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19/05/2022 | FRANCE | N°21/05179

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 2e chambre civile, 19 mai 2022, 21/05179


Grosse + copie

délivrées le

à







COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



2e chambre civile



ARRET DU 19 MAI 2022



Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 21/05179 - N° Portalis DBVK-V-B7F-PD3C



Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 27 JUILLET 2021

Tribunal Judiciaire de NARBONNE N° RG 21/00207





APPELANTE :



SARL BERNISE, exerçant sous l'enseigne RELAIS DES CORBIERES, inscrite au registre du commerce et des sociétés de NARBO

NNE sous le n° 343 658 670, dont le siège social est situé [Adresse 7], prise en la personne de son gérant en exercice, Monsieur [S] [O], domicilié en cette qualité audit siège

RELAIS DES CO...

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

2e chambre civile

ARRET DU 19 MAI 2022

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 21/05179 - N° Portalis DBVK-V-B7F-PD3C

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 27 JUILLET 2021

Tribunal Judiciaire de NARBONNE N° RG 21/00207

APPELANTE :

SARL BERNISE, exerçant sous l'enseigne RELAIS DES CORBIERES, inscrite au registre du commerce et des sociétés de NARBONNE sous le n° 343 658 670, dont le siège social est situé [Adresse 7], prise en la personne de son gérant en exercice, Monsieur [S] [O], domicilié en cette qualité audit siège

RELAIS DES CORBIERES, [Adresse 7]

[Localité 1]

Représentée par Me BOUSQUET substituant Me Yves FERES de la SELARL FERES & ASSOCIES, avocat au barreau de CARCASSONNE

INTIMES :

Monsieur [C] [E]

né le 24 Avril 1950 à [Localité 6]

de nationalité Française

[Adresse 3]

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représenté par Me ROGER substituant Me Fatiha EL HAZMI de la SCP PECH DE LACLAUSE-JAULIN-EL HAZMI, avocat au barreau de NARBONNE

Madame [A] [E]

née le 29 Novembre 1945 à [Localité 6]

de nationalité Française

[Adresse 5]

[Localité 1]

Représentée par Me ROGER substituant Me Fatiha EL HAZMI de la SCP PECH DE LACLAUSE-JAULIN-EL HAZMI, avocat au barreau de NARBONNE

Monsieur [F] [E]

né le 10 Décembre 1956 à [Localité 6]

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Localité 1]

Représenté par Me ROGER substituant Me Fatiha EL HAZMI de la SCP PECH DE LACLAUSE-JAULIN-EL HAZMI, avocat au barreau de NARBONNE

Ordonnance de clôture du 08 Mars 2022

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 15 MARS 2022,en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Béatrice VERNHET, Conseiller, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Eric SENNA, Président de chambre

Madame Myriam GREGORI, Conseiller

Madame Béatrice VERNHET, Conseiller

Greffier, lors des débats : Mme Laurence SENDRA

L'affaire, mise en délibéré au 21 avril 2022, a été prorogée au 12 mai 2022, puis au 19 Mai 2022.

ARRET :

- Contradictoire

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par Monsieur Eric SENNA, Président de chambre, et par Mme Laurence SENDRA, Greffier.

La société Bernise occupe les locaux indivis des consorts [E] en vertu d'un bail commercial notarié du 3 mars 1988 qui avait été souscrit par leurs auteurs, Monsieur [Y] [E] et Madame [U] [K], son épouse au profit de Madame [X] et de Monsieur [O], aux droits desquels se trouve la société Bernise.

Ce bail , qui porte sur un terrain, situé au lieu dit ' La roue' sur lequel est implantée une construction à usage d'hôtel- restaurant, s'est trouvé renouvelé par tacite reconduction depuis le 10 mars 2006, moyennant un loyer mensuel de 3051,71 € par mois.

Les consorts [E] , ont fait signifier à la société Bernise le 24 mars 2021 un commandement de payer en principal la somme de 32 824,72 € visant la clause résolutoire prévue au bail, accompagné d'un commandement de communiquer l'attestation d'assurance matérialisant la garantie des lieux contre les risques locatifs.

