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24/05/2022 | FRANCE | N°19/07304

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 5e chambre civile, 24 mai 2022, 19/07304


Grosse + copie

délivrées le

à







COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



5e chambre civile



ARRET DU 24 MAI 2022



Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 19/07304 - N° Portalis DBVK-V-B7D-OMPT



Décision déférée à la Cour :

Jugement du 16 SEPTEMBRE 2019

TRIBUNAL D'INSTANCE DE CARCASSONNE

N° RG 11-18-606





APPELANTE :



Madame [B] [C] [W]

née le 14 Septembre 1961 à [Localité 7]

de nationalité Français

e

[Adresse 5]

[Localité 1]

Représentée par Me Aurélie ANDRE, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et plaidant





INTIMES :



Monsieur [G] [Z]

né le 13 Février 1973 à [Localité 6]

de nationalité F...

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

5e chambre civile

ARRET DU 24 MAI 2022

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 19/07304 - N° Portalis DBVK-V-B7D-OMPT

Décision déférée à la Cour :

Jugement du 16 SEPTEMBRE 2019

TRIBUNAL D'INSTANCE DE CARCASSONNE

N° RG 11-18-606

APPELANTE :

Madame [B] [C] [W]

née le 14 Septembre 1961 à [Localité 7]

de nationalité Française

[Adresse 5]

[Localité 1]

Représentée par Me Aurélie ANDRE, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et plaidant

INTIMES :

Monsieur [G] [Z]

né le 13 Février 1973 à [Localité 6]

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représenté par Me Alexandra VITRAC, avocat au barreau de CARCASSONNE, postulant

assisté de Me Pauline BASTIT, avocat au barreau de TOULOUSE, avocat plaidant

Madame [I] [Z]

née le 04 Mai 1976 à République Tchèque

de nationalité Française

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentée par Me Alexandra VITRAC, avocat au barreau de CARCASSONNE

assistée de Me Pauline BASTIT, avocat au barreau de TOULOUSE, avocat plaidant

Ordonnance de clôture du 28 Février 2022

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 21 MARS 2022,en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Philippe GAILLARD, Président de chambre, chargé du rapport.

Ce(s) magistrat(s) a (ont) rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Philippe GAILLARD, Président de chambre

Madame Nathalie AZOUARD, Conseiller

Monsieur Emmanuel GARCIA, Conseiller

Greffier, lors des débats : Madame Estelle DOUBEY

Le délibéré de l'affaire, initialement prévu au 10 mai 2022, a été prorogé au 24 mai 2022.

ARRET :

- contradictoire.

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, prévu le 10 mai 2022, délibéré prorogé au 24 mai 2022, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par Monsieur Philippe GAILLARD, Président de chambre, et par Madame Estelle DOUBEY, Greffier.

*

**

Le 25 septembre 2017, [G] [Z] et [I] [Z] ont donné à bail à [B] [C] [W] une maison moyennant un loyer mensuel de 735 €, outre les charges.

Le 15 janvier 2018, suite à des impayés, les époux [Z] ont fait signifier à leur locataire un commandement de payer visant la clause résolutoire.

Le 5 mars 2018, les bailleurs ont accepté un accord amiable avec la locataire lui permettant de ne pas payer trois mois de loyers contre un départ de sa part.

Le 29 mars 2018, les bailleurs ont fait signifier un nouveau commandement de payer à la locataire.

Le 18 mai 2018, un deuxième accord amiable est conclu permettant à la locataire d'obtenir 7 mois de réduction contre un départ de la locataire au 14 juillet. La locataire n'a pas quitté les lieux.

Le 16 août 2018, les bailleurs ont assigné la locataire devant le juge des référés pour voir constater l'acquisition de la clause résolutoire, obtenir son expulsion et sa condamnation au paiement des sommes dues.

Parallèlement, la locataire a fait état de plusieurs désordres dans le logement et a saisi l'ARS qui a rendu son rapport le 18 mars 2019.

Le juge des référés s'est déclaré incompétent au motif d'une contestation sérieuse au fond.

Le 30 novembre 2018, [B] [C] [W] a assigné ses bailleurs aux fins d'être autorisée à suspendre le paiement des loyers au motifs de l'indécence du logement et obtenir la condamnation des bailleurs à réparer divers postes de préjudices, outre la résiliation du bail pour divers motifs auteurs des bailleurs.

Le jugement rendu le 16 septembre 2019 par le tribunal d'instance de Carcassonne énonce dans son dispositif :

Rejette l'exception d'incompétence soulevée par les époux [Z] s'agissant de la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive.

