La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

11/05/2022 | FRANCE | N°18/01273

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 2e chambre sociale, 11 mai 2022, 18/01273


Grosse + copie

délivrées le

à







COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



2e chambre sociale



ARRET DU 11 MAI 2022





Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 18/01273 - N° Portalis DBVK-V-B7C-N6AH



ARRET N°





Décision déférée à la Cour : Jugement du 28 SEPTEMBRE 2018

CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE MONTPELLIER - N° RG F 16/01525







APPELANTE :



Madame [I] [H]

de nationalité F

rançaise

[Adresse 2]

[Localité 4]



Représentée par Me Xavier GROSCLAUDE, avocat au barreau de MONTPELLIER



(bénéficie d'une aide juridictionnelle totale numéro 2018/016059 du 12/12/2018 accordée par le bureau d'aide juri...

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

2e chambre sociale

ARRET DU 11 MAI 2022

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 18/01273 - N° Portalis DBVK-V-B7C-N6AH

ARRET N°

Décision déférée à la Cour : Jugement du 28 SEPTEMBRE 2018

CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE MONTPELLIER - N° RG F 16/01525

APPELANTE :

Madame [I] [H]

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Xavier GROSCLAUDE, avocat au barreau de MONTPELLIER

(bénéficie d'une aide juridictionnelle totale numéro 2018/016059 du 12/12/2018 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de MONTPELLIER)

INTIMEE :

Etablissement Public Agence Regionale de Santé de L'occitanie

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Laurent ERRERA, avocat au barreau de MONTPELLIER, substitué par Me Eve BEYNET

Ordonnance de clôture du 14 Février 2022

COMPOSITION DE LA COUR :

En application de l'article 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 07 MARS 2022, en audience publique, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par l'article 804 du même code, devant la cour composée de :

Monsieur Jean-Pierre MASIA, Président

Madame Caroline CHICLET, Conseiller

Madame Isabelle MARTINEZ, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Marie-Lydia VIGINIER

ARRET :

- contradictoire ;

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par M. Jean-Pierre MASIA, Président, et par Mme Marie-Lydia VIGINIER, Greffier.

*

**

FAITS ET PROCEDURE

Madame [I] [H] a été engagée par l'Agence nationale de santé de Languedoc-Roussillon Midi-Pyrénées en qualité de secrétaire dans le cadre d'un contrat de travail à durée déterminée et à temps complet pour surcroît d'activité du 2 novembre 2010 au 31 décembre 2010. Ce contrat qui prévoyait une période d'essai de huit jours a fait l'objet de quatre avenants de prolongation couvrant la période du 1er janvier 2011 au 31 août 2011.

Elle a ensuite été engagée par la même Agence en qualité d'agent affecté au secrétariat juridique dans le cadre d'un nouveau contrat de travail à durée déterminée à temps partiel (70%) du 1er septembre 2011 au 31 décembre 2011. Ce contrat qui ne prévoyait aucune période d'essai a fait l'objet de quatre avenants de prolongation couvrant la période du 1er janvier 2012 au 31 août 2015.

Elle a enfin été engagée par la même Agence en qualité de référent processus courrier, documentation et archive, niveau 4, coefficient de qualification 250 majoré dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée à compter du 1er janvier 2016. Ce contrat prévoyait une période d'essai de deux mois.

Le 15 février 2016, l'employeur lui a notifié la rupture de la période d'essai au motif que cette dernière n'avait pas été concluante.

Contestant la validité de la période d'essai, Madame [I] [H] a saisi, le 28 octobre 2016, le conseil de prud'hommes de Montpellier lequel, par jugement du 28 septembre 2018, qui avait précédemment ordonné la réouverture des débats, a dit que la période d'essai était justifiée, que la rupture était conforme aux dispositions du code du travail, l'a déboutée de l'ensemble de ses demandes et a dit n'y avoir lieu à indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

C'est le jugement dont Madame [I] [H] a interjeté appel le 19 décembre 2018 étant précisé qu'elle avait déposé le 26 octobre 2018 une demande d'aide juridictionnelle laquelle lui a été accordée par décision du 12 décembre 2018.

MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES

Vu les dernières conclusions de Madame [I] [H] régulièrement notifiées et déposées au RPVA le 12 juin 2019.

Vu les dernières conclusions de l'Agence nationale de santé de Languedoc-Roussillon Midi-Pyrénées régulièrement notifiées et déposées au RPVA le 12 juin 2019.

Pour l'exposé des prétentions des parties et leurs moyens, il est renvoyé, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, à leurs conclusions ci-dessus mentionnées et datées.

Vu l'ordonnance de clôture du 14 février 2022.

SUR CE

Madame [I] [H] soutient à titre principal la nullité de la clause stipulant une période d'essai de deux mois au motif qu'ayant exercé depuis le 2 novembre 2010 des fonctions identiques de secrétaire avec une rémunération sensiblement égale, une nouvelle période d'essai ne pouvait pas se justifier car l'Agence avait suffisamment pu apprécier ses compétences. Elle soutient à titre subsidiaire, en reprochant au jugement de n'avoir pas répondu à ce moyen qu'elle avait soulevé, que la durée de la période d'essai aurait dû être réduite de celle accomplie dans le cadre du contrat de travail à durée déterminée. Elle demande donc à la cour de dire que la rupture s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse et de l'indemniser en conséquence.

