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15/12/2022 | FRANCE | N°18/00656

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 3e chambre civile, 15 décembre 2022, 18/00656


Grosse + copie

délivrées le

à































COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



3e chambre civile



ARRET DU 15 DECEMBRE 2022



Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 18/00656 - N° Portalis DBVK-V-B7C-NQYI





Décision déférée à la Cour :

Jugement du 14 décembre 2017

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE NARBONNE

N° RG 16/00008





APPELANTS :




Monsieur [P] [R]

copropriétaire du lot n°1 de la COPROPRIETE SISE [Adresse 14] A [Localité 3]

né le [Date naissance 2] 1970 à [Localité 3] (11)

de nationalité Française

[Adresse 12]

[Localité 3]

et

Monsieur [M] [J]

copropriétaire du lot n°3 de la COPROPRIETE ...

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

3e chambre civile

ARRET DU 15 DECEMBRE 2022

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 18/00656 - N° Portalis DBVK-V-B7C-NQYI

Décision déférée à la Cour :

Jugement du 14 décembre 2017

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE NARBONNE

N° RG 16/00008

APPELANTS :

Monsieur [P] [R]

copropriétaire du lot n°1 de la COPROPRIETE SISE [Adresse 14] A [Localité 3]

né le [Date naissance 2] 1970 à [Localité 3] (11)

de nationalité Française

[Adresse 12]

[Localité 3]

et

Monsieur [M] [J]

copropriétaire du lot n°3 de la COPROPRIETE SISE [Adresse 14] A [Localité 3]

né le [Date naissance 10] 2012 à [Localité 20]

de nationalité Française

[Adresse 6]

[Localité 17]

et

SARL DES [Adresse 21]

copropriétaire du lot n°4 de la COPROPRIETE SISE [Adresse 14] A [Localité 3]

RCS de Narbonne n°489 636 811, prise en la personne de son représentant légal en exercice, domicilié ès qualités au siège social

[Adresse 7]

[Localité 3]

et

SARL ELMA

copropriétaire du lot n°2 de la COPROPRIETE SISE [Adresse 14] A [Localité 3]

RCS de Narbonne n°503 533 606, prise en la personne de son représentant légal en exercice, domicilié ès qualités au siège social

[Adresse 9]

[Adresse 9]

[Localité 3]

et

Syndicat des copropriétaires IMMEUBLE [Adresse 14] A [Localité 3], pris en la personne de son syndic M. [P] [R], domicilié ès qualités au siège social

[Adresse 12]

[Localité 3]

Représentée par Me Marie-Camille PEPRATX NEGRE de la SCP ERIC NEGRE, MARIE CAMILLE PEPRATX NEGRE, avocat au barreau de MONTPELLIER, substituée à l'audience par Me Yves SINSOLLIER de la SELARL SINSOLLIER-PEREZ, avocat au barreau de NARBONNE

INTIMES :

Monsieur [W] [D]

né le [Date naissance 11] 1974 à [Localité 19] (Turquie)

de nationalité Turque

[Adresse 8]

[Localité 3]

Représenté par Me Philippe CALVET, avocat au barreau de NARBONNE, substitué à l'audience par Me Victor ETIEVANT, avocat au barreau de NARBONNE

Madame [U] [C] épouse [A]

née le [Date naissance 1] 1944 à [Localité 18] (34)

de nationalité Française

[Adresse 13]

[Localité 4]

et

Madame [L] [C] épouse [V]

née le [Date naissance 5] 1948 à [Localité 18] (34)

de nationalité Française

[Adresse 15]

[Localité 3]

Représentées par Me Karine JAULIN-BARTOLINI de la SCP PECH DE LACLAUSE-JAULIN-EL HAZMI, avocat au barreau de NARBONNE

Ordonnance de clôture du 21 septembre 2022

COMPOSITION DE LA COUR :

En application de l'article 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 12 octobre 2022, en audience publique, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par l'article 804 du même code, devant la cour composée de :

M. Gilles SAINATI, Président de chambre

M. Thierry CARLIER, Conseiller

M. Fabrice DURAND, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Camille MOLINA

ARRET :

- contradictoire ;

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour fixée au 8 décembre 2022 prorogée au 15 décembre 2022 les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par M. Gilles SAINATI, Président de chambre, et par Mme Camille MOLINA, Greffière.

