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07/07/2022 | FRANCE | N°17/03342

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 2e chambre de la famille, 07 juillet 2022, 17/03342


Grosse + copie

délivrées le

à





























COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



2e chambre de la famille



ARRET DU 07 JUILLET 2022



Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 17/03342 - N° Portalis DBVK-V-B7B-NGRE



ARRET N°



Décision déférée à la Cour :

Jugement du 10 AVRIL 2017 DU TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE BEZIERS

N° RG 14/02588



APPELANTS :
>

Monsieur [W] [O] [L]

né le 03 Février 1967 à [Localité 9]

de nationalité Française

[Adresse 7]

[Localité 2]

Représenté par Me Frédéric PINET, avocat au barreau de NARBONNE substitué par Me CHOPIN avocat au barreau de NARBONNE



Madame [N] [T] [U] [E] ...

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

2e chambre de la famille

ARRET DU 07 JUILLET 2022

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 17/03342 - N° Portalis DBVK-V-B7B-NGRE

ARRET N°

Décision déférée à la Cour :

Jugement du 10 AVRIL 2017 DU TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE BEZIERS

N° RG 14/02588

APPELANTS :

Monsieur [W] [O] [L]

né le 03 Février 1967 à [Localité 9]

de nationalité Française

[Adresse 7]

[Localité 2]

Représenté par Me Frédéric PINET, avocat au barreau de NARBONNE substitué par Me CHOPIN avocat au barreau de NARBONNE

Madame [N] [T] [U] [E] [L] épouse [Z]

née le 31 Octobre 1960 à [Localité 9]

de nationalité Française

[Adresse 4]

[Localité 3]

Représentée par Me Frédéric PINET avocat au barreau de NARBONNE substitué par Me CHOPIN avocat au barreau de NARBONNE

INTIMEE :

Madame [B] [X] [L] veuve [M]

née le 13 Août 1953 à [Localité 8]

de nationalité Française

[Adresse 6]

[Localité 5]

Représentée par Me Annie RUIZ-ASSEMAT, avocat au barreau de BEZIERS substituée par Me Rébecca SMITH avocat au barreau de BEZIERS

Ordonnance de clôture du 27 Avril 2022

COMPOSITION DE LA COUR :

En application de l'article 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 18 MAI 2022, en audience publique, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par l'article 804 du même code, devant la cour composée de :

Mme S. DODIVERS, Présidente de chambre

M. T. GRAFFIN, Conseiller

Mme K. ANCELY, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme D. IVARA

ARRET :

- Contradictoire

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par Mme . DODIVERS, Présidente de chambre, et par Mme D. IVARA, Greffier.

*

**

EXPOSÉ DU LITIGE

Mme [A] [L] s'est mariée avec M. [K] [H] le 22 décembre 1959.

Aucun enfant n'est issu de cette union.

Par testament olographe en date du 28 décembre 1974, elle a institué en qualité de légataires universels ses neveu et nièce M. [W] [L] et Mme [N] [L].

Par un deuxième testament olographe en date du 8 décembre 1986, elle a institué en qualité de légataire universelle Mme [P] [M], fille de Monsieur et Madame [M].

Par un troisième testament olographe en date du 11 mai 2009, elle a institué à nouveau en qualité de légataires universels ses neveu et nièce M. [W] [L] et Mme [N] [L].

Mme [A] [L] épouse [H] est décédée le 22 mars 2012.

Maître [C], notaire, chargé des opérations de liquidation de la succession a dressé un acte de notoriété le 5 septembre 2012 reconnaissant la qualité de successeur ab intestat à M. [W] [L] et Mme [N] [L], précisant renoncer purement et simplement au bénéfice du legs universel résultant du testament du 11 mai 2009.

