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14/06/2022 | FRANCE | N°20/00563

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 5e chambre civile, 14 juin 2022, 20/00563


Grosse + copie

délivrées le

à















COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



5e chambre civile



ARRET DU 14 JUIN 2022



Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 20/00563 - N° Portalis DBVK-V-B7E-OP3K



ARRET N°



Décision déférée à la Cour :

Jugement du 17 DECEMBRE 2019

TRIBUNAL D'INSTANCE DE MONTPELLIER

N° RG 11-19-1157





APPELANTE :



Madame [X] [S]

née le 12 Octobre 19

69 à [Localité 6] (MAROC)

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représentée par Me Marion DEJEAN PELIGRY, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et plaidant

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2020/001062 du 05/02/2020 accor...

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

5e chambre civile

ARRET DU 14 JUIN 2022

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 20/00563 - N° Portalis DBVK-V-B7E-OP3K

ARRET N°

Décision déférée à la Cour :

Jugement du 17 DECEMBRE 2019

TRIBUNAL D'INSTANCE DE MONTPELLIER

N° RG 11-19-1157

APPELANTE :

Madame [X] [S]

née le 12 Octobre 1969 à [Localité 6] (MAROC)

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représentée par Me Marion DEJEAN PELIGRY, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et plaidant

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2020/001062 du 05/02/2020 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de MONTPELLIER)

INTIMEE :

Madame [W] [R] [E] épouse [M]

née le 12 Février 1971 à [Localité 8]

[Adresse 1]

[Adresse 5]

[Localité 4]

Représentée par Me Philippe SENMARTIN de la SELARL CHABANNES-SENMARTIN ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et plaidant

Ordonnance de clôture du 19 Avril 2022

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 09 MAI 2022,en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Nathalie AZOUARD, Conseiller, chargé du rapport.

Ce(s) magistrat(s) a (ont) rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Philippe GAILLARD, Président de chambre

Madame Nathalie AZOUARD, Conseiller

Monsieur Emmanuel GARCIA, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Estelle DOUBEY

ARRET :

- contradictoire.

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par Monsieur Philippe GAILLARD, Président de chambre, et par Madame Estelle DOUBEY, Greffier.

*

**

FAITS et PROCÉDURE ' MOYENS et PRÉTENTIONS DES PARTIES

En 2016, [X] [S], a alerté à plusieurs reprises la société MAB Planchon, gérant du bien qu'elle loue à [W] [M], de l'état déplorable et indécent du logement.

Le 11 janvier 2017, suite à sa saisine par la locataire, l'inspecteur du service communal d'hygiène et de santé a déposé un rapport constatant notamment un grave problème d'humidité, une absence de système de ventilation permanente, et une superficie de 42 m2 inadaptée pour une occupation de cinq personnes.

Le 30 mars 2018, la société MAB Planchon a transmis un devis détaillé des travaux à réaliser à la locataire.

Le 18 juin 2018, l'un des enfants de [X] [S] a été victime d'une électrocution à son domicile et cette dernière a fait intervenir un électricien pour sécuriser l'installation.

Le 23 janvier 2019, le juge des référés, saisi préalablement par la locataire d'une demande de réalisation des travaux et subsidiairement d'une mesure d'expertise, a rejeté sa demande en réalisation des travaux en jugeant que le temps mis à la réparation des désordres ne résulte que de la difficulté de communication entre propriétaire et locataire sans qu'il soit possible d'imputer en référé la responsabilité à l'une ou à l'autre des parties.

Le 13 mai 2019, [X] [S] a assigné [W] [M] aux fins d'obtenir la somme de 8 000 € à titre de dommages et intérêts et 800 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

La bailleresse fait valoir que les travaux ont été réalisés et que l'importance du temps écoulé entre la constatation des désordres et les travaux est la conséquence du comportement de la locataire puisque cette dernière n'a pas récupéré plusieurs courriers recommandés lui étant destinés et concernant les travaux, et a refusé de laisser entrer dans le logement les entreprises mandatées.

Reconventionnellement, [W] [M] a demandé la condamnation de la locataire sous astreinte de 150 € par jour de retard à compter de la signification du jugement à laisser pénétrer les entreprises mandatées par la propriétaire pour faire des travaux selon un planning qui lui sera fourni au moins 7 jours avant, au paiement de 1 500 € de dommages et intérêts en sanction de sa résistance abusive et de son usage dévoyé de la procédure et de 1 200 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

En cours d'instance, le 17 avril 2019, la bailleresse a fait notifié à la locataire un congé avec offre de vente pour le 31 janvier 2020.

Le jugement rendu le 17 décembre 2019 par le tribunal d'instance de Montpellier énonce dans son dispositif :

Rejette les demandes de [X] [S].

Condamne reconventionnellement et en tant que de besoin, [X] [S], sous astreinte judiciaire de 150 € par jour de retard à compter de la signification du jugement, à laisser pénétrer les entreprises mandatées par la propriétaire pour faire des travaux et selon le planning qui sera toujours fourni 7 jours au moins avant ceux-ci.