*

* *

EXPOSE DU LITIGE

Madame [U] [C] épouse [A] et Madame [L] [C] épouse [V] étaient propriétaires d'un immeuble situé au « [Adresse 14] » à [Localité 3], divisé en quatre lots de copropriété créant ainsi un syndicat des copropriétaires avec règlement de copropriété du 20 mai 2011.

Par acte du 20 mai 2011, Madame [U] [C] épouse [A] et Madame [L] [C] épouse [V] ont vendu aux époux [R] le lot n°1 de cet immeuble en copropriété.

Par acte du même jour, Madame [U] [C] épouse [A] et Madame [L] [C] épouse [V] ont cédé à la SARL des [Adresse 21] les lots n° 2, 3 et 4 de cet immeuble ; le même jour, la SARL des [Adresse 21] a vendu à la SARL Elma le lot n°2 et à Monsieur [M] [J] le lot n°3.

La SARL des [Adresse 21] a été nommée syndic de la copropriété, puis a été remplacée par Monsieur [P] [R].

Monsieur [W] [D] est propriétaire de l'immeuble voisin situé au [Adresse 16] à [Localité 3].

Se plaignant que des travaux réalisés par la SA Colas Midi Mediterrannée entraînaient d'importantes vibrations provoquant des fissures sur leurs immeubles, Madame [L] [C] épouse [V] et Monsieur [W] [D] ont fait établir un procès-verbal de constat d'huissier le 29 novembre 2010.

A la demande de la Direction Générale des Services Techniques de la ville de [Localité 3] laquelle menacait d'engager la procédure dite de " péril ordinaire", Monsieur [D] mandatait Monsieur [Z] [K], ingénieur ETP, expert en bâtiment, lequel évoquait dans une note d'expertise du 10 mai 2011 un tassement de fondation pouvant selon lui provenir soit de fuites d'eau sur la canalisation d'eaux usées se situant le long du mur mitoyen dans le bâtiment voisin, soit de fuites d'eau sur une canalisation d'eau sous le dallage de ce bâtiment voisin ou dans le sol sous l'avenue; à défaut, il indiquait que ce tassement pourrait provenir des travaux réalisés dans l'avenue au pied de la façade.

Par ordonnance du 13 décembre 2011, le juge des référés a ordonné une mesure d'expertise confiée à Monsieur [X] [Y] au contradictoire la SCA Veolia Eau ayant entrepris le renforcement du réseau d'eaux usées de [Localité 3] avec la création d'une tranchée sur l'[Adresse 14].

Par ordonnance de référé du 3 mai 2012, le même magistrat a étendu les opérations d'expertise à la société CGTH (sous-traitante) et à la SAS Cathar ayant réalisé les terrassements.

Par ordonnance de référé du 28 mai 2013, le même magistrat a étendu les opérations d'expertise à la SARL des [Adresse 21].

Par ordonnance de référé du 10 décembre 2013, le même magistrat a étendu les opérations d'expertises à la SARL Elma, à Mesdames [C] et à la société Groupama Sud.

L'expert a exécuté sa mission et déposé son rapport le 24 juillet 2014.

Par actes des 16 et 18 décembre 2015, Monsieur [W] [D] a assigné la SCA Veolia Eau, la SA Colas Midi Mediterrannée, Monsieur [P] [R] et la SARL des [Adresse 21] devant le tribunal de grande instance de Narbonne, au visa des articles 1384 et 1386 du code civil, aux fins de lui donner acte de ce qu'il reconnaît sa part de responsabilité à hauteur de 20 %, de voir retenir la responsabilité délictuelle des défendeurs et se voir indemniser de ses préjudices.