Ayant été abandonnée à sa naissance et apprenant la liquidation de la succession de sa mère en 2014, Mme [B] [L] épouse [M], mère de Mme [P] [M], a fait assigner par actes des 2 et 5 septembre 2014, M. [W] [L] et Mme [N] [L] aux fins de voir dire qu'elle est héritière ab intestat de la défunte pour la totalité en pleine propriété, annuler le partage successoral fait le 22 mars 2012 entre M. [W] [L] et Mme [N] [L] et dire qu'ils se sont rendus coupables d'un recel successoral en cachant sciemment son existence alors qu'ils ne pouvaient l'ignorer.

Maître [C] a dressé un acte de notoriété rectificatif le 16 juin 2015, précisant qu'informés de l'existence de Mme [B] [L], ils ont vocation à recueillir tout ou partie de la succession de Mme [A] [L] en leur qualité de légataires universels.

Par jugement en date du 10 avril 2017, le juge du tribunal de grande instance de Béziers a :

- dit que Mme [B] [L] est héritière ab intestat de Mme [A] [L] pour la totalité en pleine propriété,

- annulé en conséquence le partage réalisé entre M. [W] [L] et Mme [N] [L] le 22 mars 2012,

- condamné solidairement M. [W] [L] et Mme [N] [L] à payer à Mme [B] [L] la somme de 23.925,97€ assortie des intérêts au taux légal à compter du 5 septembre 2014,

- rejeté toute autre demande et dit inutiles ou mal fondées celles plus amples ou contraires formées par les parties,

- condamné M. [W] [L] et Mme [N] [L] aux dépens dont distraction au profit des avocats de la cause conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Le 29 mai 2017, Mme [N] [L] et M. [W] [L] ont saisi le tribunal de grande instance de Béziers d'une requête en interprétation s'agissant du sort à donner à l'acte de notoriété rectificatif établi par Me [C] en date du 16 juin 2015.

Par déclaration au greffe en date du 15 juin 2017, M. [W] [L] et Mme [N] [L] ont interjeté appel de l'intégralité des chefs de jugement de la décision.

Par jugement du 27 juillet 2017, en raison de l'appel interjeté, le tribunal de grande instance de Béziers a rejeté la requête.

Dans leurs dernières conclusions en date du 16 mars 2021, ils demandent à la cour de :

- rejeter toutes demandes, fins et conclusions contraires,

- dire et juger recevable tant sur la forme que sur le fond l'appel diligenté par M. [W] [L] et Mme [N] [L] à l'encontre du jugement du 10 avril 2017,

- confirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions, précisant néanmoins que l'acte de notoriété rectificatif en date du 16 juin 2015 demeure valide,

- condamner Mme [B] [L] à verser la somme de 4000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.

L'intimée Mme [B] [L], dans ses conclusions récapitulatives en date du 29 septembre 2017, demande à la cour de :

- dire et juger que M. [W] [L] et Mme [N] [L] sont mal fondés en leur appel,

- dire et juger M. [W] [L] et Mme [N] [L] irrecevables et mal fondés en leur demande d'interprétation du jugement rendu le 10 avril 2017,

En conséquence,

- les débouter de l'ensemble de leurs demandes, moyens fin et conclusions,

- confirmer le jugement entrepris,

- recevoir Mme [B] [L] en son appel incident et le dire bien fondé,

En conséquence,

- dire et juger que M. [W] [L] et Mme [N] [L] se sont rendus coupables de recel successoral,

- constater en outre que M. [W] [L] et Mme [N] [L] n'ayant pas sollicité la délivrance de leurs legs dans l'année du décès n'ont pu entrer en jouissance des biens de la succession,

En conséquence,

- dire et juger qu'ils devront également restituer les fruits des biens de la succession,

- condamner M. [W] [L] et Mme [N] [L] au paiement de la somme de 4000 € au titre des frais irrépétibles exposés en première instance,

Si par impossible, la cour devait estimer recevable la demande en interprétation du jugement du 10 avril 2017 formulée par les appelants,

