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10/01/2023 | FRANCE | N°20/00892

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 5e chambre civile, 10 janvier 2023, 20/00892


Grosse + copie

délivrées le

à















COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



5e chambre civile



ARRET DU 10 JANVIER 2023



Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 20/00892 - N° Portalis DBVK-V-B7E-OQOQ





Décision déférée à la Cour :

Jugement du 17 DECEMBRE 2019

TRIBUNAL D'INSTANCE DE MONTPELLIER

N° RG 1119000649





APPELANTS :



Monsieur [J] [U]

né le 10 Juin 1969 à [LocalitÃ

© 13] ([Localité 13])

[Adresse 2]

[Localité 6]

Représenté par Me Jean Marc NGUYEN-PHUNG de la SELARL SELARL PHUNG 3P, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant

assisté de Me Romain BOULET, avocat au barreau de MONTPELLIER, avo...

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

5e chambre civile

ARRET DU 10 JANVIER 2023

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 20/00892 - N° Portalis DBVK-V-B7E-OQOQ

Décision déférée à la Cour :

Jugement du 17 DECEMBRE 2019

TRIBUNAL D'INSTANCE DE MONTPELLIER

N° RG 1119000649

APPELANTS :

Monsieur [J] [U]

né le 10 Juin 1969 à [Localité 13] ([Localité 13])

[Adresse 2]

[Localité 6]

Représenté par Me Jean Marc NGUYEN-PHUNG de la SELARL SELARL PHUNG 3P, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant

assisté de Me Romain BOULET, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat plaidant

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2020/002232 du 30/06/2020 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de MONTPELLIER)

Madame [Z] [O]

née le 09 Avril 1973 à [Localité 12] (78)

[Adresse 2]

[Localité 6]

Représentée par Me Jean Marc NGUYEN-PHUNG de la SELARL SELARL PHUNG 3P, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant

assistée de Me Romain BOULET, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat plaidant

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2020/002231 du 30/06/2020 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de MONTPELLIER)

Monsieur [F] [U] (décédé)

[Adresse 8]

[Localité 7]

Représenté par Me Jean Marc NGUYEN-PHUNG de la SELARL SELARL PHUNG 3P, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant

Madame [Y] [U]

de nationalité Française

[Adresse 8]

[Localité 7]

Représentée par Me Jean Marc NGUYEN-PHUNG de la SELARL SELARL PHUNG 3P, avocat au barreau de MONTPELLIER,

avocat postulant

assistée de Me Romain BOULET, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat plaidant

INTIMES :

Monsieur [D] [N]

né le 20 Novembre 1951 à [Localité 16]

[Adresse 9]

[Localité 5]

Représenté par Me Laëtitia RETY FERNANDEZ de la SARL LRF AVOCATS CONSEIL, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant

assisté de Me Marion RAMBIER, avocat au barreau de MARSELLE, avocat plaidant

Madame [V] [A] épouse [N]

née le 09 Juillet 1954 à [Localité 15]

de nationalité Française

[Adresse 9]

[Localité 5]

Représentée par Me Laëtitia RETY FERNANDEZ de la SARL LRF AVOCATS CONSEIL, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant

assistée de Me Marion RAMBIER, avocat au barreau de MARSELLE, avocat plaidant

INTERVENANTS :

Monsieur [M] [U] ès-qualités d'héritier de [F] [U]

né le 17 Mai 1967 à [Localité 14] ([Localité 14])

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représenté par Me Jean Marc NGUYEN-PHUNG de la SELARL SELARL PHUNG 3P, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant,

assisté de Me Romain BOULET, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat plaidant

Monsieur [E], [C] [U]

ès-qualités d'héritier de [F] [U]

né le 09 Juin 1965 à [Localité 14] ([Localité 14])

[Adresse 1]

[Localité 7]

Représenté par Me Jean Marc NGUYEN-PHUNG de la SELARL SELARL PHUNG 3P, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant,

assisté de Me Romain BOULET, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat plaidant

Ordonnance de clôture du 24 Octobre 2022

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 14 NOVEMBRE 2022,en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Emmanuel GARCIA, Conseiller, chargé du rapport.

Ce(s) magistrat(s) a (ont) rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Philippe GAILLARD, Président de chambre

Madame [M] AZOUARD, Conseiller

Monsieur Emmanuel GARCIA, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Estelle DOUBEY

ARRET :

- Contradictoire ;

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par Monsieur Philippe GAILLARD, Président de chambre, et par Madame Estelle DOUBEY, Greffier.

