La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

23/06/2022 | FRANCE | N°21/04834

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 2e chambre civile, 23 juin 2022, 21/04834


Grosse + copie

délivrées le

à































COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



2e chambre civile



ARRET DU 23 JUIN 2022



Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 21/04834 - N° Portalis DBVK-V-B7F-PDGR



Décision déférée à la Cour : Jugement du 05 juillet 2021

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE NARBONNE

N° RG 19/00012







APPELANTE :



SCI CAMAPI



représentée par son gérant, domicilié ès qualités au siège social

[Adresse 1]

[Localité 6]

Représentée par Me AUCHE-HEDOU substituant Me Jacques Henri AUCHE de la SCP AUCHE HEDOU, AUCHE - AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER







INTIMEE :



SA BANQU...

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

2e chambre civile

ARRET DU 23 JUIN 2022

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 21/04834 - N° Portalis DBVK-V-B7F-PDGR

Décision déférée à la Cour : Jugement du 05 juillet 2021

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE NARBONNE

N° RG 19/00012

APPELANTE :

SCI CAMAPI

représentée par son gérant, domicilié ès qualités au siège social

[Adresse 1]

[Localité 6]

Représentée par Me AUCHE-HEDOU substituant Me Jacques Henri AUCHE de la SCP AUCHE HEDOU, AUCHE - AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER

INTIMEE :

SA BANQUE POPULAIRE DU SUD

société anonyme coopérative de banque populaire à capital variable régie par les articles L.512-2 et suivants du code monétaire et financier et l'ensemble des textes relatifs aux Banques Populaires et aux établissements de crédits, intermédiaire d'assurance inscrit à l'ORIAS sous le n°07 02 3534 - TVA n° FR29 554200808, inscrite au RCS de [Localité 3] sous le n°SIREN 554 200 808, venant aux droits des sociétés BANQUE DUPUY DE PARSEVAL, BANQUE MARZE et CREDIT MARITIME à compter du 1er juin 2019 suite à des opérations de fusion-absorption, agissant par son représentant légal, domicilié ès qualités au siège social

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me SALLELES substituant Me Gilles BERTRAND de la SCP ROZE, SALLELES, PUECH, GERIGNY, DELL'OVA, BERTRAND, AUSSEDAT , SMALLWOOD, avocat au barreau de MONTPELLIER

Ordonnance du 5 août 2021 d'autorisation d'assigner à jour fixe (n°RG 21/00102)

COMPOSITION DE LA COUR :

En application de l'article 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 09 MAI 2022, en audience publique, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par l'article 804 du même code, devant la cour composée de :

M. Eric SENNA, Président de chambre

Mme Myriam GREGORI, Conseillère

Mme Nelly CARLIER, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffiers lors des débats : Mme Ginette DESPLANQUE.

ARRET :

- contradictoire ;

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour fixé au 16 juin 2022 prorogé au 23 juin 2022, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par Monsieur Eric SENNA, Président de chambre, et par Mme Camille MOLINA, Greffier.

*

**

EXPOSE DU LITIGE

Suivant commandement de payer valant saisie immobilière délivré le 21 décembre 2018 à la SCI CAMAPI et publié le 5 février 2019 au SPF de Narbonne (volume 2019 S n° 8), la SA BANQUE DUPUY DE PARSEVAL agissant en vertu de la copie exécutoire d'un acte contenant prêt reçu par Maître [P], notaire associé à Narbonne le 21 juin 2012, a fait saisir divers biens et droits immobiliers dans un ensemble immobilier situé à [Adresse 7], constitués des lots n° 8 et 11 et cadastrés section AN [Cadastre 4] pour une contenance de 2 a 82 ca, afin d'obtenir paiement de la somme totale de 237 900,64 euros.

Le 1er avril 2019, la SA BANQUE DUPUY DE PARSEVAL a fait assigner la SCI CAMAPI à l'audience d'orientation du juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Narbonne.

