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08/09/2022 | FRANCE | N°17/04539

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 2e chambre de la famille, 08 septembre 2022, 17/04539


Grosse + copie

délivrées le

à































COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



2e chambre de la famille



ARRET DU 8 SEPTEMBRE 2022



Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 17/04539 - N° Portalis DBVK-V-B7B-NJJR



ARRET N°



Décision déférée à la Cour :

Jugement du 06 JUILLET 2017

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE CARCASSONNE

N° RG 14/01231


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APPELANTE :



Madame [N] [S]

née le 27 Octobre 1965 à [Localité 4]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée par Me Karine JAULIN-BARTOLINI, avocat au barreau de NARBONNE substituée par Me SEGHIER







INTIME :



Monsieur [F] [S]

né le 27 Octobre 1965 à [Local...

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

2e chambre de la famille

ARRET DU 8 SEPTEMBRE 2022

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 17/04539 - N° Portalis DBVK-V-B7B-NJJR

ARRET N°

Décision déférée à la Cour :

Jugement du 06 JUILLET 2017

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE CARCASSONNE

N° RG 14/01231

APPELANTE :

Madame [N] [S]

née le 27 Octobre 1965 à [Localité 4]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée par Me Karine JAULIN-BARTOLINI, avocat au barreau de NARBONNE substituée par Me SEGHIER

INTIME :

Monsieur [F] [S]

né le 27 Octobre 1965 à [Localité 4]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représenté par Me Ségolène ZICKLER, avocat au barreau de CARCASSONNE substituée par Me SOLERE-RIUS

Ordonnance de clôture du 25 Mai 2022

COMPOSITION DE LA COUR :

En application de l'article 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 15 JUIN 2022, en audience publique, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par l'article 804 du même code, devant la cour composée de :

Mme Sylvie DODIVERS, Présidente de chambre

M. Thibault GRAFFIN, Conseiller

Mme Karine ANCELY, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : M. Salvatore SAMBITO

ARRET :

- contradictoire ;

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par Mme Sylvie DODIVERS, Présidente de chambre, et par M. Salvatore SAMBITO, Greffier.

**********

EXPOSÉ DU LITIGE

M. [H] [S] et Mme [K] [T] se sont mariés le 8 avril 1952 devant l'officier d'état civil de la commune de [Localité 5], sans faire précéder leur union d'un contrat de mariage.

De leur union sont issus :

- [N] [S],

- [F] [S].

Par acte authentique en date du 11 mars 2008, l'ensemble des biens immobiliers des époux [S] a fait l'objet d'un partage anticipé passé en l'étude de Maître [P], notaire. Mme [N] [S] s'est vu attribuer la nue propriété d'une maison d'habitation et d'une grange situées à [Localité 3]. M. [F] [S] s'est vu attribuer la nue propriété d'une autre maison d'habitation et d'un terrain situés à [Localité 3] ainsi que de terrains situés à [Localité 5]. M. [F] [S] a réglé à Mme [N] [S] une soulte de 32 025 € le jour de la donation. Il résulte de ce partage anticipé que la succession de M. et Mme [S] est uniquement composée de comptes bancaires et de mobiliers.

M. [H] [S] est décédé le 25 décembre 2011 et Mme [K] [S] est décédée le 8 février 2012, laissant pour leur succéder leurs deux enfants.

Constatant après l'ouverture des opérations de liquidation partage des successions, d'importants retraits pour un montant total de plus de 48 000 euros sur les comptes de ses parents entre les deux décès au profit de son frère, Mme [N] [S] a fait assigner [F] [S] devant le tribunal de grande instance de Carcassonne, par acte du 10 juillet 2014. M. [S] a reconventionnellement accusé sa s'ur de recel mettant en exergue deux chèques de 38 112,26 euros du 6 janvier 2014 et un autre de 13 725 du 11 mars 2008.

