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12/05/2022 | FRANCE | N°17/02391

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 3e chambre civile, 12 mai 2022, 17/02391


Grosse + copie

délivrées le

à







COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



3e chambre civile



ARRET DU 12 MAI 2022



Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 17/02391 - N° Portalis DBVK-V-B7B-NEMG



Décision déférée à la Cour :

Jugement du 24 MARS 2017

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE MONTPELLIER

N° RG 15/07066





APPELANTE :



SMABTP (assureur de la Sté ARCHI BO) Société Mutuelle d'Assurances du Bâtiment et des Travaux P

ublics, entreprise régie par le Code des Assurances, représentée par son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité au siège social

[Adresse 5]

[Adresse 5]

[Localité 2]

Représentée par ...

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

3e chambre civile

ARRET DU 12 MAI 2022

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 17/02391 - N° Portalis DBVK-V-B7B-NEMG

Décision déférée à la Cour :

Jugement du 24 MARS 2017

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE MONTPELLIER

N° RG 15/07066

APPELANTE :

SMABTP (assureur de la Sté ARCHI BO) Société Mutuelle d'Assurances du Bâtiment et des Travaux Publics, entreprise régie par le Code des Assurances, représentée par son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité au siège social

[Adresse 5]

[Adresse 5]

[Localité 2]

Représentée par Me Emily APOLLIS de la SCP GILLES ARGELLIES, EMILY APOLLIS - AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER, substitué par Me Gilles ARGELLIES, avocat au barreau de MONTPELLIER

INTIMES :

Monsieur [G] [C]

né le 07 Avril 1950 à [Localité 8] (30)

de nationalité Française

[Adresse 4]

[Localité 7]

Représenté par Me Arnaud JULIEN, avocat au barreau de MONTPELLIER, substitué par Me Kamila HALLI, avocat au barreau de MONTPELLIER

Madame [X] [Z] épouse [C]

née le 15 Avril 1955 à [Localité 6] (38)

de nationalité Française

[Adresse 4]

[Localité 7]

Représentée par Me Arnaud JULIEN, avocat au barreau de MONTPELLIER, substitué par Me Kamila HALLI, avocat au barreau de MONTPELLIER

SA AXA FRANCE IARD, compagnie d'assurances, prise en la personne de son représentant légal en exercice, domicilié ès qualités au siège social sis

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Arnaud LAURENT de la SCP SVA, avocat au barreau de MONTPELLIER, substitué par Me Doaä BENJABER, avocat au barreau de MONTPELLIER

Ordonnance de clôture du 18 Février 2022

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 11 MARS 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. Thierry CARLIER, Conseiller, chargé du rapport.

Ce(s) magistrat(s) a (ont) rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

M. Thierry CARLIER, Conseiller faisant fonction de président de chambre

M. Fabrice DURAND, Conseiller

Mme Marie-Claude SIMON, Vice-présidente placée par ordonnance du Premier Président en date du 1er décembre 2021.

Greffier, lors des débats : Mme Sabine MICHEL

ARRET :

- contradictoire,

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par M. Thierry CARLIER, Conseiller faisant fonction de président de chambre, et par Mme Sabine MICHEL, Greffier.

*

**

EXPOSE DU LITIGE :

Le 6 février 2014, au visa de l'article 145 du Code de procédure civile, Monsieur [G] [C] et Madame [X] [Z], épouse [C], propriétaires d'un immeuble à usage d'habitation à [Localité 7], ont sollicité la désignation d'un expert en invoquant des problèmes affectant l'étanchéité des toitures terrasses et des terrasses du rez-de-jardin confiée à l'entreprise Jami Etanchéité assurée auprès de la compagnie Axa France Iard et des défaillances du maître d'oeuvre, la société Archi Bo, assurée auprès de la compagnie Smabtp.

Le 10 avril 2014, Monsieur [I] a été désigné par ordonnance de référé et a déposé son rapport le 30 juillet 2015.

