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24/05/2022 | FRANCE | N°20/00038

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 5e chambre civile, 24 mai 2022, 20/00038


Grosse + copie

délivrées le

à







COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



5e chambre civile



ARRET DU 24 MAI 2022



Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 20/00038 - N° Portalis DBVK-V-B7E-OOXL



Décision déférée à la Cour :

Jugement du 28 NOVEMBRE 2019

TRIBUNAL D'INSTANCE DE MONTPELLIER

N° RG 19/000810









APPELANT :



Monsieur [U] [P]

né le 27 Novembre 1954 à [Localité 7]

[Adresse 1]


[Localité 3]

Représenté par Me Bruno GUIRAUD de la SCP SPORTOUCH BRUN, GUIRAUD, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et plaidant









INTIMEE :



Madame [Z] [T] épouse [M]

née le 04 Mai 1978 à [Localité 6]

[...

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

5e chambre civile

ARRET DU 24 MAI 2022

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 20/00038 - N° Portalis DBVK-V-B7E-OOXL

Décision déférée à la Cour :

Jugement du 28 NOVEMBRE 2019

TRIBUNAL D'INSTANCE DE MONTPELLIER

N° RG 19/000810

APPELANT :

Monsieur [U] [P]

né le 27 Novembre 1954 à [Localité 7]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représenté par Me Bruno GUIRAUD de la SCP SPORTOUCH BRUN, GUIRAUD, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et plaidant

INTIMEE :

Madame [Z] [T] épouse [M]

née le 04 Mai 1978 à [Localité 6]

[Adresse 4]

[Localité 2]

Représentée par Me Sylvain ISATELLE, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et plaidant

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Partielle numéro 2020/002313 du 26/02/2020 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de MONTPELLIER)

Ordonnance de clôture du 21 Mars 2022

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 11 AVRIL 2022,en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Nathalie AZOUARD, Conseiller, chargé du rapport.

Ce(s) magistrat(s) a (ont) rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Philippe GAILLARD, Président de chambre

Madame Nathalie AZOUARD, Conseiller

Madame Emmanuel GARCIA, Conseiller

Greffier, lors des débats : Madame Estelle DOUBEY

ARRET :

- Contradictoire.

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par Monsieur Philippe GAILLARD, Président de chambre, et par Madame Estelle DOUBEY, Greffier.

*

**

FAITS et PROCÉDURE ' MOYENS et PRÉTENTIONS DES PARTIES

Le 28 septembre 2012, [U] [P] a donné à bail à [V] [M] et [Z] [M] un logement situé à [Localité 6] contre un loyer mensuel de 1 010 € outre 50 € de charges.

Le 15 juillet 2015, [U] [P] a mis les locataires en demeure de justifier de l'occupation effective des lieux ce qui a donné lieu à un procès-verbal de recherches infructueuses suivi d'un procès-verbal de constat établi par huissier le 12 octobre 2015.

Le 18 novembre 2015, suite à sa saisine par le bailleur, le tribunal d'instance de Montpellier a notamment constaté la résiliation du bail, ordonné l'expulsion des locataires en cas de retour de ces derniers en cours de procédure et ordonné leur condamnation à payer la somme de 11 861, 93 € au titre de l'arriéré de loyers.

Le 24 septembre 2019, les consorts [M] ont interjeté appel de l'ordonnance.

Le 18 janvier 2016, la signification de l'ordonnance du 18 novembre 2016 est intervenue selon procès-verbal de recherches infructueuses.

Le 24 février 2016, [U] [P] a saisi le tribunal d'instance aux fins de saisie des rémunérations à l'égard de [Z] [M] en faisant valoir que les époux n'ont pas réglé leur dette.

Le 14 septembre 2016, à l'audience de tentative de conciliation, [Z] [M] ne s'est pas présentée et la saisie de ses rémunérations a été ordonnée.

Le 13 mars 2019 par courrier, [Z] [M] a sollicité la suspension de la saisie des rémunérations pratiquée.