Par jugement d'orientation contradictoire en date du 5 juillet 2021, le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Narbonne a notamment :

- déclaré irrecevable la demande de nullité de 1'acte de prêt notarié du 21 juin 2012 formée par la SCI CAMAPI ;

- débouté la SCI CAMAPI de ses demandes en annulation et en caducité du cornmandement de payer du 21 décembre 2018 ;

- s'est déclaré incompétent pour connaître de la demande en dommages-intérêts pour engagement de la responsabilité contractuelle de la SA BANQUE POPULAIRE DU SUD venant aux droits de la BANQUE DUPUY ;

- constaté que les conditions des articles L 311-1 la L 311- 6 du code des procédures civiles d'exécution sont réunies ;

- fixé le montant de la créance du créancier poursuivant à la somme de 237 900,64 euros en principal et intérêts arrêtés au 19 décembre 2018, intérêts postérieurs en mémoire ;

- constaté la défaillance de la SCI CAMAPI et autorisé la SA BANQUE POPULAIRE DU SUD venant aux droits de la BANQUE DUPUY DE PARSEVAL à poursuivre la vente aux enchères publiques du bien saisi sur les conditions définies dans le cahier des conditions de la vente ;

- rappelé que la mise à prix est fixée à la somme de 80 000 euros ;

- dit qu'il y sera procédé à 1'audience du lundi 18 octobre 2021 ;

- dit que l'immeuble pourra être visité avec le concours de la SCP [O] huissiers de justice à Narbonne, laquelle pourra se faire assister si besoin est, de deux temoins, d'un serrurier et de la force publique dans les 30 jours précédant la date de la vente ;

- dit n'y avoir lieu à application des dispositions de1'article 700 du code de procédure ;

- employé les dépens en frais privilégiés de saisie immobiliere.

Par acte reçu au greffe de la Cour le 27 juillet 2021, la SCI CAMAPI a relevé appel de ce jugement.

Suivant exploit d'huissier en date du 20 août 2021, la SCI CAMAPI autorisée par ordonnance du 5 août 2021 rendue par le président de la chambre délégué par le premier président de la Cour a fait assigner à jour fixe la SA BANQUE POPULAIRE DU SUD venant aux droits de la BANQUE DUPUY DE PARSEVAL, créancier poursuivant, à l'audience du 17 janvier 2022, l'assignation ayant été déposée au greffe de la Cour par la voie électronique le 9 septembre 2021.

A l'audience du 17 janvier 2022, l'affaire a été renvoyée à l'audience du 9 mai 2022.

Aux termes de ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 6 mai 2022, auxquelles il est expressément renvoyé pour un exposé complet de ses moyens et prétentions, la SCI CAMAPI demande à la Cour :

' In limine litis

- de prononcer la nullité de l'acte du 21 juin 2012 servant de bases aux poursuites ;

- de prononcer la nullité du commandement de payer du 21 décembre 2018.

' En tout état de cause,

- de constater l'inexistence du contrat de prêt servant de base aux poursuites pour n'avoir pas été valablement formé ;

- de déclarer caduc le commandement de payer du 21 décembre 2018 ;

- de déclarer irrecevables l'ensemble des demandes de la BANQUE DUPUY DE PARSEVAL ;

- de l'en débouter.

' A titre infiniment subsidiaire, d'accorder à la SCI CAMAPI les plus larges délais afin de vendre amiablement le bien objet de la saisie.

' Reconventionnellement,

- de condamner la SA BANQUE POPULAIRE DU SUD venant aux droits de la SA DUPUY DE PARSEVAL à payer à la SCI CAMAPI la somme de 237 900,64 € au titre de dommages et intérêts ;

- de condamner la SA BANQUE POPULAIRE DU SUD venant aux droits de la SA DUPUY DE PARSEVAL à payer à la SCI CAMAPI la somme de 5 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- de condamner la SA BANQUE POPULAIRE DU SUD venant aux droits de la SA DUPUY DE PARSEVAL aux entiers dépens, distraits au profit de Maître AUCHE, avocat au barreau de Montpellier, en application de l'article 699 du code de procédure civile.

Au dispositif de ses dernières écritures transmises par voie électronique le 17 janvier 2022, auxquelles il est expressément renvoyé pour un exposé complet de ses moyens et prétentions, la SA BANQUE POPULAIRE DU SUD venant aux droits de la SA DUPUY DE PARSEVAL demande à la Cour de :

' confirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions, sauf en ce qui concerne la date de l'audience de vente forcée qui devra être fixée par le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Narbonne au vu de l'arrêt à intervenir.

' Y ajoutant,

- condamner la SCI CAMAPI à payer à la SA BANQUE POPULAIRE DU SUD la somme de 5 000 € par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens d'appel.

' A défaut et en cas d'infirmation du jugement dont appel :

* débouter la SCI CAMAPI de l'intégralité de ses exceptions de procédure, ainsi que de ses demandes principales et reconventionnelles, si ce n'est de les déclarer irrecevables.