Le 22 avril 2021, la société Bernise a assigné Monsieur [C] [E], Madame [A] [E] , et Monsieur [F] [E] devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Narbonne pour entendre prononcer la suspension des effets de la clause résolutoire, et obtenir les plus larges délais de paiement.

Par ordonnance en date du 27 juillet 2021, le juge des référés de cette juridiction a:

Au principal, renvoyé les parties à se pourvoir ainsi qu'e1les aviseront, mais des à présent, par provision,

- dit n'y avoir lieu à référé s'agissant de la demande de suspension des effets de la clause résolutoire formulée par la société Bernise;

- condamné la société Bernise à payer aux consorts [E] une indemnité provisionnelle d'un montant de 23 712, 70 € au titre de sa dette locative

- constaté qu'en application de la clause résolutoire la société Bernise est sans droit ni titre depuis le 24 avril 2021

- ordonné à la société Bernise de libérer les lieux dénommés Relais des Corbières sises [Adresse 7] dans le délai de deux mois à compter de la présente ;

- condamné la société Bernise au paiement d'une indemnité d'occupation sur la base de la somme de 3051, 71 € à compter du 24 avril 2021 et jusqu'à totale libération des lieux ;

- condamné la société Bernise aux entiers dépens de l'instance ;

- rejeté les demandes autres ou plus amples des parties

- rappelé que les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision n'en dispose autrement.

La société Bernise a relevé appel de cette ordonnance le 13 août 2021 en critiquant chacune de ses dispositions.

Dans ses dernières conclusions, notifiées par voie électronique le 7 mars 2022, auxquelles il y a lieu de se référer pour un plus ample exposé de ses prétentions et moyens, la société Bernise demande à la cour de:

- déclarer la société Bernise recevable est bien fondée en son appel,

- débouter les consorts [E] de l'ensemble de leurs demandes, fins, moyens

et conclusions,

- réformer en toutes ses dispositions l'ordonnance de référé rendue le 27 juillet 2021 par le tribunal judiciaire de Narbonne et ce faisant,

- suspendre les effets de la clause résolutoire du contrat de bail conclu le 3 mars 1988 entre les parties,

- dire n'y avoir lieu à l'application des dispositions des articles 700 et 696 du Code de procédure civile.

Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 16 février 2022, auxquelles il y a lieu de se référer pour un plus ample exposé de ses prétentions et moyens, les consorts [E] demandent à la cour de :

- confirmer la décision entreprise

- rejeter la demande de délais formulés par la société Bernise, vu les articles L631-1, L 653-1, L653-3 du code de commerce.

- constater qu'en application de la clause résolutoire prévue au bail, la société citée est occupante sans droit titre ni qualité et ce depuis le 24 avril 2021 des locaux dont la désignation suit le lot n°1 de l'état descriptif de division dressé par Maître [M] Notaire, le 26 octobre 1972, dénommé Relais des Corbières, [Adresse 7] ,

- condamner l'appelante à payer la provision de 9 641,35€.

- condamner la citée à payer les dépens de la procédure dans lesquels seront compris le coût des commandements de la SCP Martines Jaffus Lefrene des 24 juillet 2019 et 24 mars 2021.

- condamner la citée à supporter les entiers dépens de la présente procédure, de l'ordonnance de référé et le coût de tous les actes d'exécution qui seraient nécessaires pour le cas où les lieux ne seraient pas libérés.

-condamner la citée en application de l'article 700 du Code de procédure civile , à payer la somme de 3500 € .

L'ordonnance de clôture est intervenue le 8 mars 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION

La société Bernise critique la décision du juge des référés qui a rejeté sa demande tendant à la suspension de la clause résolutoire, et à l'octroi de délais de paiement, en faisant droit aux demandes reconventionnelles des consorts [E] qui souhaitaient entendre constater la résiliation du bail et prononcer toutes les mesures s'y attachant.

