Grosse + copie
délivrées le
à
COUR D'APPEL DE MONTPELLIER
3e chambre civile
ARRET DU 23 JUIN 2022
Numéro d'inscription au répertoire général :
N° RG 20/04555 - N° Portalis DBVK-V-B7E-OXFA
Décision déférée à la Cour :
Ordonnance du 15 octobre 2020
PRESIDENT DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE CARCASSONNE
N° RG 20/00341
APPELANT :
Monsieur [N] [P]
né le 20 Septembre 1974 à Casablanca
de nationalité Française
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représenté par Me Yvan MONELLI de la SELARL MBA & ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER, substitué à l'audience par Me Laure D'HAUTEVILLE de la SELARL MBA & ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER
INTIMEE :
Madame [I] [G]
née le 13 Septembre 1970 à [Localité 4]
de nationalité Française
[Adresse 3]
[Localité 2]
Représentée par Me Stéphane CABEE de la SCP CABEE-BIVER-SPANGHERO, avocat au barreau de CARCASSONNE
(ordonnance du 10 juin 2021 d'irrecevabilité des conclusions)
Ordonnance de clôture du 04 Février 2022
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 11 FEVRIER 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Marie-Claude SIMON, Vice-présidente placée, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
M. Thierry CARLIER, Conseiller faisant fonction de président de chambre
M. Fabrice DURAND, Conseiller
Mme Marie-Claude SIMON, Vice-présidente placée par ordonnance du premier président du 1er décembre 2021
Greffier, lors des débats : Mme Camille MOLINA
ARRET :
- contradictoire ;
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour fixé au 7 avril 2022 prorogé au 9 juin 2022, au 16 juin 2022 puis au 23 juin 2022, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;
- signé par M. Thierry CARLIER, Conseiller faisant fonction de président de chambre, et par Mme Camille MOLINA, Greffière.
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EXPOSE DU LITIGE
Mme [I] [G] se portait acquéreur le 21 janvier 2021 d'une maison d'habitation située [Adresse 3] auprès de M. [N] [P].
Le lendemain de l'acquisition se produisait un dégât des eaux dans la maison, au niveau du conduit de cheminée et dans les chambres.
Par exploit du 13 août 2020 Mme [I] [G] assignait M. [N] [P], devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Carcassonne en paiement d'une provision de 94 400 euros à valoir sur les travaux de reprise des désordres et de la remise en état de la maison.
Par ordonnance contradictoire du 15 octobre 2020, le juge des référés du tribunal judiciaire de Carcassone a :
-condamné M. [P] à payer à la somme de 8 911 euros à valoir sur le montant des travaux de reprises et l'indemnisation des conséquences du sinistre ;
-condamné M. [P] aux entiers dépens ;
-condamné M. [P] à payer à Mme [I] [G] la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;
- rejeté toutes autres demandes des parties.
Le 21 octobre 2020, M. [N] [P] a interjeté appel de l'ordonnance de référé du tribunal judiciaire de Carcassone du 15 octobre 2020, à l'encontre de Mme [I] [G].
Par ordonnance du 10 juin 2021, le président de chambre a prononcé l'irrecevabilité des conclusions de Mme [I] [G] remises au greffe le 9 mars 2021 en application de l'article 905-2 du code de procédure civile.
Vu les conclusions de M. [N] [P], remises au greffe le 20 novembre 2021.
MOTIFS DE L'ARRÊT
I/ Sur les conséquences de l'irrecevabilité des conclusions de l'intimée
En application de l'article 472 du code de procédure civile, si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond. Le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l'estime régulière, recevable et bien fondée.
Il sera précisé qu'en l'état de l'irrecevabilité déclarée des conclusions de l'intimé et par l'effet dévolutif de l'appel, la cour pour statuer sur l'appel, examinera les motifs du jugement ayant accueilli les prétentions de l'intimé en première instance.
II/ Sur l'existence des vices cachés
M. [N] [P] conclut à l'infirmation de l'ordonnance. Il fait valoir qu'il existe une contestation sérieuse, l'acte de vente comportant une clause d'exclusion de garantie. Il soutient qu'il ignorait le vice affectant le bien vendu, contrairement à l'attestation de M. [J] qui ne justifie d'aucun devis. Il précise qu'aucune déclaration de sinistre n'a été effectuée entre 2014 et 2020 et que Mme [I] [G] a fait procédé au ramonage avant l'achat sans que le technicien ne relève aucun problème.
