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02/06/2022 | FRANCE | N°17/03400

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 3e chambre civile, 02 juin 2022, 17/03400


Grosse + copie

délivrées le

à







COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



3e chambre civile



ARRET DU 02 JUIN 2022



Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 17/03400 - N° Portalis DBVK-V-B7B-NGVO



Décision déférée à la Cour :

Jugement du 11 MAI 2017

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE NARBONNE

N° RG 16/00147





APPELANT :



Maître [D] [B]

de nationalité Française

[Adresse 5]

[Adresse 5]

[Locali

té 6]

Représenté par Me Gilles LASRY de la SCP D'AVOCATS BRUGUES - LASRY, avocat au barreau de MONTPELLIER







INTIMEE :



Madame [P] [M]

née le [Date naissance 1] 1948 à [Localité 6]

de nationalité Française

[Adresse 2...

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

3e chambre civile

ARRET DU 02 JUIN 2022

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 17/03400 - N° Portalis DBVK-V-B7B-NGVO

Décision déférée à la Cour :

Jugement du 11 MAI 2017

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE NARBONNE

N° RG 16/00147

APPELANT :

Maître [D] [B]

de nationalité Française

[Adresse 5]

[Adresse 5]

[Localité 6]

Représenté par Me Gilles LASRY de la SCP D'AVOCATS BRUGUES - LASRY, avocat au barreau de MONTPELLIER

INTIMEE :

Madame [P] [M]

née le [Date naissance 1] 1948 à [Localité 6]

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Localité 6]

Représentée par Me Yann GARRIGUE de la SELARL LEXAVOUE MONTPELLIER GARRIGUE, GARRIGUE, LAPORTE, avocat au barreau de MONTPELLIER et sur l'audience par Me Iris RICHAUD, avocat au barreau de MONTPELLIER substituant Me Philippe CLEMENT, avocat au barreau de NARBONNE

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2017/010108 du 02/08/2017 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de MONTPELLIER)

Ordonnance de clôture du 18 Mars 2022

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 08 AVRIL 2022,en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. Fabrice DURAND, Conseiller, chargé du rapport.

Ce(s) magistrat(s) a (ont) rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

M. Thierry CARLIER, Conseiller faisant fonction de président de chambre

M. Fabrice DURAND, Conseiller

Mme Marie-Claude SIMON, Vice-présidente placée par ordonnance du premier président en date du 1er décembre 2021

Greffier, lors des débats : Mme Sabine MICHEL

ARRET :

- contradictoire,

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par M. Thierry CARLIER, Conseiller faisant fonction de président de chambre, et par Mme Sabine MICHEL, Greffier.

*

**

EXPOSE DU LITIGE

Par jugement du 6 juillet 1988, le tribunal de grande instance de Perpignan a prononcé le divorce entre Mme [P] [M] et M. [Y] [T] et en a homologué la convention définitive.

Cette convention prévoyait le versement par M. [T] à Mme [M] d'une prestation compensatoire sous forme de rente mensuelle viagère de 5 000 francs (762 euros) ramenée à 2 500 francs dans le cas où celle-ci viendrait à occuper un emploi lui procurant le SMIC.

Par jugement du 7 novembre 1994, le tribunal de grande instance de Perpignan a réduit le montant de cette prestation compensatoire à la somme de 3 000 francs par mois.

Par arrêt du 15 février 1996, la cour d'appel de Montpellier infirmait ce jugement et maintenait le montant de la prestation compensatoire à la somme de 5 000 francs par mois.

Par jugement du 27 juin 2007, le juge aux affaires familiales du tribunal de Perpignan a rejeté une nouvelle demande de suppression de prestation compensatoire formée par M. [T].

Par la suite, M. [T] ne s'est plus acquitté du paiement de cette prestation compensatoire.

Courant 2008, Mme [M] a pris attache avec la SCP d'huissiers de justice [B]-Yperzeele et lui a confié mandat de recouvrer les arriérés de prestation compensatoire dus par M. [T].

Mme [M] était alors assistée par son avocat Me [R] [W].

Par actes d'huissier signifié le 8 janvier 2016, Mme [M] a fait assigner Me [B], huissier de justice, devant le tribunal de grande instance de Narbonne aux fins de voir rechercher sa responsabilité civile professionnelle et le voir condamner à lui verser 37 432 euros de dommages-intérêts.