*

* *

EXPOSE DU LITIGE

Le 18 décembre 2015, [D] [N] et [V] [N] ont donné à bail, avec effet au 8 janvier 2016, à [J] [U] et [Z] [O], une maison située à [Adresse 10], moyennant un loyer mensuel de 780 euros, outre 20 euros de provision sur charges. [F] [U] et [Y] [U] se sont portés caution et un état des lieux a été effectué le 24 décembre 2015.

Le 28 juin 2018, un congé pour vente a été délivré aux locataires pour la date du 7 janvier 2019.

Le 22 novembre 2018, un commandement de payer les loyers a été délivré aux locataires et dénoncé aux cautions le 26 novembre 2018.

Parallèlement, les locataires ont saisi la CAF afin de faire réaliser un diagnostic d'indécence du logement et la société Urbanis a effectué une visite le 4 décembre 2018, avant de rendre son rapport le 14 décembre 2018.

L'état des lieux de sortie a été réalisé le 24 janvier 2019 par un huissier de justice.

Le 12 mars 2019, les bailleurs ont fait assigner [J] [U] et [Z] [O], ainsi que les époux [U], aux fins de les voir solidairement condamner à payer 5 840 euros au titre de loyers et charges impayés, 4 113 euros au titre de réparations locatives, 1 000 euros à titre de dommages et intérêts et 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, sous bénéfice de l'exécution provisoire.

Les locataires ont fait valoir qu'ils avaient connu des difficultés financières importantes en 2017 et au début de l'année 2018, ce qui avait contribué à leur arriéré locatif puisque l'un avait perdu son emploi et l'autre avait cessé son activité d'auto-entrepreneur en raison du manque de rentabilité. Selon eux, un prêt de 3 000 euros de la part des cautions leur a permis de régler le solde des loyers en mars 2018. Ils ont opposé également l'indécence du logement, afin de voir reconnu l'existence de leur préjudice et l'absence de prise en compte du dépôt de garantie.

Le jugement rendu le 17 décembre 2019 par le tribunal d'instance de Montpellier énonce dans son dispositif :

Condamne solidairement [J] [U] et [Z] [O], ainsi que les époux [U], à la somme de 5 840 euros de loyers et charges impayés au 24 janvier 2019 et à la somme de 4 113 euros au titre des réparations locatives ;

Condamne solidairement [J] [U] et [Z] [O], ainsi que [F] [U] et [Y] [U], à la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens ;

Rejette toute autre demande.

Le jugement expose que les locataires n'ont rendu les clés aux propriétaires qu'en septembre 2018 et que le bail a pris fin le 24 janvier 2019, ce qui permet de déclarer fondée la demande au titre de la dette locative. Il relève que le rapport de décence n'a pas été établi de manière contradictoire, qu'il est vague et qu'il concerne des points non signalés en amont par les locataires aux propriétaires.

Le jugement constate que l'état des lieux de sortie dressé par huissier fait état de plusieurs dégradations, ce qui permet de mettre à la charge des locataire la facture correspondant aux réparations.

[J] [U], [Z] [O], [F] [U] et [Y] [U] ont relevé appel du jugement par déclaration au greffe du 13 février 2020.

Le 10 décembre 2020, [F] [U] est décédé.

La clôture de la procédure a été prononcée par ordonnance du 24 octobre 2022.

Les dernières écritures pour les consorts [B] ont été déposées le 23 février 2022.

Les dernières écritures pour les époux [N] ont été déposées le 27 septembre 2022.

Les ayants-droits de [F] [U] sont intervenus volontairement à la procédure et ont déposées des écritures le 6 juillet 2022.

Le dispositif des écritures pour consorts [B] énonce :

Recevoir les moyens formulés par consorts [B] ;

Rejeter l'ensemble des moyens et demandes formulés par les consorts [N] ;

Infirmer en totalité le jugement rendu par le tribunal d'instance de Montpellier le 17 décembre 2019 ;

Condamner les époux [N] à payer la somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens.

Les consorts [B] soutiennent que le décompte de leur arriéré de loyers allégué est faux. Ils affirment qu'ils ont soldé leurs retards de paiement en mars 2018 grâce au prêt de 3 000 euros obtenu auprès de leurs cautions. Ils ajoutent qu'ils ont quitté les lieux fin septembre 2018 et non en janvier 2019, ce dont le décompte ne tient pas compte. Ils font également valoir l'absence de restitution du dépôt de garantie. Seule une somme de 3 211 euros correspondrait donc aux loyers impayés.