Par acte du 29 décembre 2016, Monsieur [W] [D] a assigné aux mêmes fins le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis au [Adresse 14] à [Localité 3].

La SARL Elma et Monsieur [M] [J] sont intervenus volontairement à l'instance.

Par acte du 12 janvier 2016, Monsieur [P] [R], la SARL des [Adresse 21], la SARL Elma et Monsieur [M] [J] ont assigné en garantie Madame [U] [C] épouse [A] et Madame [L] [C] épouse [V].

Ces deux procédures ont été jointes à la procédure principale par ordonnance du conseiller de la mise en état du 15 mars 2017.

Par un jugement rendu le 14 décembre 2017, le tribunal de grande instance de Narbonne a :

- donné acte à la SARL Elma et à Monsieur [M] [J] de leur intervention volontaire à l'instance ;

- déclaré recevables les demandes de Monsieur [W] [D] ;

- déclaré le rapport d'expertise judiciaire de Monsieur [Y] opposable au syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis au [Adresse 14] à [Localité 3] ;

- dit le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis au [Adresse 14] à [Localité 3] responsable sur le fondement de l'article 1384 du code civil à hauteur de 50 % des conséquences dommageables subies par Monsieur [W] [D] sur son immeuble sis au n°6 même avenue ;

- condamné en conséquences le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis au n°[Adresse 14] à [Localité 3] à payer à Monsieur [W] [D], suivant le pourcentage de responsabilité retenue, les sommes de :

* 56 266,58 euros au titre des travaux de reprise,

* 43 087,50 euros au titre du préjudice de jouissance locatif,

- débouté Mesdames [C] de leur demande en dommages et intérêts pour procédure abusive ;

- condamné le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis au [Adresse 14] à [Localité 3] à payer à Monsieur [W] [D] la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au profit des autres parties à la procédure

- condamné le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis au [Adresse 14] à [Localité 3] aux dépens sauf les frais d'expertise qui seront partagés par moitié entre ce syndicat et Monsieur [W] [D].

Le 6 février 2018, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis au [Adresse 14] à [Localité 3], Monsieur [P] [R], la SARL des [Adresse 21], la SARL Elma et Monsieur [M] [J] ont interjeté appel de ce jugement à l'encontre de Monsieur [W] [D], de Madame [U] [C] épouse [A] et de Madame [L] [C] épouse [V].

Par ordonnance du 11 juin 2019, le conseiller de la mise en état a fait droit à la demande formée par Monsieur [W] [D] tenant à la mise en 'uvre d'une nouvelle expertise judiciaire, au vu de l'aggravation des dégradations visibles sur son immeuble, expertise confiée à nouveau à Monsieur [X] [Y].

L'expert a déposé son rapport le 13 février 2020.

Vu les conclusions du syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis au [Adresse 14] à [Localité 3], Monsieur [P] [R], la SARL des [Adresse 21], la SARL Elma et Monsieur [M] [J] remises au greffe le 29 avril 2020 ;

Vu les conclusions de Monsieur [W] [D] remises au greffe le 16 septembre 2022 ;

Vu les conclusions de Madame [U] [C] épouse [A] et de Madame [L] [C] épouse [V] remises au greffe le 20 septembre 2022 ;

Vu les conclusions d'incident remises au greffe par le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis au [Adresse 14] à [Localité 3], Monsieur [P] [R], la SARL des [Adresse 21], la SARL Elma et Monsieur [M] [J] le 21 septembre 2022, tenant au rejet de l'ensemble des conclusions et pièces notifiées par Monsieur [W] [D] le 16 septembre 2022 et par Mesdames [C] le 20 septembre 2022 ;

Vu l'ordonnance de clôture en date du 21 septembre 2022 ;

MOTIFS DE L'ARRET

Sur la demande de rejet de l'ensemble des conclusions et pièces notifiées par Monsieur [W] [D] le 16 septembre 2022 et par Mesdames [V] et [A] le 20 septembre 2022,

Le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis au [Adresse 14] à [Localité 3], Monsieur [P] [R], la SARL des [Adresse 21], la SARL Elma et Monsieur [M] [J] exposent qu'ils n'ont pas été mis en mesure de répliquer utilement et dans le respect du principe du contradictoire aux conclusions récapitulatives de Monsieur [D] et de Mesdames [V] et [A] déposées respectivement quatre jours avant la date de clôture et la veille de cette dernière.