Le 27 et 30 novembre 2015, Monsieur [G] [C] et Madame [X] [Z], épouse [C] ont fait assigner la SA Axa France Iard, prise en sa qualité d'assureur de la société Jami Etanchéité et la société Smabtp, prise en sa qualité d'assureur de la société Archi Bo, aux fins, au principal, de les voir condamner in solidum à leur verser la somme de 41.927 euros correspondant aux préjudices matériels subis, celle de 10.500 euros correspondant aux préjudices immatériels, celle de 9.000 euros par application de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi que de les voir condamner in solidum aux dépens, en ce compris les frais d'expertise judiciaire s'élevant à 5.897,11 euros, avec droit pour l'avocat soussigné de recouvrer directement ceux dont il aurait fait l'avance sans avoir reçu provision, conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

Le 24 mars 2017, le Tribunal de grande instance de Montpellier a:

- constaté la réception de l'ouvrage, sans réserve, à la date du 6 décembre 2011 ;

- condamné in solidum la SA Axa et la compagnie Smabtp à verser aux époux [C] les sommes de 41.927 euros au titre des préjudices matériels et 18.200 euros au titre des préjudices immatériels ;

- dit que la franchise d'un montant de 1.500 euros au titre des préjudices immatériels de la SA Axa est opposable aux époux [C] ;

- condamné in solidum la SA Axa et la Smabtp à verser la somme de 3.000 euros au visa de l'article 700 du Code de procédure civile;

- condamné la compagnie Axa et la Smabtp solidairement aux dépens.

Le 3 avril 2017, la compagnie Smabtp a déposé une requête aux fins de rectification d'erreur matérielle et omission de statuer. Cette dernière a obtenu un jugement rectificatif le 28 juin 2017 en ces termes : 'Dit que la Smabtp pourra opposer sa franchise contractuelle relative aux préjudices immatériels'.

Le 25 avril 2017, la compagnie Smabtp a interjeté appel.

Vu les conclusions de la Société Mutuelle d'Assurance du Bâtiment et des Travaux Publics remises au greffe le 11 février 2022;

Vu les conclusions de Axa France, SA, Axa France IARD, remises au greffe le 12 septembre 2017;

Vu les conclusions de Monsieur [G] [C] et Madame [X] [Z] épouse [C] remises au greffe le 7 février 2022;

MOTIFS DE L'ARRÊT :

Au préalable, il convient de constater qu'en appel, le défaut de réception n'est plus invoqué par la Smabtp.

Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a retenu qu'une réception tacite était intervenue le 6 décembre 2011, les maîtres de l'ouvrage ayant pris possession des lieux en novembre 2011 et la dernière facture de la société Jami Etanchéité ayant été réglée le 6 décembre 2011.

Sur la nature des désordres :

L'expert judiciaire relève que les premiers désordres sont apparus au début de l'année 2013, soit un an après la fin des travaux et portent sur des infiltrations dans la chambre du rez-de-chaussée et dans la buanderie liées à des défauts d'étanchéité de la terrasse.

Il expose que les travaux d'étanchéité comportent de nombreuses malfaçons (film de l'étanchéité très faible, film posé en une couche au lieu des deux préconisées dans la fiche technique, défauts de mise en oeuvre...).

Il ajoute que ces désordres sont de nature à rendre les biens impropres à leur destination.

Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a retenu la nature décennale des désordres.

Sur les responsabilités :

L'expert indique que les désordres sont imputables à l'entreprise Jamy, l'étanchéité n'étant pas conforme aux règles de l'art et souffrant de nombreuses malfaçons.

Si Axa fait valoir que les infiltrations en partie habitable seraient imputables à la chape constituant le support de l'étanchéité qui n'aurait pas été correctement réalisée, force est de constater que l'expert relève que la chape mise en place par Technisol n'est pas en cause dans les désordres constatés sur l'étanchéité.

La responsabilité de la société Jami Etanchéité ne pourra donc qu'être retenue.