Par jugement du 11 mai 2017, le tribunal de grande instance de Narbonne a :

' déclaré recevable l'action en responsabilité contractuelle professionnelle engagée par Mme [M] à l'encontre de Me [B], huissier de justice ;

' dit que Me [B] avait engagé sa responsabilité contractuelle professionnelle à l'égard de Mme [M] ;

' condamné Me [B] à payer à Mme [M] la somme de 15 500 euros à titre de dommages-intérêts ;

' condamné Me [B] à payer à Mme [M] la somme de 800 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

' débouté Me [B] de sa demande sur le même fondement ;

' condamné Me [B] aux dépens.

Par déclaration au greffe du 19 juin 2017, Me [B] a relevé appel de cette décision.

Vu les dernières conclusions de Me [D] [B] remises au greffe le 11 septembre 2017 ;

Vu les dernières conclusions de Mme [P] [M] remises au greffe le 28 septembre 2017 ;

L'ordonnance de clôture a été rendue le 18 mars 2022.

MOTIFS DE L'ARRÊT

A titre liminaire, il convient de rappeler que, conformément aux dispositions du troisième alinéa de l'article 954 du code de procédure civile, les demandes tendant simplement à voir « constater », « rappeler » ou « dire et juger » ne constituent pas des demandes en justice visant à ce qu'i1 soit tranché sur un point litigieux mais des moyens, de sorte que la cour n'y répondra pas dans le dispositif du présent arrêt.

L'article 19 de la loi n°91-650 du 9 juillet 1991, applicable aux faits de l'espèce, dispose que « L'huissier de justice chargé de l'exécution a la responsabilité de la conduite des opérations d'exécution. »

Il résulte du texte précité, ainsi que des dispositions de l'article 1147 dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016 applicable en l'espèce et de l'article 1991 du code civil, que l'huissier de justice engage sa responsabilité contractuelle en raison de sa qualité d'officier ministériel tenu d'accomplir la mission qui lui a été confiée par son mandant.

L'engagement de la responsabilité de l'huissier exige la démonstration d'une faute et d'un préjudice en lien de causalité directe avec cette faute.

Sur la faute de l'huissier de justice,

L'huissier est notamment responsable envers son client de l'inexécution ou du retard dans l'exécution du mandat dont il a été chargé, de la passivité devant des difficultés sérieuses rencontrées et plus généralement de toute faute d'imprudence ou de négligence commise dans l'accomplissement de son office.

D'une façon générale, son obligation n'est que de moyens et l'éventuelle faute de l'avocat de son mandant n'exonère pas l'huissier de justice de sa responsabilité.

En l'espèce, il n'est pas contesté que Mme [M] a confié à Me [B] un mandat de recouvrement forcé de la prestation compensatoire que lui devait M. [T].

Ce mandat résulte notamment du courrier adressé le 25 septembre 2008 par Me [B] à Me [W] en ces termes :

« Dans l'affaire référencée en marge et suite à notre conversation téléphonique de ce jour nous vous informons que Mr [T] n'habite plus sur [Localité 7].

Afin de localiser son nouveau domicile ainsi que des éléments de solvabilité, nous avons diligenté une requête près des services de Monsieur le procureur de la République. »

L'huissier a ainsi pratiqué une saisie des rémunérations le 20 novembre 2008.

Cette saisie a abouti à un accord transactionnel signé entre Mme [M] et M. [T] pour un montant de 8 000 euros correspondant aux mensualités de prestation compensatoire dus jusqu'au mois de mai 2008.

Par courrier du 3 février 2009, Me [W], conseil de Mme [M], a informé Me [B] de ce que Mme [M] le dessaisissait du dossier. L'avocat demandait également à l'huissier de lister toutes les procédures en cours, l'avancée des recherches concernant la solvabilité de M. [T] ainsi que le décompte des sommes dues à ce jour par le débiteur.

