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11/05/2022 | FRANCE | N°18/00626

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 1re chambre sociale, 11 mai 2022, 18/00626


Grosse + copie

délivrées le

à







COUR D'APPEL DE MONTPELLIER



1re chambre sociale



ARRET DU 11 MAI 2022





Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 18/00626 - N° Portalis DBVK-V-B7C-NWLW



Arrêt n° :



Décision déférée à la Cour :

Jugement du 17 MAI 2018 du CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE MONTPELLIER - N° RG F 17/00772







APPELANT :



Monsieur [N] [U]

[Adresse 2]

Repr

ésenté par Me Ratiba OGBI, avocat au barreau de MONTPELLIER







INTIMEE :



SARL TECHNICFER

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Jérôme PASCAL de la SARL CAP-LEX, avocat au barreau de MONTPELLIER







COMPOSIT...

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D'APPEL DE MONTPELLIER

1re chambre sociale

ARRET DU 11 MAI 2022

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 18/00626 - N° Portalis DBVK-V-B7C-NWLW

Arrêt n° :

Décision déférée à la Cour :

Jugement du 17 MAI 2018 du CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE MONTPELLIER - N° RG F 17/00772

APPELANT :

Monsieur [N] [U]

[Adresse 2]

Représenté par Me Ratiba OGBI, avocat au barreau de MONTPELLIER

INTIMEE :

SARL TECHNICFER

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Jérôme PASCAL de la SARL CAP-LEX, avocat au barreau de MONTPELLIER

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 02 MARS 2022,en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Georges LEROUX, Président de chambre, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Georges LEROUX, Président de chambre

Madame Caroline CHICLET, Conseiller

M. Pascal MATHIS, Conseiller

Greffier, lors des débats : Mme Marie BRUNEL

ARRET :

- contradictoire

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

- signé par Monsieur Georges LEROUX, Président de chambre, et par Mme Marie BRUNEL, Greffière.

*

**

EXPOSE DU LITIGE

M. [N] [U] a été embauché par le biais de plusieurs contrats de mission entre le 28 mars 2011 et le 30 mai 2017 par la société Gima Intérim en qualité de manoeuvre du 28 mars 2011 au 5 septembre 2014, puis d'aide poseur à compter du 8 septembre 2014, et mis à disposition de la SARL Technicfer.

Reprochant à l'entreprise utilisatrice divers manquements à ses obligations, M. [U] a saisi le conseil des prud'hommes de [Localité 3] le 17 juillet 2017 pour notamment voir requalifier ses contrats de mission en contrat à durée indéterminée et obtenir le paiement de diverses sommes.

Par jugement du 17 mai 2018, ce conseil a :

- déclaré l'action de M. [U] à l'encontre de la société Technicfer recevable,

- condamné la SARL Technicfer à payer à M. [U] les sommes de 1.650 € nets au titre de l'indemnité de requalification et de 750€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté les parties du surplus de leurs demandes,

- mis les dépens à la charge de la sarl Technicfer.

M. [U] a interjeté appel de ce jugement le 13 juin 2018.

Le 24 octobre 2018, la SARL Technicfer a saisi le conseiller de la mise en état d'une requête aux fins de caducité de la déclaration d'appel au visa des articles 902 et 908 du code de procédure civile, et subsidiairement aux fins d'irrecevabilité des conclusions de l'appelant.

Par ordonnance du 20 février 2019 confirmée par la cour par arrêt du 18 décembre 2019, le conseiller de la mise en état a rejeté les demandes de la société Technicfer.

Dans ses conclusions déposées au RPVA le 30 septembre 2021, M. [U] demande à la cour de :

- rejeter l'exception d'irrecevabilité et infirmer le jugement frappé d'appel,

- réformer le jugement sur le quantum en ce qu'il n'a pas alloué le bon salaire au titre de l'indemnité de requalification et en ce qu'il n'a pas fait droit à sa demande de dommages et intérêts liés à la rupture du contrat et de ses conséquences financières annexes,

- condamner l'employeur au paiement des sommes de :

- 2.452 € à titre d'indemnité de requalification des contrats d'intérim en contrat à durée indéterminée,

- 4.904 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

- 490 € au titre des congés payés y afférents,

- 6.406,67 € de rappel de salaires,

- 640 € de congés payés sur rappel de salaire,

- 800 € de dommages et intérêts pour perte d'une chance d'acquérir une formation diplômante pour le faire bénéficier du statut de serrurier,

- 2.942,33 € à titre d'indemnité légale de licenciement,

- 35.000 € net de CSG CRDS à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif,

- « règlement cotisations retraite sur rappel de salaires »,

- 2.400 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et entiers dépens,

- ordonner la délivrance du certificat de travail et de l'attestation Pôle emploi rectifiés sous astreinte de 120 €.

