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19/05/2022 | FRANCE | N°17/02740

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 3e chambre civile, 19 mai 2022, 17/02740


Grosse + copie

délivrées le

à







COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



3e chambre civile



ARRET DU 19 MAI 2022



Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 17/02740 - N° Portalis DBVK-V-B7B-NFHD



Décision déférée à la Cour :

Jugement du 06 janvier 2017

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE MONTPELLIER

N° RG 14/01897





APPELANTE :



SNC KAUFMAN ET BROAD PROMOTION 4

agissant poursuites et diligences de ses représentants

légaux, domiciliés en cette qualité au siège social

[Adresse 3]

[Localité 4]



Représentée par Me Arnaud LAURENT de la SCP SVA, avocat au barreau de MONTPELLIER, substitué à l'audience par Me Thierry VERN...

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

3e chambre civile

ARRET DU 19 MAI 2022

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 17/02740 - N° Portalis DBVK-V-B7B-NFHD

Décision déférée à la Cour :

Jugement du 06 janvier 2017

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE MONTPELLIER

N° RG 14/01897

APPELANTE :

SNC KAUFMAN ET BROAD PROMOTION 4

agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité au siège social

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentée par Me Arnaud LAURENT de la SCP SVA, avocat au barreau de MONTPELLIER, substitué à l'audience par Me Thierry VERNHET de la SCP SVA, avocat au barreau de MONTPELLIER

INTIMEES :

SARL PER INGENIERIE

RCS de Montpellier n°409 240 108, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié ès qualités au siège social

[Adresse 7]

[Localité 4]

Représentée par Me Jérémy BALZARINI de la SCP LEVY, BALZARINI, SAGNES, SERRE, LEFEBVRE, avocat au barreau de MONTPELLIER, substitué à l'audience par Me Rémy LEVY, avocat au barreau de MONTPELLIER

Compagnie d'assurances L'AUXILIAIRE

prise en la personne de ses représentants légaux, domicilié ès qualités au siège social

[Adresse 5]

[Localité 6]

Représentée par Me Christophe PONS de la SCP VERBATEAM MONTPELLIER, avocat au barreau de MONTPELLIER

SARL FRANCE BTP SERVICE

RCS de Romans n°403 397 516, prise en la personne de son représentant légal en exercice, domicilié ès qualités au siège social

[Adresse 10]

[Localité 2]

Représentée par Me Grégory ANGLES, avocat au barreau de MONTPELLIER

Société d'assurances SMABTP, assureur de la SARL FRANCE BTP SERVICE

[Adresse 9]

TSA 80011

[Localité 4]

Représentée par Me Christine AUCHE HEDOU de la SCP AUCHE HEDOU, AUCHE - AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER, substitué à l'audience par Me Jean-Philippe DOMMEE de la SCP CASCIO, CASCIO ORTAL, DOMMEE, MARC, avocat au barreau de MONTPELLIER

SARL CADMO

RCS de Montpellier n° 521 830 422, prise en la personne de son représentant légal en exercice, domicilié ès qualités au siège social

[Adresse 1]

[Adresse 11]

[Localité 4]

Non représentée - signification délivrée à étude le 16/08/2017

Ordonnance de clôture du 02 Mars 2022

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 23 MARS 2022,en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. Thierry CARLIER, Conseiller et Mme Marie-Claude SIMON, Vice-présidente placée, chargée du rapport.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

M. Thierry CARLIER, Conseiller faisant fonction de président de chambre

M. Fabrice DURAND, Conseiller

Mme Marie-Claude SIMON, Vice-présidente placée par ordonnance du premier président du 1er décembre 2021

Greffier, lors des débats : Mme Camille MOLINA

ARRET :

- rendu par défaut.

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par M. Thierry CARLIER, Conseiller faisant fonction de président de chambre, et par Mme Camille MOLINA, Greffière.

*

**

EXPOSE DU LITIGE :

Dans le cadre de son opération immobilière '[Adresse 8]' à [Localité 4], la société SNC Kaufman & Broad Promotion 4 a confié le lot démolition de l'existant à la société France BTP Services, assurée auprès de la Smabtp, suite à l'abandon de ce lot par la société RMD.