( I ) Sur la clause résolutoire

Le juge des référés a débouté la société Bernise de sa demande tendant à la suspension des effets de la clause résolutoire et à l'octroi de délais de paiement , en considération des difficultés récurrentes rencontrées par cette dernière depuis l'année 2011 dans le paiement des loyers , ayant motivé la délivrance d'un premier commandement de payer en juillet 2019.Le magistrat a estimé qu'il n'était pas possible d'imputer ces difficultés de paiement à la seule crise sanitaire et qu'il n'était pas certain , que le prêt garanti par l'état dans le cadre du soutien apporté aux entreprises touchées par la crise sanitaire soit suffisant pour couvrir la dette locative et assurer à l'avenir un paiement régulier des loyers. Il a en conséquence fait droit à la demande des bailleurs en constatant au contraire l'acquisition des effets de la clause résolutoire et en prononçant toutes les mesures et condamnations qui s'y attachent.

La société Bernise , qui ne conteste pas , l'existence de difficultés financières par le passé, rappelle qu'elle est toujours parvenue à les surmonter mais que la crise sanitaire les a aggravées. Elle fait valoir sa bonne foi en rappelant qu'elle a pris l'initiative de saisir le juge dans le mois du commandement pour obtenir des délais, et que depuis lors, elle a pu, en cours de procédure, régler la totalité de sa dette locative et même au delà , puisqu'à la faveur de la compensation effectuée entre la dette locative et la condamnation prononcée à l'encontre des bailleurs par le tribunal judiciaire de Narbonne, le 10 juin 2019 puis par la cour d'appel de Montpellier dans son arrêt du 02 novembre 2021 , dans une autre procédure ayant opposé les parties, l'indivision [E] se trouve maintenant débitrice envers elle de la somme de 5 333,77 € selon le dernier décompte délivré par l'huissier de justice en date du 7 mars 2022.

En conséquence, elle demande à la cour de débouter les consorts [E] et de suspendre les effets de la clause résolutoire.

Les consorts [E] rappellent que la société locataire est confrontée depuis plusieurs années à des défauts de règlement du loyer, qu'il ressort d'un décompte du 21 janvier 2020 qu'elle était débitrice de 16 596,34 € et que le passif s'est aggravé pour atteindre au jour du commandement de payer en mars 2021 la somme de 32 825,72€ malgré la compensation effectuée conformément à la décision du tribunal de Narbonne à hauteur de 50 % du montant de la condamnation. Ils font valoir d'une part que l'huissier s'est trompé dans l'établissement du dernier décompte, et que cette dette n'a pas été régularisée dans le mois du commandement de payer nonobstant les versements de 6100 € effectués le 24 mars et le 27 avril 2021 ( puisque une somme de 3051,71 € venait en paiement du loyer courant et non de l'arriéré), de sorte que le solde dû sur le commandement de payer était de 23 677, 43 €. Elle soutient que la société Bernise est en constant état de cessation de paiement, qu'elle aurait du déposer le bilan, et qu'elle n'a pas justifié non plus être assurée pour couvrir les risques locatifs en 2020.

Elle demande en conséquence à la cour de constater que la bail est résilié en vertu de la clause résolutoire , de déclarer la société Bernise , occupante sans droit ni titre depuis le 24 avril 2021 et de la condamner au paiement d'une provision de 9 641,35 € .

Il ressort des pièces versées aux débats et notamment du commandement de payer délivré le 24 mars 2021 , qu'à cette date, l'arriéré locatif de la société Bernise s'élevait à la somme globale de 32 825,72 € en principal intérêts et frais, après déduction de la créance alors non définitive , détenue par la locataire sur les bailleurs au titre du jugement rendu par le tribunal judiciaire de Narbonne, (assorti de l'exécution provisoire à concurrence de la moitié du montant des condamnations prononcées ) au titre des réparations et travaux leur incombant à hauteur de 12 370, 90 € ( soit 19 9895,64 +4846,16 :2 ) venue en compensation .

Les décomptes établis par l'huissier instrumentaire postérieurement ,les 16 avril 2021 et le 4 juin 2021 démontrent, de manière incontestable qu'en dépit des versements effectués par la locataire le jour de la signification du commandement de payer ( 6000, 00 € ) et le 27 avril 2021 ( 6100 € ) le 31 mai ( 3100 € ) et 1er juin 2021 ( 3 100 € ) les causes du commandement de payer n'étaient pas éteintes ni à la date du 24 avril 2021, marquant la date butoir de régularisation , ni à celle du 4 juin 2021 , à laquelle l'arriéré s'élevait encore à 23 712, 70 €.