S'agissant de la responsabilité du maître d'oeuvre, il résulte du rapport d'expertise que l'origine des désordres vient de la mise en oeuvre de l'étanchéité, et notamment du non respect du cahier des prescriptions techniques établies par le fabricant.

L'expert ajoute que le maître d'oeuvre, dans sa mission de suivi des travaux, n'a pas pour vocation de contrôler chaque point de la mise en oeuvre des travaux de l'entreprise et de se substituer à elle, d'autant qu'en la circonstance, ces travaux s'étalent sur deux jours au plus et qu'à la réception, la terrasse était étanche, les désordres n'étant apparus qu'après.

Par ailleurs, le contrat de maîtrise d'oeuvre versé aux débats ne prévoit à la charge du bureau d'étude que des visites de chantier ponctuelles (art 5-08), l'article 5-11 précisant :' Le contrat de mission de bureau d'étude dans ses parties ' plan de réalisation, descriptifs, consultation et suivi de chantier' prévoit les prescriptions et la surveillance des travaux seulement aux postes énumérés dans le descriptif annexé au contrat ', les postes annexés au contrat ne visant que les plans de permis de construire et le tableau de répartition d'honoraires.

Par conséquent, au regard de ces dispositions contractuelles, il n'appartenait pas au maître d'oeuvre de suivre et de contrôler étape par étape les travaux d'étanchéité et leur mise en oeuvre par l'entreprise Jamy, étant relevé que le défaut d'exécution reproché à cette dernière était indécelable, les premiers désordres n'étant apparus qu'un an après les travaux.

Dans ces conditions, la responsabilité de la société Archibo ne peut être retenue et la garantie de la Smabtp n'est en conséquence pas mobilisable.

Il convient donc de prononcer sa mise hors de cause.

Le jugement sera infirmé de ce chef.

Sur la garantie d'Axa France Iard :

En l'espèce, il résulte de la police Axa que sont couvertes les activités relatives à l'étanchéité de toiture et terrasse.

Sont exclues :

* l'étanchéité de toiture terrasse par matériaux bitumineux ou de synthèse (à l'exclusion des procédés d'étanchéité liquide coulée et/ou mousse projetée in situ)

* l'étanchéité liquide coulée et/ou mousse in situ

Tout d'abord, il convient de relever qu'est contraire aux dispositions de l'article L 133-1 du code des assurances et est réputée non écrite la clause de la police d'Axa qui exclut de l'exclusion l'étanchéité liquide coulée et/ou mousse in situ tout en incluant dans le champ des activités exclues la même étanchéité liquide coulée et/ou mousse in situ, ce qui est parfaitement contradictoire et ne permet pas à l'assuré de connaitre l'étendue de la garantie souscrite.

Par ailleurs, si la garantie de l'assureur ne concerne que le secteur d'activité professionnelle déclarée par le constructeur, il est constant qu'un assureur ne peut refuser à un constructeur la garantie résultant d'un contrat d'assurance obligatoire, en se fondant sur les modalités d'exécution de l'activité déclarée et non sur son objet, la clause étant alors réputée non écrite.

En l'espèce, force est de constater que l'étanchéité liquide coulée et/ou mousse in situ ne constitue qu'une modalité d'exécution et un procédé technique de l'activité souscrite par l'assurée, à savoir l'étanchéité de toiture et terrasse.

Cette clause est donc réputée non écrite.

Enfin, et en tout état de cause, il ressort du rapport d'expertise que l'étanchéité liquide réalisée par l'entreprise Jamy n'est pas une étanchéité coulée mais passée au rouleau et ne correspond donc pas aux activités exclues du champ de la garantie d'Axa ne visant que les étanchéités coulées.

La SA Axa France Iard doit donc garantir la société Jami Etanchéité, le jugement étant confirmé de ce chef.

Sur les préjudices :

sur les préjudices matériels :

L'expert évalue le coût des travaux de reprise à la somme de 33 008,10 euros TTC, outre la somme de 4 200 euros TTC au titre du recours à un bureau d'étude, soit une somme de 37 208 euros TTC dont le quantum n'est pas contesté par l'assureur de la société Jami Etanchéité.

