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09/06/2022 | FRANCE | N°20/05677

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 3e chambre civile, 09 juin 2022, 20/05677


Grosse + copie

délivrées le

à







COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



3e chambre civile



ARRET DU 09 JUIN 2022



Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 20/05677 - N° Portalis DBVK-V-B7E-OZHQ



Décision déférée à la Cour :

Jugement du 27 NOVEMBRE 2020

TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE RODEZ

N° RG 19/00337





APPELANT :



Monsieur [C] [V]

né le 20 Septembre 1971 à RODEZ

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[Adresse 1]

[Localité 2]

Représenté par Me Sophie MIRALVES-BOUDET de la SELARL CHATEL ET ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER

subsitué par Me Andreia DA SILVA, avocat au barreau de MONTPELLIER





INTIME :...

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

3e chambre civile

ARRET DU 09 JUIN 2022

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 20/05677 - N° Portalis DBVK-V-B7E-OZHQ

Décision déférée à la Cour :

Jugement du 27 NOVEMBRE 2020

TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE RODEZ

N° RG 19/00337

APPELANT :

Monsieur [C] [V]

né le 20 Septembre 1971 à RODEZ

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représenté par Me Sophie MIRALVES-BOUDET de la SELARL CHATEL ET ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER

subsitué par Me Andreia DA SILVA, avocat au barreau de MONTPELLIER

INTIME :

Monsieur [H] [U]

né le 20 Juillet 1966 à RODEZ

de nationalité Française

[Adresse 7]

[Localité 3]

Représenté par Me Elian GAUDY de la SCP GAUDY GALANDRIN, avocat au barreau de l'AVEYRON, subsitué par Me Bruce FLAVIER, avocat au barreau de l'AVEYRON

Ordonnance de clôture du 21 Mars 2022

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 11 AVRIL 2022,en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. Thierry CARLIER, Conseiller, chargé du rapport.

Ce(s) magistrat(s) a (ont) rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

M. Thierry CARLIER, Conseiller faisant fonction de président de chambre

M. Fabrice DURAND, Conseiller

Mme Marie-Claude SIMON, Vice-présidente placée par ordonnance du premier président du 1er décembre 2021

Greffier, lors des débats : Mme Sabine MICHEL

ARRET :

- contradictoire,

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par M. Thierry CARLIER, Conseiller faisant fonction de président de chambre, et par Mme Sabine MICHEL, Greffier.

*

**

EXPOSE DU LITIGE :

Par acte authentique dressé le 29 janvier 2008 par Maître [Z], notaire à [Localité 5], Monsieur [M] [U] a vendu à Monsieur [C] [V] une maison à usage d'habitation avec piscine et terrain attenant sur la commune de [Adresse 6], figurant au cadastre sous la référence section D, n°[Cadastre 4], pour la somme de 311.000 euros. L'acte a fait l'objet d'une publication le 4 mars 2008 au service de la publicité foncière de [Localité 5].

Le 20 septembre 2015, Monsieur [V] a sollicité l'organisation d'une mesure d'expertise technique suite à la découverte de l'apparition d'une cavité sur le terrain situé en partie arrière de son immeuble.

Le 27 octobre 2015, le cabinet d'expertise SAS BL a déposé son rapport et a conclu que le sinistre a été généré par l'effondrement d'une cavité souterraine de volume suffisamment important (environ 3 m3) pour modifier l'équilibre de portance du sol d'assise au voisinage de l'angle du bâtiment.

Le 3 décembre 2015, Monsieur [V] a, par acte d'huissier, sollicité devant le juge des référés l'organisation d'une mesure d'expertise au contradictoire de Monsieur [U], précédent propriétaire de l'immeuble sur le fondement de l'article 145 du code de procédure civile.

Le 21 janvier 2016, Madame [D] [E] épouse [J] a été désignée en qualité d'expert judiciaire par ordonnance du juge des référés du tribunal de grande instance de Rodez et a déposé son rapport le 29 mai 2018.

Le 29 mars 2019, suite au dépôt du rapport d'expertise et en l'absence d'accord amiable, Monsieur [V] a fait assigner Monsieur [U] devant le tribunal de grande instance de Rodez aux fins de solliciter la résolution de la vente intervenue le 29 janvier 2008 sur le fondement des article 1641 et suivants du code civil et subsidiairement, sur le fondement du dol.

Le 27 novembre 2020, le tribunal judiciaire de Rodez a :

- débouté Monsieur [C] [V] de l'intégralité de ses demandes ;

- condamné Monsieur [C] [V] à payer à Monsieur [H] [U] la somme de 1.000 euros au titre des frais irrépétibles;

- condamné Monsieur [C] [V] à supporter les entiers dépens de l'instance ;

- dit n'y avoir lieu à exécution du présent jugement ;

Le 11 décembre 2020, Monsieur [C] [V] a interjeté appel du jugement rendu le 27 novembre 2020 par le tribunal judiciaire de Rodez.