La cour considère cependant que les efforts réalisés par la société Bernise, certes insuffisants pour paralyser le jeu résolutoire, n'en sont pas moins significatifs de la volonté et de la bonne foi de la société locataire de mettre tout en oeuvre pour parvenir à l'apurement total du passif et force est d'ailleurs de constater qu'elle y ait parvenue en cours d'instance, puisqu'il ressort du dernier décompte établi par l'huissier le 7 mars 2022 , qu'elle est maintenant devenue créancière des bailleurs pour une somme de 5333,77 € .

La cour observe en effet que les consorts [E] , se prévalent d'une erreur que l'huissier aurait commise dans l'établissement de ce décompte, prétendant sans en justifier qu'ils seraient toujours créanciers d'une somme qu'ils évaluent à 9 148,29 € dans en page 3 de leurs dernières conclusions et à 9641,35 € dans le dispositif de ces mêmes conclusions. Il ressort en effet de l'examen du décompte litigieux du 7 mars 2022, que l'huissier a bien tenu compte de la modification apportée par l'arrêt de la cour en date du 02 novembre 2021, dans le montant de la créance de la société Bernise , par substitution des sommes de 19 895,64 € et de 2 200 € à la somme figurant dans les décomptes antérieurs à la date du 17 septembre 2019 de 12 370, 90 €.

Par ailleurs, la société Bernise verse aux débats l'attestation de son assureur , la compagnie AXA, de laquelle il ressort qu'elle avait bien assuré les lieux loués en 2020/20221.

Dans ces conditions, la cour , dans son pouvoir souverain d'appréciation estime que c'est à tort que le premier juge a débouté la société preneuse de ses demandes fondées sur l'article L 145 -41 du Code de commerce, tendant à l'octroi de délais de paiement et à la suspension des effets de la clause résolutoire. Aussi, faisant droit rétroactivement à cette demande, il y a lieu d'autoriser la société Bernise à se libérer de sa dette , au plus tard le 17 septembre 2021 , et tenant l'évolution du litige et la régularisation intégrale du passif dans ce délai, de dire n'y avoir lieu à constater l'acquisition des effets de la clause résolutoire.

Les consorts [E] seront par voie de conséquence déboutés de cette demande reconventionnelle ainsi que de leur prétention au paiement de la somme provisionnelle de 9 641,35 € au titre des impayés de loyers.

L'ordonnance critiquée sera réformée en ce sens.

(II) Sur l'application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile

Compte tenu des circonstances de l'espèce, l'équité commande de ne pas faire application des dispositions à l'égard de quiconque de l'article 700 du code de procédure civile.

Compte tenu de l'issue du procès, les dépens de l'instance d'appel seront à la charge de l'indivision [E].

PAR CES MOTIFS

La cour,

- Infirme l'ordonnance rendue le 27 juillet 2021 par le juge des référés près le tribunal judiciaire de Narbonne,

Statuant à nouveau,

- Constate que les causes du commandement de payer signifié le 24 mars 2021 à la Sarl Bernise, n'étaient pas éteintes à la date du 24 avril 2021,

- Autorise rétroactivement la société Bernise à se libérer de la dette locative au plus tard au 17 septembre 2021 et suspend les effets de la clause résolutoire prévue au bail pendant le cours des délais ainsi octroyés,

- Constate que l'intégralité des sommes dues au titre des loyers et charges, en principal , frais et intérêts échus ont été réglés dans le délai imparti par la société Bernise,

- Dit que la clause résolutoire prévue par le bail n'a pas joué,

-Déboute Monsieur [C] [E], Madame [A] [E] et Monsieur [F] [E] de l'intégralité de leurs demandes,

Y ajoutant,

- Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,

- Condamne in solidum Monsieur [C] [E], Madame [A] [E] et Monsieur [F] [E] aux dépens de l'instance d'appel.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 2e chambre civile
Numéro d'arrêt : 21/05179
Date de la décision : 19/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-19;21.05179 ?
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