A l'audience de contestation des saisies de rémunération elle a demandé principalement la mainlevée totale de la saisie rémunératoire en cours et subsidiairement, la suspension de la saisie dans l'attente de l'issue du procès en appel et de l'enquête pénale. Elle a avancé avoir donné congé pour le 1er février 2015 au bailleur, qui aurait par la suite usé de man'uvres frauduleuses, en envoyant tous les actes à une adresse où elle et son époux ne résidaient pas, et ce afin d'obtenir un titre exécutoire.

[U] [P] a fait valoir que les époux [M] n'ont jamais restitué les clés et dément avoir eu une intention frauduleuse.

Le jugement rendu le 28 novembre 2019 par le tribunal d'instance de Montpellier énonce dans son dispositif :

Constate la nullité de la signification du 18 janvier 2016 d'une ordonnance de reprise des lieux rendue par le tribunal d'instance de Montpellier le 28 novembre 2015.

Ordonne la mainlevée de la saisie des rémunérations de [Z] [M].

Déboute les parties du surplus de leurs demandes.

Dit que chaque partie prendra en charge ses propres dépens.

Le jugement expose que le procès-verbal de recherches infructueuses dressé par l'officier public est entaché de nullité faute de diligences suffisantes de la part de l'huissier. Il apparait que l'huissier s'est limité à une recherche internet et à un appel téléphonique à une personne du même nom pour tenter de déterminer l'adresse effective des époux [M] visée par l'acte.

Le jugement note également que le courrier de congé des locataires a bien été transmis à [U] [P] puisque ce dernier l'a donné au promoteur immobilier dans le cadre de la vente du bien ce qui signifie qu'il avait connaissance du départ des locataires et de leur nouvelle adresse.

Cette insuffisance des diligences de l'officier public entache de nullité le procès-verbal et cause nécessairement un grief à la personne privée de faire valoir ses moyens de défense.

Dès lors, la signification de l'ordonnance servant de fondement à la mesure d'exécution forcée est nulle et [U] [P] ne dispose donc d'aucun titre exécutoire.

[U] [P] a relevé appel du jugement par déclaration au greffe du 3 janvier 2020.

La clôture de la procédure a été prononcée par ordonnance du 21 mars 2022.

Les dernières écritures pour [U] [P] ont été déposées le 20 mars 2020.

Les dernières écritures pour [Z] [M] ont été déposées le 16 mars 2020.

Le dispositif des écritures pour [U] [P] énonce :

Déclarer recevable et bien fondé l'appel du concluant.

Réformer la décision querellée dans toutes ses dispositions.

Débouter [Z] [M] de toutes ses demandes, fins et conclusions.

Condamner [Z] [M] à payer au concluant la somme de 3 500 € au titre des frais irrépétibles outres aux entiers dépens. 

[U] [P] soutient que le juge en première instance a statué ultra petita en prononçant la nullité de la signification de l'ordonnance sans que [Z] [M] ne l'ait sollicitée.

Il ajoute que le congé délivré par ses locataires ne contient pas la nouvelle adresse des époux [M]. Il affirme que la décision du 15 septembre 2016 était définitive puisque l'article L 211-4 du Code des procédures civiles d'exécution prévoit que toute contestation et demande de mainlevée de la saisie attribution doit être formée dans le délai d'un mois. [Z] [M] a eu connaissance des actes depuis octobre 2016 mais n'a jamais demandé à être relevée de forclusion. En tout état de cause, [Z] [M] a fini par se désister de l'appel formé à l'encontre de l'ordonnance, ce qui n'a pas empêché la cour d'appel de Montpellier de la confirmer le 13 févier 2020. [U] [P] en déduit que [Z] [M] ne peut plus contester le titre exécutoire du 18 novembre 2015 ni leur dette à hauteur de 11 861, 83 € en principal. 

[U] [P] ajoute que les locataires ont cessé de payer les loyers à compter de décembre 2014, qu'ils ont quitté les lieux sans état des lieux et qu'ils n'ont pas restitué les clés. Il rappelle que la date de restitution des lieux est celle de la remise des clés en main propre au bailleur et ce de jurisprudence constante. Il ajoute que la cour d'appel de Montpellier a bien confirmé l'ordonnance litigieuse le 13 février 2020, il n'est donc pas possible de prétendre que la saisie effectuée aurait un caractère frauduleux.