- constater la renonciation pure et simple de M. [W] [L] et Mme [N] [L] au bénéfice du legs universel résultant du testament en date du 11 mai 2009 instituant comme légataire universel M. [W] [L] et Mme [N] [L],

- dire nul et de nul effet les déclarations de M. [W] [L] et Mme [N] [L] contenues dans l'acte de notoriété rectificative de Maître [C] en date du 16 juin 2015 et constater le caractère irrévocable de la répudiation de leurs legs,

En conséquence,

- les débouter de leur demande tendant à voir reconnaître leur qualité de légataire universel et la validité de l'acte de notoriété rectificatif en date du 5 septembre 2015 établi par Maître [C],

Y ajoutant,

- condamner M. [W] [L] et Mme [N] [L] à payer à Mme [B] [L] la somme de 4000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais irrépétibles exposés en appel,

- les condamner solidairement aux entiers dépens de l'instance.

Pour un plus ample exposé des éléments de la cause, moyens et prétentions des parties, il est fait renvoi aux écritures susvisées, conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 27 avril 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la demande tendant à voir « confirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions, précisant néanmoins que l'acte de notoriété rectificatif du 16 juin 2015 demeure valide »

L'article 12 du code de procédure civile énonce que le juge tranche le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables.

Il doit donner ou restituer leur exacte qualification aux faits et actes litigieux sans s'arrêter à la dénomination que les parties en auraient proposée.

En l'espèce, [W] et [N] [L] demandent confirmation de la décision dont appel sauf à faire préciser que l'acte de notoriété rectificatif du 16 juin 2015 demeure valide.

Mme [B] [L] conclut en faisant notamment valoir qu'il s'agit d'une demande d'interprétation et que sous couvert d'une demande d'interprétation, les appelants tentent de faire valider un acte de notoriété rectificatif et de modifier ses droits pourtant reconnus.

La précision que souhaitent voir apporter les appelants à la décision dont appel doit en effet être qualifiée de demande d'interprétation de la décision querellée.

Or, sous couvert d'une précision relative à la validité de l'acte de notoriété rectificatif du 16 juin 2015, M. et Mme [L] tentent de faire valoir des droits sur la succession de leur tante alors même qu'ils demandent confirmation de la décision les ayant condamnés à restituer à l'héritière ab intestat la totalité de l'actif successoral de la défunte, restitution à laquelle ils ne s'étaient pas opposés en premier instance.

En conséquence, la décision du 10 avril 2017 sera confirmée en ce qu'elle a condamné solidairement [W] et [N] [L] à payer à Mme [B] [M] la somme de 23 925,97 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 5 septembre 2014, sans qu'il soit ajouté que l'acte de notoriété rectificatif du 16 juin 2015 demeure valide.

Sur le recel

Il résulte de l'article 778 du Code civil que sans préjudice de dommages-intérêts, l'héritier qui a recelé des biens ou des droits de succession ou dissimulé l'existence d'un cohéritier est réputé accepter purement et simplement la succession, nonobstant toute renonciation ou acceptation à concurrence de l'actif net, sans pouvoir prétendre à aucune part dans les biens ou les droits détournés ou recelés. Les droits revenant à l'héritier dissimulé et qui ont ou auraient pu augmenter ceux de l'auteur de la dissimulation sont réputés avoir été recelés par ce dernier.

Lorsque le recel a porté sur une donation rapportable ou réductible, l'héritier doit le rapport ou la réduction de cette donation sans pouvoir y prétendre à aucune part.

L'héritier receleur est tenu de rendre tous les fruits et revenus produits par les biens recelés dont il a eu la jouissance depuis l'ouverture de la succession.

Ce texte vise ainsi toutes les fraudes au moyen desquelles un héritier cherche, au détriment de ses cohéritiers, à rompre l'égalité du partage, soit qu'il divertisse des effets de la succession en se les appropriant indûment, soit il les recèle en dissimulant sa possession dans les circonstances où ils seraient tenus, d'après la loi, de la déclarer.