Condamne reconventionnellement [X] [S] au paiement de 500 € de dommages et intérêts en sanction de sa résistance abusive et de son usage dévoyé de la procédure.

Condamne reconventionnellement [X] [S] au paiement de 500 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et aux dépens.

Rejette toute autre demande.

Le jugement expose qu'il résulte des documents produits au dossier notamment les courriers non réclamés par la locataire, que le comportement de la locataire démontre qu'elle n'a pas cherché à satisfaire les solutions aux problèmes qu'elle soulève alors que la bailleresse et le mandataire sont parfaitement disposés à les résoudre. Il constate que [X] [S] a fait obstacle à la réalisation des travaux et n'a donc pas respecté ses obligations au titre de l'article 7 de la loi du 76 juillet 1989, empêchant par là même [W] [M] de respecter ses obligations de propriétaire.

[X] [S] a relevé appel du jugement par déclaration au greffe du 29 janvier 2020

Le 15 juillet 2020 par ordonnance de référé, le juge des contentieux et de la protection, saisi par la bailleresse a constaté que le bail n'avait pas été reconduit en l'état du congé pour vente délivré le 17 avril 2019 et dit que [X] [S] était occupante sans droit ni titre des lieux depuis le 31 janvier 2020 et qu'elle devait quitter les lieux avec au besoin passé un délai de six mois à compter de la présente décision le recours à la force publique.

La clôture de la procédure a été prononcée par ordonnance du 19 avril 2022.

Les dernières écritures pour [X] [S] ont été déposées le 24 avril 2020.

Par ordonnance en date du 10 septembre 2020 le magistrat en charge de la mise en état a prononcé l'irrecevabilité des dernières écritures pour [W] [M] déposées le 5 août 2020.

Cette décision n'a pas été déférée à la cour.

Le dispositif des écritures pour [X] [S] énonce :

Infirmer le jugement dont appel sur les chefs du jugement critiqués.

Condamner [W] [M] à payer à [X] [S] la somme de 8 000 € à titre de dommages et intérêts en réparation des préjudices de jouissance, de santé de ses enfants et moraux subis du fait de l'indécence avérée du logement loué.

Rejeter l'ensemble des demandes, fins et prétention de [W] [M].

Condamne [W] [M] à payer à [X] [S] la somme de 800 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et aux entiers dépens.

[X] [S] soutient que les désordres de l'appartement persistent comme l'a constaté un procès-verbal d'huissier établi le 26 février 2019 qui relèvent des désordres déjà présents dans le rapport d'enquête du 11 janvier 2017.

Elle affirme que les difficultés de communication ayant empêchées la réalisation des travaux ne lui sont pas uniquement imputables et qu'elle n'a donc commis aucun abus de procédure.

Elle fait valoir notamment que la facture versée aux débats par [W] [M] en date du 3 octobre 2016 ne concerne que le remplacement du mécanisme WC à tirette, du robinet flotteur et de la pièce WC ce qui explique qu'elle ait par la suite relancé la bailleresse pour la réalisation des travaux.

[X] [S] soutient qu'elle n'a pas reçu d'avis de passage pour le courrier recommandé adressé le 6 décembre 2016 ce qui, selon elle, est souvent le cas pour les locataires de logement dans le secteur du [Localité 7], où elle réside.

Elle conteste la pertinence de l'intervention du plombier mandaté par le gestionnaire du logement le 9 décembre 2016 en faisant valoir qu'il n'a constaté aucune fuite, alors même qu'elle avait dû régler une facture de consommation d'eau de plus de 600 €, et qu'il s'est montré extrêmement désobligeant à son égard, ce qui explique pourquoi elle a précisé à l'agence ne plus vouloir avoir à faire avec lui.

C'est pour cette raison qu'elle a demandé l'intervention des services d'hygiène de la ville qui ont pu constater plusieurs manquements. C'est seulement après cette intervention, selon la locataire, que la gestionnaire a informé la locataire que des travaux d'envergure étaient prévus. Malgré plusieurs courriers échangés avec la gestionnaire du logement, les travaux ne vont pas être réalisés. Elle précise que le 7 décembre 2017, l'agence mandataire de la bailleresse a affirmé à son conseil qu'une recherche de fuite allait être effectuée alors même que le plombier qu'elle avait mandaté n'avait prétendument pas trouvé de fuite.

La locataire soutient que [W] [M] tient des propos déplacés à son encontre et qu'elle est obligée de vivre et d'élever ses enfants dans un environnement malsain. Elle ajoute qu'aujourd'hui elle ne dispose plus de lumière mis à part dans la chambre et que l'artisan a uniquement repeint les taches d'humidité sans régler le problème.

MOTIFS:

La cour rappelle que l'appel s'entend comme la critique argumentée en droit et en fait du jugement entrepris.

