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17/01/2023 | FRANCE | N°20/02343

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 5e chambre civile, 17 janvier 2023, 20/02343


Grosse + copie

délivrées le

à































COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



5e chambre civile



ARRET DU 17 JANVIER 2023



Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 20/02343 - N° Portalis DBVK-V-B7E-OTDA





Décision déférée à la Cour : Jugement du 25 FEVRIER 2020

Tribunal judiciaire de PERPIGNAN

N° RG 18/04456





APPELANTE :



S.A.R.

L. PARADISE AVENTURE immatriculée au RCS de Perpignan num 500658 893 00010 prise en la personne de son gérant en exercice domicilié ès qualités au siège social sis

Espace Loisirs

[Adresse 5]

[Localité 4]

Représentée par Me Fanny LAPORTE de la SELARL LEXAVOUE MONTPELLI...

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

5e chambre civile

ARRET DU 17 JANVIER 2023

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 20/02343 - N° Portalis DBVK-V-B7E-OTDA

Décision déférée à la Cour : Jugement du 25 FEVRIER 2020

Tribunal judiciaire de PERPIGNAN

N° RG 18/04456

APPELANTE :

S.A.R.L. PARADISE AVENTURE immatriculée au RCS de Perpignan num 500658 893 00010 prise en la personne de son gérant en exercice domicilié ès qualités au siège social sis

Espace Loisirs

[Adresse 5]

[Localité 4]

Représentée par Me Fanny LAPORTE de la SELARL LEXAVOUE MONTPELLIER GARRIGUE, GARRIGUE, LAPORTE, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant

assistée de Me Fanny LAPORTE, avocat au barreau de MONTPELLIER substituant Me Julien ARPAILLANGE, avocat au barreau des PYRENEES-ORIENTALES, avocat plaidant

INTIMES :

Monsieur [P] [P] [S]

né le 17 Février 1951 à [Localité 7]-

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représenté par Me Gérard DEPLANQUE de la SELARL DEPLANQUE, avocat au barreau des PYRENEES-ORIENTALES, avocat postulant et plaidant

S.A. ALLIANZ IARD

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 6]

Représentée par Me Yann GARRIGUE de la SELARL LEXAVOUE MONTPELLIER GARRIGUE, GARRIGUE, LAPORTE, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant

assistée de Me Fanny LAPORTE, avocat au barreau de MONTPELLIER substituant Me Julien ARPAILLANGE, avocat au barreau des PYRENEES-ORIENTALES, avocat plaidant

Ordonnance de clôture du 26 Octobre 2022

COMPOSITION DE LA COUR :

En application de l'article 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 16 NOVEMBRE 2022, en audience publique, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par l'article 804 du même code, devant la cour composée de :

Monsieur Philippe GAILLARD, Président de chambre

Madame Nathalie AZOUARD, Conseiller

M. Emmanuel GARCIA, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Sylvie SABATON

ARRET :

- contradictoire

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par Monsieur Philippe GAILLARD, Président de chambre, et par Madame Sylvie SABATON, greffier.

*

* *

Le 7 juin 2017, [P] [S] a utilisé un toboggan avec tremplin terminal dans le parc aquatique Drop-in propriété de la SARL Paradise Aventure.

Allongé sur le ventre les bras vers l'avant, projeté en l'air par le tremplin, il est retombé dans l'eau. Selon ses dires ses mains puis sa tête ont heurté violemment le fond du bassin de réception.

Le service des urgences du centre hospitalier a décelé des fractures de cervicales justifiant le port d'un corset pendant plusieurs mois.

La société Paradise Aventure et son assureur Allianz Iard reconnaissent une obligation de sécurité de moyen, mais contestent la responsabilité contractuelle au motif que la victime aurait utilisé le toboggan dans un état de santé incompatible, et n'aurait pas respecté les consignes sur la position du corps lors de la rentrée dans l'eau.

Par acte du 22 novembre et 13 décembre 2018, [P] [S] a fait assigner la SARL Paradise Aventure et la SA Allianz Iard.

Le jugement rendu le 25 février 2020 par le tribunal judiciaire de Perpignan énonce dans son dispositif :

Déclare la société Paradise Aventure entièrement responsable de l'accident.

Dit que la société Allianz Iard assureur en responsabilité civile de Paradise Aventure est tenue de garantir les conséquences du dommage.

Ordonne une expertise médicale du préjudice corporel de la victime (mission détaillée dans le dispositif).

Condamne solidairement la société Paradise Aventure et son assureur Allianz Iard à verser à [P] [S] la somme de 8000 € à titre de provision.