Le juge de la mise en état du tribunal de grande instance de Carcassonne, par décision en date du 27 mai 2015, a ordonné une mesure d'expertise.

Le rapport d'expertise a été déposé le 2 juin 2016.

Par décision en date du 6 juillet 2017, le juge du tribunal de grande instance de Carcassonne a :

- ordonné le partage de la communauté de biens et la succession des consorts [S],

- rejeté les demandes de recels successoraux formulées de part et d'autre,

- dit que la somme de 56 500 € détenue par M. [F] [S] jusqu'au 22 août 2014 doit être réintégrée à l'actif des successions et que la somme de 38 112,26 € donnée le 6 janvier 2004 à Mme [N] [S] par ses parents doit être par elle rapportée à leurs successions confondues,

- dit que l'actif à partager est de 100 024,75 € et que la part de chacune des parties est de 50 012,37 €,

- commet Me [J], notaire, pour procéder aux opérations de compte, liquidation et partage, sur les bases sus indiquées,

- rejeté toute demande plus ample ou contraire,

- fait masse des dépens y compris des frais de l'expertise judiciaire et qu'ils seront pris en frais privilégiés de partage, avec distraction au profit des avocats en la cause.

Par déclaration au greffe en date du 17 août 2017, Mme [N] [S] a interjeté appel limité de cette décision en ce qu'elle a :

- dit que la somme de 56 500 € détenue par M. [F] [S] jusqu'au 22 août 2014 doit être réintégrée à l'actif des successions et que la somme de 38 112,26 € donnée le 6 janvier 2004 à Mme [N] [S] par ses parents doit être par elle rapportée à leurs successions confondues,

- fait masse des dépens y compris des frais de l'expertise judiciaire et qu'ils seront pris en frais privilégiés de partage, avec distraction au profit des avocats en la cause.

Dans ses dernières conclusions en date du 9 avril 2020, elle demande à la cour de :

- réformer la décision entreprise,

- dire et juger que M. [F] [S] a commis un recel successoral pour un montant de 56 500 € avec intérêt au taux légal à compter du 2 janvier 2012, sauf à parfaire,

- dire et juger que les droits de Mme [N] [S] s'élèvent à 59 206,24€ et ceux de M. [F] [S] à 2 706,25 €,

- dire et juger en ce qui concerne la somme de 38 112,26 € qu'il n'est point rapporté la preuve de ce qu'elle constituerait un don rapportable à la succession,

Subsidiairement,

- confirmer sur ce chef le jugement en ce que les premiers juges ont estimé que cette somme ne pouvait faire que l'objet d'un rapport à la succession et rejeter donc à ce titre l'appel incident de M. [F] [S] en ce qu'il sollicite que soient appliquées les règles du recel successoral à cette somme,

- réformer la décision en ce qu'elle a considéré que les frais d'expertise judiciaire constituaient des frais privilégiés de partage alors que l'expertise a été ordonnée par le juge de la mise en état le 27 mai 2015 compte tenu des agissements de M. [F] [S] liés à l'utilisation abusive de la procuration qui lui avait été consentie par sa mère et à la mise en 'uvre d'opérations de détournement d'une partie de l'actif successoral,

- dire donc que les frais de la mesure d'instruction doivent être supportés par M. [F] [S],

Sur l'appel incident de l'intimé,

- rejeter l'appel incident de M. [F] [S] qui ne justifie point que la somme de 38 112,26 € constitue un don,

Subsidiairement et pour le cas où il serait qualifié comme tel,

- dire qu'il ne peut être considéré que la concluante soit à ce titre l'auteur d'un recel successoral,

- rejeter l'appel incident de M. [F] [S] qui réclame rapport à la succession de la somme de 13 725 € tenant que ladite somme ne fait point partie de l'actif successoral, s'agissant d'une soulte convenue par les parties lors de la donation-partage reçue par Me [P] notaire le 11 mars 2008,

- rejeter l'appel incident de M. [F] [S] qui réclame allocation de dommages et intérêts pour procédure abusive,

- condamner M. [F] [S] au paiement de ces frais ainsi qu'au paiement de la somme de 6 000€ en application de l'article 700 du code de procédure civile.