Dit que le logement litigieux n'est pas décent.

Déboute [B] [C] [W] de son exception d'inexécution.

Prononce la résiliation du bail à compter du présent jugement.

Ordonne en conséquence à [B] [C] [W] de libérer la maison à usage d'habitation et de remettre aux époux [Z] les clés faute de quoi, ces derniers pourront procéder à son expulsion.

Dit n'y avoir lieu à ordonner l'enlèvement, le transport et la séquestration des meubles éventuellement laissés sur place.

Condamne [B] [C] [W] à verser aux époux [Z] la somme de 14 700 € selon décompte arrêté au 30 juin 2019 avec intérêts et une indemnité mensuelle d'occupation.

Condamne les époux [Z] à payer à [B] [C] [W] les sommes de 8 000 € en réparation de son préjudice de jouissance et 500 € en réparation de son préjudice moral.

Condamne [B] [C] [W] à payer aux époux [Z] les sommes de 500 € de dommages et intérêts pour procédure abusive et 300 € en application de l'article 700 du Code de procédure civile.

Ordonne la compensation des dettes et créances réciproques des parties.

Déboute les parties du surplus de leurs demandes.

Condamne [B] [C] [W] aux dépens en ce compris le coût du commandement de payer.

Le jugement constate qu'il ne peut être fait grief à [B] [C] [W] de ne pas avoir présenté devant le juge des référés sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive puisque cela n'entre pas dans ses attributions.

Le jugement constate que [B] [C] [W] verse aux débats un courrier adressé par le cabinet Urbanis mandaté par le préfet de l'Aude, le conseil départemental de l'Aude et la CAF aux termes duquel le logement qu'elle occupe est qualifié de non décent. Si les bailleurs ont montré leur volonté de corriger les anomalies relevées, il n'en demeure pas moins que le logement loué ne répondait pas aux critères de décence depuis l'entrée dans les lieux. Les deux parties sont d'accord pour prononcer la résiliation du bail, qu'il convient d'ordonner au vu de leurs relations conflictuelles. Dès lors, la demande de [B] [C] [W] de cessation immédiate des troubles subis devient sans objet.

Le jugement relève que l'indécence du logement ne permet pas de s'exonérer du paiement de la totalité du loyer dès lors que l'inhabilité totale n'est pas démontrée. Aucun élément ne permet ici d'établir que le logement serait insalubre ou inhabitable de sorte que [B] [C] [W] ne pouvait d'elle-même suspendre les loyers. Le décompte versé par les bailleurs n'est pas contesté.

Les demandes de [B] [C] [W] au titre de la prise en charge de ses frais de déménagement sont rejetées puisque leur imputabilité aux époux [Z] n'est pas démontrée. Il en est de même de la demande de réparation de [B] [C] [W] au titre de son préjudice de santé puisque ne sont démontrés ni le préjudice, ni le lien de causalité avec les désordres, rien ne justifiant n'ordonner une expertise. Le jugement relève que la requérante n'établit pas que les bailleurs aient agi par malice, mauvaise foi ou légèreté blâmable.

Le jugement constate que le comportement de [B] [C] [W] traduit un acharnement procédural qui excède le droit d'ester en justice puisqu'elle a systématiquement rejeté toutes les tentatives de règlement amiable proposées par ses bailleurs, ses derniers ayant même proposé de renoncer au paiement des 5 mois de loyers dus en échange de son départ.

[B] [C] [W] a relevé appel du jugement par déclaration au greffe du 6 novembre 2019.

La clôture de la procédure a été prononcée par ordonnance du 28 février 2022.

Les dernières écritures pour [B] [C] [W] ont été déposées le 16 septembre 2020.

Les dernières écritures pour les époux [Z] ont été déposées le 16 juin 2020.

Le dispositif des écritures pour [B] [C] [W] énonce :

Débouter les consorts [Z] de leurs demandes de condamnation au titre du paiement de l'arriéré locatif, de la résiliation du bail, de l'expulsion et du paiement d'une indemnité d'occupation. 

A titre subsidiaire,

- condamner les consorts [Z] au paiement de la somme de 14 700 € au 30 juin 2019 plus l'indemnité d'occupation de 735 € courant depuis le 30 juin 2019 jusqu'à la date de l'arrêt à intervenir, somme à parfaire jusqu'à l'exécution complète des travaux de reprise au titre du préjudice de jouissance.