La conception du gros oeuvre et de la démolition ainsi que la maîtrise d'oeuvre d'exécution relative au lot « démolition '' a été confiée à la société Per Ingenierie.

Le suivi d'exécution des autres lots autre que démolition et l'OPC général y compris le lot démolition, à compter de sa prise de fonction, a été confié à la société Cadmo assurée auprès de l'Auxiliaire.

Suite à des retards et au non-respect de la méthodologie de démolition, la SNC Kaufman & Broad Promotion 4 a fait assigner le 7 mai 2012 la société France BTP Services et son assureur devant le juge des référés aux fins de désignation d'un expert judiciaire.

Par ordonnance du 16 mai 2012, rendue commune et opposable à la société Per Ingenierie et à la société Cadmo, Monsieur [F] a été désigné en qualité d'expert et a déposé son rapport le 18 juin 2013.

Le 30 septembre 2013, la SNC Kaufman & Broad Promotion 4 a assigné la société France BTP Services et son assureur la Smabtp devant le tribunal de grande instance de Montpellier statuant en référé aux fins de les voir condamner in solidum au paiement de 221 260 euros outre 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par ordonnance du 19 décembre 2013, le juge des référés a condamné in solidum la SARL France BTP Services, la Smabtp, la SARL Cadmo et son assureur l'Auxiliaire, ainsi que la SARL Per Ingenierie à lui verser 157 696,40 euros HT représentant 85 % du montant de son préjudice non sérieusement contestable.

La Société Per Ingenierie a interjeté appel de cette ordonnance. La cour d'appel de Montpellier, par arrêt du 3 juillet 2014, a confirmé l'ordonnance du 19 décembre 2013 mais a réduit le montant de la provision à 150 000 euros.

Parallèlement, la société d'assurance l'Auxiliaire a assigné les 17 et 19 mars 2014 la SNC Kaufman & Broad Promotion 4, la SARL BTP Services et son assureur la Smabtp, la SARL Cadmo et la SARL Per Ingenierie afin d'obtenir le remboursement de la provision versée.

La SNC Kaufman & Broad Promotion 4 a de son côté assigné la société France BTP Service le 10 avril 2014, la Smabtp, la SARL Cadmo, la société d'assurance l'Auxiliaire, la SARL Per Ingenierie devant le tribunal de grande instance de Montpellier aux fins de les voir condamner in solidum à lui verser 27 304,60 euros.

Les deux procédures ont été jointes.

Par jugement du 6 janvier 2017, le tribunal de grande instance de Montpellier a :

- condamné in solidum la SARL France BTP Services et son assureur, la Smabtp, la SARL Cadmo et la SARL Per Ingenierie ainsi que la société d'assurances l'Auxiliaire, en sa qualité d'assureur de la SARL Cadmo, à verser à la SNC Kaufman & Broad Promotion 4 la somme de 157 695 euros au titre de l'indemnisation de son préjudice ;

- dit que dans leurs rapports entre eux la SARL France BTP Services, la SARL Cadmo et la SARL Per Ingenierie se devront respectivement garantie dans les proportions fixées par l'expert ;

- dit que la Smabtp et la société l'Auxiliaire devront garantir leurs assurées la SARL France BTP Services et la SARL Cadmo des condamnations respectives prononcées à leur encontre ;

- condamné la SNC Kaufman & Broad Promotion 4 à verser à la la SARL France BTP Services la somme de 28 070,06 euros au titre du solde de son marché ;

- dit n'y avoir lieu application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- dit que chaque partie conservera la charge de ses dépens.

Le 16 mai 2017, la SNC Kaufman & Broad Promotion 4 a interjeté appel du jugement à l'encontre de la compagnie d'assurance l'Auxiliaire, la SARL France BTP Service, la Smabtp, la SARL Cadmo et la SARL Per Ingenierie.

