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19/05/2022 | FRANCE | N°17/04529

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 3e chambre civile, 19 mai 2022, 17/04529


Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



3e chambre civile



ARRET DU 19 MAI 2022



Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 17/04529 - N° Portalis DBVK-V-B7B-NJI2



Décision déférée à la Cour :

Jugement du 06 juillet 2017

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE CARCASSONNE

N° RG 14/01715





APPELANTS :



Monsieur [E], [K] [H],

né le 02 Février 1935 à [Localité 13]

de nationalité Française

décé

dé le 26 octobre 2019 à [Localité 15]



Madame [A] [G] [T] [H], agissant tant en son nom personnel qu'en qualité d'ayant droit de M. [E] [H] décédé

née le 26 Mars 1943 à [Localité 17]

de nationalité França...

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

3e chambre civile

ARRET DU 19 MAI 2022

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 17/04529 - N° Portalis DBVK-V-B7B-NJI2

Décision déférée à la Cour :

Jugement du 06 juillet 2017

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE CARCASSONNE

N° RG 14/01715

APPELANTS :

Monsieur [E], [K] [H],

né le 02 Février 1935 à [Localité 13]

de nationalité Française

décédé le 26 octobre 2019 à [Localité 15]

Madame [A] [G] [T] [H], agissant tant en son nom personnel qu'en qualité d'ayant droit de M. [E] [H] décédé

née le 26 Mars 1943 à [Localité 17]

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par Me Marie-Pierre VEDEL SALLES, avocat au barreau de MONTPELLIER

INTIMES :

Madame [O] [J]

née le 22 Mars 1957 à [Localité 18]

de nationalité Française

[Adresse 2]»

[Adresse 2]

et

Monsieur [W] [U]

né le 16 Janvier 1964 à [Localité 14]

de nationalité Française

[Adresse 2]»

[Adresse 2]

Représentés par Me Gérard BOUISSINET de la SCP BOUISSINET-SERRES, avocat au barreau de CARCASSONNE, substitué à l'audience par Me Lionel SERRES de la SCP BOUISSINET-SERRES, avocat au barreau de CARCASSONNE

Ordonnance de clôture du 23 Février 2022

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 02 MARS 2022,en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Brigitte DEVILLE, Magistrate honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

M. Thierry CARLIER, Conseiller faisant fonction de président de chambre

M. Fabrice DURAND, Conseiller

Mme Brigitte DEVILLE, Magistrate honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles

Greffier, lors des débats : Mme Camille MOLINA

ARRET :

- contradictoire.

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par M. Thierry CARLIER, Conseiller faisant fonction de président de chambre, et par Mme Camille MOLINA, Greffière.

*

**

FAITS ET PROCEDURE

Selon acte authentique des 5 et 26 juin 1967 les consorts [V], [I] [B] et [M] [C] ont défini le statut de la copropriété d'une parcelle située sur la commune de [Localité 16], cadastrée [Cadastre 11], devenue [Cadastre 4] à la suite du remaniement cadastral du 1er octobre 2001. Cette parcelle est à usage de voie d'accès et de circulation pour la desserte des fonds respectifs des copropriétaires.

Le même acte authentique a institué sur cette parcelle une servitude de passage au profit de la parcelle contiguë [Cadastre 12], devenue [Cadastre 3], appartenant aux consorts [Z]-[N].

Ces derniers, selon acte notarié du 7 janvier 2004 contenant rappel de la servitude dont bénéficie ce fonds cadastré [Cadastre 3], ont vendu celui-ci aux consorts [U]-[J].

Suivant acte authentique de partage du 10 novembre 2003, rectifié le 10 juin 2004, la parcelle [Cadastre 4] a été divisée en trois parcelles : [Cadastre 5], [Cadastre 6] et [Cadastre 7].

La parcelle [Cadastre 5] a été acquise par les consorts [U]-[J] suivant acte du 23 octobre 2008 qui précise expressément la suppression pure et simple de la servitude de passage mais uniquement en ce qu'elle porte sur la parcelle [Cadastre 5].

La parcelle [Cadastre 6] a été divisée en deux parcelles, les parcelles [Cadastre 9] et [Cadastre 10], et les consorts [U]-[J] ont acquis la parcelle [Cadastre 10] par acte du 3 décembre 2013 et ont renoncé à exercer leur servitude de passage sur le solde de la parcelle [Cadastre 9], propriété des consorts [L].

La parcelle [Cadastre 7] appartient aux consorts [H] suivant acte du 27 février 1998.

Par procès-verbal de constat d'huissier du 5 mars 2013 les consorts [U]-[J] ont fait constater que la servitude de passage était obstruée par une clôture grillagée, une terrasse carrelée, une pergola et une barrière en bois. Ils ont sommé, par courrier recommandé, les consorts [H] de faire cesser ce trouble mais ces derniers ont contesté l'existence de celui-ci puisque, selon eux, par acte du 23 octobre 2008, il a été expressément renoncé à l'exercice de la servitude sur la parcelle [Cadastre 7].