L'intimé M. [F] [S], dans ses conclusions récapitulatives en date du 3 janvier 2018, demande à la cour de :

- débouter Mme [N] [S] de son appel principal,

- accueillir l'appel incident de M. [F] [S],

- ordonner la liquidation et le partage des successions des consorts [S],

- débouter Mme [N] [S] de ses accusations de recel successoral à l'encontre de M. [F] [S],

- dire et juger en revanche que Mme [N] [S] a commis un recel successoral portant sur les sommes de 38 112,26 € et 13 725 € avec toutes conséquences de droit,

- dire et juger que l'actif successoral s'élève à la somme de 61 912,49 € + 38 112,26 € + 13 725 € = 113 549,75 €, soit 56 874,87 € par partie,

- dire et juger qu'au regard du recel commis par Mme [N] [S], ses droits ne porteront que sur le partage par moitié de la somme de 61 912,49 €, soit 30 956,24 €,

- dire et juger que les droits de M. [F] [S] seront de 82 593,51 €,

- condamner en conséquence Mme [N] [S] à verser en l'étude du notaire désigné la somme résiduelle pour le remplir de ses droits,

- renvoyer les parties devant tel notaire qu'il plaira à la cour de désigner pour procéder aux opérations de partage suivant les prescriptions ci-dessus exposées,

- condamner Mme [N] [S] à payer la somme de 5 000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et 4 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Pour un plus ample exposé des éléments de la cause, moyens et prétentions des parties, il est fait renvoi aux écritures susvisées, conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 25 mai 2022.

SUR QUOI LA COUR

Sur le recel invoqué par Mme [S]

Selon l'article 778 du code civil, sans préjudice de dommages et intérêts, l'héritier qui a recelé des biens ou des droits d'une succession ou dissimulé l'existence d'un cohéritier est réputé accepter purement et simplement la succession, nonobstant toute renonciation ou acceptation à concurrence de l'actif net, sans pouvoir prétendre à aucune part dans les biens ou les droits détournés ou recelés. Les droits revenant à l'héritier dissimulé et qui ont ou auraient pu augmenter ceux de l'auteur de la dissimulation sont réputés avoir été recelés par ce dernier.

Lorsque le recel a porté sur une donation rapportable ou réductible, l'héritier doit le rapport ou la réduction de cette donation sans pouvoir y prétendre à aucune part.

L'héritier receleur est tenu de rendre tous les fruits et revenus produits par les biens recelés dont il a eu la jouissance depuis l'ouverture de la succession.

Ce texte vise ainsi toutes les fraudes au moyen desquelles un héritier cherche, au détriment de ses cohéritiers, à rompre l'égalité du partage, soit qu'il divertisse des effets de la succession en se les appropriant indûment, soit il les recèle en dissimulant sa possession dans les circonstances où ils seraient tenus, d'après la loi, de la déclarer.

En l'espèce, l'expertise a confirmé que Mme [K] [S] avait approvisionné un compte CCP ouvert postérieurement au décès de son mari, au moyen de virements effectués depuis d'autres comptes lui appartenant, et que ce compte a été débité au moyen d'un chèque de 20 000 euros le 2 février 2012 puis d'un virement de 33 500 euros le 3 février 2012, ces deux sommes ayant bénéficié à [F] [S] comme reconnu par ce dernier. Par ailleurs, une somme de 3000 euros a été retirée le 2 février 2012 du LDD ouvert à la banque postale de Mme [S] au profit de [F] [S], comme également reconnu par l'intimé ( page 24 et 25 du rapport).

En page 33, il est également précisé que l'actif net des successions confondues s'élevait à 61912,49 euros après réintégration des sommes retirées avant le décès par le fils pour un total de 56 500 euros.