En l'espèce, outre que dans leurs dernières conclusions récapitulatives, Monsieur [D] et Mesdames [V] et [A] ne font état d'aucune pièce nouvelle à l'exception pour ces dernières du pré-rapport d'expertise du 18 décembre 2019 ayant fait l'objet d'une communication à l'ensemble des parties, les appelants ne précisent pas en quoi l'argumentation des intimés aurait nécessité une réplique de leur part, étant enfin relevé que s'ils souhaitaient répliquer absolument aux conclusions tardives des intimés, ils gardaient la possibilité de solliciter de la cour la révocation de l'ordonnance de clôture pour pouvoir acceuillir leurs conclusions en réplique, ce qui, au regard de la tardiveté des conclusions litigieuses, leur aurait été accordé.

Par conséquent, la demande présentée à ce titre sera rejetée.

Sur les désordres et leur aggravation,

En l'espèce, il résulte des constatations effectuées par le sapiteur, Monsieur [B], dans le cadre de la première expertise, que la canalisation mitoyenne (maintenant hors service) a très probablement au cours des années générée des fuites tout au long du mur mitoyen, ce qui expliquerait non seulement la fissure en couloir près de l'entrée du n° 6, qui se poursuit en fondation et dans le mur du couloir, mais également toutes les autres fissures visibles dans ce couloir et notamment dans l'escalier aujourd'hui profondément déstructuré et très instable.

Le sapiteur expose par ailleurs que la réalisation du raccordement des eaux usées de l'immeuble [D] est très rudimentaire et défectueuse, notamment eu égard aux règles de l'art dans la réalisation des différents raccords et ce, même si le second sapiteur a constaté qu'elle évacue à ce jour sans fuite apparente les eaux de toilette du rez-de-chaussée en fonctionnement habituel. Il ajoute que le passage de l'évacuation à travers le mur s'est fait en dégradant sérieusement la fondation de façade et que ce raccordement très approximatif doit également être pris en compte dans le développement d'éventuelles cavités qui ont pu se produire sous trottoir et sous le mur de façade.

Suite aux constatations de son sapiteur, l'expert concluait que l'origine et les causes des désordres sur les immeubles [D] et l'immeuble voisin provenaient d'une double défectuosité des évacuations des eaux usées de l'immeuble [D] et de la moitié des eaux pluviales des toitures ainsi que des anciennes canalisations et de l'évacuation du n° 4 expliquant le délabrement du mur mitoyen sur toute sa longueur et de l'escalier.

Il indiquait d'autre part que les origines et les causes de ces désordres n'étaient pas imputables directement aux travaux réalisés en pied de façade.

L'expert préconisait des travaux de confortation de reprise à mettre en oeuvre, notamment la réfection de la couverture et d'une partie de la charpente, la reprise des fondations sinistrées et la réfection de l'escalier central et la réalisation de contreventements généraux.

Or, dans le cadre de la seconde expertise, l'expert a constaté en pénétrant dans le couloir de l'immeuble [D] qu'aucun des travaux préconisés n'avaient été réalisés concernant la reprise en structure de l'immeuble et que d'autres désordres étaient apparus sur la façade de l'immeuble [R], à savoir une fissure verticale se prolongeant le long de la corniche, de l'ordre de 1 à 2 cm, une fissure de 1 cm sur la droite, à la jonction de l'autre immeuble ainsi que des fissures sous l'allège de la fenêtre gauche du 2e étage et au dessus du linteau de la fenêtre du 1er étage.