- ordonner la compensation des créances en ce compris le montant du dépôt de garantie versé.

- débouter les consorts [Z] de leurs demandes de résiliation du bail, d'expulsion et de paiement d'une indemnité d'occupation

Très subsidiairement, si une condamnation devait intervenir à l'encontre de [B] [C] [W], celle-ci ne pourra excéder 20 % du loyer soit la somme de 147 € outre la déduction du montant de dépôt de garantie et préjudices annexes.

Condamner les consorts [Z] au paiement de la somme de 5 000 € au titre du préjudice moral subi par [B] [C] [W], de 5 000 € au titre du préjudice de santé, de 18 000 €, somme arrêtée au 30 septembre 2020 correspondant aux dommages et intérêts relatifs à un jour de consultance par mois à 500 € sur 36 mois et à la somme de 14 000 € au titre des préjudices subis pour les troubles de jouissance.

Réformer le jugement en ce qu'il a condamné [B] [C] [W] au paiement de la somme de 500 € à titre de préjudice pour procédure abusive.

Condamner les consorts [Z] à réaliser ces travaux dans un délai d'un mois suivant signification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 € par jour de retard.

A titre infiniment subsidiaire, accorder un délai de grâce de 36 mois au bénéfice de [B] [C] [W] et nommer les experts judiciaires en bâtiment et médical si la cour le juge nécessaire.

Débouter les consorts [Z] de l'ensemble de leurs demandes.

Condamner les consorts [Z] au paiement de la somme de 5 000 € en application de l'article 700 du Code de procédure civile et aux entiers dépens.

[B] [C] [W] soutient que le logement qui lui a été loué est indécent. Elle estime que le premier juge n'a pas tiré les conséquences de cette constatation puisqu'il a rejeté l'exception d'inexécution alors même que les désordres rendaient impossible l'usage du logement.

Elle fait observer l'absence de remise des diagnostics obligatoires, que les accès et circulations extérieures ne sont pas en état, que l'électricité, le poêle de chauffage au bois, la plomberie, les sanitaires, le réseau téléphonique d'Internet, ne fonctionnent pas ne sont pas aux normes.

Elle relève dans le rapport d'expertise du 5 avril 2019 le risque pour la sécurité des personnes et la décision de l'ARS du 18 mars 2019 posant diagnostic de non décence.

Elle relève l'absence de mentions obligatoires dans le bail, notamment concernant le DPE.

Elle soutient que les bailleurs ont bien reconnu l'existence des désordres puisqu'ils lui ont concédé des exonérations de paiement des loyers et ont engagé des pourparlers avec elle, sans que ces derniers n'aboutissent.

[B] [C] [W] verse aux débats le rapport d'Urbanis qualifiant le logement de non décent et relevant des infractions au règlement sanitaire départemental ainsi que les rapports d'experts relevant de nombreux désordres. Elle souligne le risque lié à l'absence de potabilité de l'eau et rappelle que l'accès à l'eau potable est un des critères impératifs de décence d'un logement. Les bailleurs avaient connaissance de ce fait puisqu'ils avaient installé un filtre à sédiments sur leur installation bien que cet élément n'ait pas suffit à rendre l'eau buvable outre le fait qu'il n'a pas été changé depuis son arrivée dans les lieux. Elle rappelle que les bailleurs auraient dû l'informer du risque de rupture du barrage sous lequel se trouve sa maison et du fait que le logement se situe en zone inondable.

Elle soutient qu'elle a subi des troubles de jouissance et d'occupation. Elle estime avoir subi des nuisances sonores de la part des voisins et avoir découvert que sa voisine directe était assistante maternelle et qu'elle filmait constamment ses deux chiens qui ne pouvaient donc plus sortir. Elle avance que les voisins ont tenu des propos diffamants à son encontre. [B] [C] [W] estime subir également un trouble de droit puisque son voisin dispose d'une cabane, non cadastrée avec des ouvertures donnant directement chez elle et qu'il existe une servitude sur la clôture mitoyenne.

Elle fait valoir que le juge en première instance a constaté l'indécence du logement et qu'il convient d'en retenir également l'inhabitabilité au vu des risques pour sa santé et sa sécurité. Elle conteste donc devoir une somme au titre des loyers impayés ou d'une quelconque indemnité d'occupation.

Elle soutient qu'elle peut obtenir une indemnisation de son préjudice de jouissance qui a été constaté par le premier juge et devrait être évalué à 100 % du loyer puisque le logement est inhabitable et qu'il présente un danger pour la santé et la sécurité des locataires.

