Grosse + copie
délivrées le
à
COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
3e chambre civile
ARRET DU 19 JANVIER 2023
Numéro d'inscription au répertoire général :
N° RG 18/01819 - N° Portalis DBVK-V-B7C-NTPE
Décision déférée à la Cour :
Jugement du 28 FEVRIER 2018
TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE MONTPELLIER
N° RG 16/04691
APPELANTE :
SASU DOMITIANA (RCS 801 262 080) agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié au siège social,
[Adresse 4],
[Adresse 4]
[Adresse 4]
[Localité 2]
Représentée par Me Denis BERTRAND, avocat au barreau de MONTPELLIER
INTIMEE :
SAS HOTEL DE VERCHANT, venant aux droits par transformation et modification de dénomination sociale de la SCI VERCHANT, RCS de Montpellier n° 479 170 151, prise en la personne de son représentant légal en exercice, domicilié ès qualités au siège social
[Adresse 3]
[Adresse 3]
[Localité 1]
Représentée par Me Frédéric DABIENS de l'AARPI DABIENS, KALCZYNSKI, avocat au barreau de MONTPELLIER
Ordonnance de clôture du 07 Novembre 2022
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 28 NOVEMBRE 2022,en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. Fabrice DURAND, conseiller, chargé du rapport.
Ce(s) magistrat(s) a (ont) rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
M. Gilles SAINATI, président de chambre
M. Thierry CARLIER, conseiller
M. Fabrice DURAND, conseiller
Greffier lors des débats : Mme Sabine MICHEL
ARRET :
- contradictoire ;
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;
- signé par M. Gilles SAINATI, président de chambre, et par Mme Sabine MICHEL, greffier.
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EXPOSE DU LITIGE
Courant 2014, la SARL Domitiana a conclu avec la SCI Verchant (devenue la SASU Hôtel de Verchant) divers contrats d'entreprise à l'origine d'un litige entre les parties concernant le paiement du prix des travaux réalisés sur le Domaine de Verchant à Castelnau-le-Lez (34).
La SARL Domitiana a réclamé à la SCI Verchant au mois d'août 2015 la somme de 498 153,30 euros en paiement du solde de ses marchés tandis que cette dernière ne reconnaissait le 7 juillet 2015 devoir au maître d'ouvrage qu'une somme de 398 153,30 euros.
Aux termes d'un protocole transactionnel conclu le 28 août 2015, les parties ont convenu de solder le marché par le paiement par la SCI Verchant à la SARL Domitiana de la somme de 378 153,30 euros.
Cet accord a été intégralement exécuté après paiement par la SCI Verchant de 150 000 euros par lettre de change à échéance du 15 septembre 2015 et règlement du solde au moyen d'un chèque et d'une autre lettre de change.
Par acte d'huissier signifié le 22 juillet 2016, la SARL Domitiana a fait assigner la SCI Verchant devant le tribunal de grande instance de Montpellier aux fins de voir annuler la transaction passée le 28 août 2015 et condamner la SCI Verchant à lui verser la somme de 120 000 euros et 96 960,24 euros en paiement du solde des marchés de travaux liant les parties, outre 10 000 euros de dommages-intérêts pour résistance abusive et 5 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile.
Par jugement du 28 février 2018, le tribunal de grande instance de Montpellier a :
' débouté la SARL Domitiana de l'ensemble de ses demandes ;
' débouté la SCI Verchant de sa demande reconventionnelle de dommages-intérêts pour violation de la confidentialité ;
' condamné la SARL Domitiana à verser à la SCI Verchant la somme de 2 900 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile ;
' condamné la SARL Domitiana aux entiers dépens.
Par déclaration au greffe du 6 avril 2018, la SARL Domitiana a relevé appel de ce jugement contre la SCI Verchant.
Vu les dernières conclusions de la SARL Domitiana remises au greffe le 3 janvier 2019 ;
Vu les dernières conclusions de la SCI Verchant devenue SASU Hôtel de Verchant remises au greffe le 14 septembre 2022 ;
L'ordonnance de clôture a été rendue le 7 novembre 2022.