Me [B] a répondu le 10 février 2009 à Me [W] :

' qu'il avait adressé la somme de 8 000 euros à Mme [M] pour solde de tout compte arrêtée au mois de mai 2008 ;

' que les prestations compensatoires à compter de juin 2008 restait dues ;

' que M. [T] était propriétaire d'une maison indivise à [Localité 7] ;

' qu'il n'avait inscrit aucune hypothèque sur ce bien « dans la mesure où Mme [M] a été dans l'impossibilité de nous déclarer exactement les sommes dont le requis est redevable » ;

' que « M. [T] s'étant acquitté de la dette réclamée, il nous est impossible de continuer plus avant notre mandat » ;

' que « M. [T] ne souhaite pas qu'une hypothèque soit prise sur ce bien immobilier. Cette sûreté constitue un moyen de pression important. »

Me [B] soutient dans ses écritures que ce courrier du 3 février 2009 de Me [W] l'a expressément déchargé du mandat de recouvrement que Mme [M] lui avait confié.

Toutefois, Mme [M] verse aux débats la copie d'un reçu établi le 11 mai 2009 par la SCP [B]-Yperzeele attestant du versement par sa cliente de la somme de 520 euros avec la mention « reçu de l'hypothèque maison [T] Trouillas » et comportant le numéro 79435 correspondant à son numéro de client au sein de l'étude.

Ce reçu atteste du versement d'une provision sur honoraires à l'huissier et constitue la preuve de ce que Mme [M] a confirmé au plus tard le 11 mai 2009 à Me [B] son mandat de recouvrement forcé de la prestation compensatoire due par M. [T], mission qui avait pu être temporairement suspendue suite au courrier de Me [W] du 3 février 2009.

Ce reçu est parfaitement probant au regard du versement de cette provision, sans qu'il soit besoin de déterminer avec certitude l'identité de la personne qui a apposé la mention manuscrite « reçu de l'hypothèque maison [T] Trouillas ».

Aucune facture d'honoraires ni relevé de compte client n'est versé aux débats par Me [B] susceptible de contredire les déclarations de Mme [M] et d'établir le cas échéant que cette somme de 520 euros aurait été versée en rémunération d'actes accomplis par l'huissier antérieurement au 11 mai 2009.

Il ressort ainsi des pièces versées au débats par les deux parties :

' que Me [B] savait que la prestation compensatoire n'était plus versée par M. [T] depuis juin 2008 ;

' que Me [B] a reçu mandat de Mme [M] au plus tard le 11 mai 2009 de poursuivre le recouvrement forcé de cette créance contre M. [T] ;

' que Me [B] savait que M. [T] ne coopérait pas, qu'il avait déménagé et qu'il était susceptible de déployer tous les moyens nécessaires pour échapper aux actes de recouvrement de l'huissier ;

' que Me [B] avait connaissance des actifs immobiliers détenus par M. [T].

Me [B] a donc commis une faute de négligence en ne prenant pas immédiatement les mesures conservatoires nécessaires et en omettant d'inscrire dans les plus brefs délais une hypothèque sur les biens immobiliers de M. [T].

En effet, entre le 11 mai 2009 et le 1er juillet 2010, date à laquelle M. [T] a vendu son bien immobilier, l'huissier disposait largement du temps nécessaire pour procéder à l'inscription de cette hypothèque.

Ainsi que l'a pertinemment retenu le jugement déféré, Me [B] n'est pas fondé à soutenir qu'il n'a jamais pu obtenir de Mme [M] et de ses conseils le décompte précis des sommes dues par M. [T] ni la communication des décisions de justice prononçant la condamnation de ce dernier au profit de Mme [M].

D'une part Me [B] a reconnu lui-même dans son courrier du 10 février 2009 que les mensualités de prestation compensatoire restaient dues depuis le mois de juin 2008 inclus, de sorte qu'il n'avait besoin d'aucun décompte de sa cliente pour poursuivre la procédure.

D'autre part, l'engagement de la procédure de saisie des rémunérations le 20 novembre 2008 démontre que l'huissier détenait déjà à cette date le titre exécutoire qui était nécessaire pour l'accomplissement de sa mission. Ce titre exécutoire, que Me [B] n'a jamais restitué à Mme [M], est le même qui était nécessaire pour poursuivre sa mission à partir du 11 mai 2009.

En toute hypothèse, Me [B] ne produit aucune copie de courrier ayant demandé une quelconque communication de pièce à sa cliente, ce qui confirme qu'aucune carence de cette dernière n'est susceptible de l'avoir empêché d'accomplir sa mission.

