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18/05/2022 | FRANCE | N°19/01424

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 2e chambre sociale, 18 mai 2022, 19/01424


Grosse + copie

délivrées le

à







COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

2e chambre sociale

ARRET DU 18 MAI 2022



Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 19/01424 - N° Portalis DBVK-V-B7D-OBJP



Décision déférée à la Cour :

Jugement du 18 DECEMBRE 2018

CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE CARCASSONNE N° RG 16/00098



APPELANTE :



Madame [D] [O]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée par Me Antoine SOLANS de la SELAR

L ANTOINE SOLANS, avocat au barreau de CARCASSONNE







INTIMEE :



SAS OPTIM-EX RIVESALTES VENANT AUX DROITS DE FIDUCIAIRE EUROPEENNE D'AUDIT

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentée par Me AUCH...

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

2e chambre sociale

ARRET DU 18 MAI 2022

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 19/01424 - N° Portalis DBVK-V-B7D-OBJP

Décision déférée à la Cour :

Jugement du 18 DECEMBRE 2018

CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE CARCASSONNE N° RG 16/00098

APPELANTE :

Madame [D] [O]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée par Me Antoine SOLANS de la SELARL ANTOINE SOLANS, avocat au barreau de CARCASSONNE

INTIMEE :

SAS OPTIM-EX RIVESALTES VENANT AUX DROITS DE FIDUCIAIRE EUROPEENNE D'AUDIT

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentée par Me AUCHE avocat pour Me Valérie RENEAUD, avocat au barreau de CARCASSONNE

Ordonnance de clôture du 28 Février 2022

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 21 MARS 2022,en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. Jean-Pierre MASIA, Président, chargé du rapport.

Ce(s) magistrat(s) a (ont) rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

M. Jean-Pierre MASIA, Président

Madame Florence FERRANET, Conseiller

Mme Véronique DUCHARNE, Conseillère

Greffier, lors des débats : M. Philippe CLUZEL

ARRET :

- contradictoire.

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par M. Jean-Pierre MASIA, Président, et par M. Philippe CLUZEL, Greffier.

*

**

FAITS ET PROCEDURE

Le 2 mai 2011, Madame [D] [O] a été engagée par la sas Fiduciaire Européenne D'Audit (la société FEA) en qualité d'assistante comptable par contrat à durée déterminée jusqu'au 31 juillet 2011 en vue de faire face à un accroissement temporaire d'activité.

Le 1er août 2011, Madame [O] a été engagée par la même société en qualité d'assistante comptable par contrat à durée indéterminée. La convention collective applicable à la relation de travail était celle des experts comptables et commissaires aux comptes.

Le 30 novembre 2015, l'employeur a proposé à la salariée une modification de son contrat de travail pour motif économique, consistant en une réduction de sa durée de travail à 30 heures hebdomadaires.

Le 29 décembre 2015, la salariée a refusé cette modification.

Le 4 janvier 2016, la salariée a été convoquée à un entretien préalable, fixé au 14 janvier 2016, et, le 27 janvier 2016, elle a été licenciée pour motif économique.

Contestant son licenciement et sollicitant diverses sommes au titre de l'exécution et de la rupture de son contrat de travail, la salariée a saisi, le 6 juin 2016, le conseil de prud'hommes de Carcassonne lequel, par jugement du 18 décembre 2018, a débouté Madame [O] de toutes ses demandes, débouté les parties de leurs demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile, débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires et laissé les dépens à la charge de chacune des parties.

C'est le jugement dont Madame [O] a régulièrement interjeté appel.

MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES

Vu les dernières conclusions de Madame [D] [O] régulièrement notifiées et déposées au RPVA le 21 octobre 2019 dans lesquelles il est demandé à la cour de réformer intégralement le jugement et de :

- dire que la société Fiduciaire Européenne D'Audit a méconnue les dispositions de l'article L1224-1 du contrat de travail en procédant à son licenciement économique,

- dire que son licenciement économique est dépourvu de cause réelle et sérieuse,

- condamner la société Fiduciaire Européenne D'Audit à lui payer les sommes de :

*3660,40€ à titre d'indemnité compensatrice de prévis, outre la somme de 366,04€ à titre d'indemnité de congés payés sur préavis,

* 21960€ à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* 957,84€ à titre de rappel de salaire correspondant aux heures supplémentaires non payées au titre des années 2013 à 2016, outre une somme de 95,78€ à titre d'indemnités de congés payés,

*1357,28€ à titre de rappel de salaire correspondant aux heures supplémentaires non payées au titre des heures de ménage effectuées sur la période juillet-décembre 2014, outre une somme de 135,72€ à titre d'indemnité de congés payés,

*10981,20€ à titre d'indemnité forfaitaire relative au travail dissimulé,

*2307,84€ au titre de la contrepartie obligatoire en repos sur les années 2014 et 2015,

*1500€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Vu les dernières conclusions de la sas Optim-Ex Rivesaltes, venant aux droits de la sas Fiduciaire Européenne D'Audit, régulièrement notifiées et déposées au RPVA le 1er août 2019 dans lesquelles il est demandé à la cour de confirmer le jugement du conseil de prud'hommes en toutes ses dispositions, débouter Madame [O] de l'ensemble de ses demandes et la condamner à lui payer la somme de 2000€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Pour l'exposé des prétentions des parties et leurs moyens, il est renvoyé, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, à leurs conclusions ci-dessus mentionnées et datées.

Vu l'ordonnance de clôture du 28 février 2022.

SUR CE

Sur le motif économique

La lettre de licenciement était ainsi rédigée : 'Nous faisons suite à notre entretien préalable au licenciement du 14 janvier 2016 au cours duquel nous vous avons exposé les raisons qui nous ont conduits à envisager à votre égard une mesure de licenciement pour motif économique.

Nous avons le regret de vous informer de notre décision de procéder à votre licenciement pour motif économique.

Les raisons de ce licenciement pour motif économique sont les suivantes :

- difficultés économiques rencontrées par la société et réorganisation nécessaire des activités de notre entreprise liée à la perte significative de clientèle au cours de l'année 2015 qui nous ont conduites à vous proposer la modification de votre contrat de travail de la façon suivante : durée du travail : 30 heures hebdomadaires (...).

- constat de notre impossibilité, à ce jour, de procéder à votre reclassement au sein de la société. Notre société est confrontée à des difficultés économiques, notamment celles liées à une perte d'honoraires de 230000€ HT étalée sur une période de deux ans qui se traduit par la baisse du chiffre d'affaire et des résultats de l'entreprise.

Le bilan 2014 a constaté une perte de 100000€. De plus, la société a subi une perte significative clientèle entre avril 2014 et décembre 2015, ce qui va impacter fortement le chiffre d'affaire de l'exercice 2015 et non clôturé à ce jour. En effet, la baisse de chiffre d'affaire constaté s'élève pour 2015 à 100000€ et s'élèvera pour 2016 à 130000€ ce qui aura inévitablement un impact équivalent sur le total des produits de l'exercice, et donc sur le résultat des exercices 2015 et 2016.

A un niveau national, toutes les catégories de cabinets sont touchées par une baisse d'activité. L'analyse des performances des petits cabinets (moins de 500k€ de chiffre d'affaire annuel) est inquiétante, entre 2007 et 2013 le résultat d'exploitation de ces cabinets (toujours en données déflatées) a plongé de 20% dont les deux tiers sur les deux dernières années. In fine, leur taux de résultat d'exploitation, qui s'est régulièrement dégradé sur la période de revue, est tombé de près de 14% du chiffre d'affaires en 2007 à 11% en 2013.

Le secteur du métier d'expert comptable se voit également concurrencé par les prestations '100% On Line' ou 'Low cost' proposées par les nouveaux acteurs de la profession qui proposent des prix très bas par rapport au marché.

L'augmentation régulière des charges externes imposée par l'inflation des postes de dépenses, tels que : loyers, énergie, éditeurs de logiciels, assurances... et par l'évolution du recours accru aux compétences externes telles que : juristes, fiscalistes... n'a fait qu'aggraver une situation déjà fragilisée.