Ils contestent également devoir une quelconque somme au titre des charges. Ils font valoir qu'ils ont réglé une somme de 480 euros sur 2016 et 2017 à titre de provisions alors que les taxes d'ordures ménagères ont représenté 160 euros sur cette même période et l'assainissement 307,92 euros, soit un total de 467,92 euros. Ils ajoutent que les époux [N] sont agents immobiliers et qu'ils ont donc sans doute une assurance couvrant les prétendus dommages du logement, sans pour autant en justifier.

Les consorts [B] contestent les demandes des bailleurs liées au paiement des travaux de réparation. Ils avancent qu'elles ne reposent que sur un devis, non signé par les époux [N] et qui prévoit des travaux de réparations nécessaires à la décence du logement. L'assignation n'invoquait que des carreaux prétendument abîmés, soit seulement 800 euros sur les 4 113 euros du devis. Ils ajoutent que le premier juge n'aurait pas dû se baser uniquement sur le constat d'huissier de sortie puisqu'il n'est pas précisé l'origine des désordres constatés.

Les consorts [B] soutiennent que le congé pour vente qui leur a été délivré est frauduleux. Ils versent aux débats le témoignage d'un voisin attestant que le logement semble être loué et n'a pas fait l'objet d'une vente. Ils ajoutent que le bien semble être devenu le siège d'une entreprise dont la représentante légale est [I] [N], fille des bailleurs.

Ils soutiennent que les bailleurs leur ont loué un logement indécent. Ils font valoir les fuites d'eau, les moisissures, le manque d'étanchéité et d'isolation qui mettaient en danger leur santé et celle de leurs jeunes enfants. Ils versent aux débats le rapport Urbanis, réalisé après leur saisine de la CAF, qui conclut notamment à plusieurs postes d'indécences. Il s'agit d'un avis technique certain qui a été versé aux débats de première instance et a donc été contradictoire. Le constat d'huissier est insuffisant puisque l'huissier n'est pas un technicien habitué des situations de décence des logements. Il n'a d'ailleurs pas relevé les points constatés par le rapport Urbanis. Les consorts [B] estiment donc avoir subi un préjudice de jouissance pendant les 32 mois d'occupation mais avancent que du fait de leur bonne foi, ils demandent simplement le rejet des demandes des bailleurs à titre de compensation des dettes réciproques. Ils contestent également leur condamnation au paiement de la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 en première instance ainsi qu'aux dépens puisque selon eux, les intimés sont de mauvaise foi.

Le dispositif des écritures pour les époux [N] énonce :

Rejeter les conclusions, fins et prétentions des consorts [B],

Confirmer en toutes ses dispositions le jugement du tribunal d'instance de Montpellier du 17 décembre 2019 ;

Condamner les consorts [B] ainsi que les héritiers d'[F] [U] à la somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens ;

Ordonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir.

Les époux [N] soutiennent que le bail a pris fin en janvier 2019. Ils affirment qu'ils n'ont pu récupérer leur bien qu'à partir du 24 janvier 2019. Les locataires ont d'ailleurs saisi la CAF afin de faire visiter le bien fin 2018, ce qui dément l'hypothèse d'un départ des lieux en septembre 2018. Concernant le montant de la dette, les époux [N] soutiennent que le paiement de 3 000 euros en mars 2018 n'a pas suffi à rembourser la totalité de la dette et qu'à compter de cette date, plus aucun règlement n'a été effectué. Ils ajoutent que les locataires les ont menacés de saisir la CAF dans le cas où ils refuseraient d'effacer la dette. Les bailleurs soulignent que par courrier du 7 décembre 2015, les locataires ont reconnu le bon état des lieux, il n'y a donc pas lieu de retenir un quelconque préjudice de jouissance.