Elle subit un préjudice de santé qu'il est possible d'évaluer subsidiairement par la désignation d'un expert. [B] [C] [W] estime qu'il convient de condamner les bailleurs à réaliser les travaux de mise en conformité sous astreinte au vu de leur inertie et du danger résultant des désordres.

A titre infiniment subsidiaire, elle demande des délais de grâce au vu de la dégradation de sa situation financière et son épuisement réel et avéré.

Le dispositif des écritures pour les époux [Z] énonce :

Confirmer le jugement du tribunal d'instance de Carcassonne en date du 16 septembre 2019 sauf en ce qu'il a dit que le logement n'est pas décent et qu'il a condamné les consorts [Z] à payer à [B] [C] [W] les sommes de 8 000 € en réparation de son préjudice de jouissance et 500 € en application de son préjudice moral.

Débouter [B] [C] [W] de l'ensemble de ses demandes.

Condamner [B] [C] [W] au paiement de la somme de 6 982, 50 € au titre de l'indemnité d'occupation due depuis le jugement, de 1 837, 50 € au titre des loyers sur la période du 1er juillet 2019 au 15 septembre 2019, de 2 000 € pour procédure abusive, de 4 000 € en vertu des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile et aux entiers dépens.

Les époux [Z] observent que [B] [C] [W] demande l'infirmation du jugement en ce qu'il a résilié le bail alors qu'elle avait sollicité cette résiliation. En tout état de cause, le contrat de bail comporte une clause résolutoire en cas de défaut de paiement des loyers et la locataire ne s'acquitte plus de ses loyers depuis novembre 2017.

Les époux [Z] contestent l'indécence du logement. Ils font valoir que le chargé de mission habitat indigne de l'ARS précise dans sa décision qu'il ne s'agit ni d'une enquête d'insalubrité ni d'une expertise mais un simple constat outre le fait qu'il n'a pas été réalisé de manière contradictoire. Ils ajoutent qu'aucun des rapports versés aux débats n'est contradictoire. La liste des désordres ne permet pas d'établir qui en est à l'origine. Le fait qu'ils aient acceptés de lui faire grâce de plusieurs mois de loyers en échange de son départ n'est pas une reconnaissance de leur responsabilité mais bien une volonté de leur part de lui faire quitter le logement compte tenu des relations compliquées entre eux. Les bailleurs relèvent que l'état des lieux d'entrée ne fait aucune mention des dysfonctionnements allégués alors même que la locataire l'a signé. Rien ne démontre que la locataire aurait demandé de compléter l'état des lieux dans le délai de 10 jours prévu à l'article 3-2 de la loi du 6 juillet 1989.

Les époux [Z] contestent l'existence de nuisances du fait du voisinage et la véracité des allégations de [B] [C] [W]. Ils ajoutent que qu'ils ne sont pas tenus de garantir le preneur du trouble que des tiers apportent par voies de fait à sa jouissance, sans prétendre d'ailleurs aucun droit sur la chose louée. La demande de la locataire au titre du relogement est irrecevable puisque nouvelle en appel et subsidiairement parce que les bailleurs n'en sont pas débiteurs.

Ils rappellent qu'il est de jurisprudence constante que l'inexécution de travaux de réparation par le bailleur ne dispense pas le preneur de payer le loyer. Cette exception d'inexécution n'est possible qu'en cas d'impossibilité totale d'utiliser les lieux loués ce qui n'est ici pas le cas puisque la locataire n'a toujours pas quitté les lieux.

Les bailleurs opposent aux demandes de la locataire en indemnisation de ses préjudices, son absence de justificatif des montants réclamés ni de la différence entre les montants demandés en première instance et ceux demandés en appel.

Les bailleurs soutiennent que la demande infiniment subsidiaire de [B] [C] [W] tendant à la suspension de la clause résolutoire est une demande nouvelle et contradictoire avec sa demande initiale de résiliation du bail. En tout état de cause, il n'est pas possible d'établir la bonne foi de la locataire puisqu'elle ne règle aucun loyer et ne démontre pas par le biais de justificatifs de revenus, qu'elle pourra les régler à l'avenir. 

MOTIFS

La locataire a signé un état des lieux d'entrée le 25 septembre 2017 qui mentionne des situations pour la plupart en très bon état, pour les autres en bon état, et quelques éléments en état moyen, mais sans indiquer ni réserve particulière ni situation en mauvais état.