Dans ses conclusions déposées au RPVA le 14 octobre 2021, la SARL Tecnicfer demande à la cour de réformer le jugement et juger irrecevables les demandes de M. [U] à son égard et le renvoyer à mieux se pourvoir contre son employeur réel, ou à titre subsidiaire,

- sur la demande de requalification en CDI, rejeter la demande d'indemnité de 2.480 €, et à titre infiniment subsidiaire, confirmer le jugement allouant la somme de 1.650 €,

- confirmer le jugement en ses dispositions relatives au rappel de salaire et aux dommages et intérêts pour perte de chance,

- confirmer le jugement en ses dispositions relatives à la rupture du contrat de travail et à titre infiniment subsidiaire, dire que :

* l'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse ne saurait excéder 9.600 €

* l'indemnité compensatrice de préavis ne saurait être que de 3.316€,

* l'indemnité de congés payés doit être limitée à 331,16 €

* l'indemnité de licenciement serait au maximum de 2.220 €,

- réformer le jugement en ses dispositions relatives à l'article 700 du code de procédure civile et condamner M. [U] à lui verser la somme de 1.000 € à ce titre, outre les dépens.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 15 octobre 2021 et l'audience a eu lieu le 5 novembre 2021.

Par arrêt du 5 janvier 2022, la cour a ordonné la réouverture des débats à l'audience du mercredi 2 mars 2022 à 9 heures sans révocation de l'ordonnance de clôture, pour permettre aux parties de présenter leurs observations sur le moyen relevé d'office par la cour et tiré de l'éventuelle absence d'effet dévolutif de l'appel, a enjoint à l'appelant de conclure dans le mois suivant la réception de l'arrêt et à l'intimée de conclure en réponse dans le mois suivant la réception des conclusions de l'appelant, réservant les demandes et moyens des parties.

Dans ses observations écrites déposées au RPVA le 28 février 2022, M. [U] demande à la cour de déclarer l'acte d'appel régulier, de dire que l'effet dévolutif a opéré et de juger la procédure d'appel recevable.

Dans ses observations écrites déposées au RPVA le 18 février 2022, la société intimée demande à la cour de se déclarer non saisie en l'absence d'effet dévolutif de la déclaration d'appel et de lui allouer la somme de 1.000 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et de condamner M. [U] aux dépens.

Vu l'article 455 du code de procédure civile pour l'exposé des moyens des parties, il sera renvoyé à leurs conclusions susvisées.

MOTIFS :

En vertu de l'article 562 du code de procédure civile, dans sa rédaction issue du décret n° 2017-891 du 6 mai 2017, l'appel défère à la cour la connaissance des chefs de jugement qu'il critique expressément et de ceux qui en dépendent, la dévolution ne s'opérant pour le tout que lorsque l'appel tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible.

En outre, seul l'acte d'appel opère la dévolution des chefs critiqués du jugement, ce dont il se déduit que l'absence d'effet dévolutif de cet acte ne peut être corrigé que par une nouvelle déclaration d'appel formée dans le délai imparti et non par les conclusions d'appelant.

Il en résulte que lorsque la déclaration d'appel tend à la réformation du jugement sans mentionner les chefs de jugement qui sont critiqués, l'effet dévolutif n'opère pas.

En l'espèce, la déclaration d'appel de M. [U] ne mentionne pas les chefs du jugement critiqués puisqu'il y est seulement indiqué : « FAIRE APPEL SUR LA TOTALITE DU JUGEMENT et pour les motifs suivants il est sollicité la réformation. Le salarié a bénéficié de 94 contrats d'intérim irréguliers durant plusieurs années. Il a dénoncé cette situation en 2016 ' l'entreprise lui a suggéré de « partir » ayant besoin de travailler il a préféré rester. Avec le temps, Mr [U] a acquis une expérience certaine puisqu'il s'est vu octroyer le poste de chef d'équipes. Cependant son statut, son salaire sont restés ceux d'aide poseur. Mr [U] a revendiqué par courrier RAR cette qualification de chef d'équipes en dénonçant les multiples CDD irréguliers. L'entreprise utilisatrice n'a pas démenti les fonctions réellement occupées par son salarié mais a proposé un CDI en qualité d'aide poseur sans reprise d'ancienneté avec un salaire de débutant. Mr [U] a refusé compte tenu les pièces et preuves qu'il détenait. Le conseil de prud'hommes ne l'a pas suivi, il a considéré qu'un CDI lui a été offert et qu'il l'a refusé, en outre les éléments qu'il produit ne sont pas suffisants pour étayer sa demande de chef d'équipe. En application des articles L.1251.1 et suivants du code du travail De l'article L -1235-3 du code du travail L.1234.1 et suivants du code du travail Il est sollicité la réformation du jugement qui n'a pas fait application de la Loi. Le salarié n'était pas tenu d'accepter un CDI pour des fonctions qu'il n'occupait plus, de surcroît contrat, tendant juste à le piéger pour éviter les conséquences financières de la requalification préavis, indemnité de licenciement dommages et intérêts. ».