MOTIFS DE L'ARRÊT
Sur la validité de l'accord transactionnel du 28 août 2015,
L'article 2044 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n°2016-1547 du 18 novembre 2016 applicable en l'espèce, dispose :
« La transaction est un contrat par lequel les parties terminent une contestation née, ou préviennent une contestation à naître. Ce contrat doit être rédigé par écrit. »
Une jurisprudence constante et établie antérieurement à la loi du 18 novembre 2016 retient que la validité d'une transaction implique l'existence de concessions réciproques entre les parties.
En l'espèce, le contrat intitulé « protocole transactionnel » signé par les parties le 28 août 2015 comporte les stipulations suivantes.
La SARL Domitiana a accepté de déduire de son décompte définitif de 498 153,30 euros TTC un montant de 120 000 euros TTC pour ramener le montant de sa créance à la somme de 378 153,30 euros TTC.
Elle s'est aussi engagée à faire son affaire personnelle de toute demande ou réclamation d'entreprise tierce au protocole, sous-traitante ou non, et notamment des demandes déjà formées par la SARL Sotraloc à son encontre.
En contrepartie de ces concessions accordées par l'entreprise, la SCI Verchant a renoncé à « toute demande, réclamation, prétention, droit, instance et action, présent ou passé, né ou à naître, qu'elle qu'en soit la cause ou le fondement, en relation directe ou indirecte avec le litige objet du présent protocole ».
Ainsi que l'a exactement relevé le jugement déféré par des motifs que la cour adopte expressément, la SCI Verchant a notamment renoncé à toute demande visant à « valoriser le travail effectué par un dénommé [S] [Z], rémunéré par la SCI Verchant,et qui avait supervisé, selon les propres dires du gérant de la SARL, une grande partie des travaux réalisés par elle pendant toute la durée du chantier (9 mois), ce que la SARL ne conteste pas. Or ce travail aurait pu faire l'objet d'une revendication ultérieure pour contester le montant réclamé en l'amputant du montant de la rémunération dudit [Z] sur 9 mois, ce qui a été évité du fait du protocole. »
L'existence de ce litige concernant l'intervention de [S] [Z] est non seulement attesté par le courrier du 11 juin 2015 mais également par le courrier du 7 août 2015 annexé au protocole litigieux.
La SARL Domitiana n'est pas fondée à contester l'existence de cette concession de la part de la SCI Verchant en affirmant simplement sans aucune démonstration « qu'une éventuelle action de la SCI Verchant pour amputer les factures émises par le montant du prix du salaire de ce Mr n'aurait aucun fondement légal et serait complètement vouée à l'échec devant un quelconque tribunal ».
Outre les demandes afférentes à l'intervention de [S] [Z], il ressort du courrier adressé le 11 juin 2015 par la SARL Domitiana à la SCI Verchant que cette dernière a aussi renoncé à toute revendication liée aux travaux supplémentaires consécutifs à la modification du projet et aux exigences de la commission de sécurité en cours de chantier.
Ainsi que l'a exactement relevé le jugement déféré, la SCI Verchant a aussi renoncé à contester le montant et l'exigibilité des factures établies par la SARL Domitiana sur le fondement de devis non signés par le maître d'ouvrage.
Enfin, la SCI Verchant s'est engagée à payer sa dette selon les instruments et le calendrier précis suivants :
' 150 000 euros payés par lettre de change tirée sur la banque Crédit Agricole Languedoc Roussillon émise le 7 août 2015 à échéance du 15 septembre 2015 ;
' 60 000 euros payés par chèque à l'ordre de la SARL Domitiana ;
' 168 153,30 euros payés par lettre de change tirée sur la banque Crédit Agricole Languedoc Roussillon émise le 28 août 2015 à échéance du 10 septembre 2015.
Il résulte donc des différentes stipulations du protocole signé le 28 août 2015 précédemment rappelées que la SARL Domitiana et la SCI Verchant se sont bien accordées des concessions réciproques en vue du règlement définitif de leur différend.
Contrairement à la position soutenue par la SARL Domitiana dans ses écritures, la diminution du solde des travaux restant à payer que cette dernière a consenti à hauteur de 120 000 euros n'a donc pas été octroyée sans contrepartie de la part de la SCI Verchant.
Le contrat signé entre les parties le 28 août 2015 constitue donc une transaction conforme aux dispositions de l'article 2044 du code civil.