Le dispositif des écritures pour [Z] [M] énonce :

Confirmer en toutes ses dispositions le jugement du 28 novembre 2019.

Condamner [U] [P] à restituer à [Z] [M] l'intégralité des sommes saisies et des frais y afférents.

Condamner [U] [P] à payer 2 000 € sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1990 et aux entiers dépens.

[Z] [M] soutient que [U] [P] est de mauvaise foi. Elle fait valoir qu'il a adressé sa requête en reprise des lieux et sa sommation à une adresse où il savait que ses locataires ne seraient pas touchés afin de les priver de la possibilité de se défendre. Elle avance que par courrier remis en main propre, elle a prévenu le bailleur qu'ils quittaient les lieux pour le 1er février 2015. Le bailleur a d'ailleurs remis ce courrier au promoteur immobilier dans le cadre de l'achat de son bien. Les courriers versés aux débats par le bailleur sont adressés à la précédente adresse de ses locataires et à l'adresse du logement libéré alors qu'il savait que le logement était vide.

[Z] [M] souligne que [U] [P] prétend que la dette serait née depuis 2012 alors même qu'il n'a engagée aucune procédure ou commandement de payer à leur égard à cette période. Elle ajoute qu'il est logique que les loyers entre février 2015 et octobre 2015 n'aient pas été payés, puisque les locataires avaient délivré congé. Elle ajoute qu'il est possible de reprocher au bailleur son absence de formalisme de congé puisqu'il n'a jamais dénoncé le bail ou respecté le formalisme de résiliation pour reprise des lieux en perspective de l'acquisition des lieux. Aucun état des lieux d'entrée n'a été réalisé ni aucun état des lieux de sortie puisque le bien devait être détruit par le promoteur.

[Z] [M] soutient que l'huissier ayant établi ses procès-verbaux de recherches infructueuses n'a pas accompli toutes les diligences nécessaires pour la retrouver. 

Elle fait valoir qu'il est parvenu à la retrouver pour faire exécuter la décision mais non pour lui signifier celle-ci ce qui l'a privé de sa possibilité d'engager un recours contre le jugement. Elle affirme que de fait, la signification de l'ordonnance du 18 novembre 2015 est nulle ce qui prive la décision du 18 novembre 2015 de son caractère exécutoire. Elle demande donc la restitution de l'intégralité des sommes saisies.

MOTIFS

La cour rappelle tout d'abord qu'en application de l'article 954 du code de procédure civile elle ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des dernières conclusions des parties.

En l'espèce la cour observe que dans ses dernières conclusions [U] [P] développe un moyen selon lequel [Z] [M] n'aurait plus été recevable a contesté la décision de saisie des rémunérations en date du 15 septembre 2018 la contestation intervenant au delà du délai d'un mois à compter de la signification de la dénonciation de la saisie en application de l'article L 211-4 du code des procédures civiles d'exécution.

Toutefois ce moyen ne se traduit pas dans le dispositif des conclusions de l'appelant en terme de prétention si bien que la cour n'est pas tenue d'y répondre.

En outre la cour relève que l'article L 211-4 du code pré-cité s'applique à la procédure de saisie attribution alors que la procédure de saisie des rémunérations est régie par le code du travail lequel permet au débiteur à tout moment de saisir le juge d'une contestation tant que la saisie est en cours.

Le juge d'instance se fondant tant que les dispositions du code des procédures civiles d'exécution que sur les dispositions du code du travail régissant la procédure de saisie des rémunérations a rappelé que la mise en place d'une saisie des rémunérations d'un débiteur suppose que le créancier soit muni d'un titre exécutoire en l'occurrence en application de l'article L 111-3 1° du code des procédures civiles d'exécution seuls constituent des titres exécutoires, les décisions des juridictions de l'ordre judiciaire ou de l'ordre administratif lorsqu'elles ont force exécutoire, ainsi que les accords auxquels ces juridictions ont conféré force exécutoire.