Par exploit du 29 novembre 2014 les consorts [U]-[J] ont assigné devant le tribunal de grande instance de Carcassonne les consorts [H] pour voir constater que ces derniers ont créé sur l'assiette de la servitude de passage leur bénéficiant, des constructions qui obstruent ce passage et font ainsi obstacle à l'exercice de la servitude, pour voir ordonner la destruction de ces constructions et se voir allouer des dommages et intérêts.

Par jugement du 6 juillet 2017 ce tribunal a :

' déclaré les consorts [U]-[J] bien fondés en leur action confessoire de servitude de passage introduite à l'encontre des consorts [H] ;

' dit en conséquence que la parcelle située commune de [Localité 16], lieu-dit chemin des acacias, section [Cadastre 3] appartenant aux consorts [U]-[J], bénéficie d'une servitude de passage conventionnelle sur la parcelle section [Cadastre 7] appartenant aux consorts [H] ;

' ordonné la destruction et l'enlèvement des ouvrages édifiés en travers de ce passage, à savoir la terrasse carrelée, les jardinières, la pergola, la clôture en bois et la clôture grillagée dont la présence a été constatée le 5 mars 2013 par la Selarl Marquestaut-Verge-Brignet, huissiers de justice à [Localité 14], le tout à peine d'une astreinte de 50 € par jour de retard à l'issue du délai d'un mois passé la signification du jugement et pour une période de 18 mois au-delà de laquelle il pourra être à nouveau fait droit ;

' ordonné l'exécution provisoire ;

' rejeté toute demande autre ou plus ample formulée par les parties ;

' condamné les consorts [H] aux entiers dépens.

Les consorts [H] ont interjeté appel de cette décision le 16 août 2017.

[E] [H] est décédé le 26 octobre 2019 et [A] [H], sa s'ur, est intervenue tant en son nom qu'en sa qualité d'ayant droit de son frère décédé.

Vu les conclusions de [W] [U] et de [O] [J] remises au greffe le 11 février 2022 ;

Vu les conclusions de [A] [H] remises au greffe le 23 février 2022 ;

MOTIFS

[A] [H] soutient que la parcelle [Cadastre 3] appartenant aux consorts [U]-[J] ne bénéficie pas d'une servitude de passage conventionnelle sur sa parcelle [Cadastre 7] et conclut donc à la réformation du jugement.

Sur l'opposabilité de la servitude de passage :

L'appelante invoque tout d'abord l'inopposabilité de la servitude de passage à son égard puisque son titre de propriété du 27 février 1998 n'en fait aucune mention.

En effet cet acte notarié concerne l'acquisition de droits indivis sur la parcelle [Cadastre 4] mais ne mentionne pas la servitude de passage conventionnelle qui avait été instituée par l'acte des 5 et 26 juin 1967 au profit du fonds cadastré [Cadastre 3] actuellement propriété des consorts [U]-[J].

Une servitude n'est opposable au propriétaire de l'immeuble qui en est grevé que si son titre en fait mention, si elle a été publiée ou encore s'il en connaissait l'existence au moment de l'acquisition.

En l'espèce, les actes des 5 et 26 juin 1967 ont été publiés à la conservation des hypothèques de [Localité 14] le 20 juillet 1967 et, en conséquence, cette servitude de passage conventionnelle est bien opposable à [A] [H].

Sur l'existence actuelle de la servitude de passage conventionnelle :

L'appelante soutient que cette servitude de passage n'existe plus puisque, dans un acte de partage avec les consorts [D] en date du 22 octobre 2008, elle a été purement et simplement supprimée.

Cet acte est un partage et de division entre les époux [D] et les consorts [H] dans lequel il a été convenu de supprimer la servitude de passage qui avait été créée par acte du 10 novembre 2003, suivi d'un acte rectificatif du 10 juin 2004, au profit de la parcelle [Cadastre 5] sur les parcelles [Cadastre 6] et [Cadastre 7].

Les consorts [U]-[J] soutiennent qu'ils ont acquis la parcelle [Cadastre 5] par acte notarié du 23 octobre 2008. Or celui-ci porte acquisition de la parcelle [Cadastre 8] et non de la parcelle [Cadastre 5]. En tout état de cause, par cet acte, la servitude de passage a été purement et simplement supprimée mais uniquement en ce qu'elle porte sur la parcelle [Cadastre 5], fonds servant.

Les parties ne produisent aucun autre acte notarié par lequel les consorts [U]-[J] auraient acquis des époux [D] la parcelle [Cadastre 5] qui ne disposait plus, aux termes de l'acte du 22 octobre 2008, d'une servitude de passage sur la parcelle [Cadastre 7].

L'appelante déclare également que l'acte de partage de 2003, rectifié en 2004, a modifié l'intégralité de la servitude qui ne s'applique plus au bénéfice de la parcelle [Cadastre 3].

Or, lors de cette division, une servitude de passage a été instituée au profit de la parcelle [Cadastre 5] appartenant aux époux [D] sur le fonds AD 41, propriété des consorts [H]. Cet acte a ajouté de nouvelles servitudes à celle instituée par l'acte de partage de 1967 mais n'a nullement supprimé le bénéfice de la servitude de passage des autres fonds et notamment de la parcelle [Cadastre 3] dont le propriétaire n'était d'ailleurs pas partie à cet acte de partage.