* fixer ainsi qu'il suit le montant de la créance de la SA BANQUE POPULAIRE DU SUD venant aux droits de la SA BANQUE DUPUY DE PARSEVAL en principal, frais, intérêts et autres accessoires, au jour du jugement à intervenir :

- capital restant dû au 21/01/2018 113 907,48 €

- échéances impayées au 06/02/2018

94 638,47 €

- intérêts de retard sur échéances impayées au 05/03/2018

17 051,64 €

- intérêts de retard à 7,40 % du 06/03/2018 au 18/12/2018

12 303,05 €

- intérêts de retard à 7,40 % du 19/12/2018 au règlement

mémoire

- frais judiciaires

mémoire

' Subsidiairement, et en cas d'annulation du contrat de prêt, fixer le montant de la créance de la SA BANQUE POPULAIRE DU SUD venant aux droits de la SA BANQUE DUPUY DE PARSEVAL à la somme de 170 694,92€, augmentée des intérêts légaux dus à compter du 2 août 2018.

' En tout état de cause,

* déterminer les modalités de poursuite de la procédure :

1°) Au cas où la vente forcée serait ordonnée :

En fixer la date et, conformément aux dispositions de l'article R.322-26 du code de procédures civiles d'exécution :

- désigner Maître [O] huissier de justice, [Adresse 5], rédacteur du PV descriptif, pour assurer la visite des biens saisis, assistée si besoin, d'un serrurier et de la force publique et d'un expert chargé d'établir ou d'actualiser les diagnostics imposés par la réglementation en vigueur ;

- ordonner l'emploi des dépens en frais privilégiés de vente en ce compris les frais de visite et de diagnostics, au profit de la SCP HABEAS AVOCATS ET CONSEILS société civile professionnelle d'avocats inscrits au Barreau de Narbonne dont le siège social est [Adresse 8], avocats poursuivants.

2°) Au cas où la vente amiable serait autorisée :

- s'assurer qu'elle peut être conclue dans les conditions satisfaisantes compte tenu de la situation du bien, des conditions économiques du marché et des diligences éventuelles du débiteur ;

- fixer le montant de la créance du créancier poursuivant en principal, frais, intérêts et accessoires au jour du jugement à intervenir tel qu'évoqué ci-dessus ;

- fixer le montant du prix en deçà duquel l'immeuble ne peut être vendu, eu égard aux conditions particulières de la vente ;

- dire que le prix de vente, en vue de sa distribution, sera consigné entre les mains du séquestre ci-après : Monsieur le Bâtonnier de l'Ordre des avocats, Caisse des adjudications, Ordre des Avocat à [Localité 6] ;

- taxer les frais de poursuite de la SCP HABEAS AVOCATS ET CONSEILS société civile professionnelle d'avocats inscrits au barreau NARBONNE dont le siège social est [Adresse 8], avocats poursuivants ;

- Fixer la date de l'audience à laquelle l'affaire sera appelée dans un délai qui ne peut excéder quatre mois ;

* ordonner l'emploi des dépens en frais privilégiés de vente.

MOTIFS

Sur la nullité du commandement valant saisie immobilière

Aux termes de l'article L. 311-2 du code de procédure civile, tout créancier muni d'un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible peut procéder à une saisie immobilière.

Les actes notariés revêtus de la formule exécutoire constituent des titres exécutoires en application de l'article L. 111-3-4° du même code.

En l'espèce, la Banque Poulaire du Sud justifie fonder la saisie immobilière sur la copie d'un acte notarié établi le 21 juin 2012 et revêtu de la formule exécutoire, ce qui n'est pas contesté.

La SCI CAMAPI soulève la nullité du commandement de payer valant saisie immobilière du 21 décembre 2018 en l'absence de titre exécutoire valable aux motifs d'une part de l'absence d'offre préalable de prêt ayant précédé l'acte authentique de prêt du 21 juin 2012 fondant la saisie immobilière, en violation des dispositions de l'article L 312-7 ancien du code de la consaommation, rendant ainsi cet acte nul et subsidiairement inexistant et d'autre part de l'absence du caractère authentique de l'acte de prêt, à défaut de contenir en annexe le contrat de prêt du 3 mai 2012 visé par l'acte authentique et contenant l'accord de la SCI CAMAPI au contrat d'adhésion établi par le prêteur et ce, en violation des articles 21 et 22 du décret du 26 novembre 1971 modifié par décret du 10 août 2005.