Le jugement expose pour retenir la responsabilité contractuelle qu'un certificat médical daté du 31 août 2017 indique que la victime ne présentait pas le 7 juin lors de la descente du toboggan une contre-indication cliniquement décelable à cette pratique, l'opération en 1996 d'une hernie discale ne constituant plus en 2017 une contre-indication, que les panneaux d'affichage du règlement intérieur ne font référence qu'à des pathologies actuelles.

Elle expose qu'il importe peu que la victime ait ou non plongée la tête la première, en infraction ou non avec les règles d'utilisation du toboggan, que le simple fait d'avoir heurté le fond du bassin de réception avec la tête démontre le manquement à l'obligation de sécurité, alors que l'utilisateur n'a plus la maîtrise suffisante de sa position lorsqu'il est projeté en l'air par le tremplin terminal, qu'il appartenait à l'exploitant de veiller à une profondeur suffisante du bassin de réception.

Il indique que l'expertise médicale sera limitée par la limite des prétentions de la victime à la détermination de son incapacité permanente partielle, de son pretium doloris, de son incapacité temporaire de travail, de son préjudice d'agrément et de son préjudice de jouissance.

La SARL Paradise Aventure a relevé appel du jugement par déclaration au greffe du 12 juin 2020.

La clôture a été prononcée par ordonnance du 26 octobre 2022.

Les dernières écritures pour la SARL Paradise Aventure et la SA Allianz Iard ont été déposées le 7 septembre 2020.

Les dernières écritures pour [P] [S] ont été déposées le 2 octobre 2020.

Le dispositif des écritures pour la SARL Paradise Aventure et la SA Allianz Iard énonce en termes de prétention :

In limine litis décliner la compétence de la cour au bénéfice du conseiller de la mise en état pour statuer sur l'irrecevabilité de l'appel.

Juger recevable l'appel en raison des prorogations de délai adoptées par les mesures sanitaires relatives à la COVID19.

Infirmer le jugement déféré.

Débouter [P] [S] de ses prétentions en raison des fautes commises.

Condamner [P] [S] à payer à la SARL Paradise Aventure et à la SA Allianz Iard la somme de 5000 € chacune en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamner [P] [S] aux dépens.

Le propriétaire du parc d'activités et son assureur exposent que l'appel a été régulièrement interjeté le 12 juin 2020, dans les délais prorogés par la loi en l'état de la période de confinement.

Ils soutiennent que la difficulté soulevée par les premières écritures en appel pour [P] [S] d'un appel tardif enregistré seulement le 15 juin 2020 après la signification du jugement le 12 mars 2020 relevait de la compétence exclusive du conseiller la mise en état, que par ailleurs l'ordonnance du 25 mars 2020 relative à la prorogation de délai pendant la période d'urgence sanitaire avait prorogé le délai d'appel d'un mois après l'expiration de la période d'urgence sanitaire le 23 juin 2020.

Ils soutiennent sur le fond que le certificat médical produit par la victime ne constitue pas une expertise médicale sur la compatibilité de son état de santé avec l'activité, alors que l'expertise judiciaire ordonnée ne prévoit pas dans les chefs de mission la prise en considération d'éventuels antécédents.

Ils soutiennent que tout était mis en 'uvre pour satisfaire l'obligation de sécurité mais que le comportement de la victime est bien à l'origine du sinistre, en ce qu'elle n'a pas respecté les consignes de se tenir droit de manière à ce que les pieds soient les premiers à toucher la surface de l'eau.

Pour cette activité, le rôle nécessairement actif de l'utilisateur limite à une obligation de moyens de l'organisateur. L'exploitation avait reçu un avis favorable d'ouverture au public le 2 juin 2017. Le règlement intérieur affiché à l'entrée du parc prévient les visiteurs de l'obligation d'une bonne condition physique sans pathologie incompatible avec la pratique des activités, avec la mention particulière des pathologies cervicales, dorsales ou lombaires, et de demander des conseils pour concilier son état de santé, de l'obligation de consulter et respecter la signalétique à l'entrée de chaque activité alors que [P] [S] déclaré avoir été opérée d'une hernie discale.

La signalétique de l'activité précise que le pratiquant doit être actif en sortie de vol pour essayer d'atterrir les pieds en premier dans l'eau avec les membres collés au corps. L'exploitant du restaurant atteste qu'il a vu [P] [S] plonger la tête la première.

Un employé intérimaire indique qu'un client lui a signalé que la victime l'avait abordé au bord du bassin en train de filmer après lui avoir déclaré avoir eu des problèmes avec l'encadrement et la sécurité.

L'exploitant et son assureur produisent l'expertise des sociétés spécialisées dans ces infrastructures qui attestent de la conformité du parc Drop-in. Ils soulignent qu'aucun autre incident n'est survenu depuis l'ouverture du parc, et les avis particulièrement positifs du site Internet TripAdvisor.