L'expert retient également une somme de 4 719 euros au titre des dépenses de travaux et d'investigations d'ores et déjà engagées par le maître de l'ouvrage, ce chiffrage n'étant pas davantage contesté par la société Axa.

Par conséquent, cette dernière sera condamnée à payer à Monsieur et Madame [C] la somme de 41 927 euros au titre des préjudices matériels, le jugement étant confirmé de ce chef.

En revanche, le jugement sera infirmé en ce qu'il a condamné la Smabtp, in solidum avec la SA Axa France Iard, à payer cette somme aux époux [C].

Sur les préjudices immatériels :

Si la SA Axa France Iard soutient qu'elle ne garantie pas les dommages immatériels, force est de constater qu'il ressort de la police que sa garantie s'applique ' aux dommages immatériels résultant directement d'un dommage entraînant le versement d'une indemnité au titre des garanties citées aux articles 2.8,2.9,2.10,2.12,2.13 ou 2.14 des conditions générales', ces garanties se rapportant aux assurances de responsabilité pour les dommages de nature décennale.

La SA Axa France Iard doit donc sa garantie pour les dommages immatériels.

* sur la perte de revenus locatifs :

Les époux [C] font état d'un préjudice locatif que l'expert a évalué à la somme mensuelle de 500 euros hors charges, soit 550 euros.

Il résulte des pièces du dossier que le dernier bail a été résilié le 1er août 2014, les époux [C] n'ayant perçu les fonds résultant de l'exécution du jugement de première instance et permettant d'entreprendre les travaux de reprise qu'en septembre 2017.

Par conséquent, la SA Axa France Iard sera condamnée à leur payer à ce titre la somme de 20 350 euros, soit 550 euros x 37 mois, le jugement étant infirmé de ce chef.

* sur la perte de jouissance de la terrasse :

L'expert a retenu à ce titre un préjudice de jouissance qu'il a évalué à 3 500 euros par été.

Les époux [C] sont privés de leur terrasse depuis 5 étés (2013 à 2017), ce qui justifie de condamner la SA Axa France Iard à leur payer à ce titre une somme de 17 500 euros.

Le jugement sera infirmé de ce chef.

Le jugement sera en revanche confirmé en ce qu'il a jugé que la franchise d'un montant de 1 500 euros au titre des préjudices immatériels pourrait être opposée par Axa aux époux [C], conformément aux limites de garanties et franchises versées aux débats.

PAR CES MOTIFS :

La cour,

Infirme le jugement sauf en ce qu'il a constaté la réception de l'ouvrage, sans réserve, à la date du 6 décembre 2011, retenu la garantie de la SA Axa France Iard et dit que cette dernière pourrait opposer aux époux [C] sa franchise au titre des préjudices immatériels ;

Statuant à nouveau,

Prononce la mise hors de cause de la société Smabtp ;

Condamne la SA Axa France Iard à payer à Monsieur et Madame [C] la somme de 41 927 euros au titre des préjudices matériels, avec indexation à compter du dépôt du rapport d'expertise sur l'indice BT01 ;

Condamne la SA Axa France Iard à payer à Monsieur et Madame [C] la somme de 20 350 euros au titre de la perte de revenus locatifs ;

Condamne la SA Axa France Iard à payer à Monsieur et Madame [C] la somme de 17 500 euros au titre de la perte de jouissance de la terrasse ;

Condamne la SA Axa France Iard aux entiers dépens de première instance et d'appel, comprenant les frais d'expertise judiciaire, avec autorisation de recouvrement direct conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;

Condamne la SA Axa France Iard à payer à Monsieur et Madame [C] la somme de 4000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, pour leurs frais engagés en première instance et en appel ;

Déboute la société Smabtp de sa demande présentée au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Le greffier, Le conseiller faisant fonction de président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 3e chambre civile
Numéro d'arrêt : 17/02391
Date de la décision : 12/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-12;17.02391 ?
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