S'agissant de l'exception de nullité du contrat de prêt soulevée par l'appelante, la Banque Populaire du Sud invoque l'irrecevabilité de l'exception de nullité du prêt en faisant valoir que la SCI CAMAPI a exécuté partiellement le contrat de prêt en cause en réglant des échéances jusqu'en juin 2013, de sorte qu'elle ne saurait se prévaloir des dispositions de l'article 1185 du code civil sur l'absence de prescription de l'exception de nullité qui ne s'applique que lorsqu'un contrat n'a reçu aucune exécution. Subsidiairement, elle expose que l'action en annulation de l'acte de prêt était prescrite bien avant l'introduction de la présente instance, par application de la presciption quinquennale de l'article 2224 du code civil, que le prêt ait été souscrit par emprunteur professionnel ou simple consommateur.

A ce titre, l'appelante soutient la recevabilité de l'exception de nullité soulevée, le délai de prescription de l'action en nullité n'ayant pu commencer à courir selon elle, qu'au jour où son conseil l'a informée des manquements de la Banque, soit après réception du commandement valant saisie immobilière, le délai de prescription de 5 ans n'étant donc pas expiré. Elle ajoute, en tout état de cause que la prescription ne lui est pas opposable dans la mesure où l'exception de nullité est opposée comme moyen de défense et non comme demande principale de sorte que le délai de prescription ne court qu'à compter de l'acte introductif d'instance.

Il convient de rappeler qu'aux termes de l'article 9 de l'ordonnance n° 2016- 131 du 10 février 2016, ayant institué le nouvel article 1185 du code civil invoqué par l'intimée, les contrats conclus avant la date du 1er octobre 2016, date d'entrée en vigueur de l'ordonnance, demeurent soumis à la loi ancienne, ce qui est le cas en l'espèce du contrat signé le 21 juin 2012.

Dans le cadre du régime antérieur à l'ordonnance précitée, applicable à l'espèce, il est de jurisprudence constante que la prescription d'une action en nullité ne fait pas obstacle au droit d'opposer cette nullité comme exception en défense à l'action, ce qui est le cas en l'espèce, la demande tendant à la nullité de l'acte pour défaut d'offre préalable de prêt étant invoquée par voie d'exception par la SCI CAMAPI, défenderesse à l'action en recouvrement forcée engagée par la banque et non par voie d'action principale.

Il est de principe que l'exception de nullité ne se prescrit pas et est donc perpétuelle, en dépit de la prescription de l'action en nullité. Néanmoins cette règle ne s'applique que si l'action en exécution de l'obligation litigieuse a été introduite après l'expiration du délai de prescription de l'action en nullité. Par ailleurs, l'exception de nullité n'est recevable que si elle tend à faire échec à la demande d'exécution d'un acte juridique qui n'a pas encore été exécutée ou qui n'a pas commencé à être exécutée.

Les parties s'accordent, en l'espèce, pour faire application des dispositions de l'article 2244 du code civil qui prévoient que les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettent de l'exercer.

La SCI CAMAPI ne saurait invoquer avoir eu connaissance de l'absence d'une offre préalable de prêt postérieurement à la signature de l'acte authentique, lequel ne vise l'existence d'aucune offre et n'en contient aucune, ce qui n'est pas contesté. Elle ne saurait davantage prétendre ne pas avoir été informée de l'exclusion du prêt accordé du champ d'application des dispositions des articles L 312-1 et suivants du code de la consommation et donc du fait que la signature d'une offre préalable n'était pas imposée légalement, cette exclusion étant expressément mentionnée en page 5 de l'acte authentique dans le paragraphe " financement par un prêt", comme le relève à juste titre le premier juge.

C'est donc à bon droit que le premier juge a retenu comme point de départ du délai de la prescription quinquennale la date de la signature de l'acte authentique de prêt du 21 juin 2012, date à laquelle la SCI CAMAPI disposait de tous les éléments de connaissance nécessaires pour lui permettre d'exercer une action en nullité du contrat de prêt et a constaté que le délai de prescription de cette action avait expiré le 22 juin 2017, soit à une date antérieure à l'engagement de la procédure de saisie immobilière.

Dés lors, l'exception de nullité soulevée dans le cadre de la présente procédure par la SCI CAMAPI a bien été présentée à l'issue du délai de prescription de l'action en nullité.

