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12/05/2022 | FRANCE | N°17/02445

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 3e chambre civile, 12 mai 2022, 17/02445


Grosse + copie

délivrées le

à







COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



3e chambre civile



ARRET DU 12 MAI 2022



Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 17/02445 - N° Portalis DBVK-V-B7B-NEQW



Décision déférée à la Cour :

Jugement du 09 MARS 2017

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PERPIGNAN

N° RG 16/01693





APPELANTE :



OFFICE PUBLIC DE L'HABITAT DES PYRENEES ORIENTALES

[Adresse 2]

66000 FRANCE

Repr

ésentée par Me Frédéric BONNET, avocat au barreau des PYRENEES-ORIENTALES







INTIMEE :



SCAV LES VIGNOBLES DU SUD ROUSSILLON

[Adresse 6]

[Localité 4]

Représentée par Me Florent ESQUIROL, avocat au barreau des ...

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

3e chambre civile

ARRET DU 12 MAI 2022

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 17/02445 - N° Portalis DBVK-V-B7B-NEQW

Décision déférée à la Cour :

Jugement du 09 MARS 2017

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PERPIGNAN

N° RG 16/01693

APPELANTE :

OFFICE PUBLIC DE L'HABITAT DES PYRENEES ORIENTALES

[Adresse 2]

66000 FRANCE

Représentée par Me Frédéric BONNET, avocat au barreau des PYRENEES-ORIENTALES

INTIMEE :

SCAV LES VIGNOBLES DU SUD ROUSSILLON

[Adresse 6]

[Localité 4]

Représentée par Me Florent ESQUIROL, avocat au barreau des PYRENEES-ORIENTALES

irrecevabilité des conclusions par ordonnance incident du 27 juin 2018

Ordonnance de clôture du 18 Février 2022

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 11 MARS 2022,en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. Thierry CARLIER, Conseiller, chargé du rapport.

Ce(s) magistrat(s) a (ont) rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

M. Thierry CARLIER, Conseiller faisant fonction de président de chambre

M. Fabrice DURAND, Conseiller

Mme Marie-Claude SIMON, Vice-présidente placée par ordonnance du premier président en date du 1er décembre 2021

Greffier, lors des débats : Mme Sabine MICHEL

ARRET :

- contradictoire,

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par M. Thierry CARLIER, Conseiller faisant fonction de président de chambre, et par Mme Sabine MICHEL, Greffier.

*

**

EXPOSE DU LITIGE :

Le 9 janvier 2013, l'Office Public de l'Habitat des Pyrénées Orientales (OPH) et la Société Coopérative Agricole de Vinification (SCAV) Les Vignobles du Sud Roussillon ont signé un avant-contrat portant sur la cession des murs de l'ancienne cave coopérative de [Localité 7] qui est constituée d'un ensemble immobilier composé de plusieurs bâtiments, cadastrés AL n°[Cadastre 1], [Cadastre 3] et [Cadastre 5] pour une contenance totale de 1 ha 4 a et 40 ca. Cet avant-contrat a été conditionné à l'approbation de la modification du plan local d'urbanisme par le conseil municipal de la commune de [Localité 7] qui devait permettre l'obtention d'un permis de construire dont le bénéficiaire devait être l'Office Public de l'Habitat des Pyrénées Orientales.

La modification du plan local d'urbanisme étant intervenue, un premier permis de construire est obtenu le 25 juillet 2014 et autorise la démolition partielle ainsi que la construction, pour une surface de plancher nouvelle de 4.136,25 m2, de 37 logements sociaux. Puis, un permis de construire rectificatif est délivré le 11 août 2014, augmentant la surface plancher à 4.564,59 m2.

Le 2 octobre 2014, par acte notarié reçu par Maître [E] avec la participation de Maître [S], la Société Coopérative Agricole de Vinification les Vignobles du Sud a vendu à l'Office Public de l'Habitat des Pyrénées Orientales, un bâtiment constituant l'ancienne cave coopérative de [Localité 7] pour le prix de 440.000 euros. Il a été stipulé que 360.000 euros étaient payables comptant à la signature de l'acte et que 80.000 euros étaient payables sous forme de dation en paiement d'un local commercial décrit à l'acte, devant être livré brut de décoffrage, fluides en attente au plus tard dans les douze mois à compter de l'acte, et trois emplacements de parking dont un pour personne à mobilité réduite.

Dans l'acte de vente, il a été inséré la clause suivante : ' à défaut de livraison au terme convenu, l'acquéreur s'oblige à régler au vendeur qui accepte une indemnité forfaitaire de 150 euros par jour de retard. Cette indemnité deviendrait exigible le premier jour de chaque mois de retard. Son versement ne vaudrait pas de la part du vendeur accord de délai de paiement.'