Compte tenu de ces résultats et de ces constatations, et aucun élément ne nous permettant d'espérer une amélioration de la situation, afin de faire face à celle-ci, nous avons été contraints de vous proposer la modification de votre contrat de travail (...) que vous avez refusée (...). De ce fait, nous sommes à présent forcés d'envisager la suppression de deux emplois au sein de la société dont le vôtre suite au refus de modifier votre contrat de travail.

A ce jour nous ne disposons pas d'autre poste disponible, à temps complet ou à temps partiel, compatible avec votre formation, votre expérience et votre qualification au sein de la société.

Nos recherches de reclassement auprès de nos confrères ne nous ont pas permis de trouver un poste susceptible de vous être proposé. Toutefois ce licenciement produira effet uniquement si vous n'adhérez pas au contrat de sécurisation professionnelle que nous vous avons remis lors de l'entretien préalable'.

A titre liminaire, la cour constate que la salariée ne conteste pas la matérialité du motif économique consistant en une perte d'honoraires et une baisse afférente du chiffre d'affaires de la société intimée.

Sur le transfert du contrat de travail

Pour demander l'infirmation du jugement qui l'a déboutée de sa demande, la salariée soutient, d'abord, que son licenciement avait été notifié en méconnaissance des dispositions de l'article L1224-1 du code du travail, la société FEA ayant transféré sa clientèle et une partie de son personnel à la société Optim-Ex.

L'employeur réplique que l'article L1224-1 du code du travail ne pouvait s'appliquer au cas d'espèce dans la mesure où il n'y avait pas eu de transfert d'une unité économique autonome entre la société FEA et la société Optim-Ex et que seule une cession partielle de clientèle avait été effectuée entre la société Optim-Ex Rivesaltes et la société Optim-Ex plus d'un an après le licenciement.

Lorsque survient une modification dans la situation juridique de l'employeur, notamment par succession, vente, fusion, transformation du fonds, mise en société de l'entreprise, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l'entreprise.

En l'espèce, il ne ressort pas du dossier qu'un acte de transfert de l'entité économique avait existé antérieurement ou concomitamment au licenciement de Madame [O].

Si la salariée produit la première page d'un protocole de cession partielle de clientèle comportant une date d'effet au 1er janvier 2016, cette unique page, ni paraphée ni signée, est insuffisante à établir qu'une cession de clientèle avait été réalisée à cette date.

La salariée produit également un courrier que la société FEA avait adressé, du 15 décembre 2015, à ses clients et par lequel elle les informait du déménagement de ses bureaux ainsi que du changement de dénomination sociale en ces termes : 'nous vous informons également de notre changement de dénomination sociale, notre cabinet s'appellera désormais Optim-Ex'. Ce courrier est insuffisant à caractériser un transfert de l'entité de la société FEA à une seconde société. Il établit tout au plus un changement de dénomination sociale par ailleurs corroboré par le fait que les comptes annuels de la sas Optim-Ex Rivesaltes reprenaient les données comptables de la société FEA et que la société Optim-Ex Rivesaltes viennent aux droits, dans la présente instance, de la société FEA.

La société intimée démontre pour sa part, en produisant l'entier protocole de cession partielle, paraphé et signé par chacune des parties, que la cession partielle de clientèle, réalisée entre les sociétés Optim-Ex Rivesaltes et Optim-Ex, avait débuté le 1er décembre 2016, par la présentation des clients à la société Optim-Ex, avant d'être pleinement effective le 1er janvier 2017. Or, à ces deux dates, le contrat de travail de la salariée était rompu depuis presque un an.

La cession de clientèle s'étant réalisée près d'un an après le licenciement de la salariée, les conditions d'application de l'article L. 1224-1 du code du travail ne sont pas réunies.

Sur l'attitude intentionnelle et frauduleuse de la société FEA ou de son dirigeant

La salariée fait ensuite valoir que le comportement du gérant de la société intimée, Monsieur [X], qui avait détourné la clientèle du cabinet au profit de la société Optim-Ex, était de nature à priver le licenciement économique de sa cause réelle et sérieuse.

Les pièces produites par la salariée ne permettent pas d'établir l'existence d'un détournement de clientèle qui aurait été commis par Monsieur [X], co-dirigeant de la société intimée aux côtés de Monsieur [J].