Par acte d'huissier du 30 novembre 2017, la SNC Kaufman & Broad Promotion 4 a fait signifier la déclaration d'appel et ses conclusions d'appelant à la SARL Cadmo, non constituée.

Vu les conclusions de la SNC Kaufman & Broad Promotion 4 remises au greffe le 28 novembre 2017 ;

Vu les conclusions de la société France BTP Services remises au greffe le 13 décembre 2017 ;

Vu les conclusions de la Smabtp remises au greffe le 13 octobre 2017 ;

Vu les conclusions de la SARL Per Ingenierie remises au greffe le 10 janvier 2022 ;

Vu les conclusions de la société l'Auxiliaire remises au greffe le 17 octobre 2017 ;

MOTIFS DE L'ARRÊT :

Sur la responsabilité de la SNC Kaufman et Broad Promotion 4 :

La SNC Kaufman & Broad Promotion 4 reproche au tribunal d'avoir jugé qu'elle avait assuré la maîtrise d'oeuvre d'exécution de la démolition jusqu'à l'arrivée de la société Cadmo et qu'elle avait accepté le non respect par la société France BTP Services de la méthodologie définie dans la notice descriptive du dossier DCE, et ce malgré les avertissements de la société Per Ingenierie.

Or, l'expert judiciaire relève que l'ensemble des documents fournis ont permis de constater d'une part que les missions de maîtrise d'oeuvre ont été exécutées par la société Kaufman & Broad Promotion 4 durant les travaux de démolition, d'autre part que la société Kaufman & Broad Promotion 4 n'avait pas suivi les réserves et remarques de la maîtrise d'oeuvre technique, la société Per Ingenierie, et avait fait poursuivre les travaux par l'entreprise France BTP Services qui n'a pas respecté la méthode de démolition et a employé ses propres procédures.

L'expert expose ' l'entreprise France BTP Services a fait valider, sans formalisme écrit, avant le démarrage des travaux, une méthodologie proche de la notice du marché, avec emploi d'un robot et sciage des poutres. Cette validation orale a été confirmée par la SNC Kaufman & Broad , qui intervenait alors comme maître d'oeuvre d'exécution selon les comptes rendus de chantier . Toutefois, l'entreprise France BTP Services a visé le marché après cette réunion : elle n'a pas inscrit de réserve sur la notice visée, ni indiqué sa propre méthode employée. C'est la méthode définie au marché qui constitue le contrat '.

L'expert indique enfin ' L'entreprise accumule un certain retard dans l'exécution des prestations.Alors que l'entreprise n'emploie pas les méthodes prévues au contrat, aucun arrêt de chantier ne lui est signifié.Les maîtres d'oeuvre ont attiré l'attention du maître de l'ouvrage, la société Kaufman & Broad Promotion 4 ( qui a aussi la qualité de maître d'oeuvre au début des travaux de démolition) sur ces non-conformités au contrat, sans indiquer que ces non conformités nécessitaient un arrêt du chantier.Il semblerait que la volonté du maître d'ouvrage a été de ne pas accentuer le retard déjà pris, tant par le premier démolisseur que par l'entreprise France BTP Services '.

Il ressort donc du rapport d'expertise que la SNC Kaufman & Broad a bien assuré la maîtrise d'oeuvre d'exécution des opérations de démolition, l'expert indiquant sur ce point que la société Per Ingenierie intervenait pour le suivi technique du lot démolition, la société Kaufman & Broad pour le suivi des travaux et OPC jusqu'au démarrage de la société Cadmo, puis la société Cadmo pour le suivi des travaux des lots autres que la démolition et l'OPC général y compris le lot démolition à partir de sa prise de fonction.