En l'espèce il n'est pas contesté que le fondement à la requête en saisie des rémunérations de [Z] [M] est l'ordonnance rendue le 18 novembre 2015 par le tribunal d'instance de Montpellier décision qui pour avoir force exécutoire doit avoir fait l'objet d'une signification.

[U] [P] a fait procéder à la signification à [Z] [M] de l'ordonnance du tribunal d'instance de Montpellier du 18 novembre 2015 par un acte d'huissier en date du 18 janvier 2016, [Adresse 5].

L'acte de signification conformément aux dispositions de l'article 659 du code de procédure civile mentionne qu'aucune personne répondant à l'identification du destinataire n'a son domicile, sa résidence ou son établissement à l'adresse connue.

L'huissier comme la loi le prévoit énumère ensuite les diligences effectuées à savoir :

- la requise est partie « à la cloche de bois »,

- sur internet « pages blanches » cette dernière ne figure pas,

- seul un certain [M] [V] y figure à l'adresse [Adresse 8] nous avons tenté de le joindre au 04 67 71 79 02 et tombons sur un répondeur.

Toutefois il ne résulte pas de ces mentions que l'huissier instrumentaire comme la loi lui oblige a effectué les diligences nécessaires et sérieuses pour connaître le nouveau domicile, la résidence ou le lieu de travail de [Z] [M].

En effet il est établi par les pièces produites par cette dernière qu'à compter de mars 2015 sa nouvelle adresse était connue de plusieurs administrations et organismes, comme le Ministère de l'enseignement supérieur son employeur, les services fiscaux, EDF et que l'huissier aurait pu par de simples investigations auprès de ces services avoir connaissance de la nouvelle adresse de [Z] [M] et lui signifier l'ordonnance à personne alors que comme relevé par le premier juge il s'est limité à des recherches des plus sommaires et à signifier l'acte concerné et tous les actes subséquents à l'adresse du logement anciennement occupé alors que depuis fin décembre 2014 le bailleur savait que les époux [M] n'occupaient plus les lieux loués et ce même s'il n'est pas justifié de la remise effective des clés comme le soutient [Z] [M].

Le fait que dans le courrier donnant congé [Z] [M] n'ait pas communiqué sa nouvelle adresse ne dispensait pas l'huissier de justice d'effectuer les diligences nécessaires et sérieuses pour connaître le nouveau domicile, la résidence ou le lieu de travail de [Z] [M] cette dernière travaillant en outre dans l'administration.

Par conséquent la signification faite le 18 janvier 2016 ne répond pas aux exigences légales et si bien que l'ordonnance du 18 novembre 2015 ne peut avoir avoir force exécutoire, le fait que cette décision est ensuite été confirmée par un arrêt de la cour d'appel de Montpellier le 13 février 2020 étant sans incidence sur la validité du titre exécutoire et donc sur la régularité de la procédure de saisie des rémunérations ordonnée le 14 septembre 2016.

Par ces motifs ajoutés le jugement dont appel sera donc confirmé en ce qu'il a ordonné la main levée de la saisie des rémunérations de [Z] [M] sans qu'il soit besoin d'ordonner la restitution par [U] [P] de l'intégralité des sommes saisies et des frais y afférents, la main levée de la saisie des rémunérations pour défaut de titre exécutoire emportant de fait cette restitution.

Le jugement dont appel sera en outre confirmé en ses dispositions au titre des frais irrépétibles et des dépens.

L'équité en appel ne commande pas en appel de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, mais [U] [P] succombant au principal devra supporter les dépens de la présente procédure.

PAR CES MOTIFS:

La cour statuant pas arrêt contradictoire et rendu par mise à disposition au greffe;

Confirme le jugement rendu le 28 novembre 2019 par le tribunal d'instance de Montpellier;

Y ajoutant,

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile;

Condamne [U] [P] aux dépens de la présente procédure.

Le greffierLe président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 5e chambre civile
Numéro d'arrêt : 20/00038
Date de la décision : 24/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-24;20.00038 ?
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