L'Agence nationale de santé de Languedoc-Roussillon Midi-Pyrénées réplique que la clause fixant la période d'essai était valide dès lors que les fonctions exercées dans le cadre du contrat de travail à durée indéterminée étaient différentes de celles exercées précédemment, qu'elles ne relevaient pas de la même direction et qu'elles ne correspondaient pas à la même rémunération. Ainsi, l'intimée fait valoir la régularité de la rupture intervenue au cours de la période d'essai. Elle conteste à titre subsidiaire le montant des dommages et intérêts au motif que le préjudice n'était pas motivé.

***

L'article L 1221-20 du code du travail dispose que ' la période d'essai permet à l'employeur d'évaluer les compétences du salarié dans son travail, notammment au regard de son expérience (...)'

Or, en l'espèce, si les intitulés des emplois de secrétaire du premier contrat de travail à durée déterminée du 2 novembre 2010 au 31 août 2011 et d'agent affecté au secrétariat juridique du second contrat de travail à durée déterminée du 1er septembre 2011 au 31 décembre 2015 ne correspondaient pas à l'intitulé de l'emploi de référent processus courrier, documentation et archive du contrat de travail à durée indéterminée ayant débuté le 1er janvier 2016, pour autant ces trois emplois, indépendamment de leur intitulé, de leur positionnement dans la grille de classification, de leur rémunération et de leur rattachement à telle ou telle direction, appartenaient à la même catégorie professionnelle des agents administratifs. Les missions confiées à Madame [I] [H], quelque soit l'intitulé de l'emploi, concernaient exclusivement des tâches administratives de bureau, classement, archivage, secrétariat ou courrier. Ces tâches administratives étaient communes aux trois emplois et si une différence pouvait éventuellement apparaître, elle résultait seulement de la prédominance donnée à une tâche sur une autre selon l'emploi occupé mais sans incidence sur la nature effective de l'emploi.

En admettant même que les tâches confiées dans le cadre du contrat de travail à durée indéterminée n'étaient pas rigoureusement identiques à celles accomplies précédemment, elles restaient néanmoins parfaitement comparables entre elles sans nécessité d'ailleurs d'une formation supplémentaire ou d'une qualification différente en sorte que le dernier emploi ne se distinguait pas fondamentalement des emplois précédents.

La cour considère dans ces conditions que l'Agence nationale de santé de Languedoc-Roussillon Midi-Pyrénées, qui n'avait pas craint de conserver Madame [I] [H] à son service pour l'accomplissement de tâches administratives dans le cadre d'une relation de travail ininterrompue du 2 novembre 2010 au 31 décembre 2015 soit pendant plus de cinq ans, avait largement pu appréhender et évaluer pendant toutes ces années les compétences de Madame [I] [H] à accomplir des tâches administratives dans le cadre du contrat de travail à durée indéterminée sans qu'il n'était besoin pour elle de recourir à une nouvelle période d'essai laquelle était abusive et donc nulle.

Le jugement sera réformé.

***

La lettre de rupture n'énonçait pas d'autre motif que la période d'essai non concluante.

Cette rupture s'analyse dès lors en un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Compte tenu de l'ancienneté de la salariée (plus de cinq ans), du nombre de salariés dans l'entreprise (plus de onze), du salaire brut perçu (1830,86€), de l'âge de la salariée (née en 1987), des conditions dans lesquelles la rupture est intervenue et de la situation de demandeur d'emploi posterieure à cette rupture, la cour estime devoir condamner l'Agence nationale de santé de Languedoc-Roussillon Midi-Pyrénées à payer à Madame [I] [H] la somme de 14000€ € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

A cette somme s'ajoutent celles de 4575€ au titre de l'indemnité compensatrice de préavis de trois mois (article 54 de la convention collective nationale des personnels des organismes de sécurité sociale visée dans le contrat de travail) après déduction des 15 jours de prévenance payés à la salariée, outre les congés payés afférents pour 457,50€. Madame [I] [H] est également fondée à percevoir l'indemnité conventionnelle dont le montant s'élève à la somme de 4839,05€.

L'équité commande de condamner l'Agence nationale de santé de Languedoc-Roussillon Midi-Pyrénées à payer à Madame [I] [H] la somme de 1000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure devant le conseil de prud'hommes et celle de 1500€ sur le même fondement pour la procédure d'appel.

L'Agence nationale de santé de Languedoc-Roussillon Midi-Pyrénées sera condamnée à rembourser à pôle-emploi dans la limite de six mois de versement les indemnités de chômage payées à Madame [I] [H].

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Réforme le jugement du conseil de prud'hommes de Montpellier du 28 septembre 2018 en toutes ses dispositions sauf celles ayant rejeté la demande reconventionnelle de l'Agence nationale de santé de Languedoc-Roussillon Midi-Pyrénées au titre de l'article 700 du code de procédure civile

Statuant à nouveau,

Déclare abusive et nulle la clause fixant une période d'essai de deux mois et dit le licenciement de Madame [I] [H] sans cause réelle et sérieuse.

En conséquence condamne l'Agence nationale de santé de Languedoc-Roussillon Midi-Pyrénées à payer à Madame [I] [H] les sommes de :

-14000€ à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

-4575€ au titre de l'indemnité compensatrice de préavis ;

(article 54 de la convention)

-457,50€ au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis ;

-4839,05€ au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement ;

-1000€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la première instance ;

-1500€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour l'instance d'appel.

Condamne l'Agence nationale de santé de Languedoc-Roussillon Midi-Pyrénées à rembourser à pôle-emploi dans la limite de six mois de versement les indemnités de chômage payées à Madame [I] [H].

Condamne l'Agence nationale de santé de Languedoc-Roussillon Midi-Pyrénées aux dépens de première instance et d'appel.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 2e chambre sociale
Numéro d'arrêt : 18/01273
Date de la décision : 11/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-11;18.01273 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award