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délivrées le
à
COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
3e chambre civile
ARRET DU 12 JANVIER 2023
Numéro d'inscription au répertoire général :
N° RG 18/03778 - N° Portalis DBVK-V-B7C-NYDR
Décision déférée à la Cour :
Décision du 05 juillet 2018
TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE NARBONNE
N° RG 16/00712
APPELANTS :
M. [K] [G]
né le 06 octobre 1943 à CARDO (20200)
de nationalité française
[Adresse 3]
[Localité 2]
et
Mme [M] [F] épouse [G]
née le 23 octobre 1943 à [Localité 6] (83)
de nationalité française
[Adresse 3]
[Localité 2]
Représentés par Me Alexandre SALVIGNOL de la SARL SALVIGNOL ET ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER, substitué à l'audience par Me Marjorie AGIER, avocat au barreau de MONTPELLIER,
et assistés à l'instance par Me Malika RAYNAL, avocat au barreau des PYRENEES-ORIENTALES
INTIMES :
M. [K] [B]
oné le 02 Octobre 1945 à [Localité 8]
de nationalité française
[Adresse 1]
[Localité 2]
et
Mme [U] [H] épouse [B]
née le 30 Septembre 1947 à [Localité 7]
de nationalité française
[Adresse 1]
[Localité 2]
Représentés par Me Robert MARY de la SCP GOUIRY/MARY/CALVET/BENET, avocat au barreau de NARBONNE
Ordonnance de clôture du 12 octobre 2022
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 02 novembre 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Brigitte DEVILLE, Magistrate honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
M. Gilles SAINATI, président de chambre
M. Thierry CARLIER, conseiller
Mme Brigitte DEVILLE, Magistrate honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles
Greffier lors des débats : Mme Camille MOLINA
ARRET :
- contradictoire ;
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;
- signé par M. Gilles SAINATI, président de chambre, et par Mme Camille MOLINA, greffière.
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* *
FAITS ET PROCEDURE
[M] [F] épouse [G] est propriétaire d'une parcelle cadastrée [Cadastre 4], [Adresse 9] pour en avoir acquis la nue-propriété de son père par acte notarié du 24 décembre 1972 et l'usufruit par acte notarié du 4 octobre 1996.
[K] [B] et son épouse née [U] [H] sont propriétaires de la parcelle voisine cadastrée [Cadastre 5].
[M] [G] s'est plaint de ce que sa clôture non mitoyenne depuis plus de 30 ans a été arrachée par les époux [B] au mois de janvier 2014 pour réaliser les travaux de construction d'un garage.
Les époux [B] ont fait établir un plan de bornage par un géomètre-expert mais celui-ci a été refusé par [M] [G] qui a été assignée, par exploit du 14 avril 2014, devant le tribunal d'instance de Narbonne aux fins de bornage judiciaire.
Par jugement du 11 mai 2015 ce tribunal a ordonné une mesure d'expertise afin de déterminer la limite séparative des fonds.
L'expert a déposé son rapport le 28 mars 2013 et, par exploit du 30 mai 2016, [M] [G] et [K] [G] ont assigné les époux [B] devant le tribunal de grande instance de Narbonne afin de voir constater la prescription acquisitive trentenaire à leur profit de la clôture arborée.
Par jugement du 5 juillet 2018 ce tribunal a :
- débouté [M] [G] et [K] [G] de l'ensemble de leurs demandes ;
- dit que la limite de la propriété de [M] [G], cadastrée [Cadastre 4], et de celle des époux [B], cadastrée [Cadastre 5], doit être établie conformément aux limites retenues en page 13 du rapport de l'expert [J] du 28 mars 2016 et matérialisée par la ligne A-B figurée sur le plan en annexe ;
- condamné [M] [G] à payer aux époux [B], pris ensemble, la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire ;
- condamné [M] [G] et [K] [G] aux dépens.
[K] [G] et [M] [G] ont relevé appel de cette décision le 20 juillet 2018.
Vu les conclusions des appelants remises au greffe le 4 juin 2019 ;
Vu les conclusions des époux [B] remises au greffe le 3 janvier 2019 ;
MOTIFS
Sur la recevabilité de la demande des époux [G] relative à l'acquisition de la propriété de la parcelle supportant la clôture arborée,
Les époux [G] ont assigné les époux [B] devant le tribunal de grande instance de Narbonne le 30 mai 2016 afin de se voir reconnaître la propriété, par le jeu de la prescription trentenaire, de la clôture arborée de leur propriété.
Dans leurs dernières conclusions d'appelants ils demandent que leur soit reconnue la propriété exclusive de la clôture non mitoyenne en fer et arborée et de la parcelle qui la supporte.
Les intimés concluent à l'irrecevabilité de cette demande nouvelle.
Un arbre appartient au propriétaire du sol sur lequel il est implanté. Ainsi les arbres constituant la clôture dont la propriété est revendiquée par les époux [B] appartiennent au propriétaire du sol les supportant.
En conséquence, la demande de reconnaissance de la propriété de la parcelle sur laquelle est implantée la couture arborée est le complément nécessaire de la demande de reconnaissance de la propriété de la clôture.
De même les conclusions relatives à la clôture en fer est l'accessoire de la demande d'attribution de la propriété de la clôture arborée soutenue par ce dispositif métallique.
En conséquence, en application de l'article 566 du code de procédure civile, les demandes des époux [G] sont recevables.