Le second sapiteur, Monsieur [T], expose qu'il s'agit d'une conséquence de l'aggravation des tassements affectant le mur mitoyen avec le n°6 et que l'absence de réalisation des travaux de reprise en sous oeuvre du mur mitoyen, tels que préconisés par le sapiteur Monsieur [B] en 2013 est la cause principale de l'aggravation des désordres relevés lors de la première expertise et de l'apparition de nouvelles fissures sur le bâtiment n°4.

Il ajoute que l'on peut s'étonner que rien n'ait été fait à ce jour pour y remédier, alors même que le coût des travaux de reprise en sous-oeuvre suivant le devis établi par l'entreprise Cutillas était peu élevé (5 600 euros) par rapport au montant total de remise en état (241 422 euros HT).

Monsieur [D] ne peut donc soutenir qu'il n'aurait pas disposé des fonds suffisants pour réaliser les travaux destinés à limiter les dommages.

Il résulte donc clairement du rapport d'expertise que l'aggravation des désordres, qui n'existait pas lors de la première expertise, provient du fait qu'aucune reprise en sous-oeuvre de la partie de fondation du mur de façade de l'immeuble [D] n'a été entreprise et ceci contrairement à ce qui était préconisé dans le premier rapport d'expertise, l'expert précisant qu'il s'agit de la partie commune de l'immeuble [D], puisqu'il s'agit de l'angle de son mur de façade.

Sur le partage de responsabilité,

Il résulte de ce qui vient d'être développé que l'évolution importante des désordres sur l'immeuble [D] ainsi que les nouveaux désordres décelés sur l'immeuble [R] sont une conséquence de l'aggravation des tassements affectant le mur mitoyen avec le n° [Adresse 16] qui est l'immeuble de Monsieur [D].

L'expert conclut que si les désordres actuels trouvent leur origine dans la cause décelée en 2014, il affirme que la cause principale est bien l'affouillement sous le mur de la proprété [D] décelé par les nombreuses fuites constatées, ce tassement ayant entraîné les désordres visibles sur l'immeuble voisin appartenant à Monsieur [R].

Il rappelle également que ce dernier avait fait dévier en 2014 les évacuations passant près du mur mitoyen.

Compte tenu de ces éléments, la responsabilité de Monsieur [D] dans l'apparition mais surtout dans l'aggravation et l'apparition de nouveaux désordres apparaît prépondérante, ce qui conduit à retenir le partage de responsabilité proposé par l'expert, à savoir 60 % à la charge de Monsieur [D] et 40 % à la charge du syndicat des copropriétaires s'agissant des désordres initiaux et la responsabilité exclusive de Monsieur [D] s'agissant de l'aggravation et de l'apparition de nouveaux désordres.

Le jugement sera infirmé de ce chef.

Sur les travaux de reprise,

- sur les travaux de reprise de l'immeuble [R]

D'une part, il résulte des factures versées aux débats que la SARL Elma et la SARL des [Adresse 21] ont financé les travaux de leurs lots respectifs respectivement à hauteur de 16 138,02 euros TTC et 36 139,64 euros TTC.

Compte tenu du partage de responsabilité retenu, il convient de condamner Monsieur [D] à payer à la SARL Elma la somme de 9 682,81 euros (60 % de 16 138,02 euros) et à la SARL des [Adresse 21] la somme de 21 683,78 euros (60 % de 36 139,64 euros ) au titre des travaux de reprise des désordres dans leurs lots privatifs.

D'autre part, s'agissant de la reprise des désordres consécutifs à l'aggravation imputable à Monsieur [D], l'expert a chiffré les travaux à la somme de 12 040,50 euros.