Un héritier ne peut être frappé des peines du recel que lorsque est rapportée la preuve de son intention frauduleuse, constitutive de ce délit civil.

En l'espèce, Mme [M] soutient que les appelants ne pouvaient ignorer que leur tante avait eu une fille.

Elle en veut pour preuve l'existence du second des trois testaments successivement rédigés par la défunte ayant institué sa fille Mlle [P] [M] en qualité de légataire universelle. Elle fait remarquer que dans le testament du 8 décembre 1986, outre l'adresse de M. et Mme [M], il est précisé que [P] [M] est fille de Mme et M. [J] [M], alors que dans l'acte de notoriété, il est uniquement mentionné Mlle [P] [M], fille de M. [J] [M]. Elle en déduit qu'il s'agit d'une volonté délibérée de l'écarter de la succession.

Elle affirme qu'il existerait un premier livret de famille de mère célibataire mentionnant son existence qui aurait été délivré par la mairie du [Localité 1] et elle s'étonne de ce que les appelants soient en possession du second livret de famille délivré lors du mariage avec M. [H] et non du premier.

Mais, ces éléments sont insuffisants pour affirmer que les appelants connaissaient l'existence même de Mme [B] [L] et que dès lors, ils ont voulu conserver la totalité des avoirs de la succession au détriment de l'intimée. En effet, le seul livret de famille produit aux débats ne mentionne pas l'existence d'un enfant. Par ailleurs, le deuxième testament rédigé instituant [P] [L] ne permet pas de connaître son lien de filiation avec sa grand-mère et il n'est pas rapporté de preuve suffisante que les appelants avaient connaissance de ce lien.

C'est donc par une juste appréciation des faits et à bon droit, par des motifs pertinents, que la cour adopte que le premier juge a débouté Mme [B] [L] de sa demande de condamnation au titre d'un recel.

Sur la demande incidente relative à la restitution des fruits des biens de la succession

Mme [B] [L] demande de voir constater en outre que M. [W] [L] et Mme [N] [L] n'ayant pas sollicité la délivrance de leurs legs dans l'année du décès, ils n'ont pu entrer en jouissance des biens de la succession, et qu'en conséquence, il soit dit et jugé qu'ils devront également restituer les fruits des biens de la succession.

Mais, il résulte de la confirmation de la décision dont appel que M. et Mme [L] ont renoncé, par acte de notoriété du 5 septembre 2012, à faire valoir leur qualité de légataire universel.

Dès lors, cette demande incidente est sans objet.

Sur les dépens et les frais irrépétibles de première instance

Mme [B] [L] sollicite la réformation de la décision dont appel en ce qu'elle l'a déboutée de sa demande présentée au titre des frais irrépétibles.

Cependant, c'est par une juste appréciation de l'équité et de la nature du litige que la première juridiction a rejeté la demande présentée par Mme [B] [L].

En conséquence, la décision du 10 avril 2017 sera confirmée sur ce point également.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

M. et Mme [L] qui succombent seront condamnés à supporter les dépens.

La nature du litige commande de ne pas faire application de l'article 700 du code de procédure civile en faveur de l'une ou l'autre des parties.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant, par arrêt réputé contradictoire, après en avoir délibéré conformément à la loi et en dernier ressort,

CONFIRME la décision du 10 avril 2017 en toutes ses autres dispositions critiquées ;

Y ajoutant

DÉBOUTE [W] et [N] [L] de leur demande visant à préciser que « l'acte de notoriété rectificatif du 16 juin 2015 demeure valide » ;

CONDAMNE [W] et [N] [L] à supporter les dépens.

DIT n'y avoir lieu à faire application de l'article 700 du code de procédure civile en faveur de l'une ou l'autre des parties.

LE GREFFIER LA PRESIDENTE

D. IVARA S. DODIVERS


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 2e chambre de la famille
Numéro d'arrêt : 17/03342
Date de la décision : 07/07/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-07-07;17.03342 ?
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