Le dispositif des écritures pour [P] [S] énonce :

Dire que les deux motivations de l'appel, nullité et réformation du jugement, sont incompatibles, et juger en conséquence nulles les prétentions de l'appelant.

Dire que l'appel est tardif plus d'un mois après la signification du jugement le 12 mars 2020.

Confirmer sur le fond le jugement du 25 février 2020.

Condamner la société Paradise Aventure et la compagnie d'assurances SA Allianz Iard à payer la somme de 5000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, et solidairement aux dépens.

[P] [S] soutient que l'appel enregistré le 15 juin 2020 est tardif au regard de la signification du jugement le 12 mars 2020.

Il soutient que la déclaration d'appel ne pouvait pas invoquer à la fois la nullité ou à défaut la réformation du jugement.

Il soutient que la profondeur de l'eau du bassin de réception de 2 m ne respectait pas les conditions de l'arrêté du 14 septembre 2004 d'une réception « dans une zone où la profondeur d'eau est adaptée au type de chute et à sa hauteur ».

Il soutient que la jurisprudence considère que la structure même du toboggan aquatique implique que l'utilisateur ne peut avoir aucun rôle actif dans sa trajectoire ou sa vitesse, ce qui suppose une obligation contractuelle de résultat, que l'exploitant du parc a manqué même à une obligation de sécurité de moyen.

MOTIFS

Sur les incidents de procédure

À titre liminaire, la prétention de faire déclarer l'appel irrecevable relève de la compétence exclusive et préalable du conseiller de la mise en état qui n'a pas été saisi dans l'espèce par la SARL Paradise Aventure et son assureur, sans qu'il soit prétendu que l'incident soit survenu ou révélé postérieurement au dessaisissement du juge de la mise en état par l'ordonnance de clôture.

La cour constate son incompétence sur cette prétention de [P] [S].

La prétention au dispositif des écritures de [P] [S] de faire déclarer nulles les prétentions de l'appelant en raison d'une incompatibilité entre deux motivations de l'appel, de nullité et réformation du jugement, est sans objet utile, alors que le dispositif des écritures de l'appelant qui détermine l'objet du litige soumis à la cour ne porte pas mention d'une demande de nullité du jugement, et que la recevabilité des motivations de la déclaration d'appel relèverait également de la compétence exclusive du conseiller de la mise en état dessaisi depuis la clôture des débats.

Sur le fond du litige

La cour confirme les motifs pertinents du premier juge, qu'elle adopte et auxquels elle renvoie les parties pour la lecture complète, alors notamment que la SARL Paradise Aventure et son assureur n'apportent aucun élément de preuve que [P] [S] ait enfreint délibérément des consignes de sécurité dans l'utilisation du toboggan, qu'il ne souffrait pas d'une pathologie actuelle, qu'il ne peut être exigé de l'utilisateur projeté en l'air une nécessaire maîtrise de sa position corporelle avant d'atterrir dans le bassin de réception, alors également qu'il n'est ni démontré ni prétendu une position de départ non conforme aux consignes.

La cour retient dans ces conditions de vitesse acquise et de projection de l'utilisateur en l'air une impossibilité évidente d'exigence d'un rôle actif conforme de l'usager à la réception. Cette impossibilité de maîtrise absolue confère à l'exploitant une obligation contractuelle de résultat pour laquelle il a failli.

La conformité validée des structures n'est pas de nature à exonérer l'exploitant de sa responsabilité contractuelle de résultat sans avoir démontré une faute de l'usager, qui n'est pas caractérisée par une mauvaise réception accidentelle.

La cour confirme en conséquence le jugement déféré, et renvoie sur le fond du litige l'affaire à la juridiction de première instance pour statuer sur l'expertise ordonnée des préjudices de la victime.

Il n'est pas inéquitable de laisser à la charge de l'appelant une part des frais non remboursables exposés par [P] [S], à hauteur de 4000 €.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire, par mise à disposition au greffe ;

Confirme le jugement rendu le 25 février 2020 par le tribunal judiciaire de Perpignan ;

Renvoie l'affaire et les parties devant le tribunal judiciaire de Perpignan pour qu'il soit statué sur les préjudices après le dépôt du rapport d'expertise judiciaire ;

Condamne la SARL Paradise Aventure in solidum avec la SA Allianz Iard à payer à [P] [S] une somme de 4000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la SARL Paradise Aventure in solidum avec la SA Allianz Iard aux dépens de l'appel.

Le greffier Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 5e chambre civile
Numéro d'arrêt : 20/02343
Date de la décision : 17/01/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-01-17;20.02343 ?
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