Il se déduit de ces développements que Me [B] était parfaitement en mesure de procéder à l'inscription de l'hypothèque, mesure qui s'imposait en l'espèce comme étant la plus adaptée et la plus efficace pour sécuriser la créance détenue par Mme [M] sur M. [T], débiteur dont l'huissier savait par ailleurs qu'il était mal disposé à payer et susceptible d'organiser son insolvabilité.

L'huissier ne peut pas davantage s'exonérer de ses fautes de négligence en mettant en cause l'avocat de Mme [M] au motif que ce dernier aurait dû prendre en charges l'hypothèque et engager une éventuelle saisie immobilière.

En effet, la responsabilité de l'huissier de justice s'apprécie au regard de sa mission propre qui en l'espèce n'a pas abouti en raison des fautes personnelles de négligence de l'huissier de justice dans l'accomplissement de son mandat de recouvrement forcé de la créance.

Le mandat que lui avait confié Mme [M] imposait à Me [B], compte tenu de l'urgence de la situation, d'engager dans les meilleurs délais la prise d'hypothèque qui s'imposait en l'espèce comme étant le meilleur moyen de protéger Mme [M] de l'insolvabilité de son débiteur.

Le jugement déféré sera donc confirmé en ce qu'il a retenu la faute commise par l'huissier.

Sur le préjudice et le lien de causalité avec la faute,

Il ressort des pièces versées aux débats que les perspectives de recouvrement de sa créance par Mme [M] sont désormais illusoires au regard du déménagement de son débiteur et de sa volonté manifeste depuis 2008 de ne plus payer ses mensualités, voire d'organiser son insolvabilité.

Mme [M] fait valoir que M. [T] a vendu le 1er juillet 2010 deux biens immobiliers cadastrés section B n°[Cadastre 3] et [Cadastre 4] sur la commune de [Localité 7] (66) respectivement au prix de 131 000 euros et 2 500 euros.

En l'absence de diligences de la part de l'huissier, M. [T] a pu percevoir l'intégralité de sa quote-part du tiers du prix qui lui revenait à l'issue de cette vente.

M. [T] a ainsi pu échapper au paiement de sa dette de prestation compensatoire envers Mme [M] dont le montant s'élève pour la période comprise entre le 1er juin 2008 et le 1er juillet 2010 à la somme de :

762 euros x 25 mois = 19 050 euros

Comme le souligne à juste titre Mme [M], le préjudice qu'elle a subi en lien de causalité avec cette faute consiste donc en une perte de chance de recouvrer cette créance de prestation compensatoire. Cette perte de chance est proportionnelle à la probabilité que le gain espéré soit survenu si l'huissier avait été normalement diligent.

Me [B] ne peut pas utilement faire valoir que l'immeuble était indivis et rendait nécessaire une licitation-partage alors que la part indivise suffisait pour payer la totalité de la créance et que les consorts [T] ont vendu le bien spontanément. Il en résulte que la saisie par Mme [M] de la quote-part du prix revenant à M. [T] n'imposait aucune « procédure complexe » de nature à faire obstacle au recouvrement de la créance.

S'agissant dans un premier temps d'une simple inscription conservatoire, et concernant une créance d'un montant substantiel de 19 050 euros, Mme [M] ne pouvait pas se voir opposer par son débiteur l'usage d'un moyen d'exécution déloyal ou disproportionné, ainsi que le soutient à tort Me [B] dans ses écritures.

En l'espèce, les biens vendus par les trois indivisaires [T] n'étaient grevés d'aucune charge, hypothèque ou privilège au profit d'autres créanciers mieux placés que Mme [M] de sorte qu'il est quasi certain que la prise d'hypothèque aurait permis à Mme [M] de recouvrer sa créance.

Il se déduit de ces éléments que la probabilité pour Mme [M] d'obtenir paiement de sa créance après inscription d'une hypothèque était quasi certaine. Cette probabilité sera donc fixée à 95% et permet d'évaluer le préjudice de perte de chance subi par Mme [M] à la somme de 18 100 euros.

Il convient d'ajouter à cette somme de 18 100 euros le montant de 520 euros d'honoraires versés par Mme [M] à Me [B] en pure perte et qui a augmenté d'autant le préjudice matériel qu'elle a subi.

Le jugement sera donc infirmé en ce sens.

Sur les demandes accessoires,

Me [D] [B] succombe en ses demandes et sera donc tenu de supporter les entiers dépens de première instance et d'appel conformément à l'article 696 du code de procédure civile et des dispositions applicables en matière d'aide juridictionnelle.