Les époux [N] soutiennent que les locataires ont dégradé le bien loué, comme le démontre le constat d'huissier qui relève un carrelage cassé, un placard cassé et des peintures à refaire. Ils précisent que les locataires étaient présents lors de l'état des lieux d'entrée et de sortie. Les travaux ont été chiffrés à 4 113,70 euros. Les époux [N] contestent l'indécence du logement donné à bail. Ils estiment que le rapport Urbanis est contestable notamment car il n'a pas été réalisé de manière contradictoire et qu'il s'appuie uniquement sur les dires du locataire. Ils font valoir qu'ils n'ont pas pu préciser par exemple que le logement n'était plus habité depuis plus de trois mois. Ils ajoutent que le rapport est en contradiction avec le constat d'huissier qui souligne non pas l'indécence du logement mais le mauvais état dans lequel les consorts [B] ont laissé l'appartement. Les époux [N] affirment qu'aucune réserve ou observation particulière n'a été notée dans l'état des lieux d'entrée. Les photographies versées aux débats sont contestables dans la mesure où elles s'opposent à l'état des lieux d'entrée et que rien ne démontre qu'elles aient été prises en 2015. Les bailleurs versent aux débats des factures d'électricité et de plomberie démontrant qu'ils ont toujours entretenu le bien ainsi qu'une attestation d'une société intervenue afin de vérifier l'installation électrique et l'isolation et qui les a déclarées conformes. Les époux [N] soutiennent que les locataires ont cessé d'habiter le logement dès septembre 2018, sans les avertir et sans restituer les clés. Ils auraient laissé les volets ouverts malgré une vitre cassée ce qui a détérioré le bien, outre le fait que les lieux sont donc restés plusieurs mois sans entretien ni chauffage.

Les époux [N] contestent l'absence de validité du congé délivré. Ils affirment qu'ils avaient bien l'intention de vendre les lieux mais qu'ils ont dû, pour des raisons familiales, modifier leur projet puisque leur fille a dû quitter précipitamment son département pour revenir vivre dans le logement. Ils font valoir que ce fait n'était pas prévu, sinon ils auraient dès le départ invoqué comme motif du congé, l'hébergement d'un proche.

Le dispositif des écritures pour les ayants-droits d'[F] [U] énonce :

Prendre acte de ce que feu [F] [U] est décédé en cours d'instance ;

Déclarer recevables et bien fondés les enfants [E] et [M] [U] à intervenir volontairement en leur qualité d'héritiers.

MOTIFS

1. Sur les loyers et charges

S'agissant de la date de fin de bail, il est constant que l'état des lieux de sortie a été réalisé le 24 janvier 2019, au contradictoire des parties et en la présence d'un huissier de justice, à l'issue duquel les clés ont été remises aux époux [N], de sorte que le jugement sera confirmé en ce qu'il a dit que les consorts [B] étaient redevables des loyers et charges jusqu'à cette date, ceux-ci échouant, sur le fondement des dispositions de l'article 15 de la loi du 6 juillet 1989, à justifier qu'ils auraient en réalité libéré les lieux en septembre 2018.

S'agissant du décompte des sommes à devoir aux bailleurs, au moyen d'un décompte arrêté au mois de janvier 2019, tenant compte de la somme de 3 000 euros payée en mars 2018, des paiements effectués par la CAF et de l'indexation du loyer, les époux [N] justifient d'une somme totale à devoir de 5 840 euros, sans que les consorts [B] ne justifient d'un solde créditeurs de 12,08 euros au titre des charges.

Le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu'il les a condamnés au paiement de la somme de 5 840 euros au titre des loyers et charges.

2. Sur la décence du logement

En conclusion de son rapport du 14 décembre 2018, après avoir invité les époux [N] à présenter leurs observations, la société Urbanis, intervenue à la demande de la caisse d'allocations familiales, a conclu à l'indécence du logement en litige au motif notamment de plusieurs fenêtres non étanches à l'air et à l'eau, dont une qui ne fermait pas, d'une prise de la salle à manger qui faisait disjoncter l'installation électrique lorsqu'il pleuvait, d'une absence de radiateur dans la cuisine, d'un radiateur partiellement fonctionnel dans la salle de bain, d'un radiateur non fonctionnel dans une chambre, des traces d'infiltrations et d'humidité dans la cuisine et la salle de bain.

En l'état de ce constat-diagnostic et des pièces versées au débat, notamment les factures produites par les bailleurs, qui attestent seulement, pour justifier du bon entretien du logement, du débouchage du réseau des eaux usées, du dépannage d'une fuite avec remplacement d'un flexible et remplacement du disjoncteur du cumulus, et de l'abattage d'un pin et de deux épicéas, il sera retenu l'indécence du logement donné à bail.

Les consorts [B] sollicitent la somme de 25 600 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de leur préjudice de jouissance, correspondant à 32 mois de loyer à 800 euros, dont il demandent compensation avec les sommes à devoir aux époux [N].

En considération des faits de l'espèce, de ce que les consorts [B] justifient avoir signalé les désordres par courrier recommandé du 8 juin 2018, le préjudice de jouissance lié à l'indécence, dont il n'est toutefois pas démontré que ces désordres empêchaient l'habitation du logement, sera indemnisé par l'allocation de la somme de 300 euros par mois sur la période de juin 2018 à janvier 2019, soit 8 x 300 euros = 2 400 euros, que les époux [N] seront condamnés à leur payer à titre de dommages-intérêts pour indécence du logement.