Il n'est par ailleurs pas contesté par les parties que cette transaction a été parfaitement exécutée.
En conséquence, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a rejeté la demandes d'annulation de la transaction du 28 août 2015.
Sur les demandes en paiement de travaux formées par la SARL Domitiana,
La SARL Domitiana sollicite la condamnation de la SCI Verchant à lui payer :
' 29 015,50 euros HT (quatre factures n°2015.03.01 et 2015.03.02 du 31 mars 2015 et factures n° 2015.04.01 et 2015.04.02 du 30 avril 2015 communiquées en pièce n°9) ;
' et 51 625,53 euros HT correspondant à un rabais accordé sur un montant de 168 388,03 euros HT par M. [T] ancien dirigeant de la SARL Domitiana (pièce n°3).
Ainsi qu'a pu le faire le premier juge avant elle, la cour constate que tous les devis mentionnés sur la pièces n°3 (mentionnant un rabais total de 51 625,53 euros sur le prix de ces travaux) figurent sur la liste figurant en annexe n°1 de la transaction signée le 28 août 2015. Ces travaux entrent donc dans le champ d'application de la transaction, ce qui empêche la SARL Domitiana de former de nouvelles demandes sur le fondement de ces mêmes devis.
Les quatre autres factures datées du 31 mars et du 30 avril 2015 ne figurent pas sur l'annexe n°1 du protocole du 28 août 2015. Toutefois, la SARL Domitiana n'apporte pas la preuve de ce qu'elle a effectué ces travaux au bénéfice de la SCI Verchant qui le conteste expressément dans ses écritures.
En effet, le constat d'huissier versé aux débats (sans tenir compte des ajouts manuscrits qui ont été apposés par un tiers non identifié) ne comporte pas les éléments nécessaires à l'identification des factures afférentes aux travaux décrits par l'huissier.
Les courriers du 11 juin et du 10 juillet 2015 de la SARL Domitiana demandant la réception d'ouvrages, de même que le courriel en réponse du 5 août 2015 de la SCI Verchant, sont tout aussi insuffisants pour établir la réalisation des travaux précisément facturés les 31 mars et 30 avril 2015.
En conséquence, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a rejeté ces demandes.
Sur l'existence d'une violation de l'obligation de confidentialité,
Aux termes de l'article 4 de la transaction du 28 août 2015, les parties se sont engagées à conserver une totale confidentialité de la transaction intervenue dans son principe et dans ses modalités.
La SASU Hôtel de Verchant forme une demande reconventionnelle de 15 000 euros de dommages-intérêts contre la SARL Domitiana à qui elle reproche d'avoir violé cet engagement de confidentialité.
Ainsi que l'a exactement apprécié le jugement déféré, le simple fait de la part de la SARL Domitiana d'avoir engagé une action en justice et d'avoir versé aux débats le contrat litigieux ne constitue pas une atteinte à l'obligation de confidentialité stipulée par l'article 4 de ce contrat.
En effet, ce contrat transactionnel n'a jamais été communiqué à des tiers et cette obligation contractuelle de confidentialité ne saurait avoir pour effet de priver la SARL Domitiana de son droit d'ester en justice et de contester cet accord devant un tribunal.
En conséquence, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a rejeté la demande reconventionnelle de 15 000 euros de dommages-intérêts formée par la SASU Hôtel de Verchant contre la SARL Domitiana.
Sur les demandes accessoires,
Le jugement déféré sera également confirmé en ses dispositions ayant mis à la charge de la SARL Domitiana les entiers dépens ainsi qu'une indemnité de 2 900 euros représentant les frais non compris dans les dépens.
La SARL Domitiana succombe intégralement en appel au principal et sera donc tenue de supporter les entiers dépens d'appel.
L'équité commande en outre de la condamner à payer à la SASU Hôtel de Verchant une indemnité de 3 000 euros représentant les frais de l'instance d'appel non compris dans les dépens.
PAR CES MOTIFS,
La cour,
Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Condamne la SARL Domitiana à supporter les entiers dépens d'appel avec application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile au profit de Me Frédéric Dabiens ;
Condamne la SARL Domitiana à payer à la SASU Hôtel de Verchant une indemnité de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais engagés en cause d'appel ;
Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.
Le greffier, Le président,