L'article 700 du code de procédure civile, dans sa rédaction issue du décret n°2022-45 du 25 février 2022 et applicable aux instances en cours au 27 février 2022, dispose :

« Le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer :

1° A l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

2° Et, le cas échéant, à l'avocat du bénéficiaire de l'aide juridictionnelle partielle ou totale une somme au titre des honoraires et frais, non compris dans les dépens, que le bénéficiaire de l'aide aurait exposés s'il n'avait pas eu cette aide. Dans ce cas, il est procédé comme il est dit aux alinéas 3 et 4 de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.

Dans tous les cas, le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à ces condamnations.

Les parties peuvent produire les justificatifs des sommes qu'elles demandent.

La somme allouée au titre du 2° ne peut être inférieure à la part contributive de l'État majorée de 50 %. »

L'article 37 de la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 modifiée par la loi n°2021-1729 du 22 décembre 2021 dispose :

« Les auxiliaires de justice rémunérés selon un tarif peuvent renoncer à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État et poursuivre contre la partie condamnée aux dépens et non bénéficiaire de l'aide juridictionnelle le recouvrement des émoluments auxquels ils peuvent prétendre.

Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens, ou qui perd son procès, et non bénéficiaire de l'aide juridictionnelle, à payer à l'avocat pouvant être rétribué, totalement ou partiellement, au titre de l'aide juridictionnelle, une somme qu'il détermine et qui ne saurait être inférieure à la part contributive de l'État majorée de 50 %, au titre des honoraires et frais non compris dans les dépens que le bénéficiaire de l'aide aurait exposés s'il n'avait pas eu cette aide. Les parties peuvent produire les justificatifs des sommes qu'elles demandent et le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation.

Si l'avocat du bénéficiaire de l'aide recouvre cette somme, il renonce à percevoir la part contributive de l'État S'il n'en recouvre qu'une partie, la fraction recouvrée vient en déduction de la part contributive de l'État

Si, à l'issue du délai de quatre ans à compter du jour où la décision est passée en force de chose jugée, l'avocat n'a pas demandé le versement de tout ou partie de la part contributive de l'État, il est réputé avoir renoncé à celle-ci.

Un décret en Conseil d'État fixe, en tant que de besoin, les modalités d'application du présent article. »

En l'espèce, Mme [M] sollicite l'octroi d'une indemnité de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Dans la mesure où Mme [M] est bénéficiaire de l'aide juridictionnelle totale, il convient de faire application des dispositions précitées, d'infirmer le jugement déféré en ses dispositions relatives à l'article 700 du code de procédure civile et de condamner Me [D] [B] à verser à la SELARL Clément-Malbec-Conquet la somme de 2 000 euros au titre de ses honoraires et frais afférents à la procédure de première instance et en appel ;

Il sera également fait application de l'article R. 631-4 du code de la consommation qui dispose : « Lors du prononcé d'une condamnation, le juge peut, même d'office, pour des raisons tirées de l'équité ou de la situation économique du professionnel condamné, mettre à sa charge l'intégralité des droits proportionnels de recouvrement ou d'encaissement prévus à l'article L. 111-8 du code des procédures civiles d'exécution. »

PAR CES MOTIFS,

La cour,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions à l'exception de celle ayant fixé le quantum de dommages-intérêts mis à la charge de Me [D] [B] et de celle ayant statué sur l'article 700 du code de procédure civile ;

Statuant à nouveau de ces chefs et y ajoutant,

Condamne Me [D] [B] à payer à Mme [P] [M] la somme de 18 620 euros de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi ;

Dit que Me [D] [B] supportera les entiers dépens d'appel ;

Condamne Me [D] [B] à payer à la SELARL Clément-Malbec-Conquet la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700-2° du code de procédure civile et de l'article 37 de la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 ;

Met à la charge de Me [D] [B] le montant des droits proportionnels de recouvrement et d'encaissement de l'huissier de justice en cas d'exécution forcée du présent arrêt ;

Déboute les parties de leurs plus amples demandes.

Le greffier, Le conseiller faisant fonction de président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 3e chambre civile
Numéro d'arrêt : 17/03400
Date de la décision : 02/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-02;17.03400 ?
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