Vu les conclusions de Monsieur [C] [V] remises au greffe le 18 mars 2022 ;

Vu les conclusions de Monsieur [H] [U], remises au greffe le 04 mars 2022;

MOTIFS DE L'ARRÊT :

Sur la forclusion de la demande fondée sur la garantie des vices cachés:

Aux termes de l'article 1648 alinéa 1 du code civil ' L'action résultant des vices rédhibitoires doit être intentée par l'acquéreur dans un délai de deux ans à compter de la découverte du vice '.

Il est constant que ce délai de deux ans est un délai préfix, dont la méconnaissance a pour conséquence la forclusion de l'action.

La suspension de la prescription prévue par l'article 2239 du code civil n'est pas applicable au délai de forclusion.

L'article 2241 du code civil dispose que la demande en justice, même en référé, interrompt le délai de prescription ainsi que le délai de forclusion.

Par ailleurs, il résulte des dispositions de l'article 2242 du code civil qu'en cas d'assignation en référé, le délai pour agir n'est interrompu que pendant la durée de l'instance à laquelle met fin l'ordonnance nommant un expert.

En l'espèce, si Monsieur [V] soutient n'avoir eu connaissance du vice que lors de la dernière venue de l'expert judiciaire, le 12 avril 2017, il résulte de la même expertise judiciaire que les désordres existants sur son fonds ont été visibles depuis la surface du terrain naturel dès le 20 septembre 2015, les locataires ayant constaté l'apparition d'une cavité dans la parcelle, en façade arrière du jardin, ce qui a conduit Monsieur [V] à diligenter, dès le 27 octobre 2015, une expertise technique, l'expert, la SAS BL Expertises, constatant l'existence d'un effondrement souterrain se produisant à l'angle du bâtiment et pouvant correspondre à un vice du sol et préconisant la mise en oeuvre de mesures conservatoires pour sécuriser les lieux.

Par conséquent, Monsieur [V] ne peut contester avoir eu connaissance du vice affectant son immeuble dès le 27 octobre 2015.

Monsieur [V] a délivré le 3 décembre 2015 une assignation en référé qui a interrompu le délai de forclusion jusqu'au 21 janvier 2016, date de l'ordonnance de référé, un nouveau délai de deux ans courant à compter de cette date.

Or, il n'a assigné Monsieur [U] devant le tribunal de grande instance de Rodez que le 29 mars 2019, soit postérieurement à l'expiration du délai de forclusion intervenu le 21 janvier 2018.

Sa demande fondée sur la garantie des vices cachés est donc irrecevable pour cause de forclusion.

Le jugement sera confirmé de ce chef.

Sur la nullité de la vente fondée sur la réticence dolosive:

Aux termes de l'ancien l'article 1116 du code civil ' Le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les manoeuvres pratiquées par l'une des parties sont telles, qu'il est évident que, sans ces manoeuvres, l'autre partie n'aurait pas contracté. Il ne se présume pas et doit être prouvé '.

Monsieur [V] fait principalement valoir que Monsieur [U], qui avait la qualité de professionnel du bâtiment lors de la construction, n'a pas signalé, lors de la vente intervenue en 2008, qu'un tassement était survenu en 2002 lors des travaux de construction, exposant que la date de ce tassement n'est pas établie avec certitude et qu'il a pu se produire juste avant la vente, l'absence d'information par le vendeur de ce premier sinistre constituant une réticence dolosive de sa part, cette information revêtant un caractère déterminant pour l'acquéreur qui aurait pu renoncer à contracter s'il avait eu connaissance de ce premier tassement.

En l'espèce, le premier rapport d'expertise de la société BL Expertises du 27 octobre 2015 expose que le sinistre a été généré par l'effondrement d'une cavité souterraine de volume suffisamment important (environ 3 m3) pour modifier l'équilibre de portance du sol d'assise au voisinage de l'angle du bâtiment.

L'expert amiable expose qu'il s'agit probablement de la rupture de la voûte d'une cavité souterraine relativement proche de la surface du terrain naturel qui a cédé à la faveur de la dissolution de la roche calcaire par érosion de circulations d'eaux souterraines non maîtrisées, ce phénomène s'étant produit de façon très étalée dans le temps.

Il résulte également du rapport d'expertise amiable ainsi que du rapport d'expertise judiciaire qu'en 2002, un affaissement s'est produit à l'arrière du bâtiment, à proximité du mur de façade Nord-Est, cet affaissement ayant été comblé, selon Monsieur [U], par ' 3 ou 4 brouettées de tout-venant ( graviers) et par de la terre rapportée ', étant relevé que la date de ce phénomène a bien été confirmée à l'expert par Monsieur [T], le voisin limitrophe, page 22 du rapport d'expertise.