Comme le relève le conseil du syndicat des copropriétaires dans son dire du 17 décembre 2019, il convient d'ajouter à cette somme 660 euros HT pour constat d'huissier et 460 euros HT pour montage et dépôt en mairie d'une déclaration préalable et de retenir une somme totale de 13 040 euros TTC que Monsieur [D] sera condamné à payer au syndicat des copropriétaires.

- sur les travaux de reprise de l'immeuble [D]

L'expert a actualisé et évalué la reprise des désordres de l'immeuble [D] à la somme de 114 666 euros TTC.

Si Monsieur [D] se prévaut d'un devis de l'entreprise Cutillas pour un montant total de 302 513,92 euros, expliquant ce montant par le fait qu'il s'agit d'un chantier risqué, l'immeuble menacant de s'effondrer, il convient d'un part de relever que l'aggravation des désordres et l'état de son immeuble lui est exclusivement imputable, d'autre part que l'expert a indiqué que le devis Cutillas était très élevé, s'agissant d'un devis de remise en oeuvre de l'immeuble et non de réparation des désordres et que le peu d'amplification des dégâts de l'immeuble [D] ne justifiait pas cette augmentation du prix de ce devis qui était à l'origine d'un montant de 106 000 euros TTC.

Compte tenu de ces éléments, le coût des travaux de reprise de l'immeuble [D] sera fixé à la somme de 114 666 euros.

Compte tenu du partage de responsabilité retenu, le syndicat des copropriétaires sera condamné à payer à Monsieur [D] une somme de 45 866,40 euros (40 % de 114 666 euros).

Le jugement sera infirmé de ce chef.

Sur les préjudices locatifs,

- sur les préjudices locatifs de la SARL Elma et de la SARL des [Adresse 21]

En l'espèce, il n'est pas contestable que les trois appartements dans les étages ont subi d'importants travaux de réhabilitation suite aux désordres initiaux et à leur aggravation et n'ont pu être reloués ou revendus.

Dans ces conditions, il sera fait droit à la demande de condamnation de Monsieur [D] à régler à ce titre à la SARL Selma la somme de 5 000 euros pour son lot privatif et à la SARL des [Adresse 21] la somme de 10 000 euros pour ses deux lots privatifs.

- sur les préjudices locatifs de Monsieur [D]

Monsieur [D] évalue le préjudice résultant de la perte de revenus locatifs de 2012 à 2022 à la somme de 249 300 euros, outre une somme de 12 600 euros au titre du temps de réalisation des travaux estimé à 6 mois par la société Cutillas.

Au vu des contrats de bail versés aux débats, Monsieur [D] percevait une somme de 31 200 euros par an au titre des loyers perçus pour trois appartements et un local commercial.

Il convient de limiter la perte de loyers résultant des désordres à la période allant de 2012 à 2014, Monsieur [D] étant principalement responsable de l'aggravation des désordres après la première expertise, les travaux de reprise en sous-oeuvre du mur mitoyen préconisés en 2013 par le sapiteur [B] n'ayant pas été réalisés par lui, Monsieur [D] étant en conséquence responsable de l'impossibilité de relouer ses appartements et son local commercial, y compris pendant le temps de réalisation des travaux, lorsque Monsieur [D] les engagera.

Par ailleurs, le préjudice de Monsieur [D] ne peut s'analyser que comme une perte de chance de pouvoir relouer ses appartements et son local commercial, rien ne permettant cependant d'établir avec certitude que ces derniers auraient tous été loués et de façon continue.

Cette perte de chance sera donc évaluée à 75 % de la somme de 93 600 euros (31 200 euros/an en 2012, 2013 et 2014), soit à la somme de 70 200 euros .

Compte tenu du partage de responsabilité retenu, le syndicat des copropriétaires sera condamné à payer à Monsieur [D] la somme de 28 080 euros (40 % de 70 200 euros).

Le jugement sera infirmé de ce chef.