3. Sur les réparations locatives

La somme de 4 113,70 euros allouée par le premier juge est justifiée par les époux [N] au moyen d'un devis faisant apparaître le coût de reprise d'un carrelage situé à l'extérieur de la maison, de la reprise de la peinture des murs et d'un placard coulissant.

En comparaison de l'état des lieux d'entrée et de sortie réalisé en la présence d'un huissier, du rapport d'indécence de la société Urbanis, des courriers échangés et des pièces versées au débat, le jugement entrepris sera infirmé en ce qu'il a condamné les consorts [B] à payer aux époux [N] la somme de 4 113 euros au titre des réparations locatives, ces derniers ne pouvant leur imputer pour l'essentiel l'état des murs et la présence des moisissures, notamment dans la cuisine et la salle de bain, compte tenu des infiltrations relevées et de ce que le diagnostic de performances énergétiques faisait état d'un classement en catégorie D, soit une performance énergétique moyenne.

Toutefois, cela résultant de l'état des lieux de sortie et le coût étant justifié par les bailleurs, les consorts [B] seront condamnés à payer aux époux [N] la somme de 1 035 euros pour la reprise du carrelage extérieur. Il ne sera pas alloué de somme au titre du placard coulissant dès lors qu'il n'est pas justifié qu'il serait à remplacer, l'état des lieux de sortie mentionnant un état moyen d'un dressing, sans plus de précision.

4. Sur la validité du congé pour vendre délivré par les époux [N]

En cas de contestation de la validité du congé pour vendre, le juge peut, même d'office, vérifier la réalité du motif du congé.

Si l'intention de vendre le bien loué constitue un motif péremptoire de congé dispensant le bailleur de toute justification préalable de la réalité d'un projet de vente, le locataire est toutefois fondé à contester l'intention réelle et sérieuse de vendre. Cette contestation est fondée lorsque, par exemple, le bailleur ne justifie d'aucun acte positif en vue de la mise en vente du bien immobilier depuis la délivrance du congé.

Il convient de relever que la loi dite Alur n° 2014-366 du 24 mars 2014 a renforcé la lutte contre les congés frauduleux en instaurant une sanction pénale en cas de congé frauduleux.

En l'espèce, la cour constate que les époux [N] ne justifient d'aucune démarche positive pour procéder à la vente du bien litigieux depuis la délivrance du congé, telle que la conclusion d'un mandat de vente, la publication d'annonces, l'affichage de panneaux ou de visites d'acquéreurs éventuels, et qu'ils se retranchent derrière le fait qu'ils auraient dû en définitive renoncer au projet de vente pour héberger leur fille [I], qui aurait dû précipitamment quitter le département de la [Localité 11] pour des raisons strictement personnelles.

Ce moyen étant inopérant, puisque le congé délivré n'était pas un congé pour reprise mais bien un congé pour vendre, et les époux [N] n'apportant aucunement la preuve d'une intention réelle et sincère de vendre, le congé sera considéré comme frauduleux.

La cour constate cependant que s'il lui était demandé de se prononcer sur la validité de ce congé, les consorts [B] n'en tirent pas conséquence, notamment en matière de demande d'allocation de dommages-intérêts de ce chef.

5. Sur les dépens et les frais non remboursables

Le jugement sera confirmé en ce qui concerne les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile.

Les époux [N] seront condamnés aux dépens de l'appel.

Les époux [N] seront en outre condamnés à payer aux consorts [B] la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire et mis à disposition au greffe ;

CONFIRME le jugement rendu le 17 décembre 2019 par le tribunal d'instance de Montpellier, sauf en ce qu'il condamne solidairement [J] [U] et [Z] [O], ainsi que les époux [U], à la somme de 4 113 euros au titre des réparations locatives ;

Statuant à nouveau de ce chef,

CONDAMNE les consorts [B] à payer aux époux [N] la somme de 1 035 euros au titre des réparations locatives ;

CONDAMNE les époux [N] à payer aux consorts [B] la somme de 2 400 euros en réparation de leur trouble de jouissance du fait de l'indécence du logement ;

CONDAMNE les époux [N] à payer aux consorts [B] la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais non remboursables exposés en appel ;

CONDAMNE les époux [N] aux dépens de l'appel.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 5e chambre civile
Numéro d'arrêt : 20/00892
Date de la décision : 10/01/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-01-10;20.00892 ?
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