La locataire n'a pas fait usage par ailleurs du délai de 10 jours mentionné à l'article 3-2 de la loi du 6 juillet 1989 pour faire compléter les mentions après l'entrée dans les lieux,

La cour observe cependant que les échanges de mails produits montrent que très rapidement dans les jours suivant l'entrée dans les lieux la locataire s'est plaint de plusieurs dysfonctionnements.

Le premier juge a relevé avec pertinence l'indication dans le courrier du cabinet URBANIS mandaté par le préfet de l'Aude, le conseil départemental et la CAF, la qualification de logement non décent au regard des dispositions du décret du 30 janvier 2002 et du règlement sanitaire départemental, dont le contenu auquel la cour renvoie les parties pour la lecture complète relate plusieurs éléments d'indécence notable, même s'ils ne caractérisent pas une situation d'insalubrité rendant le logement inhabitable.

Les rapports d'experts en bâtiment en avril, mai et juin, 2019 corroborent sans ambiguïté la présence de ces désordres de nature à comporter un risque pour les conditions d'habitabilité d'un logement, dont la contestation de principe des bailleurs n'est pas techniquement argumentée.

La cour confirme les motifs pertinents du premier juge pour prononcer la résiliation du bail, en ce qu'elle était sollicitée en première instance sur un fondement distinct par chacune des parties, et en considération à la fois du non-paiement des loyers d'un logement qui n'est pas déclaré inhabitable et d'une situation conflictuelle sans issue prévisible.

Elle constate que ces motifs ne font pas l'objet de contestation sérieuse en appel, en observant notamment que la locataire qui demande d'infirmer la résiliation a cessé de payer les loyers sans autorisation judiciaire et sans apporter la preuve d'un caractère inhabitable du logement.

La cour confirme également l'obligation du locataire du paiement de l'intégralité des loyers, et d'une indemnité d'occupation équivalente jusqu'à la libération des lieux qui n'est pas invoquée dans les débats de l'appel.

Le montant de la dette locative retenue par le premier juge jusqu'au 30 juin 2019 n'est pas critiquée, et pas davantage en appel les montants supplémentaires réclamés pour la somme de 1837,50 € jusqu'à la date du jugement du 16 septembre 2019, pour la somme de 6982,50 € au titre de l'indemnité d'occupation jusqu'au 10 juin 2020, soit un montant total jusqu'au 10 juin 2020 de 8820 €.

La cour confirme également la juste appréciation d'une indemnisation à hauteur de 8000 € de la réalité du préjudice consécutif aux désordres et au caractère non décent du logement.

La cour rejette en revanche les demandes d'indemnisation supplémentaire de [B] [C] [W] sous diverses qualifications de préjudice moral, de jouissance, de santé, de consultance, dont l'imputabilité particulière aux époux [Z] n'est pas suffisamment démontrée, notamment concernant les certificats médicaux ou les plaintes à l'encontre de voisins tiers aux obligations contractuelles des parties.

La cour rejette comme le premier juge la demande de condamnation à réaliser des travaux sous astreinte incompatible avec la résiliation du bail prononcée.

La cour infirme la condamnation prononcée au titre d'un préjudice de procédure abusive, en ce qu'il n'est pas suffisamment caractérisé dans l'évolution d'une situation conflictuelle depuis l'entrée dans les lieux, dans laquelle des éléments de responsabilité du bailleur ont été relevés à la fois par le premier juge et par la cour.

La cour rejette la demande de délai de paiement en raison de la poursuite du maintien dans les lieux après la résiliation prononcée sans effectuer aucun paiement d'indemnités d'occupation.

La cour confirme la compensation entre les dettes réciproques.

Il n'est pas inéquitable de laisser à la charge des parties les frais non remboursables qu'elles ont exposés en première instance et en appel en considération des comportements de chacune d'elles contraires aux obligations du bail.

[B] [C] [W] supportera la charge des dépens de l'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire, par mise à disposition greffe ;

Confirme le jugement rendu le 16 septembre 2019 par le tribunal d'instance de Carcassonne, sauf en ce qu'il condamne [B] [C] [W] au titre d'une procédure abusive et au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Et y ajoutant :

Condamne [B] [C] [W] à payer à [G] [Z] et [I] [Z] la somme de 8820 € au titre des loyers et indemnités d'occupation échus entre le 30 juin 2019 et le 10 juin 2020 ;

Condamne [B] [C] [W] aux dépens de l'appel.

Le greffierLe président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 5e chambre civile
Numéro d'arrêt : 19/07304
Date de la décision : 24/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-24;19.07304 ?
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