Sur le fond,
La catégorie des immeubles par nature comprend tous les végétaux attachés au sol tant qu'ils n'ont pas été coupés.
Par ailleurs les végétaux appartiennent au propriétaire du sol sur lequel ils sont implantés.
Les intimés ne peuvent arguer du fait qu'une partie des végétaux n'adhérent plus au sol dans la mesure où ils ont, eux-mêmes, détruit partie de cette clôture arborée ce qui est la cause de cette instance initiée par les époux [G].
Il importe donc de déterminer le propriétaire du sol sur lequel sont implantés les végétaux supportés par des piquets métalliques.
Le géomètre-expert [Y] [J] a été désigné en qualité d'expert par le tribunal d'instance de Narbonne afin de déterminer la limite séparative des fonds respectifs des parties et de rechercher tous les indices permettant d'établir les caractères et la durée de la possession invoquée.
Il écarte un plan dressé en 1959 non signé par un géomètre-expert et qui ne constitue pas un plan de bornage dans la mesure où la description des limites extérieures est imprécise.
Il a examiné les titres des parties et a constaté l'existence de la clôture datant de plus de 30 années mais qui cependant n'est pas droite et semble avoir été déviée ou modifiée en fonction de la végétation plantée en limite. En effet sur les plans dressés par le géomètre-expert [L] en 1974 la clôture est figurée droite tandis que sur le plan du même cabinet dressé en 2013 elle n'est plus droite mais déviée vers l'Est.
Le plan de 1974, qui n'est pas un plan de bornage, détermine cependant les éléments de limites apparentes de la propriété [G]. L'expert judiciaire propose dans son plan, en annexe 2, une limite séparative AB en fonction des titres de propriété, du plan de 1974 et des signes de possession constatés, soit une ligne droite matérialisée par un point implanté sur un mur en limite de l'avenue du Languedoc et un angle de mur existant.
Les appelants excluent une déviation de la clôture qui est retenue par des piquets métalliques et fixée sur un muret ainsi que constaté par huissier de justice le 11 avril 2019. En effet ce constat note l'existence d'un soubassement de pierres surmonté d'un grillage vétuste tenu par des piquets en fer.
Cependant le plan dressé en 2013 démontre que la clôture n'est plus droite ainsi qu'elle l'était sur le plan établi en 1974. L'époque à laquelle la clôture arborée a été modifiée ne peut être déterminée.
Le constat d'huissier dressé le 11 avril 2019 ne permet pas d'affirmer que les végétaux constituant la clôture, immeuble par nature, ont toujours été implantés de manière rectiligne et se sont toujours appuyés sur le grillage vétuste retenu par de vieux piquets en fer ou en bois. D'ailleurs le constat d' huissier du 11 avril 2019 ne permet pas à la cour de constater que les piquets en fer vétustes étaient fixés de manière durable au sol ou au sous-sol. Le soubassement de pierre ne suivait pas une ligne précise puisque l'huissier a relevé que ces pierres étaient amoncelées les unes sur les autres.
Or la possession doit avoir été exercée dans tous les moments pendant 30 ans, sans interruption rendant cette possession discontinue. Tel n'est pas le cas en l'espèce, ainsi qu'il a été dit plus haut, et ainsi, la nécessité de la continuité de la possession ne peut être retenue à propos de cette clôture arborée qui s'est modifiée au fil du temps.
Les appelants soutiennent qu'à la lecture des titres de propriété, l'hypothèse du géomètre-expert leur fait perdre plus de 7 m² de surface. L'expert judiciaire rappelle à juste titre que les actes mentionnent des contenances et non pas des surfaces. Or la contenance cadastrale n'a qu'une valeur indicative et un écart peut-être constaté par rapport aux superficies réelles.
Les époux [G] qui ne rapportent pas la preuve d'une possession conforme de la clôture arborée, en fer, et de la parcelle qui la supporte ne peuvent prétendre à leur acquisition par prescription trentenaire.
A titre subsidiaire, les appelants revendiquent l'application de la prescription abrégée de 10 ans en affirmant qu'ils bénéficient d'un juste titre et qu'ils sont de bonne foi.
Leur titre d' acquisition du 4 octobre 1996 désigne une parcelle de terre et une petite maison d'habitation avec mention d'une contenance. Or contrairement à une surface, une contenance, appelée aussi contenance cadastrale, n'a pas de valeur juridique puisqu'elle figure sur le cadastre qui est un document à caractère fiscal destiné à définir l'assiette de l'impôt foncier et qui ne peut donc valoir titre de propriété.
L'acte notarié du 4 octobre 1996 ne constitue donc pas un juste titre permettant aux époux [G] de bénéficier de la prescription abrégée de 10 ans.
Les demandes des appelants doivent être écartées comme mal fondées et le jugement entrepris doit être confirmé en ce qu'il a dit que la limite des propriétés respectives des parties devait être établie conformément au plan de l'expert judiciaire [J] figurant en annexe 2 de son rapport.
PAR CES MOTIFS,
La cour,
Déclare recevable la demande des époux [G] relative à l'acquisition de la propriété de la clôture en fer et de la parcelle supportant la clôture arborée ;
Confirme le jugement en toutes ses dispositions ;
Condamne les époux [G] à payer aux époux [B] la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais engagés en cause d'appel ;
Condamne les époux [G] aux dépens de l'appel.
La greffière, Le président,