Sur l'appel en garantie à l'encontre des venderesses de l'immeuble sis au [Adresse 14],

Les copropriétaires exposent que Mesdames [A] et [V] leur ont cédé en 2011 tous les lots de copropriété sans les avoir informé du fait que l'immeuble vendu était à l'origine de désordres importants dans l'immeuble voisin, désordres connus d'elles selon un constat d'huissier dressé en leur présence le 29 novembre 2010, aucune mention ou information ne figurant dans les actes de vente sur l'existence de ce sinistre.

Ils sollicitent donc que leur responsabilité soit reconnue sur le fondement du dol, de la garantie des vices cachés ou du manquement à l'obligation d'information.

En l'espèce, il résulte du constat d'huissier et des photographies y figurant que les deux immeubles litigieux étaient affectés d'importantes fissures qui étaient parfaitement visibles lors de la vente des lots de copropriété, ces fissures étant également présentes à l'intérieur de l'immeuble n° 4.

Par ailleurs, un procès-verbal de constat avant travaux réalisé le 14 octobre 2009 et adressé dans le cadre d'un dire mentionnait déjà : " [Adresse 14] : Entre le 6 et le 4 importante fente, de plusieurs centimètres accompagnée d'un défaut d'aplomb spectaculaire de la porte du 4.

Le [Adresse 14] est occupé par un bar, les coffrages et enseignes cachent le corps de l'immeuble, par divers intervalles on constate un état très moyen des enduits, diverses fissurations et décroûtages".

L'expert judiciaire concluait que cela prouvait que l'immeuble était fissuré avant le début des travaux de voirie.

En tout état de cause, le procès-verbal de constat du 29 novembre 2010 ne permettait pas aux venderesses d'avoir connaissance de la responsabilité des deux réseaux d'évacuation des eaux usées dans l'origine des fissures qui n'a pu être mis à jour qu'après la mise en oeuvre d'une mesure d'expertise judiciaire.

Par conséquent, la circonstance que ce procès-verbal de constat n'ait pas été communiqué aux acquéreurs ne permet pas de caractériser un dol de la part de Mesdames [A] et [V] alors même que les fissures sur les deux immeubles étaient apparentes et que les venderesses ne pouvaient connaître le problème affectant les canalisations avant les investigations réalisés par l'expert et son sapiteur, le procès-verbal de constat ne mentionnant aucune information sur ce point.

Aucun vice caché n'est davantage caractérisé, étant relevé que les venderesses sont bien fondées à opposer aux acquéreurs la clause de non garantie des vices cachés dès lors que les fissures étaient apparentes et qu'elles ignoraient leur cause, à savoir que l'ancienne canalisation d'eau de leur immeuble pouvait être en partie à l'origine du tassement de ce dernier.

Enfin, il n'est pas démontré de manquement des venderesses à leur obligation d'information, étant relevé notamment sur ce point que le diagnostic termites annexé à l'acte de vente de la SARL des [Adresse 21] mentionnait " Il a été repéré des fissures importantes sur les murs périphériques en pierre de la bâtisse nécessitant la consultation d'un professionnel du gros oeuvre. Le mauvais état de la couverture a provoqué des dégradations importantes des planchers et des plafonds rendant certains accès dangereux; veuillez consulter un professionnel du gros oeuvre et des couvertures ".

Les acquéreurs étaient donc informés du mauvais état du bâtiment.

Compte tenu de ces éléments, la demande d'appel en garantie formée par les copropriétaires à l'encontre de Mesdames [V] et [A] sera rejetée.

Sur la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive formée par Mesdames [V] et [A],

Il résulte de ce qui vient d'être développé que l'appel en garantie formé par les copropriétaires à l'encontre des venderesses ainsi que la demande de condamnation de ces dernières présentée à titre subsidiaire par Monsieur [D] ont contraint Mesdames [A] et [V] à subir une procédure en première instance puis en appel alors même que l'immeuble vendu n'était affecté d'aucun vice caché et qu'elle ignorait le vice affectant la canalisation souterraine de leur immeuble.