Le dispositif du jugement dont appel est ainsi rédigé : « DÉCLARE l'action de Monsieur [N] [U] à l'encontre de la société TECHNIFER recevable.

CONDAMNE la SARL TECHNIFER, prise en la personne de son représentant légal en exercice, à payer à Monsieur [N] [U] les sommes suivantes :

- 1.650 € nets au titre de l'indemnité de requalification ;

- 750 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile

DÉBOUTE Monsieur [N] [U] du surplus de ses demandes.

DEBOUTE la SARL TECHNIFER de ses demandes.

MET les dépens à la charge de la SARL TECHNIFER. »

C'est donc à tort que M. [U] soutient que le jugement « se contente de débouter M. [U] du surplus de ses demandes ».

En effet, le dispositif comporte plusieurs mentions distinctes de recevabilité, de condamnations et de débouté. En tout état de cause, en indiquant dans sa déclaration d'appel « FAIRE APPEL SUR LA TOTALITE DU JUGEMENT et pour les motifs suivants il est sollicité la réformation. », M. [U] n'a visé aucun des chefs du jugement critiqués, et notamment pas celui par lequel il était débouté du surplus de ses demandes.

De la même façon, c'est à tort que M. [U] fait état d'une « déclaration d'appel à laquelle sont annexées les conclusions » : aucune pièce n'est annexée à la déclaration d'appel et seule la copie du jugement déféré a été déposée en même temps que celle-ci, conformément à l'une des exigences de l'article 901 du code de procédure civile.

C'est par un arrêt 18-22528 du 30 janvier 2020 que la cour de cassation, rappelant les dispositions de l'article 562 du code de procédure civile, dans sa rédaction issue du décret n° 2017-891 du 6 mai 2017, a dit que lorsque la déclaration d'appel tend à la réformation du jugement sans mentionner les chefs de jugement qui sont critiqués, l'effet dévolutif n'opère pas.

Cet arrêt ne faisait que tirer les conséquences de la nouvelle rédaction de l'article 562 susvisé résultant des dispositions du décret applicables à compter du 1er septembre 2017, ainsi que de la modification par le même décret de l'article 901 du code de procédure civile qui prévoit pour les appels interjetés à compter du 1er septembre 2017, à peine de nullité l'obligation de mentionner, dans la déclaration d'appel, les chefs de jugement critiqués.

Ces dispositions, encadrant les conditions d'exercice du droit d'appel dans le but légitime de garantir la bonne administration de la justice en assurant la sécurité juridique et l'efficacité de la procédure, étaient dépourvues d'ambiguïté.

Ainsi l'application des dispositions du décret du 6 mai 2017 aux appels interjetés à compter du 1er septembre 2017 ne porte pas atteinte au droit au procès équitable résultant de l'article 6 de la déclaration des droits de l'homme.

Alors que le conseiller de la mise en état n'a pas compétence pour statuer sur l'effet dévolutif de l'appel et que la question de la recevabilité de l'appel n'est pas en cause, le conseiller de la mise en état dans son ordonnance du 20 février 2019 n'a fait que statuer sur une demande relative à la caducité de la déclaration d'appel et la cour saisie du seul déféré de cette ordonnance, n'a également statué que sur cette demande.

Constatant que l'appel ne tend pas à l'annulation du jugement et que l'objet du litige n'est pas indivisible, que l'appelant n'a pas mentionné dans sa déclaration d'appel les chefs du jugement qu'il critiquait expressément, et qu'il n'a pas régularisé une nouvelle déclaration d'appel dans le délai pour conclure, la cour doit dire que la déclaration d'appel du 13 juin 2018 est dépourvue de tout effet dévolutif.

L'équité ne commande pas en l'espèce de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe :

Dit que la déclaration d'appel du 13 juin 2018 n'a pas eu d'effet dévolutif et que la cour n'est saisie de la connaissance d'aucun chef du jugement dont appel

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile

Condamne M. [U] aux dépens d'appel.

Le greffierLe président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Formation : 1re chambre sociale
Numéro d'arrêt : 18/00626
Date de la décision : 11/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-11;18.00626 ?
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