Pour justifier ces virements effectués à son profit, M. [F] [S] soutient que sa mère lui avait donné procuration sur le compte qu'elle venait d'ouvrir et qu'il a agi à la demande de celle-ci précisant qu'elle craignait que suite au décès de son mari, sa fille ne s'oppose à la libre disposition des sommes figurant sur le compte CCP au nom des deux époux, qu'elle a donc ouvert un compte à son nom à la Banque Postale puis, sentant venir sa fin mais en totale possession de ses moyens et bien avant le 2 février 2012, elle lui a demandé d'effectuer les virements qui lui sont aujourd'hui reprochés. Il ajoute qu'elle était très affectée du comportement de sa fille avec qui elle était fâchée depuis 2006, et qu'elle avait pour obsession dans la mesure de ses modestes moyens de pouvoir exprimer sa reconnaissance à l'égard de son fils. Il affirme n'avoir eu aucune intention de receler une quelconque somme et que la date des retraits excluait formellement que les opérations ne soient pas mises en évidence au moment des opérations de partage, de sorte que personne de censé ne peut imaginer qu'il a procédé à de telles opérations en ayant eu la volonté de cacher l'existence de tels actifs. Enfin, il souligne la spontanéité avec laquelle il a immédiatement fait mention après le décès des sommes détenues avec le souhait de les consigner sur un compte Carpa comme le démontre ses pièces 12 et 13 de juillet et août 2014. Il justifie avoir conservé la somme par devers lui, durant deux années supplémentaires, car sa s'ur devait elle-même rapporter des sommes d'un montant à peu près équivalent.

Mme [N] [S] maintient que sa mère ne pouvait donner son consentement les 2 et 3 février 2012 à des virements en raison d'un coma brutal survenu dès le 31 janvier 2012, que son frère a bien tenté de détourner quasiment la totalité de l'actif net successoral et qu'il a restitué les sommes seulement le 10 juillet 2014, soit deux ans après la découverte du détournement et après l'assignation du 10 juillet 2014.

Cependant, si M. [S] ne verse aucune pièce permettant de corroborer ses dires relatifs à la volonté de sa mère antérieurement à son coma survenu le 31 janvier 2012, il n'est pas non plus rapporté la preuve par l'appelante qu'il a délibérément voulu conserver la somme de 56 500 euros jusqu'au 10 juillet 2014 en fraude des droits de sa s'ur, alors que cette somme correspond à la quasi totalité de la succession de ses parents. Mais, surtout, M. [S], dès le 2 juillet 2012, suite à un premier courrier du conseil de Mme [S] du 3 mai 2012 l'interrogeant sur les retraits importants survenus entre les deux décès, a répondu en produisant les documents établissant les mouvements de fonds et a reconnu détenir 56 500 euros faisant partie des successions confondues de ses deux parents qu'il acceptait de restituer. Il s'avère qu'à cette période, les conseils des parties échangeaient des courriers sans pouvoir aboutir à un règlement amiable des opérations successorales.

Or, un héritier ne peut être frappé des peines du recel que lorsque est rapportée la preuve de son intention frauduleuse, constitutive de ce délit civil. Cette preuve doit être rapportée, positivement,'l'intention frauduleuse ne pouvant se présumer.

En conséquence, Mme [S] étant défaillante dans l'administration de cette preuve qui lui incombe, c'est par une juste appréciation des faits et à bon droit, par des motifs pertinents, que la cour complète que le premier juge a rejeté la demande de recel présentée par Mme [N] [S].

La décision du 6 juillet 2017 sera confirmée sur ce point.

Sur les recels invoqués par M. [F] [S]

M. [S] évoque la commission de deux recels par sa s'ur à savoir l'encaissement du chèque le 6 janvier 2004 de 38 112,26 euros et celui du 11 mars 2008 de 13 725 euros.