Par ailleurs, comme l'a justement relevé le tribunal, le contrat Cadmo n'a été signé que le 24 octobre 2011, alors même que dès le 11 octobre 2011, la société Per Ingienierie indiquait que la méthodologie consistant à venir cisailler et couper les éléments bétons principaux avant sciage était contraire à celle définie dans la notice descriptive du dossier DCE et que par courrier du 17 octobre 2011, soit antérieurement au contrat Cadmo, la société Kaufman & Broad écrivait au premier démolisseur, la société RMD ' Compte tenu du délai très court pour livrer la parcelle à Ametis, nous vous donnons l'ordre de démolir les bureaux Sud selon la méthodologie vue avec vous par téléphone (...). Ce courrier nous engage en tant que maître d'oeuvre, et nous vous dégageons, ainsi que le bureau d'études structures PER, de la responsabilité de cette partie de démolition que nous vous demandons de réaliser '.

Ce courrier constitue à l'évidence la reconnaissance par la SNC Kaufman & Broad d'une part de son rôle de maître d'oeuvre d'exécution et de son immixtion dans les travaux jusqu'à l'arrivée de la société Cadmo, d'autre part de son acceptation des risques inhérents à la méthodologie de démolition retenue ne correspondant pas à celle définie dans la notice descriptive du dossier DCE, la SNC Kaufman & Broad précisant sur ce point dans son courrier du 17 octobre adressé à la société RMD ' Nous vous demandons néanmoins de prendre toutes les précautions nécessaires afin de minimiser l'impact sur la structure conservée '.

Par conséquent, le jugement sera confirmé en ce qu'il a retenu la responsabilité de la SNC Kaufman & Broad Promotion 4 à hauteur de 15 %.

Sur la responsabilité de la SARL Per Ingenierie :

La SARL Per Ingenierie soulève tout d'abord l'irrecevabilité des demandes de la SNC Kaufman & Broad Promotion 4 pour défaut d'intérêt à agir, faisant valoir qu'elle n'a contracté qu'avec la SARL Kaufman & Broad.

En l'espèce, si le contrat a été signé le 25 août 2011 avec la société Kaufmann & Broad, force est de constater que tous les autres contrats conclus en vue de l'opération immobilière « [Adresse 8] » ont été signés par la SNC Kaufman & Broad Promotion 4, que les ordres de services adressés aux entreprises en charge du lot démolition mentionnent la SNC Kaufman & Broad Promotion 4 en qualité de Maître d'ouvrage et la société Kaufman & Broad en qualité de maître d'oeuvre, enfin que la proposition d'honoraires a bien été adressée le 25 août 2011 par la société Per Ingenierie à la SNC Kaufman & Broad Promotion 4 et non à la société Kaufman & Broad, ce qui démontre que la société Per Ingenierie avait bien identifié la SNC Kaufman & Broad Promotion 4, en sa qualité de maître de l'ouvrage, comme son cocontractant.

Par conséquent, le jugement sera confirmé en ce qu'il a rejeté la fin de non recevoir tiré du défaut d'intérêt à agir de la SNC Kaufman & Broad Promotion 4 à son encontre.

En revanche, la demande de dommages et intérêts présentée par la SNC Kaufman & Broad Promotion 4 sera rejetée, la fin de non recevoir soulevée par la SARL Per Ingenierie dans le cadre d'une instance judiciaire et les arguments avancés à son soutien, même non pertinents, n'étant pas de nature à caractériser une faute susceptible d'avoir engendré un préjudice et justifiant l'allocation de dommages et intérêts.

S'agissant de la responsabilité de la SARL Per Ingenierie, l'expert relève que cette dernière qui avait en charge le suivi du lot démolition n'établira un constat que le 12 février 2012, et ce malgré les difficultés signalées par la société Cadmo depuis le 15 décembre 2011, les plans d'exécution et la méthode d'exécution n'ayant pas été fournis et l'expert notant une défaillance de la société Per Ingenierie dans le suivi des procédures.

En effet, alors que l'entreprise n'emploie pas les méthodes prévues au contrat, aucun arrêt de chantier ne lui est signifié.