Il a été convenu que dans l'attente de la livraison du local, objet de la dation en paiement, et de son complet aménagement, que le vendeur continuera à bénéficier de son actuel local à usage de vente et de ses accès, dont l'acquéreur lui garantira l'accès et le bon fonctionnement de tous les réseaux jusqu'à l'achèvement de l'aménagement intérieur réalisé par le vendeur à ses frais, sous réserve que ces travaux n'excèdent pas 8 mois à compter de la livraison.

Le local, objet de la dation en paiement, n'a pas été livré à la date limite du 2 octobre 2015.La Société Coopérative Agricole de Vinification Les Vignobles du Sud a alors mis en demeure l'Office Public de l'Habitat des Pyrénées Orientales le 13 octobre 2015. Cette mise en demeure ayant été infructueuse, une nouvelle mise en demeure a été adressée à l'Office Public de l'Habitat des Pyrénées Orientales le 23 novembre 2015 qui est également restée infructueuse.

Le 6 avril 2016, la SCAV les Vignobles du Sud Roussillon venant aux droits de la Société Coopérative Agricole de Vinification dénommée Les Vignerons du Sud a, par acte d'huissier, fait assigner l'Office Public de l'Habitat des Pyrénées Orientales au visa de l'article 1134 du Code civil en paiement de la somme de 31.800 euros au titre de l'indemnité forfaitaire prévue par l'acte de vente arrêtée provisoirement au 30 avril 2016. Au surplus, elle a sollicité qu'il soit dit qu'à compter du 1er mai 2016, cette indemnité forfaitaire continuerait d'être due au mois le mois, et en tant que de besoin, condamner l'Office Public de l'Habitat des Pyrénées Orientales au paiement jusqu'à la livraison du local commercial et des emplacements de parking, objets de la dation en paiement.

Dans ses dernières conclusions du 28 octobre 2016, la SCAV les Vignobles du Sud Roussillon venant aux droits de la Société Coopérative Agricole de Vinification Les Vignerons du Sud a sollicité la condamnation de l'Office Public de l'Habitat des Pyrénées Orientales au paiement de la somme de 47.100 euros, arrêtée au 10 août 2016, date de livraison de l'immeuble litigieux. Elle a conclu également à la légitimité de la clause de pénalité de retard contractuellement convenue entre les parties qui l'ont librement négociée et qui ne créé pas un déséquilibre au préjudice de l'Office Public de l'Habitat des Pyrénées Orientales qui est en position de force au vu du marché actuel. Elle a, au surplus, fait valoir qu'elle a exécuté son obligation en livrant l'immeuble vendu et en acceptant une retenue de 80.000 euros sur le prix de vente, la clause litigieuse permettant de maîtriser ce risque.

Le 29 septembre 2016, dans ses dernières conclusions, l'Office Public de l'Habitat des Pyrénées Orientales conclut au débouté. Il soutient que la clause litigieuse est une clause pénale régie par les articles 1152 et 1226 et suivants du Code civil, et que cette clause doit être proportionnelle et directement liée au préjudice subi. Que le retard dans la livraison n'est pas de son fait et conclu au caractère manifestement excessif de la clause pénale.

Le 9 mars 2017, le Tribunal de grande instance de Perpignan a :

- condamné l'Office Public de l'Habitat des Pyrénées Orientales à payer la SCAV Les Vignobles du Sud Roussillon, venant aux droits de la Société Coopérative Agricole de Vinification les Vignerons du Sud, la somme de 47.100 euros avec intérêts au taux légal à compter du présent jugement ;

- condamné l'Office Public de l'Habitat des Pyrénées Orientales à payer à la SCAV Les Vignobles du Sud Roussillon, venant aux droits de la Société Coopérative Agricole de Vinification les Vignerons du Sud la somme de 1.200 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- condamné l'Office Public de l'Habitat des Pyrénées Orientales aux dépens qui comprendront le coût du constat d'huissier du 20 avril 2016 ;

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire.

Le 27 avril 2017, l'Office Public de l'Habitat des Pyrénées Orientales a interjeté appel du jugement en date du 9 mars 2017 rendu par le Tribunal de grande instance de Perpignan.

Le 27 juin 2018, le conseiller de la mise en état a déclaré irrecevables les conclusions de la Société Coopérative Agricole de Vinification les Vignobles du Sud Roussillon remises au greffe le 24 octobre 2017.

Vu les conclusions de l'Office Public de l'Habitat des Pyrénées Orientales remises au greffe le 26 juillet 2017 ;

MOTIFS DE L'ARRÊT :

Aux termes de l'acte de vente du 2 octobre 2014, le local devait être livré brut de décoffrage, fluides en attente au plus tard dans les 12 mois à compter de ce jour, soit au plus tard le 2 octobre 2015.

Il résulte de l'acte contenant dation en paiement du 2 février 2017 que le local a été livré au stade hors d'eau et hors d'air en date du 4 août 2016, soit avec dix mois de retard.