Il ressort du rapport d'expertise et en particulier du rapport de reconnaissance établi par le sapiteur de l'expert judiciaire, la SAS Innogeo, dont l'objectif était de déterminer si la cavité possédait d'éventuelles ramifications souterraines qui ne seraient pas visibles en surface mais qui présenteraient un risque d'effondrement supplémentaire, que l'affaissement intervenu en 2002 est qualifié d'anomalie n° 2 positive, située au centre de la zone, et pouvant correspondre à une zone de plus forte compacité, donc potentiellement remblayée, la masse en excès calculée étant de l'ordre de 6,8 tonnes par rapport à un encaissant considéré comme homogène.

Les trois autres anomalies constatées, dont celle concernant le sinistre litigieux (anomalie n° 1), sont au contraire qualifiées de négatives et représentent des masses manquantes par rapport à un encaissant considéré comme homogène, l'anomalie n° 1 représentant une masse manquante calculée de l'ordre de 4,4 tonnes par rapport à un encaissant considéré comme homogène.

Il résulte du diagnostic géotechnique établi par la société Géobilan à la demande de Monsieur [U] que l'origine des désordres apparus en 2002 pourrait correspondre soit à un phénomène karstique, soit à un tassement brutal des sols lié à la remise en place des terres autour du bâtiment (phénomène post-construction courant, pouvant avoir les mêmes conséquences qu'un petit effondrement d'origine karstique).

En tout état de cause, force est de constater que l'expert judiciaire n'impute aucunement l'effondrement de 2015 à l'affaissement de 2002 mais à l'absence de dispositif ' puits filtrant ' nécessaire à l'écoulement et au drainage des eaux pluviales et à la non conformité constructive de la canalisation PCV fuyarde, la circulation des eaux interstitielles sous cette canalisation ayant été propice à l'entrainement de particules fines dans le sous-sol (décohésion du sol) et à la formation d'un petit vide (boyau) qui s'est ensuite développé avec le temps et a entraîné l'effondrement du sous-sol.

Il résulte donc du rapport d'expertise judiciaire que l'effondrement du fonds [V] trouve son origine dans la fuite d'une canalisation d'eau pluviale, dans la sous-évaluation des contraintes géotechniques et dans la sous-évaluation du risque vis-à-vis de l'aléa effondrement dans un environnement karstique et de cavités perchées.

Il n'est donc pas caractérisé par les différents rapports techniques versés aux débats de lien direct et certain entre l'affaissement survenu en 2002 et la cavité apparue en septembre 2015, soit 13 ans plus tard.

Il n'est pas davantage établi que l'affaissement de 2002 aurait été suivi de nouveaux désordres concernant le sous-sol qui se seraient révélés avant la vente intervenue en 2008.

Par conséquent, il ne peut être reproché à Monsieur [U], qu'il ait été ou non un professionnel de l'immobilier, de ne pas avoir fait mention lors de la vente de l'affaissement intervenu en 2002 alors même qu'aucun autre problème n'était survenu postérieurement et qu'il résulte de l'avis technique du bureau d'études Cetec qu'au moment où le tassement a été constaté, il ne pouvait être interprété, même pour un professionnel en géotechnique, que comme un phénomène relativement courant de tassement des terres en fin de chantier, étant enfin relevé que la circonstance que le BET Cetec n'ait pu pénétrer sur le terrain de Monsieur [V] n'est pas de nature à remettre en cause les constatations visuelles effectuées par l'ingénieur en bâtiment, Monsieur [S].

En tout état de cause, il n'est pas démontré que Monsieur [U] se serait rendu coupable d'une réticence dolosive en omettant intentionnellement d'informer Monsieur [V] de l'affaissement intervenu en 2002 ni même que cette information aurait été déterminante dans sa décision de conclure ou non la vente en l'absence de tout autre problème affectant le sous-sol depuis 2002, étant rappelé que l'effondrement du sous-sol dont a été victime l'acquéreur n'est survenu que 13 ans après le tassement de 2002 et 6 ans après la vente.

Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a débouté Monsieur [V] de sa demande en résolution du contrat de vente du 29 janvier 2008 et de ses demandes indemnitaires subséquentes.

PAR CES MOTIFS :

La cour,

Confirme le jugement en toutes ses dispositions ;

Condamne Monsieur [C] [V] aux entiers dépens d'appel ;

Condamne Monsieur [C] [V] à payer à Monsieur [H] [U] la somme de 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, pour ses frais engagés en appel.

Le greffier, Le conseiller faisant fonction de président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 3e chambre civile
Numéro d'arrêt : 20/05677
Date de la décision : 09/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-09;20.05677 ?
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