Si la SARL Per Ingenierie conclut qu'il n'appartient pas à un maître d'oeuvre d'arrêter un chantier et qu'il lui appartient simplement de conseiller à son maître de l'ouvrage de le faire, force est de constater que dans ses courriers des 18 janvier, 8 février et 14 février 2012, la société Per Ingenierie fait état du non respect de la méthodologie initialement convenue mais ne préconise à aucun moment un arrêt du chantier, ce qui est confirmé par l'expert qui indique 'L'entreprise accumule un certain retard dans l'exécution de ses prestations.Alors que l'entreprise n'emploie pas les méthodes prévues au contrat, aucun arrêt de chantier ne lui est signifié. Les maîtres d'oeuvre ont attiré l'attention du maître de l'ouvrage , la société Kaufman & Broad Promotion 4 ( qui a aussi la qualité de maître d'oeuvre au début des travaux de démolition) sur ces non-conformités au contrat, sans indiquer que ces non-conformités nécessitaient un arrêt du chantier.Il semblerait que la volonté du maître d'ouvrage a été de ne pas accentuer le retard déjà pris, tant par le premier démolisseur que par l'entreprise France BTP Services'.

Le taux de responsabilité fixé par l'expert à hauteur de 10 % sera donc retenu et le jugement confirmé de ce chef.

Sur la responsabilité de la société Cadmo :

Si l'Auxiliaire, assureur de la société Cadmo, soutient que les désordres dénoncés trouvent leur origine dans la méthodologie mise en place et non dans la production ou l'absence de production des plans d'exécution relevée par l'expert et fait valoir qu'en tout état de cause, le suivi des travaux de démolition et les préconisations structurelles étaient assurés non par la SARL Cadmo, maître d'oeuvre d'exécution des seuls travaux de construction, mais par la société Per Ingenierie, il résulte du contrat de maîtrise d'oeuvre signé le 24 octobre 2011 entre la SNC Kaufman & Broad Promotion 4 et la société Cadmo que cette dernière, en sa qualité de maître d'oeuvre d'exécution, devait notamment contrôler la réalisation de l'ouvrage en conformité avec les pièces du marché, ce qu'elle a fait en adressant de nombreuses correspondances à l'entreprise France BTP Service en lui reprochant notamment de ne pas respecter les méthodologies préconisées par le BET, indiquant ' Etant donné que la démolition ne se déroule pas selon la méthodologie préconisée ( pas de sciage) (...) Nous ne pouvons que conseiller au démolisseur de conserver ses tours jusqu'à la fin de son intervention.Il en va de la responsabilité du démolisseur de la bonne tenue et stabilité du bâtiment lors de ses travaux' (courrier du 20 janvier 2012).

Si le maître d'oeuvre Cadmo a adressé, depuis le 15 décembre 2011, à l'entreprise France BTP Services de nombreuses correspondances lui indiquant que les principes constructifs n'étaient pas respectés, il n'a jamais alerté le maître d'ouvrage sur la nécessité d'arrêter le chantier, l'expert lui reprochant également d'avoir validé un avancement sur des prestations non réalisées, de ne pas avoir signalé l'absence de plans d'exécution hormis sur le bâtiment H alors qu'il avait en charge la direction du chantier et d'avoir laissé la société France BTP Services intervenir sans plans d'exécution, les travaux ayant été réalisés en l'absence de ces derniers.

Enfin, la circonstance que le maître d'ouvrage ait été informé des risques encourus n'est pas de nature à exonérer la société Cadmo de sa responsabilité résultant notamment de la réalisation des travaux en l'absence de plans d'exécution, la demande de restitution de la provision versée d'un montant de 53 565,13 euros étant par conséquent rejetée.

La société Cadmo a donc manqué à ses obligations contractuelles ce qui justifie de retenir le pourcentage de responsabilité fixé par l'expert à 5 %.

Enfin, la société L'auxiliaire, assureur de la SARL Cadmo, ne conteste pas sa garantie, sous réserve de l'application de la franchise contractuelle opposable au tiers lésé.

Le jugement sera confirmé de ce chef.

Sur la responsabilité de la SARL France BTP Services :

Il ressort du rapport d'expertise que la SARL France BTP Services n'a pas respecté la méthode de démolition établie par le bureau d'études structures et a fait valider, sans formalisme écrit, avant le démarrage des travaux, une méthodologie proche de la notice du marché, avec l'emploi d'un robot et sciage des poutres, en visant cependant sans réserves le marché sans indiquer sa propre méthode, ce qui a pour effet le maintien à son égard des obligations du marché initial.