Néanmoins, elle ne peut être déclarée recevable que si le contrat de prêt en cause n'a pas été exécuté ou commencé à l'être.

Or, il ressort des pièces produites et particulièrement de la mise en demeure du 2 août 2018 adressée à la SCI CAMAPI que celle-ci a réglé les échéances du prêt en cause à compter du 21 juillet 2012 jusqu'à l'échéance de juin 2013 en partie, ce qui n'est pas contesté par l'appelante. Le contrat en cause a donc reçu une exécution partielle.

Il convient, en conséquence, de confirmer la décision entreprise en ce qu'elle a déclaré irrecevable l'exception de nullité du prêt soulevée par voie d'exception par la SCI CAMAPI.

Sur l'absence de caractère authentique de l'acte de prêt, et ainsi que le soutient à juste titre l'intimée, il ressort des termes mêmes de cet acte que s'il est fait référence, en effet, en sa page 5 au paragraphe "financement par un prêt" à " un contrat de prêt en date du 5 mai 2012 dont un exemplaire est annexé", l'exemplaire annexé en question est, en réalité, un pouvoir donné par la Banque à son dirigeant à l'effet de consentir à la SCI CAMAPI un prêt destiné à l'acquisition des biens immobiliers en cause avec un certain nombre de caractéristiques et à signer l'acte définitif de prêt. Cet exemplaire est revêtu de la mention selon laquelle il est annexé à la minute de l'acte reçu par le notaire le 21 juin 2012, ainsi que de la signature de ce dernier et est donc conforme aux dispositions des articles 21 et 22 du décret cités par l'appelante et qui prévoient que l'acte notarié porte mention des documents qui lui sont annexés et que lorsque l'acte est établi sur support papier, les pièces annexées à l'acte sont revêtues d'une mention constatant cette annexe et signées du notaire.

En conséquence, la mention dans l'acte selon laquelle ce document daté du 5 mai 2012 est un contrat de prêt est une simple erreur matérielle de rédaction du notaire instrumentaire sans aucune incidence sur le caractère authentique de l'acte et son caractère exécutoire.

Il ne ressort, par ailleurs, d'aucune autre mention figurant à l'acte authentique qu'un contrat de prêt en date du 5 mai 2012 ait été signé entre les parties, préalablement à la signature de l'acte notarié, alors même que la SCI CAMAPI se prévaut dans le cadre de la présente instance de l'absence de toute offre préalable de prêt qui lui aurait été soumise.

En outre, même à supposer établi contrairement à cette mention figurant dans la copie exécutoire que le notaire ait omis de joindre l'annexe en cause à la minute de l'acte, une telle inobservation de cette obligation ne saurait faire perdre davantage à l'acte son caractère exécutoire alors qu'il n'est pas prétendu que cette annexe ait été établie par le notaire mais au contraire par la banque et que cette annexe ne participe donc pas de la force exécutoire de l'acte.

C'est donc à bon droit que le premier juge a rejeté ce moyen de nullité du contrat de prêt et du commandement de payer valant saisie immobilière. Il convient, en conséquence, de confirmer la décision entreprise à ce titre.

Sur la caducité du commandement valant saisie immobilière

La SCI CAMAPI invoque la caducité du commandement de payer valant saisie immobilière à défaut pour le créancier saisissant de justifier de l'accomplissement des formalités requises par les articles R 322-6 et R 322-10 du code des procédures civiles d'exécution relatifs à la dénonciation du commandement de payer valant saisie immobilière aux créanciers inscrits et au dépôt au greffe du juge de l'exécution du cahier des conditions de vente.

C'est par des motifs pertinents que la Cour adopte que le premier juge a rejeté ce moyen dés lors que les dispositions de l'article R 322-6 précité n'ont pas lieu à s'appliquer en l'absence de créanciers inscrits (ainsi que le confirme le relevé des formalités publiées au service de la publicité foncière versé aux débats) et que le juge de l'exécution a constaté que le dépôt du cahier des conditions de vente avait bien été déposé à son greffe le 5 avril 2019, soit dans les 5 jours ouvrables suivant l'assignation délivrée le 1er avril 2019.

Il convient donc de confirmer la décision entreprise à ce titre.

Sur la demande reconventionnelle en dommages et intérêts pour défaut d'information, de conseil et de mise en garde de la Banque

La SCI CAMAPI sollicite la condamnation de l'intimée à lui payer des dommages et intérêts équivalents au montant de la créance de la Banque à son encontre en invoquant la responsabilité contractuelle de cette dernière qui a manqué à ses obligations d'information, de conseil et de mise en garde en lui octroyant le prêt en cause.