Sur la demande en dommages et intérêts formée par [X] [S]:

La décision entreprise a rappelé tant les dispositions du code civil que celles de la loi du 6 juillet 1989, de la loi du 17 août 2015 et du décret du 30 janvier 2002 sur l'obligation de délivrance pesant sur le bailleur, sur la définition d'un logement décent et sur les éléments d'équipement et de confort dont le logement doit être pourvu.

Il a aussi rappelé que si ces obligations pèsent sur le bailleur, le locataire doit pour sa part permettre l'accès aux lieux loués pour la préparation et l'exécution des travaux.

Il ressort des pièces produites: courriers de [X] [S] signalant au bailleur ou à son mandataire les désordres et du rapport d'enquête en date du 11 janvier 2017 établi par l'inspecteur de salubrité et par la directrice du service communal d'hygiène et de santé après une visite du logement qu'il existe des problèmes d'humidité avec un développement de moisissures, une absence de ventilation permanente dans la salle de bains, un défaut d'étanchéité du tuyau de raccordement de la cuvette des WC au collecteur de l'immeuble et une installation électrique présentant un risque en cas de contact direct avec plusieurs prises qui ne sont pas scellées.

Le procès-verbal de constat en date du 26 février 2019 relève que les problèmes d'humidité avec présence de moisissures sont toujours présents dans le logement.

Toutefois après une étude particulièrement détaillée des pièces produites en première instance en l'occurrence des nombreux échanges écrits entre la locataire et le gestionnaire du bien, des devis de travaux et des attestations d'artisans, éléments qui ne sont pas sérieusement combattus par l'appelante, le juge d'instance a pertinemment considéré que si le bien loué présentait des désordres pouvant caractériser un défaut de délivrance ou un non respect de l'obligation d'entretien par le bailleur, il était justifié par ce dernier que non seulement il avait été répondu aux demandes formulées par la locataire mais qu'en outre celle-ci avait fait obstacle à plusieurs reprises à l'exécution des travaux alors même qu'elle les demandait.

Par conséquent en ne respectant pas l'obligation imposée par l'article 7 de la loi du 6 juillet 1989 de permettre l'accès à son logement pour réaliser les travaux que le bailleur est dans l'obligation d'exécuter en vertu de l'article 6 de la dite loi, [X] [S] ne peut être bien fondée à solliciter des dommages et intérêts en réparation des préjudices que lui aurait causé le non respect par le bailleur de son obligation de délivrance d'un logement décent et de son obligation d'entretien.

Le jugement dont appel sera donc confirmé en ce qu'il a débouté [X] [S] de sa demande de dommages et intérêts.

Sur la condamnation prononcée contre [X] [S] d'avoir à laisser pénétrer les entreprises mandatées par la propriétaire pour faire des travaux et selon le planning qui sera toujours fourni 7 jours au moins avant ceux-ci sous astreinte judiciaire de 150 € par jour de retard à compter de la signification du jugement:

La cour constate que cette condamnation est devenue sans objet la fin du bail au 31 janvier 2020 étant acquise suite à la délivrance du congé pour vente délivré le 17 avril 2019 comme constaté par décision du 15 juillet 2020.

Sur la condamnation de [X] [S] à des dommages et intérêts pour réstance procédure abusive:

Le jugement dont appel ne caractérise pas une résistance abusive de la part de [X] [S] qui ne peut se déduire du seul non respect de l'obligation de l'article 7 de la loi du 6 juillet 1989.

Par ailleurs le droit d'agir en justice ne dégénère en abus pouvant donner lieu à la condamnation à des dommages et intérêts qu'en cas de mauvaise foi ou d'intention de nuire.

Or le premier juge a condamné [X] [S] à payer des dommages et intérêts à ce titre sans caractériser sa mauvaise foi ou son intention de nuire.

Le jugement dont appel sera donc infirmé sur ce point.

Sur les demandes accessoires:

En revanche la décision entreprise sera confirmée en ses dispositions au titre des frais irrépétibles et des dépens et [X] [S] succombant au principal en son appel sera condamnée à supporter les dépens de la présente procédure.

PAR CES MOTIFS:

La cour statuant par arrêt contradictoire et rendu par mise à disposition au greffe;

Confirme le jugement rendu le 17 décembre 2019 par le tribunal d'instance de Montpellier en toutes ses dispositions sauf en ce qui concerne la condamnation sous astreinte de [X] [S] à laisser pénétrer les entreprises mandatées par la propriétaire et la condamnation de [X] [S] au paiement de dommages et intérêts pour résistance et procédure abusives.

S'y substituant sur ces points et y ajoutant,

Dit que la demande de condamnation sous astreinte de [X] [S] à laisser pénétrer les entreprises mandatées par la propriétaire est devenue sans objet;

Déboute [W] [M] de sa demande de dommages et intérêts pour résistance et procédure abusives;

Condamne [X] [S] aux dépens de la procédure d'appel.

Le greffierLe président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 5e chambre civile
Numéro d'arrêt : 20/00563
Date de la décision : 14/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-14;20.00563 ?
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