Monsieur [F] ajoute que la société France BTP Services, pour l'exécution de ses travaux, n'a respecté ni la méthodologie qu'elle a définie, ni celle du marché et n'a, durant le chantier, pas établi les notes de calcul et les plans méthodes utilisés en dépit des demandes qui lui ont été présentées par le bureau de contrôle le 30 novembre et le 7 décembre 2011.

Enfin, l'expert expose que l'entreprise France BTP Services a démarré ses prestations avec un décalage de 3 jours par rapport au planning joint au marché et qu'au moment de la résiliation de son marché, un retard de 60 jours a pu être constaté.

Par conséquent, la SARL France BTP Services a bien manqué à ses obligations contractuelles et ne peut s'exonérer de sa responsabilité en faisant valoir que le maître de l'ouvrage et le maître d'oeuvre l'auraient laissé continuer sa méthode de démolition sans jamais lui signifier d'arrêter les travaux.

Il y a donc lieu de retenir la part de responsabilité fixé par l'expert à 70 % et de confirmer le jugement sur ce point.

Sur la garantie de la Smabtp :

D'une part, s'agissant de l'absence d'aléa invoqué par la Smabtp, il n'est pas démontré que l'assuré aurait délibérément provoqué les désordres pour mettre à la charge de son assureur les conséquences de ses propres manquements.

Par ailleurs, la circonstance que le maître de l'ouvrage et le maître d'oeuvre aient été informés d'un changement de méthodologie concernant la démolition n'est pas davantage de nature à exclure l'aléa.

D'autre part, s'il résulte de l'attestation d'assurance risques travaux des entreprises de construction ARTEC versée aux débats que la société France BTP Services était bien assurée pour des activités de démolition, terrassements, structure et travaux courants de maçonnerie, l'exclusion de garantie contenue à l'article 5.8 des conditions générales de la police invoquée par la Smabtp selon laquelle :

' Sont exclus..* les dommages qui découlent inévitablement de la nature du travail et des modalités normales d'exécution de ce travail, tel qu'il a été prescrit ou accepté par la direction de l'entreprise'

*les dommages à caractère répétitif, lorsque le sociétaire, ou toute personne qui lui est substituée dans la direction du chantier, informés de leur survenance, n'ont pas pris les mesures nécessaires pour en éviter le renouvellement '

a bien vocation à s'appliquer en l'espèce, l'expert relevant que l'entreprise France BTP Services n'avait respecté ni la méthodologie qu'elle avait définie, ni la méthodologie prévue initialement au marché, que la mission de maîtrise d'oeuvre était alors assurée par la société Kaufman & Broad Promotion 4 et que cette dernière n'avait pas suivi les réserves et remarques de la maîtrise d'oeuvre technique lors de ces travaux et ne s'était pas interrogée sur la nécessité d'un arrêt de chantier en sa qualité de maître d'ouvrage.

Par conséquent, la garantie de la Smabtp n'a pas vocation à s'appliquer en l'espèce.

La SNC Kaufman & Broad Promotion 4 sera donc déboutée de ses demandes présentées à l'encontre de la Smabtp et la société France BTP Services, la SARL Per Ingenierie et l'Auxiliaire seront déboutées de leur appel en garantie à l'encontre de cette dernière.

Le jugement sera infirmé de ce chef.

Sur l'indemnisation du préjudice :

L'expert a évalué l'ensemble des préjudices de la société Kaufman & Broad Promotion 4 d'un point de vue technique à la somme de 185 523,99 euros HT, soit, compte tenu de la part de responsabilité laissée à cette dernière à hauteur de 15 %, à la somme de 157 695 euros HT que la SARL France BTP Services, la SARL Cadmo et son assureur l'Auxiliaire ainsi que la SARL Per Ingenierie seront condamnés in solidum à lui verser en deniers ou quittances.