L'acte de vente prévoit qu'à défaut de livraison au terme convenu, l'acquéreur s'engage à régler au vendeur une indemnité forfaitaire de 150 euros par jour de retard, exigible le premier jour de chaque mois de retard.

Comme l'a jugé le tribunal, cette indemnité forfaitaire répond bien à la définition de la clause pénale telle qu'elle résulte des dispositions des anciens articles 1226 et 1229 du code civil, ce qui n'est pas contesté par l'appelant.

Aux termes de l'ancien article 1152 du code civil alinéa 2 'Néanmoins, le juge peut, même d'office, modérer ou augmenter la peine qui avait été convenue, si elle est manifestement excessive ou dérisoire.Toute stipulation contraire sera réputée non écrite'.

En l'espèce, il résulte notamment du tableau chronologique des études de l'opération établi par l'architecte, Monsieur [L], que les études géotechniques ont été lancées dès le 3 octobre 2014, soit le lendemain de la vente, que les rapports diagnostics ont été rendus le 1er décembre 2014 et que les études de sol et d'ingénierie ont permis l'établissement du RICT et du PGC le 28 octobre 2015, l'OPH imputant le retard de livraison aux discussions avec la commune de [Localité 7] qui souhaitait conserver une partie du bâtiment en l'état, dans le cadre d'une opération de conservation du patrimoine agricole.

En tout état de cause, si le dépassement du délai contractuel est incontestable, les pièces versées aux débats démontrent que l'OPH a agi avec diligence pour faire avancer l'opération de construction, aucun défaut caractérisé de diligence n'étant en tout état de cause établi.

Par ailleurs, si la SCAV faisait état devant le premier juge d'un préjudice de jouissance concernant son ancien local dont l'accès avait été masqué et réduit par le chantier, force est de constater que ses conclusions ayant été déclarées irrecevables, la cour ne dispose en appel d'aucun élément permettant de caractériser un quelconque préjudice de jouissance ou une perte de chiffre d'affaire.

Enfin, si l'acte prévoyait qu'une partie du prix serait payable à hauteur de 80 000 euros sous forme de dation en paiement d'un local commercial et de trois emplacements de parking, il ressort des pièces versées aux débats que le montant des travaux liés à la création et à l'aménagement du local commercial s'est élevé à la somme de 131 924 ,75 euros TTC, supportée par l'OPH, ce qui relativise le préjudice résultant du retard de livraison du local et des emplacements de parking et justifie, en l'absence de démonstration par l'intimé d'un préjudice spécifique, la modération du montant de la clause pénale, cette dernière présentant en l'espèce un caractère manifestement excessif.

Par conséquent, l'Office Public de l'Habitat des Pyrénées Orientales sera condamné à payer à ce titre à la Société Coopérative Agricole de Vinification Les Vignobles du Sud Roussillon une somme de 23 550 euros, avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt.

Le jugement sera infirmé de ce chef.

Enfin, si l'OPH sollicite une somme de 21 450 euros au titre de la clause pénale relative à l'aménagement intérieur du local, il convient de relever qu'il résulte de l'acte de vente que l'aménagement intérieur du local livré par l'acquéreur devra être achevé au plus tard dans les huit mois de la livraison des biens qui lui aura été faite par l'acquéreur et qu'à défaut, une indemnité sera due par le vendeur d'un montant par 150 euros par jour de retard.

Il ressort à l'évidence de cette clause que le délai de huit mois ne concerne que la restitution des clés de l'ancien local et non l'aménagement intérieur du nouveau local.

Or, il résulte du procès-verbal de constat versé aux débats par l'appelant que les clés de l'ancien local ont été restituées le 30 mars 2017, soit dans les huit mois de la livraison des biens intervenue le 4 août 2016.

Par conséquent, la clause pénale invoquée par l'OPH n'a pas vocation à s'appliquer, la demande présentée à ce titre étant rejetée.

PAR CES MOTIFS :

La cour,

Infirme le jugement en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Condamne l'Office Public de l'Habitat des Pyrénées Orientales à payer à la Société Coopérative Agricole de Vinification Les Vignobles du Sud Roussillon une somme de 23 550 euros, avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt;

Déboute l'Office Public de l'Habitat des Pyrénées Orientales de sa demande de condamnation de la Société Coopérative Agricole de Vinification Les Vignobles du Sud Roussillon à payer une somme de 21 450 euros ;

Condamne la Société Coopérative Agricole de Vinification Les Vignobles du Sud Roussillon aux entiers dépens de première instance et d'appel ;

Condamne la Société Coopérative Agricole de Vinification Les Vignobles du Sud Roussillon à payer à l'Office Public de l'Habitat des Pyrénées Orientales la somme de 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, pour ses frais engagés en première instance et en appel.

Le greffier, Le conseiller faisant fonction de président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 3e chambre civile
Numéro d'arrêt : 17/02445
Date de la décision : 12/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-12;17.02445 ?
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