* S'agissant du premier chèque, il explique que sa s'ur a bénéficié en 2004 d'une donation de la part de leurs parents destinée au règlement d'une soulte qu'elle devait payer par suite de sa séparation avec son compagnon. Mais, il constate que sa s'ur n'en a pas révélé l'existence et qu'il n'a pu retrouvé la trace du chèque que le 12 août 2013. Il considère que la preuve du recel ressort de l'absence de mention de cette libéralité dans l'assignation délivrée par Mme [S]. Il conteste avoir eu connaissance du mouvement de fonds en 2004 comme l'a pourtant retenu le premier juge.

Mais, il ressort du courrier du 6 août 2013 ( pièce 8 de l'intimé ) écrit par son conseil au notaire en charge des successions que M. [F] [S] avait connaissance de l'existence de l'encaissement du chèque par sa s'ur, raison pour laquelle il a fait solliciter copie du chèque dès le 12 août 2013.

Mme [S], qui conteste l'existence même d'un don, conteste a fortiori avoir tenté de dissimuler l'encaissement de ce chèque et souligne que les opérations de liquidation partage n'avaient pas encore débuté ce qui résulte des échanges de courriers entre avocat sur la période de l'été et l'automne 2013.

Comme ci-avant indiqué s'agissant du recel reproché à M. [F] [S], il lui appartient à son tour de rapporter la preuve de l'intention frauduleuse constitutive du délit civil de recel. Cette preuve doit être rapportée positivement, l'intention frauduleuse ne pouvant se présumer.

Force est de constater qu'il ne démontre pas l'intention de sa s'ur de dissimuler l'existence de l'encaissement de ce chèque dont il avait connaissance dès avant le 6 août 2013.

En conséquence, la décision du 6 juillet 2017 sera également confirmée sur ce point.

* Concernant le second chèque du 11 mars 2008 d'un montant de 13 725 euros, il s'agit d'un chèque encaissé par Mme [N] [S] et établi par son frère lors de la donation de la même date. L'appelante justifie par sa pièce 30 que le chèque que lui a fait son frère lors de la donation correspond à ce qu'il considérait lui devoir en sus de la soulte reçue. Elle estime donc qu'il s'agit d'un complément de soulte et que la masse successorale n'est pas concernée.

M. [S] explique quant à lui que sa s'ur a exigé qu'il lui règle cette somme le 11 mars 2008 au titre d'une avance sur ses droits de succession, cette somme ne pouvant se confondre selon lui avec la soulte versée par ce dernier à l'occasion de la donation. Il estime que sa s'ur doit réintégrer cette somme dans l'actif à partager pour ensuite en être privée.

Mais, outre que la preuve que ce chèque établi entre donataires devrait être qualifié d'avance sur succession n'est pas rapportée, il ne peut être le fondement d'un recel successoral pour avoir été émis entre donataires.

En conséquence, la décision du 6 juillet 2017 sera également confirmée sur ce point.

Sur le rapport à la succession par Mme [N] [S] de la somme de 38 112,26 euros

L'article 843 alinéa premier énonce que tout héritier, même ayant accepté à concurrence de l'actif, venant à une succession, doit rapporter à ses cohéritiers tout ce qu'il a reçu du défunt, par donations entre vifs, directement ou indirectement ; il ne peut retenir les dons à lui faits par le défunt, à moins qu'ils ne lui aient été faits expressément hors part successorale.

En l'espèce, Mme [S] conteste devoir rapporter à la succession de ses parents la somme de 38 112,26 euros correspondant au chèque de 2001 ci-avant évoqué. Elle estime en premier lieu qu'il n'est pas démontré que cette somme provienne d'une donation laquelle suppose l'intention libérale du donateur et si tel était le cas, que cette donation n'a pas été faire hors part successorale.

Il convient de relever que Mme [S] ne précise pas la nature que pourrait prendre l'encaissement de ce chèque par ses soins en 2004 dont il n'est pas contesté que les fonds proviennent du compte de ses parents. Son frère explique que ses parents avaient fait une donation à leur fille pour l'aider dans le cadre de sa séparation conjugale.