Si un client avait certes pu s'étonner auprès de l'intimée de la réception d'une facture établie par la société 'Optim-Ex', cet unique courriel ne saurait caractériser le détournement de clientèle allégué par la salariée, ce d'autant plus que cette facture peut s'expliquer par la nouvelle dénomination sociale de la société FEA.

Par conséquent, le jugement sera confirmé en ce qu'il a dit le licenciement pour motif économique justifiée par une cause réelle et sérieuse.

Sur le rappel de salaire pour heures supplémentaires

Sur la majoration des heures supplémentaires

Pour demander l'infirmation du jugement qui l'a déboutée de cette demande, la salariée fait valoir qu'elle n'avait été rémunérée de ses heures supplémentaires qu'en application d'une majoration de 10% et alors qu'aucune stipulation conventionnelle applicable ne permettait de déroger à la majoration légale de 25%.

L'employeur réplique qu'en application de la convention collective des experts comptables et commissaires aux comptes, les heures supplémentaires devaient être majorées au taux de 10%.

En application de l'article L3121-22 du code du travail, dans sa rédaction alors applicable, les heures supplémentaires accomplies au-delà de la durée légale hebdomadaire fixée par l'article L3121-10 du même code, ou de la durée considérée comme équivalente, donnent lieu à une majoration de salaire de 25 % pour chacune des huit premières heures supplémentaires. Les heures suivantes donnent lieu à une majoration de 50 %.

Une convention ou un accord de branche étendu ou une convention ou un accord d'entreprise ou d'établissement peut prévoir un taux de majoration différent. Ce taux ne peut être inférieur à 10 %.

En l'espèce, le contrat de travail prévoyait 39 heures de travail hebdomadaire avec une majoration de 10% pour les heures supplémentaires dépassant la durée légale de travail.

L'article 8.2.3.2 de la convention collective applicable stipule que 'lorsque le même horaire collectif hebdomadaire est répété à l'identique, les heures excédant 35 heures ouvrent droit à une majoration conventionnelle de 10 % et celles qui excédent 39 heures ouvrent droit à la majoration légale prévue à l'article L. 3121-22".

Dès lors, la salariée qui ne soutient pas que l'horaire collectif hebdomadaire n'était pas répété à l'identique ne peut obtenir un rappel de salaire en application de la majoration de 25%.

Le jugement sera confirmé sur ce point.

Sur les heures supplémentaires non payées

Pour demander l'infirmation du jugement qui l'a déboutée de cette demande, la salariée soutient que son employeur lui avait confié, en plus de ses missions d'assistante comptable, des prestations de nettoyage de ses locaux à raison de 4,30 heures par semaine qui lui étaient payées comme remboursement de frais. Elle précise que la société intimée lui avait payé, suite à sa réclamation, les 166,50 heures supplémentaires correspondant à la période de janvier 2015 à octobre 2015 mais que les heures supplémentaires pour la période de juillet 2014 à décembre 2014 ne lui avaient pas été payées.

Selon l'article L3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

Il résulte de ces dispositions, qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.

La salariée produit un décompte hebdomadaire pour la période du 4 juillet au 26 décembre 2014. Ce décompte mentionne la réalisation d'heures de travail chaque vendredi de 17 heures à 21 heures 30, réserve faite des vendredis 22 et 30 août 2014 correspondant à ses congés payés.

Ces éléments sont suffisamment précis pour permettre à l'employeur d'y répondre.

Pour s'opposer à cette demande, l'employeur fait valoir que la salariée n'avait demandé le paiement des heures supplémentaires qu'un an après la saisine du conseil de prud'hommes et qu'elle n'apporte aucun élément probant à l'appui de sa demande.

Le fait que la salariée n'ait pas sollicité le paiement d'heures supplémentaires avant ses conclusions de juin 2017 ne la prive du droit d'en réclamer le paiement dans le cadre de la présence instance. Si l'employeur soutient avoir régularisé en octobre 2015 le paiement de toutes les heures supplémentaires effectuées par la salariée, la cour constate, au vu des mentions portées sur le bulletin de paie correspondant, que les 166,50 heures supplémentaires payées en octobre 2015 par l'employeur ne concernaient que l'année 2015, alors que la demande de la salariée porte sur l'année 2014.