Dans les rapports entre codébiteurs, la SARL Cadmo, la SARL Per Ingenierie et la SARL France BTP Services verront leur responsabilité engagée à hauteur des pourcentage retenus, à savoir :

- concernant la société Cadmo, 5 % du montant global du préjudice (185 524 euros HT), soit 9 276,20 euros HT ;

- concernant la SARL Per Ingenierie, 10 % du montant global du préjudice (185 524 euros HT), soit 18 552,40 euros HT;

- concernant la SARL France BTP Services, 70 % du montant global du préjudice (185 524 euros HT) soit 129 866,80 euros HT.

La SARL France BTP Services sollicite enfin, au titre du solde de son marché, une somme de 107 665,14 euros TTC, faisant état de quatre situations de paiement d'un montant de 84 920,60 euros TTC, 94 479,40 euros TTC, 51 320,30 euros TTC et 47 374,84 euros TTC, soit un total de 278 095,14 euros TTC sur lesquels le maître de l'ouvrage n'aurait versé que la somme de 170 430 euros.

Or, force est de constater d'une part que les situations n° 1 et 2 d'un montant de 84 920,60 euros et de 94 479, 40 euros portent la mention « payé le 03/02/2012 » pour la première et « payé le 30/03/2012 » pour la seconde, d'autre part que l'expert indique que le marché de l'entreprise France BTP Services était de 250 000 euros HT, que l'avancement du chantier a été validé à 192 909,95 euros HT, soit 230 720,30 euros TTC, que le paiement a été réalisé à hauteur de 187 700,24 euros TTC et qu'il reste à devoir au titre du solde du marché, après avoir déduit les pénalités de retard à hauteur de 14 950 euros TTC, une somme de 28 070,06 euros TTC que la SNC Kaufman & Broad Promotion 4 devra payer à la SARL France BTP Services au titre du solde de son marché.

Le jugement sera confirmé de ce chef.

PAR CES MOTIFS,

La cour,

Confirme le jugement sauf en ce qu'il a condamné la Smabtp à garantir la SARL France BTP Services ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Dit que la Smabtp n'est pas tenue à garantir la SARL France BTP Services ;

Déboute en conséquence la SNC Kaufman & Broad Promotion 4 de ses demandes présentées à l'encontre de la Smabtp et déboute la société France BTP Services, la SARL Per Ingenierie et la société L'Auxiliaire de leur appel en garantie à l'encontre de cette dernière ;

Condamne in solidum la SARL France BTP Services, la SARL Cadmo et son assureur L'Auxiliaire ainsi que la SARL Per Ingenierie à payer, en deniers ou quittances, à la SNC Kaufman & Broad Promotion 4 la somme de 157 695 euros HT ;

Dit que dans les rapports entre codébiteurs, la SARL Cadmo, la SARL Per Ingenierie et la SARL France BTP Services verront leur responsabilité engagée à hauteur des pourcentage retenus, à savoir :

- concernant la société Cadmo, 5 % du montant global du préjudice (185 524 euros HT), soit 9 276,20 euros HT ;

- concernant la SARL Per Ingenierie, 10 % du montant global du préjudice (185 524 euros HT), soit 18 552,40 euros HT ;

- concernant la SARL France BTP Services, 70 % du montant global du préjudice (185 524 euros HT) soit 129 866,80 euros HT;

Déboute la société L'Auxiliaire de sa demande de restitution de la provision versée d'un montant de 53 565,13 euros ;

Rejette la demande de dommages et intérêts présentée par la SNC Kaufman & Broad Promotion 4 à l'encontre de la SARL Per Ingenierie ;

Déboute les parties de leurs demandes présentées au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne in solidum la SARL France BTP Services, la SARL Cadmo et son assureur L'Auxiliaire ainsi que la SARL Per Ingenierie aux entiers dépens d'appel.

Le greffier, Le conseiller faisant fonction de président de chambre,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 3e chambre civile
Numéro d'arrêt : 17/02740
Date de la décision : 19/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-19;17.02740 ?
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