L'intimée soulève l'incompétence du juge de l'exécution pour statuer sur cette demande.

Aux termes de l'article L. 213-6 du code de l'organisation judiciaire le juge de l'exécution connaît des difficultés relatives aux titres exécutoires et des contestations qui s'élèvent à l'occasion de l'exécution forcée, même si elles portent sur le fond du droit, à moins qu'elles n'échappent à la compétence de l'ordre judiciaire.

La demande formée par la SCI CAMAPI aux fins de voir juger que la SA Banque Populaire du Sud a manqué à ses obligations d'information, de conseil et de mise en garde justifiant l'octroi de dommages et intérêts à son profit constitue une action en responsabilité contractuelle qui ne relève pas des pouvoirs du juge de l'exécution, dés lors que cette action n'a pas trait aux difficultés relatives au titre exécutoire ou à la contestation s'élevant à l'occasion de l'exécution forcée et impliquée par cette exécution, ainsi que rappelé à bon droit par le premier juge.

S'agissant d'une question qui ne met pas en cause la compétence du juge de l'exécution, mais seulement son pouvoir de statuer à cet égard, il convient d'infirmer la décision entreprise en ce qu'elle a déclaré le juge de l'exécution incompétent pour statuer sur cette demande et statuant à nouveau de ce chef, il y a lieu de déclarer irrecevable cette demande formée par la SCI CAMAPI.

Sur la demande subsidiaire aux fins d'autorisation de vente amiable

La SCI CAMAPI forme une demande aux fins d'autorisation de vente amiable des biens faisant l'objet de la saisie.

Indépendamment de l'irrecevabilité d'une telle demande formée pour la première fois en cause d'appel en application de l'article R 311-5 du code des procédures civiles d'exécution et qui n'a pas été soulevée par l'intimée, laquelle déclare seulement s'y opposer, il convient de rappeler que cette demande s'apprécie au regard des démarches de mise en vente du bien et notamment de la production par le débiteur saisi d'un mandat de vente du bien saisi auprès d'un professionnel de l'immobilier ou d'estimations immobilières et ce, conformément à l'article R 322-15 du code des procédures civiles d'exécution, aux termes duquel le juge n'autorise la vente amiable qu'après s'être assuré qu'elle peut être conclue dans des conditions satisfaisantes compte tenu de la situation du bien, des conditions économiques du marché et des diligences éventuelles du débiteur.

Or, en l'espèce, la SCI CAMAPI n'invoque et ne justifie d'aucune diligence particulière démontrant sa volonté de parvenir à la vente amiable du bien.

Il y a lieu, en conséquence, de rejeter la demande d'autorisation de vente amiable formée par la SCI CAMAPI.

Sur les autres dispositions du jugement entrepris

Il convient de relever que les autres chefs du jugement entrepris relatifs au montant de la créance, au prononcé de la vente forcée et à ses modalités ne sont pas critiqués en cause d'appel.

Il convient donc de confirmer le jugement entrepris en ces autres dispositions.

Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens

Il n'est pas inéquitable de laisser à la charge des parties les frais irrépétibles qu'elles ont pu exposer. Leur demande à ce titre sera rejetée.

Il y a lieu de laisser les dépens d'appel à la charge de la SCI CAMAPI qui succombe en ses demandes.

PAR CES MOTIFS,

La cour,

Confirme le jugement entrepris sauf en ce qu'il s'est déclaré incompétent pour connaître de la demande en dommages-intérêts pour engagement de la responsabilité contractuelle de la SA BANQUE POPULAIRE DU SUD venant aux droits de la BANQUE DUPUY;

Statuant à nouveau de ce chef d'infirmation,

Déclare irrecevable la demande reconventionnelle en dommages et intérêts pour défaut d'information, de conseil et de mise en garde de la banque formée par la SCI CAMAPI ;

Et y ajoutant,

Rejette la demande formée par la SCI CAMAPI aux fins d'autorisation de vente amiable ;

Renvoie les parties devant le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Narbonne pour la suite de la procédure de saisie immobilière ;

Déboute les parties de leur demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile ;

Laisse à la charge de la SCI CAMAPI les dépens d'appel.

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 2e chambre civile
Numéro d'arrêt : 21/04834
Date de la décision : 23/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-23;21.04834 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award