[A] [H] rappelle que, par acte notarié du 3 décembre 2013 par lequel les consorts [U]-[J] ont acquis des époux [L] la parcelle [Cadastre 10], les acquéreurs ont déclaré renoncer au droit de passage leur profitant mais seulement sur la parcelle [Cadastre 9] restant la propriété des vendeurs.

Mais cet acte ne mentionne aucune renonciation de la servitude de passage instituée sur le fonds servant AD 41 au profit du fonds dominant AD 19.

En conséquence, aucun acte notarié n'a supprimé la servitude de passage conventionnelle instituée en 1967 au profit de la parcelle [Cadastre 3] sur la parcelle [Cadastre 7] issue de la parcelle originelle [Cadastre 4].

Ce fonds AD 41, propriété de [A] [H], est demeuré, aux termes des actes successifs de renonciation, le seul à supporter une servitude de passage conventionnelle dont bénéficie le fonds AD 19 appartenant aux consorts [U]-[J], en application de leur titre d'acquisition du 7 janvier 2004 qui mentionnait le rappel de cette servitude conventionnelle.

Sur l'état d'enclave :

[A] [H] déclare que le fonds AD 19 dont les intimés sont propriétaires n'est pas enclavé puisqu'il a un accès direct au chemin des Acacias.

La servitude de passage litigieuse est une servitude conventionnelle et non une servitude légale pour cause d'enclave.

Une telle servitude ne peut être supprimée, en cas de disparition d'une enclave, que dans la mesure où l'acte qui l'a instituée mentionne expressément qu'elle a été créée pour désenclaver le fonds dominant.

Or, dans l'acte de partage des 5 et 26 juin 1967, les propriétaires des fonds servants n'ont pas concédé au propriétaire du fonds dominant cette servitude de passage conventionnelle en raison de son état d'enclave.

En conséquence, la demande de [A] [H] de suppression de la servitude de passage conventionnelle en raison de la disparition de l'état d'enclave la parcelle [Cadastre 3] n'est pas fondée.

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a dit que la parcelle [Cadastre 3] appartenant aux consorts [U]-[J] bénéficie d'une servitude de passage conventionnelle sur la parcelle [Cadastre 7] appartenant à [A] [H] et en ce qu'il a ordonné, sous astreinte, la destruction et l'enlèvement des ouvrages édifiés en travers de ce passage, cette condamnation devant être à présent supportée par [A] [H] tant en son nom personnel qu'en sa qualité d'héritière de son frère défunt.

Sur la demande de dommages intérêts des consorts [U]-[J] :

Les intimés demandent l'allocation de la somme de 10 000 € à titre de dommages-intérêts dans la mesure où l'obstruction du passage les a empêchés de louer régulièrement leur bien.

Le jugement qui a rejeté leur demande de dommages et intérêts, fait mention à juste titre de la complexité de la situation foncière qui a pu entraîner pour les consorts [H] une méprise sur l'étendue de leurs droits.

Les intimés doivent donc rapporter la preuve de l'existence d'un préjudice postérieur à cette décision et entraîné par la résistance injustifiée de [A] [H].

Or, ils ne versent aux débats que des documents et des attestations antérieurs au jugement et ne rapportent donc pas la preuve que le préjudice locatif s'est poursuivi au-delà de celui-ci.

Leur demande de dommages-intérêts doit donc être écartée.

En revanche, l'équité commande l'application en faveur des consorts [U]-[J] de l'article 700 du code de procédure civile et la condamnation de [A] [H], qui succombe tant en première instance qu'en cause d'appel, au paiement de la somme de 4 000 € à ce titre.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Confirme le jugement sauf en ce qu'il a débouté les consorts [U]-[J] de leur demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile ;

Et statuant à nouveau sur ce chef et y ajoutant,

Donne acte à [A] [H] de son intervention en cause d'appel tant en son nom personnel qu'en sa qualité d'héritière de [E] [H] décédé le 26 octobre 2019 ;

Dit que la destruction et l'enlèvement des ouvrages édifiés en travers de la servitude conventionnelle de passage devront être effectués par [A] [H], tant en son nom personnel qu'en sa qualité d'héritière de [E] [H], dans le délai de deux mois à compter de la signification de la présente décision délai passé lequel courra une astreinte de 100 € par jour de retard pendant 90 jours après quoi il sera à nouveau fait droit ;

Déboute les consorts [U]-[J] de leur demande de dommages-intérêts ;

Condamne [A] [H] tant en son nom personnel qu'en sa qualité d'héritière de [E] [H] à payer aux consorts [U]-[J] la somme de 4 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais engagés tant en première instance qu'en cause d'appel ;

La condamne aux dépens de première instance et d'appel qui seront recouvrés par les avocats de la cause conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

Le greffier, Le conseiller faisant fonction de président de chambre,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 3e chambre civile
Numéro d'arrêt : 17/04529
Date de la décision : 19/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-19;17.04529 ?
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