En application des dispositions de l'article 1153-1 ancien du code civil, ces condamnations porteront intérêt au taux légal à compter de la date du 23 octobre 2015 à laquelle M. et Mme [T] ont manifesté, par leur absence chez le notaire, leur refus définitif de respecter leur engagement contractuel.

Le paiement de ces sommes se fera en partie par la restitution par le notaire séquestre Me [Y] de l'indemnité d'immobilisation de 15 000 euros versée par M. et Mme [T] lors de la signature de la promesse de vente.

Sur les demandes accessoires,

Le jugement déféré sera infirmé en ses dispositions ayant statué sur les dépens et sur l'indemnisation des frais irrépétibles.

M. et Mme [T] succombent intégralement en appel et seront donc tenus de supporter les dépens de première instance et d'appel.

Il en résulte aussi que la demande de dommages-intérêts formée par M. et Mme [T] contre M. [M] pour résistance abusive ne pourra qu'être rejetée, ce en quoi le jugement déféré sera confirmé.

L'équité commande en outre d'allouer à M. [M] une indemnité de 5 000 euros représentant les frais non compris dans les dépens en première instance et en appel.

PAR CES MOTIFS,

La cour,

Infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions à l'exception de celle ayant débouté M. [O] [T] et Mme [E] [V] épouse [T] de leur demande de 2 000 euros de dommages-intérêts à l'encontre de M. [I] [M] pour résistance abusive ;

Statuant à nouveau sur les dispositions infirmées,

Prononce la résolution de l'acte de vente conclu le 21 avril 2015 entre M. [I] [M] et M. [O] [T] et Mme [E] [V] épouse [T] ;

Condamne solidairement M. [O] [T] et Mme [E] [V] épouse [T] à payer à M. [I] [M] :

' 69 800 euros en application de la clause pénale stipulée dans l'acte du 21 avril 2015 ;

' 368,80 euros représentant le coût du procès-verbal de carence des intimés ;

' les entiers dépens de première instance et d'appel ;

' 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais non compris dans les dépens de première instance et d'appel ;

Dit que les sommes de 69 800 euros et 368,80 euros seront assorties des intérêts au taux légal à compter du 23 octobre 2015 ;

Dit que le paiement de la somme de 69 800 euros précitée sera partiellement effectué par le versement à M. [I] [M] par le séquestre Me [Y] de la somme de 15 000 euros que ce notaire a reçue le 21 avril 2015 de M. et Mme [T] ;

Déboute les parties de leurs plus amples demandes.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 3e chambre civile
Numéro d'arrêt : 18/04866
Date de la décision : 19/01/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-01-19;18.04866 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award