Les copropriétaires ainsi que Monsieur [D] seront donc condamnés in solidum à leur payer une somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive.

Le jugement sera infirmé de ce chef.

Sur la demande de dommages et intérêts pour préjudice moral formée par les copropriétaires,

En l'espèce, compte tenu du rejet de leur appel en garantie, la demande de dommages et intérêts formée par les copropriétaires à l'encontre des venderesses ne pourra qu'être rejetée.

PAR CES MOTIFS,

La cour,

Infirme le jugement en toutes ses dispositions ;

Déboute les appelants de leur demande de rejet de l'ensemble des conclusions et pièces notifiées par Monsieur [W] [D] le 16 septembre 2022 et par Mesdames [V] et [A] le 20 septembre 2022 ;

Retient un partage de responsabilité à hauteur de 60 % à la charge de Monsieur [W] [D] et de 40 % à la charge du syndicat des copropriétaires du [Adresse 14] s'agissant des désordres initiaux et la responsabilité exclusive de Monsieur [D] s'agissant de l'aggravation et de l'apparition de nouveaux désordres ;

Condamne Monsieur [W] [D] à payer à la SARL Elma la somme de 9 682,81 euros et à la SARL des [Adresse 21] la somme de 21 683,78 euros au titre des travaux de reprise des désordres dans leurs lots privatifs ;

Condamne Monsieur [W] [D] à payer au syndicat des copropriétaires du [Adresse 14] la somme de 13 040 euros au titre des travaux de reprise des désordres consécutifs à l'aggravation imputable à Monsieur [D] ;

Condamne le syndicat des copropriétaires du [Adresse 14] à payer à Monsieur [W] [D] une somme de 45 866,40 euros au titre des travaux de reprise de son immeuble ;

Condamne Monsieur [W] [D] à régler à la SARL Selma la somme de 5 000 euros pour son lot privatif et à la SARL des [Adresse 21] la somme de 10 000 euros pour ses deux lots privatifs au titre de leur préjudice locatif ;

Condamne le syndicat des copropriétaires du [Adresse 14] à payer à Monsieur [D] la somme de 28 080 euros au titre de son préjudice locatif ;

Déboute Monsieur [P] [R], la SARL des [Adresse 21], la SARL Selma et Monsieur [M] [J] de leur demande d'appel en garantie formée à l'encontre de Mesdames [L] [C] épouse [V] et [U] [C] épouse [A] ;

Condamne in solidum Monsieur [P] [R], la SARL des [Adresse 21], la SARL Selma, Monsieur [M] [J] et Monsieur [W] [D] à payer à Mesdames [L] [C] épouse [V] et [U] [C] épouse [A] la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive ;

Déboute Monsieur [P] [R], la SARL des [Adresse 21], la SARL Selma et Monsieur [M] [J] de leur demande de dommages et intérêts au titre de leur préjudice moral ;

Condamne in solidum le syndicat des copropriétaires du [Adresse 14], Monsieur [P] [R], la SARL des [Adresse 21], la SARL Selma, Monsieur [M] [J] et Monsieur [W] [D] à payer à Mesdames [L] [C] épouse [V] et [U] [C] épouse [A] la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, pour leurs frais engagés en première instance et en appel ;

Rejette les autres demandes présentées au titre de l'article 700 du code de procédure civile;

Condamne Monsieur [W] [D] aux entiers dépens de première instance et d'appel comprenant les frais de la seconde expertise judiciaire, avec autorisation de recouvrement direct conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;

Dit que les frais de la première expertise judiciaire seront partagés par moitié entre le syndicat des copropriétaires du [Adresse 14] et Monsieur [W] [D] ;

Rappelle que les dépens ne comprennent que les seuls débours relatifs à des actes ou procédures judiciaires, ce qui exclu en l'espèce le coût du rapport Verdier.

La greffière, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 3e chambre civile
Numéro d'arrêt : 18/00656
Date de la décision : 15/12/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-12-15;18.00656 ?
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