Pour la période de juillet à décembre 2014, l'employeur, qui était tenu de contrôler les heures de travail effectuées par la salariée, ne produit aucun élément de contrôle du temps de travail ni aucun planning.

Réserve faite du bulletin de paie d'octobre 2015, les bulletins de paie de la salariée ne mentionnent pas d'autres heures supplémentaires que celles effectuées en application de son contrat de travail de la 36ème à la 39ème heure de travail.

En conséquence, il sera fait droit à la demande en paiement d'heures supplémentaires à hauteur de 1357,28€ bruts outre le paiement d'une somme de 135,72€ à titre d'indemnité de congés payés afférents.

Le jugement sera donc infirmé en ce qu'il a rejeté la demande de la salariée.

Sur le travail dissimulé

Les circonstances dans lesquelles la salariée avait accompli les heures supplémentaires ne révèlent pas une intention frauduleuse de dissimuler cette partie de l'activité, étant précisé que les bulletins de paie ne mentionnent aucun remboursement de frais, alors que la salariée soutient que l'employeur lui payait par ce biais ses heures supplémentaires afin d'échapper à la législation sociale, en sorte que la demande au titre du travail dissimulé sera rejetée et le jugement confirmé sur ce point.

Sur la contrepartie obligatoire en repos

Pour demander l'infirmation du jugement sur ce point, la salariée fait valoir que son employeur ne lui avait jamais accordé de repos compensateur malgré le dépassement du contingent annuel d'heures supplémentaires.

L'employeur ne réplique pas sur ce point.

Selon les termes de l'article L3121-11 du code du travail, des heures supplémentaires peuvent être accomplies dans la limite d'un contingent annuel défini par une convention ou un accord collectif d'entreprise ou d'établissement ou, à défaut, par une convention ou un accord de branche.

Une convention ou un accord collectif d'entreprise ou d'établissement ou, à défaut, une convention ou un accord de branche fixe l'ensemble des conditions d'accomplissement d'heures supplémentaires au-delà du contingent annuel ainsi que les caractéristiques et les conditions de prise de la contrepartie obligatoire en repos due pour toute heure supplémentaire accomplie au-delà du contingent annuel, la majoration des heures supplémentaires étant fixée selon les modalités prévues à l'article L. 3121-22. Cette convention ou cet accord collectif peut également prévoir qu'une contrepartie en repos est accordée au titre des heures supplémentaires accomplies dans la limite du contingent.

En l'espèce, la convention collective applicable renvoie, s'agissant du contingent annuel, aux prescriptions légales lesquelles fixent le contingent annuel à 220 heures.

La salariée, qui avait réalisé des heures supplémentaires s'agissant tant des heures supplémentaires contractualisées que des heures supplémentaires effectuées en sus chaque vendredi, la cour ayant reconnu l'existence de ces dernières, avait droit à une contrepartie obligatoire en repos.

Il sera en conséquence alloué à la salariée la somme, non contestée, de 2307,84€ au titre de la contrepartie obligatoire en repos pour les années 2014 et 2015.

Il convient d'allouer à la salariée la somme de 1500€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Confirme le jugement du conseil de prud'hommes de Carcassonne du 18 décembre 2018 en ce qu'il a débouté Madame [D] [O] de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Le réforme pour le surplus ;

Condamne la sas Optim-Ex Rivesaltes, venant aux droits de la société Fiduciaire Européenne d'Audit, aux sommes de :

- 1357,28€ à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires non payées pour l'année 2014;

- 135,72€ à titre d'indemnité de congés payés afférents ;

- 2307,84€ au titre de la contrepartie obligatoire en repos ;

- 1500€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la sas Optim-Ex Rivesaltes, venant aux droits de la société Fiduciaire Européenne d'Audit, aux entiers dépens de première instance et d'appel.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 2e chambre sociale
Numéro d'arrêt : 19/01424
Date de la décision : 18/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-18;19.01424 ?
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