En application de l'article 835 du code de procédure civile, dans sa version applicable au litige, le président du tribunal judiciaire ou le juge du contentieux de la protection dans les limites de sa compétence peuvent toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.
Dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, ils peuvent accorder une provision au créancier, ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.
Le juge des référés peut accorder une provision lorsque l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable.
En vertu de l'article 1641 du code civil le vendeur n'est pas tenu des vices apparents et dont l'acheteur a pu se convaincre lui-même.
En application de l'article 1643 du code civil le vendeur est tenu des vices cachés, quand bien même il ne les aurait pas connus, à moins que, dans ce cas, il n'ait stipulé qu'il ne sera obligé à aucune garantie.
Il ressort des pièces du dossier et de l'ordonnance, que la vente de la maison d'habitation située [Adresse 3] intervenue le 21 janvier 2021 entre M. [N] [P] à Mme [I] [G] est conclue moyennant l'engagement de « l'acquéreur de prendre le bien dans l'état où il se trouve au jour de l'entrée en jouissance, sans recours contre le vendeur pour quelque cause que ce soit notamment en raison -des vices apparents, - des vices cachés. S'agissant des vices cachés, il est précisé que cette exonération de garantie ne s'applique pas (...) s'il est prouvé par l'acquéreur dans les délais légaux, que les vices cachés étaient en réalité connus de l'acquéreur ».
Par courrier du 28 janvier 2020 adressé à Mme [I] [G], par mail à 11h49, [S] [J], en qualité de gérant de la société [J] écrit « je vous confirme que la souche de cheminée de votre maison présente des fissures et un enduit dégradé. J'ai aussi noté une absence de chapeau. Le reste de votre toiture ne présente aucun défaut. Les dégradations sur la souche de cheminée révèlent un manque d'étanchéité et sont à l'origine des fuites que nous avons pu constater ».
Par courrier du même jour envoyé par courriel à 17h13, il complète son courrier en mentionnant « Les dégradations sur la souche de cheminée révèlent un manque d'étanchéité et sont à l'origine des fuites que nous avons pu constater. Ces dégradations avaient été portées à la connaissance de l'ancien propriétaire, M. [P], au moment des travaux de rénovation de la toiture que la SARL [J] a réalisé en 2014 ».
Selon facture du 18 mars 2014, établie au nom de M. [N] [P], la SARL [J] facture " La réfection complète de la couverture ".
Au terme d'un relevé de sinistre du 4 février 2020, Mme [T] [X], agissant pour le compte de la compagnie Filia Maif certifie que M. [N] [P] a assuré un bien immobilier sis [Adresse 3] du 11 juin 2014 au 21 janvier 2020 et qu'aucun sinistre n'est survenu au cours de cette période.
Il résulte de ce qui précède et de l'ordonnance, qui ne fait état d'aucun constat d'huissier mais des photographies produites en première instance, que les dégradations de la souche de la cheminée sont anciennes et constituées par des fissures qui sont apparentes.
Si la société [J], dont il n'est pas contesté qu'elle est intervenue pour la réfection complète de la toiture en 2014, indique dans un simple courrier complémentaire, qu'elle a informé M. [N] [P] de ces " dégradations " en 2014, ces déclarations, qui ne sont pas reprises dans une attestation dans les formes de l'article 202 du code de procédure civile, ne font état d'aucune information de M. [N] [P] du risque de fuite, ni du contenu des travaux préconisés.
Ce dernier qui conteste formellement la connaissance de ces dégradations constitutives de fuites, démontre une absence de déclaration de sinistre de 2014 à 2020 auprès de son assurance, malgré la justification d'épisodes pluvieux intenses notamment en 2018.
Contrairement à ce que retient l'ordonnance, en l'état du seul courrier de la société [J], il existe une contestation sérieuse quant à l'examen de la qualification de vice caché, de sa connaissance par M. [N] [P] et de la demande de provision corrélative qui échappe à la compétence du juge des référés.
En conséquence, l'ordonnance sera infirmée en toutes ses dispositions.
PAR CES MOTIFS,
La cour,
Infirme l'ordonnance déférée, en toute ses dispositions ;
Statuant à nouveau,
Constate l'existence d'une contestation sérieuse ;
Dit que le litige excède les pouvoirs du juge des référés ;
Déboute M. [N] [P] de ses autres demandes ;
Condamne Mme [I] [G] aux dépens de la procédure de première instance et d'appel et à payer à M. [N] [P] la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile pour ses frais engagés en première instance et en cause d'appel.
Le greffier, Le conseiller faisant fonction de président de chambre,