Dès lors, l'encaissement de ce chèque par Mme [N] [S] doit être considéré comme un don, présumé rapportable conformément à l'article 843 du code civil.

En second lieu, elle ajoute que si la cour devait considérer qu'elle a bénéficié d'une donation de ses parents, cette somme pourrait faire l'objet d'un rapport de succession mais que ce rapport a déjà eu lieu lors de l'évaluation des biens immobiliers ayant donné lieu au partage anticipé. Ainsi, elle explique que son frère a surévalué la valeur des biens immobiliers donnés à sa s'ur et sous-évalué les biens qui ont été attribués, pour tenir compte du chèque de 38 112,26 euros encaissés en 2004. Elle en veut pour preuve sa pièce 30 à savoir un document manuscrit attribué à son frère reprenant différentes valeurs et mentionnant une «'soulte réelle'» de 32025 euros.

M. [S] considère un tel moyen incompréhensible rappelant que le chèque rapportable a été encaissé par sa s'ur en 2004 et que la donation-partage n'a eu lieu qu'en 2008.

Il convient de se référer à l'acte de donation partage du 11 mars 2008 qui mentionne en page 8 que la somme de 32 025 euros formant la soulte due par M. [F] [S] au profit de sa s'ur dans le cadre de cette opération, «'a été payée comptant à l'instant même, ainsi qu'il résulte de la comptabilité du notaire soussigné par le donataire redevable ce que le donataire bénéficiaire reconnaît et en consent bonne et valable quittance'».

Dès lors, il n'est pas rapporté la preuve par l'appelante ce que la somme de 38 112,26 par elle encaissée le 6 janvier 2004 ne serait pas une somme rapportable à la succession de ses parents.

En conséquence, la décision du 6 juillet 2017 sera également confirmée sur ce point, de sorte que les droits des parties demeurent inchangés.

Sur la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive sollicitée par M. [S]

La demande de dommages et intérêts doit être examinée au regard des dispositions de l'article 1240 du Code civil.

Or, en application des dispositions du dit article, l'exercice d'une action en justice de même que la défense à une action constitue un

droit et cet exercice ne dégénère en abus que s'il constitue un acte de malice ou de mauvaise foi ou s'il s'agit d'une erreur grossière équipollente au dol.

Les pièces produites aux débats ne permettent pas d'établir une faute commise par Mme [S] de nature à entraîner une quelconque indemnisation de son frère sur ce fondement, étant au surplus rappelé que le simple fait d'ester en justice n'est pas constitutif d'un abus de droit en l'absence d'intention de nuire ou de légèreté blâmable.

En conséquence, il convient de débouter M. [S] de sa demande de dommages et intérêts.

Sur les frais d'expertise

Mme [S] conteste la décision dont appel en ce qu'elle a fait masse des dépens comprenant les frais d'expertise et dit qu'ils seront pris en frais privilégiés de partage. Elle estime que l'expertise n'a été rendue nécessaire qu'au vu des agissements de son frère.

Mais, le litige démontre que l'expertise était nécessaire compte tenu du blocage et des positionnements de chacun et que la mesure d'instruction a permis d'éclairer la situation.

La décision dont appel sera donc confirmée s'agissant des dépens.

Sur les frais irrépétibles et les dépens d'appel

La nature du litige commande de rejeter les demandes présentées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile par chacune des parties et de dire que les dépens seront pris en frais privilégiés de partage.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, et après en avoir délibéré conformément à la loi, et en dernier ressort,

Confirme la décision prononcée le 6 juillet 2017 ;

Y ajoutant

Déclare les dépens frais privilégiés de partage';

Dit n' y avoir lieu à faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Le greffier La présidente

S. SAMBITOS. DODIVERS


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 2e chambre de la famille
Numéro d'arrêt : 17/04539
Date de la décision : 08/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-08;17.04539 ?
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